Chapitre 19

Ecrit par sokil

Chapitre 19 :

   

Je ne me considérais pas comme une fervente croyante parce que je pensais que  j’avais beaucoup de lacunes dans ma vie spirituelle.  Si je n’avais pas été confronté directement à la vraie sorcellerie, ma foi n’aurait pas été mise à l’épreuve.  La foi, cette grâce si puissante et si chère, cette manifestation de la confiance, de la dévotion au Tout Puissant, il fallait que j’aille la cueillir au plus profond de moi-même.  Je n’étais pas une fervente croyante et je me trouvai donc bien médiocre sur ce plan.  Bien que pratiquante dans le sens où je participais régulièrement aux activités paroissiales, je n’avais pas encore trouvé mon chemin vers la libération.  J’avais certes encore ouvert les portes aux forces maléfiques que je combattais tant bien que mal, mais à un niveau très bas, pensant que cela était assez suffisant.

 

Les paroles de Placide résonnaient sans cesse  dans ma mémoire ; il me les avait balancé en plein 3 heures du matin, heure à laquelle justement le tentateur ne dort pas et en profite pour perturber les esprits faibles.  Placide avait donc bien choisi son heure !  Il ne m’avait pas laissé le temps de lui répondre qu’il avait coupé juste après.  Le cœur battant à la chamade, je mis assez de temps pour reprendre mes esprits et réaliser ce que ce je venais d’entendre.  Il était donc prêt à tout !  Il voulait me détruire, il n’en avait pas fini avec moi, malgré notre séparation officielle.  Le lendemain matin je fis part à ma tante des propos que m’avait tenu Placide.

 

-         Il ne reculera devant rien ! Cette fois ci il veut ma peau…Il m’avait prévenu, il a tenu à sa parole !

 

-         Je vais te poser une question simple !

 

-         Oui vas y !

 

-         Est-ce que tu crois en DIEU ?

 

-         Oui !

 

-         Je ne te suis pas bien !  As-tu cette conviction là qu’en t’appuyant sur le Seigneur tu peux tout vaincre ?  Surtout ce genre de tentations ?  Parce qu’il est entrain de te tenter là !

 

-         Je …

 

-         C’est ça le problème !

 

-         Il m’a dit qu’il détient ces choses de moi il suffit qu’il décide n’importe quand pour m’atteindre…  Ca fait peur !

 

-         Justement !  Je n’aime pas t’entendre parler comme ça !  On dirait que tout le temps que tu as passé chez le père Benoît, tous les enseignements qu’il t’a prodigués ne t’ont servi à rien !

 

-         Ce n’est pas ça !  C’est juste que ce qu’il m’a dit là c’est … c’est …  Je suis terrifiée.  Je ne sais pas ce qu’il me veut, je ne sais pas !  Il a eu ce qu’il voulait, mais il en a toujours après moi !!!  Je suis épuisée, fatiguée, démoralisée !!!

 

-         Démoralisée que est ce que tu es morte ?

 

-         Non mais…  Il est capable de …

 

-         Aka !!!  Laisse-nous ça !  Placide c’est qui ?  C’est personne !  Il est tellement pris dans un engrenage que sa tête a disjoncté !  Qu’il utilise alors tes ongles et tout le reste on va voir…  Mais comme je le dis tu n’as aucune raison d’avoir peur et de te décourager, sache que si tu dors, lui il ne dort pas ; c’est comme ça qu’ils sont quand ils sont gravement atteints par le démon comme lui là !  Si tu redoubles dans les prières, mais surtout si tu as la foi, tu verras !  C’est moi qui te dis !  Ta foi est encore très faible !  Fais comme je te dis !  C’est la même chose que te dira le père Benoît quand tu iras le voir ; tu n’auras pas besoin d’un traitement, tu n’as besoin que de ta foi et des prières, et pourquoi pas des jeûnes ?

 

Je la trouvai très forte tante Sidonie, surtout dans la tête ; toute sa vie n’a été basée que sur ce types de préceptes, la foi, les prières ; ce n’est que ça qui l’a maintenue et qui lui a donné la force d’arriver là où elle est.  Jamais je ne l’avais vue se décourager ni baisser les bras ; même dans les difficultés elle a toujours su garder la tête haute et trouver les solutions à un problème.  Aujourd’hui, elle possédait cette force intérieure que je lui enviais toujours.  Toutes les fois où nous avions été confrontées à un problème donné, elle ne paniquait pas, gardait son calme, réfléchissait et finissait par trouver une solution.  Elle était devenue une vraie petite femme d’affaires, tout fonctionnait à merveille pour elle.  La seule chose qui lui manquait était juste un homme à ses côtés ; mais même jusque là elle parvenait à garder la tête haute et à ne pas le manifester. 

