Chapitre 2 : L'examen

Ecrit par MTB

Ce matin avant de se rendre en salle d’examen, il pria Dieu de l’aider à réussir brillamment. Même s’il n’arrivait pas à poursuivre les études, il aurait fait la fierté de ses parents en réussissant. Les jours passèrent, les épreuves aussi. Il était confiant qu’il réussirait mais l’angoisse de l’après examen le hantait toujours. Il retourna au village. Malgré les sollicitations des uns et des autres, les invitations des filles à s’amuser, la vie lui semblait comme fade. Tout lui paraissait étranger comme s’il n’était jamais venu dans ce village et que l’air subitement était devenu suffoquant. Parfois il lui arrive d’étouffer alors qu’il y fait frais à cause des collines qui bordent le village. En effet, il n’y avait pas besoin d’un ventilateur dans ce village. Il fallait plutôt se couvrir le soir venu pour ne pas attraper froid. Son angoisse se ressentait maintenant à des dizaines de mètres et sa solitude faisait fuir les belles jeunes filles qui autrefois seraient prêtes à mourir pour lui. Son seul ami en ces temps difficile de l’attente des résultats était le jogging. Il le faisait tôt le matin pendant près d’une heure et répétait le même rituel le soir après être rentré du champ avec ses parents. Ces exercices lui valurent d’avoir un corps puissamment bâti avec des pectoraux sous forme de tablette de chocolat comme les mannequins qu’il admirait dans les magazines de mode. Ou bien, devait-il tenter sa chance dans ce domaine ?

Mais très tôt il redescendit sur terre. Le lendemain il devait se rendre en ville pour suivre la proclamation des résultats. Le sommeil n’arrivait pas à prendre le dessus sur lui cette nuit-là. Il arpentait les couloirs de la maison dans le noir comme s’il n’y avait pas de meubles. Puis pointa à l’horizon les premiers rayons du soleil comme pour le narguer. D’habitude, il trouvait beau le lever du soleil. Mais exceptionnellement en ce jour, il le ressentait comme un défi. Qu’allait-il se passer ? Etait-ce un lever de soleil de bon augure ? Rapidement il s’habilla et prit le chemin de la gare routière. Le seul chauffeur du village était déjà là attendant les clients à emmener dans la première ville voisine. C’était une vielle Renault dont l’intérieur avait été réaménagé. D’une capacité de 9 places, la voiture pouvait à présent en prendre jusqu’à quinze personnes. Le temps passait et comme s’il n’était pas déjà assez stressé, le bus refusait de se remplir. Il dût attendre jusqu’à neuf heures avant que le chauffeur ne prenne la direction de la ville voisine. Il faut dire que démarrer n’était pas en soi un problème car le chemin de croix était plutôt l’état de la route. Il n’avait pas plu chez eux la nuit mais les villages voisins qu’ils devaient traverser avaient été sérieusement arrosés. Et la route en latérite avec déjà des trous par endroit faisant faire des acrobaties aux chauffeurs rendait encore plus difficile la conduite. Finalement il arriva et eut la chance de trouver immédiatement une occasion pour la capitale. Après deux heures de route, il descendit devant son école avec son petit sac au dos et commençait à se frayer un chemin parmi la foule nombreuse venue suivre les résultats.

Cependant, il remarqua un truc anormal. Depuis toutes ces années qu’il avait fréquenté, jamais autant de voitures n’étaient venues avec autant de personnes suivre les résultats dans ce centre. En plus, il pouvait distinguer clairement des policiers alignés un peu partout et des hommes en lunettes noires, costumes noirs comme les agents spéciaux dans Men In Black. Que se passait-il au juste ? Se trompait-il d’endroit ? Il ne pouvait pas être aussi stupide après toutes ces années. Après tout il était aussi stressé et aurait pu manquer de faire attention. Au moment de rebrousser chemin, il entendit quelqu’un prononcer son nom. C’était le directeur de l’école. Oh mon Dieu ! Qu’a-t-il fait pour se faire interpeller par le directeur ? Son cœur cognait dans sa poitrine et à y prêter un peu attention, on aurait cru les militaires en train de jouer le tambour pour l’hymne national. Timidement il s’approchait du directeur qui tout excité lui annonça qu’aujourd’hui était un jour spécial pour leur école car le Ministre de l’Education viendrait assister personnellement à la proclamation des résultats. Mais pourquoi le Ministre viendrait-il ? À peine eût-il fini de se poser cette question qu’un silence se fit dans la cour de l’école. Pour la première fois, il vit une grande autorité politique s’avancer. Il se pinça pour se rassurer que ce n’était pas un rêve.

La douleur qu’il ressentit à l’épaule le ramena à la réalité. Il n’était pas en train de rêver. Un silence impressionnant se fit et les militaires le brisèrent avec le son aigu de leur fanfare. S’en suivit l’hymne national et les salutations des autorités présentes. Contrairement à ce qu’il avait l’habitude de voir à la télévision nationale, la cérémonie fut brève et le directeur de l’école, tiré à quatre épingles, avec un nœud papillon qui se débordait d’enthousiasme prit la parole pour son discours. A ce moment, il se demanda combien de fois il avait vu le directeur aussi bien sapé. Peut-être que c’était lui qui n’y avait jamais prêté attention. Après le discours bien huilé à la gloire du Président et de ses actions en faveur de l’éducation, vint le moment le plus tendu de la journée pour Eric : la proclamation des résultats du baccalauréat. Un silence encore plus lourd s’installa car tout le monde retenait son souffle. Mais pourquoi un simple résultat prenait-il autant de temps ? Quelques va-et-vient, des chuchotements au niveau de la tribune officielle puis le Ministre se leva pour prendre la parole. Pour une première fois, même les mouches fermèrent leurs gueules pour entendre ce qui allait se dire.

UN MATIN PAS COMME L...