Chapitre 20

Ecrit par Annabelle Sara


- Qu’est-ce que Sylviane sait sur toi qu’elle ne veut pas me dire?

Solène venait de vivre la pire traversée vers une autre année de toute son existence.

Et apparemment ce n’était pas encore fini!
Elle fit d’abord la sourde oreille, utilisant le bruit des clés qui ouvrait la porte de chez eux pour prétendre ne pas avoir entendu la question de Léon. Celui-ci attendit d'être à l’intérieur et d’avoir refermé derrière eux pour reposer la question.

Il la rattrapa par le bras et la força à le regarder.

- Je t’ai demandé ce que Sylviane sait sur toi, dont elle ne veut pas me parler, répéta-t-il.

- Qu'est ce qui te fait croire qu’elle sait quoique ce soit à mon sujet?

- Solène ne me prend pas pour un idiot s’il te plait! Je connais bien Sylviane et j’ai bien vu comment tu réagissais chaque fois qu’elle prononçait ton nom cette nuit! J’ai même cru à un moment que tu allais t’enfuir tellement tu étais mal à l’aise…

- Enfin tu reconnais que les membres de ta famille ne m'apprécient pas… Exactement comme mes parents ont du mal avec toi! Dit-elle en se dégageant.

- LA seule différence c’est que ma famille te respecte, le cas contraire Sylviane aurait balancé ce qu’elle sait sur toi devant tout le monde!

- Elle n’avait qu’à le faire…

- Donc tu reconnais qu’elle sait quelque chose?

- Fiche moi la paix avec ça! Je ne vois pas pourquoi je vais te répondre étant donné que tu as déjà pris son parti et que quoique je dise ça ne suffira pas à te convaincre…

- Je n’ai pris aucun parti; dit-il calmement. Je veux juste comprendre pourquoi j’ai l’impression que ma sœur a lancé une cabale contre toi ce soir! Ne tiens pas en compte son histoire de solidarité féminine si elle a quelque chose contre toi elle ne va pas te lâcher! Moi ce que je veux c’est savoir de quoi il en retourne pour calmer la situation avant que ça ne dégénère…

- Non mais je rêve! Donc pour me défendre auprès de ta famille tu as besoin que j’ai raison? Demanda-t-elle dépassée. Tu vois une vieille pimbêche qui s’attaque à moi et toi pour me défendre tu voudrais d’abord savoir si j’ai raison?

Léon leva les mains comme pour déclarer forfait.

- Mais on parle de ta soeur ou de ta femme? Léon je veux comprendre! Tu ne vois pas ce qu’elle fait? Elle se comporte comme ma rivale! Tu parles de moi mais est-ce que tu peux m’explique pourquoi une femme que je connais comme ta soeur peut se comporter comme si elle est…

- Amoureuse- moi? Comme si elle avait une obsession pour moi?

Léon s’assit dans un fauteuil.

-Je ne vais pas le nier et te raconter des histoires! Sylviane a toujours eu un faible pour moi! D’ailleurs elle me l’a avoué elle-même. A plusieurs reprises elle s’est interposée entre mes ex-copines et moi…

- Tu sais cela et aujourd’hui tu laisse encore faire?

- Tu ne m'as pas laissé finir Solène! Si Sylviane a quelque chose contre toi, elle ne l’utilisera que si c’est vérifié! S’il y a une chose dont je suis certain sur elle, c’est que ce n’est pas une menteuse. Alors je te repose la question ou alors tu me donne une réponse ou j’attends tranquillement que ça pourrisse et que ça sente?

Le ton de Léon était tellement tranchant que Solène ne put rien faire d’autre que d’essayer de retourner la situation sur lui.

- Tu me pointes du doigt mais si on parlait plutôt de toi qui va surement te faire convoquer dans une histoire sordide! Hein comment et pourquoi tu vas te faire convoquer par la police si tu ne sais rien de cette fille! S’il ne s’est rien passé entre vous. Tu peux m’expliquer?

L”on sourit en entendant la défense de Solène, il reconnut la diversion et décida qu’il n’avait ni le temps ni l’énergie pour subir cela. Il se leva et contourna sa petite compagne qui lui criait qu’elle savait qu’il n’avait pas juste discuté avec Jazmine. Qu'il s’était sûrement passé quelque chose avec elle. Qu’elle connaissait bien le tombeur qu’il était, elle n’allait pas croire en son histoire de discussion. Elle criait tellement qu'elle-même en avait mal à la tête. Mais Léon s’était enfermé dans la douche. 