 

Tout compte fait, je décidai de changer de puce de téléphone, marre d’être harcelée moralement par mon « ex mari » !  Il était clair qu’il était trempé jusqu’aux os et qu’il ne pouvait plus faire marche arrière.  Sa dulcinée Priscilla avait obtenu ce qu’elle voulait ; elle pouvait donc s’en vanter auprès de qui voulait l’entendre, elle affichait son bonheur complet auprès de tous et sa boutique affichait toujours presque comble.  Je n’y avais jamais mis les pieds et je ne souhaitais pas le faire pour rien au monde.  Elle était située juste à quelques kilomètres de la société où je bossais, il ne manquait plus que ça, drôle de coïncidence.  Je voyais les articles bon marché et de qualité que certaines de mes collègues arboraient fièrement et dont elles en faisaient la propagande.

 

-         Jaïda ?  T’as déjà fait un tour chez PP-Shop ?  Tu devrais !  Les articles sont trop classes et bon prix je t’assure !  Tu m’as dit que tu cherchais le genre de pantalon ci non ?  Tu en trouveras là bas !

 

-         C’est quoi le nom de la boutique déjà ?

 

-         PP-Shop !  Les choses sont trop nyanga !

 

Je n’avais jamais cherché à savoir comment s’appelait cette boutique, tellement écœurée et désintéressée par tout ce qui concernait Placide et encore moins « Petite Fleur ».  Je fis rapidement le lien avec les initiales de leur prénom à tous les deux, Placide et Priscilla !  J’eus un léger haut le cœur, rien qu’à entendre ma collègue prononcer le nom de cette boutique.

 

-         Mais pourquoi fais tu cette tête ?  On dirait que tu n’es pas très chaude d’y aller !

 

-         Non !  Ce n’est pas ça !  Je n’ai pas assez de temps pour y aller, tu connais mon emploi du temps avec le boss donc…

 

-         Oui !  Mais tous ces temps ci la patronne elle même est là et elle liquide les trucs à plus de 50% tu te rends compte ?

 

-         La…  patronne ?

 

-         Oui !  Mendomo !  Je la connais bien, c’était une amie à ma grande cousine, elles se sont gâtées jusqu’à aujourd’hui !  Elle m’a même reconnue, elle est gentille, mais elle frime trop et en plus c’est une grande bordelle !

 

-         Tu dis qu’elle s’appelle comment ?

 

-         Mendomo… Voila !!! Priscilla Mendomo !

 

J’avais fais le deuil de Placide de sa tendre ; mais la curiosité me piqua quand même au vif d’en savoir un peu plus sur la vie de cette femme mystérieuse qui semait autant de trouble que dégâts dans la vie de plusieurs personnes.

 

-         Dis !  Qu’est ce qui s’est passé entre cette Priscilla et ta grande cousine ?  Tu connais ?

 

-         Ah !  Les affaires d’hommes !  Elle a arraché le copain de ma cousine, Alain !  Ils se sont fiancés par la suite!  Ma cousine a fait une grave dépression, elle a failli mourir !  Un gars avec qui elle sortait depuis le lycée !  Mendomo  a réussi à le détourner d’elle.

 

-         A ce point ?

 

-         Je te dis que hein !  Priscilla s’est fiancée avec le gars et ils ont fait trois enfants.  Lui aussi a failli devenir fou quand elle l’a lâché comme un malpropre.  Mais il a eu !

 

-         Et pourquoi elle l’a quitté ?  Au point d’abandonner ses enfants ?

 

-         Je n’ai jamais su exactement pourquoi !  Elle vit maintenant en Angleterre avec un faymen.  Quand je l’ai revue j’allais tomber !  On te dit  que la go a trois enfants tu doutes.  Belle !!!  Bien entretenue et bien mise, stylée à souhait mon ami !  Si ma cousine apprend que j’ai mis les pieds là bas dans sa boutique elle va me tuer.  Elles se détestent à mort !!!

 

-         Ca s’est passé quand ?  Et les enfants sont où ?

 

-         Ca s’est passé il y a deux ou trois ans !  Euille !  Elle a voulu les prendre mais il lui a interdit même de les approcher !  Alain Nzouaka !  Lui-même ne donne pas le lait !  Il a trop d’argent !

 

-         Mais ça n’a pas suffit pour qu’elle reste avec lui !  Elle a fini par partir !

 

-         Est-ce qu’elle aime rester sur place ?  Elle a toujours été comme ça !  Les djo par ci par là !

 

-         Je vois le genre…

 

Je tombais des nues !  Placide n’était qu’un faymen reconverti qui s’était entiché d’une vieille rombière.  Au fond leur histoire ne me disait pas grand-chose, mais j’eus un choc lorsque j’appris un peu plus sur cette « Petite Fleur », je n’étais pas la première victime ; elle avait déjà frappé auparavant.  A part ma situation matrimoniale, personne ne savait au bureau que Placide était mon ex mari et dont j’avais pris le soin de taire le nom par précaution ; sur mes papiers officiels le nom de Danga n’y figurait pas car à peine je m’étais mariée que le mariage était déjà fini.

 

La boutique de « Petite Fleur » avait ouvert ses portes il n y a pas longtemps et en un laps de temps elle devint la plus fréquentée de toutes les échoppes du coin.  Même Mbela Victor fut l’une des victimes de cette fashionista ; sa nouvelle conquête du moment, Clémentine, était une férue des boutiques qu’elle dévalisait chaque semaine.  Elle était tombée amoureuse de Victor à cause de sa main large, une vraie passoire ; il dépensait sans compter et lui offrait tout ce qu’elle voulait.  Il avait commis l’audace un jour de me commissionner là bas à PP chose !.

 

-         Allez donc me chercher un joli turban !  Un turban de couleur bleu ou rose !  Allez voir dans cette boutique là… PP machin !

 

Il me prenait pour une de ces gourdes alors que je voyais bien son petit manège.  Le turban n’était destiné qu’à Clémentine…  J’avais juste le cœur serré, de savoir que j’allais pénétrer dans cet univers que je trouvais bien malsain, et priant pour que je ne la croise pas.  J’avais trop vite parlé ; elle était bien présente; c’était la grande promotion et il fallait qu’elle se fasse bien voir et remarquer.  J’étais entrée et j’avais foncé tête baissée vers le rayon proprement dit des foulards ou écharpes, j’en savais rien ! 

 

-         Est-ce que je peux vous aider ?

 

C’était l’une des employées qui s’étaient dirigée vers moi ; pas moyen de me débarrasser d’elle ; plus je la repoussais poliment, plus elle en rajoutait.

 

-         Oh mais !  Nous avons un arrivage de jolis foulards et bien d’autres… Un instant je vais demander à la patronne !

 

-         Non !  Non !!!

 

Trop tard ; elle s’était lancée à toute vitesse vers Priscilla qui n’était pas loin.  Je voulu faire demi tour ; il valait mieux que je sorte de là et que j’aille inventer tout, n’importe quoi à Victor !  Je n’étais pas en mesure de l’affronter directement.  C’est à elle que je devais ma chute, ma déchéance sans oublier le harcèlement que Placide me faisait subir. Par un coup de chance, Priscilla, très affairée ne semblait pas prêter attention aux clients, elle était fourrée dans ces papiers et avait plutôt indiqué à la fille l’emplacement exact des foulards et autre.  Priscilla se trouvait au niveau de la caisse, à côté de la caissière ; je savais qu’elle me reconnaitrait forcément.  A ma grande surprise, elle ne daigna pas lever les yeux lorsque je payais, ni même lorsqu’on emballa le paquet.  Elle avait juste décidé de m’ignorer, préférant jouer les femmes très affairées.  Elle avait froncé les sourcils durant tout le temps que j’avais passé là à cette caisse.  Avant de prendre le paquet je confirmai que Priscilla faisait semblant de m’avoir vue quand un groupe de trois femmes entrèrent dans la boutique ; elle leva la tête et leur sourit tout en s’exclamant.

 

-         Aaaaah !  Bonjour et bienvenue chez …  P…  P-Shop !  Je suis à vous tout de suite !

 

Elle avait appuyé sur les deux lettres, j’avais compris le message.  Tous ces petits détails sans importance me consumaient à petit feu mine de rien.  Mes crises avaient repris de plus belle, et même mes migraines interminables.  J’avais besoin de Jess, il me manquait terriblement ; il aurait su me consoler, me calmer, m’apaiser.  Il ne manquait pas à son devoir, celui de m’appeler tous les soirs ; mais cela ne suffisait pas ; je ressentais son absence et je pleurai tout le temps au téléphone.