Solène était debout devant la porte des toilettes, elle sentait que quelque chose risquait d’arriver, elle ne savait pas quoi. Jamais de sa vie elle ne s’était senti aussi mal! Elle ne savait pas comment cette histoire avait autant dégénéré! Quand est-ce qu’elle avait perdu le contrôle. MAis elle devait vite se reprendre et surtout apprendre cette grosse mégère de sylviane de ne pas se fier à sa taille et son petit corps. Elle se fera un plaisir de la remettre à sa place.

Au même moment son téléphone sonna. C’était Adolph!

Elle voulut d’abord renvoyer l'appel, ensuite elle pensa qu’il fallait également remettre les pendules à l’heure au bonhomme. Alors elle quitta la chambre et alla se cloitrer dans le magasin de leur appartement qui faisait office de buanderie.

- Qu’est-ce que tu veux! Répondit-elle. 

- Mince c’est quoi cet accueille bébé? Vous vous êtes disputés et c’est sur moi que tu viens déverser ta colère, ou bien?

- Comment Sylviane sait pour nous deux? Tu peux m’expliquer? Murmura-t-elle avec rage contre son téléphone.

- Ma petite s’il te plait calme tes esprits, je n’ai rien dit à personne tu es folle? Donc tu t’imagines que je vais faire l’amour avec toi et aller raconter ça?

Il avait raison! Il n’aurait pas osé se vanter de soulever la copine de son grand frère. Adolph peut faire beaucoup de bruit mais devant Léon il a toujours l’habitude de se tasser. Mais dans quoi Solène s’était encore embarquée. Pour une histoire de fesses elle avait succomber aux charmes du petit frère de son gars.

- Alors comment est-ce qu’elle est au courant de ce que nous avons fait à Noël?

- Elle ne sait rien! Sysy est la reine du bluff. Elle passe son temps à faire peur aux filles qui ont le malheur d’attirer l’attention de Léon! Elle ne sait rien…

- Ah Adolph tu es trop… Elle ne sait rien mais elle réussit à me menacer en disant qu’elle va révéler ce que j’ai fait le jour du réveillon? Réfléchit quand quelqu’un bluff il ne peut pas être aussi précis…

Solène tremblait encore en se rappelant du regard de Sylviane lorsqu’elle lui a balancé son ultimatum.

- C’est pour ça que tu m’as évité toute la soirée au point de ne pas me souhaiter une bonne et heureuse année comme il se doit?

- Tu es sérieux? Est-ce que tu es sérieux?

- Solène…

- ça suffit arrêtes! Ça là, ce que tu fais là arrête! Je ne suis pas dedans… Nous avons dépassé les bornes une fois, nous n’allons pas recommencer! Déclara-t-elle décidée à mettre un terme à leur incartade.

- Qu’est-ce que tu racontes…

- J’ai dit que c'était fini! Je ne vais pas tromper mon homme avec son petit frère, nous sommes allés trop loin.

- Tu te rends tout de même compte que la fille morte là ton homme comme tu l’appelle a surement eu une relation avec elle…

- oui et elle est décédée entre-temps! Elle n’est pas un problème pour mon couple, mais toi oui!

- Solène, tu es en train de me dire que tu tiens à ton couple?

- A ton avis? Si je n’y tenais pas je serais ici depuis si longtemps? Demanda-t-elle avant de raccrocher. Comme si j’allais quitter Léon pour un tonneau vide qui fait beaucoup de bruit.

Solène savait que Sylviane n’allait pas la lâcher elle devait donc s’assurer que Léon ne veuille pas écouter ce qu’elle avait à dire. Personne ne devait savoir ce qui s'était passé avec Adolph. Elle retourna dans la chambre pour se changer et prendre elle aussi un douche. Léon avait fini et il se passait du lait de toilette sur le corps lorsqu’elle entra.

-Je m’excuse pour tout à l’heure! Fit-elle en passant derrière lui. J’espère juste que les histoires de Sylviane ne vont pas te monter à la tête!

Il ne répondit pas, il était épuisé, il était près de 5 heures et depuis la veille il n’avait pas vraiment eu une nuit de sommeil. Aujourd’hui il se demandait ce que tramait Sylviane mais hier c’est ce que tramait le neveu de son père qui l’avait préoccupé.