 

-         Non ma chérie ! Je n’aime pas te savoir triste !  Tu me manques atrocement mais dis toi que c’est pour un temps ! 

 

-         Jess…  C’est très dur !  Ca a recommencé, ces douleurs, ces migraines !  Je …  Je n’arrive même plus à dormir !

 

-         C’est le stress !  Tu y penses trop !  Toutes les balivernes que Placide te raconte c’est dans le but de te détruire moralement !  Placide ne peut pas revenir au pays à l’heure qu’il est !  S’il va au pays il est sûr de ne plus retourner en Angleterre…

 

-         Comment sais-tu tout ça ?

 

-         Il a des faux papiers !  Apparemment il s’est fait passer pour quelqu’un d’autre lorsqu’il voyageait pour la première fois.  Il a trempé dans une affaire de trafique illicite!  Je t’ai dit que j’ai été victime de lui !  Je suis toujours obligé de suivre ça de près.

 

-         J’ai appris qu’il se fait passer pour un homme d’affaires là bas !

 

-         Oui !  Mais la police est à ses trousses !  Ce sont des conneries tout ce qu’il te raconte !

 

-         Tu penses comme ma tante !  J’ai seulement peur parce que ce genre de pratiques est …

 

-         C’est psychologique !  Il ne peut rien te faire, n’aies pas peur !  Je te conseillerai de suivre ce que ta tante t’a recommandé.

 

-         Je vais commencer bientôt, je vais m’appliquer !

 

-         Voilà, c’est tout ce que tu auras à faire, ne gères pas le reste !  Tout ira bien !

 

-         Jusqu’à quand ?  Toi tu me manques énormément !

 

-         Toi aussi tu me manques !

 

C’était tout !  Jamais il n’évoquait le futur, ne serait ce qu’un plan avec moi ; ce qui avait le don de me foutre les boules, mais au moins ses appels me rassuraient.  Il pensait aussi comme ma tante que j’étais victime de harcèlement de la part de Placide ; la bonne nouvelle était peut être qu’il ne reviendrait pas au pays de sitôt et même s’il était supposé m’attaquer à distance je ne devrai pas le laisser faire ; et la manière la plus simple était de le combattre spirituellement…

 

Cela paraissait si simple à première vue de le dire verbalement qu’il ne m’arriverait rien quoi qu’il advienne ; ce n’était qu’une théorie.  La pratique était toute autre; les propos de Placide n’étaient pas synonymes de blagues puisque quelques jours après, les manifestations physiques firent leur apparition…  En pleine séance de travail avec mon boss, il fallu que je me démange un peu l’arrière du crâne que je remarquai des brins de cheveux coincés entre mes doigts ; intriguée je refis l’action une seconde fois et une troisième fois, il y avait toujours autant de brins de cheveux entre mes doigts.  Prise de panique, je ne pus plus me contrôler ; complètement déconcentrée, je ne suivais plus ce que Mbela Victor me dictait comme conduite à tenir par rapport à ce nouveau projet. 

 

-         Que se passe t’il ?

 

-         Rien…  Monsieur !

 

-         Non !  Qu’est ce qui se passe ?  Vous me semblez perdue !  Je n’ai pas le temps à perdre et je ne compte pas reprendre ce que je viens de vous dire !

 

-         J’ai …  j’ai compris !  Je vous suis très bien !

 

-         Il est midi de toutes les façons, c’est la pause !  On reprend dans l’après midi !  Je dois filer de toute urgence, on m’attend !

 

Mon anxiété grandissait au fur et à mesure ; j’avais couru dans les toilettes, défais mon chignon, ébouriffer toute ma chevelure en espérant que je m’étais trompée !  Mais c’était bien réel, ils avaient l’air de tomber ; plus je tirais plus je les voyais rester sur mes doigts.  Au bout de quelques jours ils tombaient considérablement.  Cette fois ci je pris la mesure de la chose.  Ma tante avait décidé qu’on retourne encore voir le prêtre.  Ce dernier me recommanda sérieusement une ligne de conduite stricte, une vie faite de prières, de recueillement, de jeûnes et autres.

 

-         Je ne peux pas confirmer que cela soit d’ordre mystique, cela peut être aussi dû à un trouble psychique organique résultant d’un traumatisme, tout ce que vous avez vécu depuis lors jusqu’à présent, en d’autres termes, c’est le stress !