Car le 30 Rose lui avait relaté sa conversation avec Virginie qui avait fait le voyage depuis Paris pour venir dire ses quatre vérités à Essengue qui selon ses dires étaient le chef du réseau de proxénète. Seulement lorsqu'elle s’était pointée chez lui à son arrivée, Essengue et sa famille avaient disparu de la circulation.

La coïncidence avec le décès de Jazmine était frappante. Sans oublier que Rose est persuadée qu’Essengue est le papa de l’enfant de Jazmine. Seulement, ils ne peuvent ni corroborer ces faits ni les prouver, Essengue a disparu. Jazmine est morte. L’histoire de Virginie reste une histoire même si elle a l’air véridique.

Léon lui était même allé jusqu'à se demander si Essengue n’avait pas tout simplement commandité le meurtre de ses collaboratrices pour pouvoir camoufler quelque chose. Mais est-ce qu’il irait jusqu’à tuer sa propre fille? Si elle était aussi psychopathe que semble la décrire les gens, il ne se serait pas débarrassée d’elle sauf si elle s’était retournée contre lui.

Rose et Léon avaient donc décidé que pour désigner Essengue comme étant le chef de la bande, il fallait trouver des preuves matérielles qui reliaient à la fois Essengue et Jazmine, Marianne et Jazmine ainsi que leur club. Mais ça c'était une toute autre paire de manches.

Thérèse connaissait son rituel du 1er. Elle n’appréciait pas forcément mais elle savait qu’elle devait se conformer. Comme bon nombre de famille le font, le 1er est le jour des visites on va de maison en maison pour souhaiter une bonne et heureuse année en apportant quelque chose, soit à manger soit dans une enveloppe. Thérèse connaissait déjà ce que pensait sa belle-famille d’elle alors elle ne se rongeait plus le sang.

Elle préparait des paniers qu’elle laissait partout où son mari et elle avait décidé de s’arrêter.

Ce matin elle avait décidé de faire des gâteaux, qui allaient accompagner le vin qu’avait rapporté DD de son voyage. 

Elle l’entendit dans le jardin, il avait une discussion assez houleuse au téléphone, quelque chose attira son attention et pour un fois elle se rapprocha pour écouter ce qu’il disait.

- Tu savais très bien dans quoi tu t’embarquais! Tu le savais et tu as signé pour ça! Je ne t’ai rien promis et je dois te dire que j’ai plus qu’horreur des gens qui veulent me faire du chantage! Alors écoute moi bien si tu as des oreilles pour entendre, écoutes… Ne m’appelle plus jamais pour me poser des ultimatums! Est-ce que c’est clair? Je veux entendre un Oui Monsieur! Voilà! C’est toi qui raccroche.

Thérèse avait déjà entendu DD s’énerver contre quelqu’un mais cette conversation avait quelque chose de particulier. Pas assez ferme et autoritaire pour que ce soit une conversation professionnelle. Elle ferma les yeux et respira un gros coup.

Elle savait qu’elle n’allait pas pouvoir garder son sang froid bien longtemps. A un moment ou à un autre il allait falloir réagir et demander des comptes à DD. Cette fin d’année avait rudement joué sur ses nerfs alors maintenant elle devait s’assurer que le début se passe mieux.

Au moment où il fait son entrée dans la cuisine, son expression faciale avait changé du tout au tout. Comme s’il ne venait pas de se passer quelque chose. Parfois Thérèse se demandait si elle connaissait bien son mari. Et son comportement ce premier Janvier 2019 la poussait à se poser des questions encore plus que d’habitude.

- Tu as fais combien de panier? Demanda-t-il en s’asseyant sur un tabouret de cuisine.

- je n’ai pas encore fait de panier je ne sais pas exactement où on va, répondit Thérèse en se tournant vers lui. Tout va bien? Depuis ton retour de voyage je te trouve un peu a cran…

- Tout va bien! T’inquiète! Fais un panier pour tantine Elise…

- C’est chez elle que nous allons? s'exclama Thérèse. Tu aurais dû me prévenir pour que fasse un bain avec l’eau et le sel béni avant d’aller chez cette mégère…

- Je te rappelle que c’est la grande Soeur à ma mère dont tu parles, Thérèse!

- Oui et cette femme me déteste… Non! Elle me hait de toutes ses forces ! Un peu un peu elle m’insulte, en 15 ans de mariage cette femme n’a jamais exprimé autre chose que du dédain à mon égard!

- Thérèse s’il te plait…

- Je ne refuse pas d’aller chez elle hein! Je veux juste que la prochaine fois que tu veux m’embarquer chez elle, pardon de me prévenir avant pour que je me prépare, émotionnellement, spirituellement et physiquement! Toi même…

DD se contenta d’éclater de rire avant de prendre sa femme dans ses bras.

-Si quelqu’un t’attaque aujourd’hui, je me ferais un plaisir de le remettre à sa place, dit-il.

- Comme tu viens de le faire au téléphone dans le jardin?

Une lueur sombre traversa le regard de DD qui la lâcha avant de lui demander:

-Tu écoutes aux portes maintenant?

- Dans ce cas précis, c'était par la fenêtre ! Tu n’étais pas dans un coin isolé non plus pour que je ne t’entende pas, lui répondit-elle en gardant les yeux bien accroché aux siens.

Elle avait un pressentiment bizarre. Même si elle se battait pour ne pas soupçonner DD; elle sentait qu’il lui cachait des choses.

- Tu n’as rien à me dire? Des problèmes avec quelqu’un?

- Non ma belle! Rien dont tu devrais t’inquiéter. Bon je finis de me préparer et on s’en va… Ah oui nous irons chez Léon après donc dit lui de ne pas bouger de chez lui!

- D’accord je lui fais un message répondit Thérèse. 

Julie n’étant pas de service le 31 et le 1, Thérèse avait dû se débrouiller seule et elle avait vraiment du pain sur la planche. Elle arrangea le panier de Tantine Elise, avant d’envoyer le message à Léon. Et pendant qu’elle finissait de ranger, son téléphone sonna. C’était Calixte. Ca faisait un moment qu’elles ne s’étaient pas vu.

- Allô ma chérie… Bonne année!

- Yaaa Mme Deffo! Yaaaa! Donc pour que tu me souhaite bonne année je dois t’appeler?

Thérèse se mit à rire, elle n’avait aucun argument pour se défendre contre cette belle attaque.

-Désolée ma chérie, si je te dis que j’ai eu une minute à moi depuis c’est que je te mens!

- Tu n’as pas envoyé de message à la famille?

- j’ai envoyé! Mais je dois t’avouer que ma liste de partage ne comprenait pas dix personnes…

- Donc je ne suis même pas dans ton top dix des personnes importantes, s'exclama Calixte. Yes ooooh! J’ai compris…

- Non, ce n’est pas ça! Weeh Mme Epee, on se fait une sortie entre fille pour me faire pardonner. 

- Ce week-end? 

- Oui si tu es dispo…

- C’est quelle question ça? Tu sais que je suis toujours dispo quand il s’agit de faire la fête! Surtout avec ma copine… copine à vie!

Elles éclatèrent de rire en fixant leur rendez-vous. DD revint dans la cuisine alors que Thérèse raccrochait.

- C'était qui au téléphone? Demanda-t-il en portant les deux panier qu’elle avait prévu finalement.

- C’était Calixte! Elle m’appelait pour me plaindre…

- celle-là aime bien se plaindre hein!

- Ekieh! Toi aussi, c’est juste que nous ne nous sommes pas vu depuis un moment et je ne lui ai même pas souhaité une bonne année…

- Nous sommes quel jour? La coupa DD en ouvrant la malle arrière pour poser les paniers.

- Nous sommes le premier… Pose celui de Tantine Elise devant, c’est le plus gros! L’autre c’est pour Léon.

- D’accord! C’est exactement ce que je dis! Elle t’appelle le premier pour te dire que tu ne lui as pas souhaité bonne année? C’est la sorcellerie? Elle ne pouvait pas juste te souhaiter bonne année et basta?

- Tu veux vraiment comprendre la logique des femmes? 

- Tu as raison, mieux je laisse tomber… 

Il ouvrit la portière passager pour laisser Thérèse entrer et contourna pour prendre place à son tour dans le véhicule.

- Mais en même temps la simplicité ne ferait de mal à aucune de vous…

- Je sais! Mais c’est ma copine et elle a toujours été égocentrique sur les bord donc je la gère comme ça, répondit Thérèse en bouclant sa ceinture pendant que le véhicule démarrait. En tout cas, nous allons nous faire une petite sortie entre fille ce week-end pour qu’elle arrête un peu de pleurnicher.

- Donc un chien t’aboie dessus et toi tu lui donne un os?