-         Je me souviens encore quand nous étions ensemble Placide et moi ! Ca me revient, je n’en suis pas sûre mais je crois que c’est à ce moment là que beaucoup de choses on dû se produire ; il venait de trouver du travail, on avait aménager dans notre nouvel appartement ; à chaque fois que nous nous retrouvions dans l’intimité, il se rassurait toujours de savoir si j’étais bien épilée, le pubis comme les aisselles ; sinon il me demandait de le laisser faire ; même mes ongles il me disait toujours de le laisser nettoyer après, je trouvais cela tout à fait normal ; je ne pouvais pas croire qu’il arriverait à ce point là, celui de tout récupérer pour un autre usage.

 

-         C’est fort probable, mais sache que rien ne dépasse celui qui est la haut, rien !  Ta foi est mise à rude épreuve et voici ce que tu vas devoir faire…

 

C’était très intense  le programme de prières que je reçu de sa part ; mais cela ne suffisait pas si je ne parvenais pas à croire moi même et à démontrer ma propre volonté de m’en sortir et de refouler avec conviction les différentes attaques extérieures.  C’est que je me résolus à faire et au bout de trois ou quatre mois à peine, je ne voyais pas que les résultats, je les vivais en direct ses résultats, cela relevait du miracle.

 

-         Cela ne relève pas du miracle…  C’est ta foi qui t’a sauvé en quelque sorte !

 

-         Oui mon père…  A présent je sais qui je suis et je sais comment faire !

 

Tout allait bien, je peux dire que j’allais merveilleusement bien ; en quelques mois j’avais encore beaucoup appris de ces terribles souffrances et des attaques directes de Placide.  Aux dernières nouvelles ce dernier venait d’être arrêté par la police londonienne et attendait le jugement ; il se pourrait qu’il soit en pleine négociation aux fins d’extradition vers le pays. 

 

-         Non !  Pourvu qu’il reste là bas !  C’est un élément très dangereux Jess !

 

-         Oui, espérons qu’ils le maintiendront là bas !  Ca vaudrait mieux !  Je peux enfin respirer !  Et toi tu vas bien ?  Je suis content que tu ailles mieux !  Tu me manques beaucoup, j’ai très envie de te voir !

 

-         A qui le dis-tu ?  Ca fait bientôt sept ou huit mois que tu es parti !  As-tu l’intention de voyager ?

-         Je n’en sais rien !  Ca ne dépend pas de moi !  Comme j’ai eu à faire plus de six mois au pays la dernière fois, ils risquent ne pas me lâcher de sitôt…  Je verrai ce que je pourrai faire !  Mais si jamais tu obtiens un congé pourquoi n’essayerais-tu pas de venir ici ?  Juste en vacances ?  Je t’invite !!!!

 

-         Waouh Jess !!!!

 

Même si cela semblait utopique, je devais essayer, pourquoi pas !  Après tous les derniers événements douloureux que j’avais pu vivre, j’avais droit au bonheur ; je me promis de la faire, cette demande de visa !  On ne sait jamais !  De toutes les façons ma joie était grande parce que je me sentais totalement libre et libérée.  On ne souhaite pas le malheur des uns et des autres mais Placide n’avait eu que ce qu’il méritait ; il croupissait dans les geôles londoniennes ; quant à Priscilla, elle avait disparu dans la nature et fermé boutique depuis des mois !  Contre toute attente elle avait réapparu un beau matin, et pas n’importe où, mais plutôt dans la même boîte où je travaillais.  Elle avait pris l’habitude de rôder autour de la compagnie ; parfois nous nous croisions tout en feignant de se connaître ; c’est chacune de nous qui, soit baissait le regard, soit snobait l’autre avant de se passer et de s’éviter comme des voitures.  J’estimais qu’elle avait eu beaucoup de chance de n’avoir pas été arrêtée à son tour !  Elle avait eu beaucoup de chance ; Placide n’était qu’un pion pour elle en fin de compte ; elle avait détruit toute une vie, des vies, des foyers.  J’avais tourné la page définitivement et même le simple fait de la croiser régulièrement dans notre compagnie devint tout à fait normal.  Un beau matin je l’avais carrément surprise en pleine conversation avec le boss lui même, dans son bureau…

 

Madame Badjeck ?  Laissez moi vous présentez votre future collègue, Madame Priscilla Blumberg !  Elle vient tout droit d’Allemagne et compte occuper le poste de Sous Directeur des Finances et de la Comptabilité !

Saignements du Coeur