- Ekieu c’est un peu exagéré comme analogie! DD c’est de Calixte qu’on parle quand même! Je croyais que tu l’appréciais?

- Tant qu’elle se comporte comme un être humain civilisé, je n’ai aucun problème avec elle; répondit DD.

Le ton et le son de sa voix lorsqu’il dit cela rappela à Thérèse la conversation dans le jardin. Il avait les yeux noir comme s’il était en colère et Thérèse préféra ne pas en rajouter.

Une fois chez Tante Elise, Thérèse garda son sang froid et son calme face aux regards et murmures qui la suivaient depuis bientôt 15 ans dans sa belle-famille. 
La tante de DD était déjà bien agée. De fait, elle restait assise à longueur de journée assise dans son fauteuil moelleux au milieu du salon. C’était son trône, car elle régnait en maître sur sa famille. C’est elle qui régente la vie de presque tout le monde. Homme comme femme. Tous se pliaient à son bon vouloir.
Tous sauf DD. Il avait réussi à se détacher de la famille de sa mère bien assez tôt. Raison pour laquelle, ils ne pouvaient rien lui faire d’autre que de murmurer lorsqu’elle était dans les parages.

Après avoir salué la vieille et subi un interrogatoire sur leur vie, celle des enfants et aussi de savoir si Thérèse allait enfin donner le fils de la retraite a DD, Thérèse réussit à s’éclipser pour aller dans les toilettes prendre un peu d’air.

Elle se fixait dans le miroir, récitant un mantra pour rester zen lorsqu’elle eut l’impression que quelqu’un pleurait. Elle se retourna et se rendit compte que le bruit venait de derrière le rideau de douche. Elle tira doucement sur le rideau pour découvrir Irène. 
Si elle ne l’avait pas encore rencontré, elle ne l’aurait pas reconnu. Irène n’était plus que l’ombre d'elle-même. Ses cheveux en bataille et sa tenue débraillé ne ressemblait pas à la femme raffinée d’Essengue.

- Irène? Qu’est-ce qui t’arrive pourquoi tu es ici et tu pleures? Irène?

- Laisses moi ! Laisse-moi pleurer mon désespoir! 

Thérèse était vraiment tenté de la laisser parce qu’elle n’avait pas vraiment été un soutien pour elle dans cette famille. Mais Thérèse voulait comprendre pourquoi elle pleurait aujourd’hui.

- Si tu voulais prendre une douche à mon avis, enlever tes habits aurait été mieux!

- Je t'assure que si j’enlève les habits sur moi ce ne sera pas pour me laver! Ce serait pour maudire les sorciers qui ont décidé de s’attaquer à moi!

- Hein?!

- Ekani, ne me regarde pas comme ça tu sais que ces gens sont des sorciers! Ils t’ont fait vivre l’enfer pendant 15 ans…

Thérèse allait lui rappeler qu’elle aussi faisait partie de cette bande quand elle éclata encore plus en larme.
 Et entre ses larmes, la morve qui lui coulait du nez, elle réussissait à parler?

- Ils ont poussé mon bébé dans le précipice… Marianne… Ma princesse est partie… Comme un agneau qu’on sacrifie… Je vais demander à qui? Qui me dira la vérité! Ils sont tous faux et avides… des gens prêts à sacrifier leurs propres enfants pour arriver à leurs fins!

- Tu parles de qui Irène! Weeh calme toi…

- C’est mon calme qui a tué mon enfant! Quand les ancêtres vont me demander des comptes… Je dirais quoi? Je dirais quoi oooh Seigneur! Pardonne moi moi oooh…

- Mais de quoi tu parles? Demanda Thérèse dont les poils se hérissaient déjà dans le dos.

- Ekani… ne fait pas comme moi… Si tu sais ne fais pas comme moi! Ne ferme pas les yeux et dire que tu profites, que tu n’as pas le sang sur tes mains… Ne fais pas comme moi! Sinon ils vont te prendre ce que tu aimes le plus…

 la porte de la salle de bain s’ouvrit sur les autres femme de la famille tellement vite que thérèse se sentit seulement ballotté de main en main vers la sortie. Elle essaya de comprendre ce qui arrivait à Irène mais la porte se referma devant son nez et la main de DD sur son poignet.

Il la tira tellement fort qu’elle se rendit juste compte qu’elle était déjà dans la voiture.

- Mais on ne va pas partir comme ça… Est-ce qu’elle va au moins bien?

- c’est important? Franchement je ne sais pas pourquoi tu t'inquiètes pour elle!

- Comment tu peux dire ça? Il y a une femme en larme dans la maison de ta tante et toi tu trouve que je m’inquiète pour rien? Elle a perdu sa fille récemment et ce genre de chose nous ne devrions pas prendre l’impact sur la santé mentale à la légère…

- Et toi tu veux faire quoi?

- L’aider? Cria Thérèse encore sous le choque des paroles d’Irène encore plus sous celui de la réaction de DD. 

- Tu es thérapeute? Entre hier et aujourd'hui tu es devenu une psy? Demanda-t-il. Non! Je ne sais pas ce que tu vas faire de plus que celles qui sont avec elle en ce moment!

- Dis plutôt que vous ne voulez pas qu’elle me parle, lâcha Thérèse sans vraiment se rendre compte de ce qu’elle venait de dire.

- Pardon?

Thérèse se cala dans son siège. Elle n’avait pas bien compris ce que lui avait dit Irène mais si elle ne se trompait pas, elle accusait sa famille d’être responsable du décès de sa fille Marianne.

- J’espère vraiment que tu n’es pas en train d’insinuer que les paroles de cette folle sont fondées. 

- pourquoi? Parce qu’elle accuse ta famille d’avoir sacrifié sa fille? DD franchement je ne sais pas de quoi elle parle mais c’est votre réaction à la cloisonner et toi de m’éloigner qui va me faire douter de vous! Tu ne peux pas être autant insensible à la douleur de cette femme! D’ailleurs son mari est où? Pourquoi elle est ici au lieu d’être chez elle? 

- tout de suite la théorie du complot! Fit DD. Je ne veux pas parler de choses qui ne me regardent pas et dont je ne sais absolument rien! Et c’est valable pour toi également!

- Il ne s’agit pas de parler de quelque chose que tu connais mais d’aider une femme dans la tourmente…

- Ça suffit ! S’écria DD énervé. On ne va pas se disputer un 1er janvier ç cause d’une folle furieuse qui pique sa crise et raconte des sottise pour jouer l’intéressante! Je peux comprendre qu’elle traverse un moment difficile mais ce qu’elle fait en ce moment c’est juste du cinéma. Et toi tu rentre dans son jeu au point de me faire un caca nerveux! Mais qu'est ce qui t’arrive au juste? Tu as des hormones en éveillent ou quoi?

Thérèse savait lorsqu’il était temps de se taire. Alors elle se carra dans son siège et ferma sa bouche, avec les paroles de sa belle-sœur dans la tête.
Le reste du trajet se fit dans le silence total. Une fois chez Léon, Thérèse se détend. Cette fois l’accueille fut chaleureux car Solène également était présente et apparemment elle avait fait un repas pour eux.

Une fois à table DD entra directement dans le vif du sujet de leur visite. Il voulait une énième fois demander à Léon de rejoindre ses troupes. Léon semblait moins catégorique sur sa position cette fois. Il écouta son beau-frère jusqu’au bout avant de réagir.

Il lança un regard à sa sœur.

Il avait appris avec les années à déceler les émotions de sa sœur dans son regard. Et là il la sentait ailleurs comme si ce qui se disait sur cette table ne la concernait pas.

- Je suis flattée par ta proposition DD! Je sais que par le passé j’ai longtemps refusé ta proposition, mais quelque chose me dit que je devrais y réfléchir alors je crois qu’il vaudrait mieux que je vienne en discuter avec toi au bureau…

- Ce serait un bon début! Nous sommes mardi, alors je t’attends au bureau disons Vendredi matin! Ça te va?

- c’est parfait! Fit Léon qui avait toujours les yeux rivés sur sa sœur qui n’avait toujours pas réagit. Thérèse tout va bien?

Elle sursauta et son verre de jus se vida sur elle.

- Merde, fit-elle en se levant.

Solène allait se lever lorsque Léon intervint en premier, il prit sa sœur par le bras et la conduisit vers la salle de bain de sa chambre.

-Thérèse, qu’est-ce qui t’arrive? Tu as l’air perturbée, ça va? Demanda Léon en tendant un chiffon mouillé à sa sœur pour qu’elle nettoie sa robe en tissu pagne. Tout va bien?

- ça va… Je viens juste de voir la femme d’Essengue perdre la tête parce que son enfant est décédé et je me demande ce que je ferais s’il arrivait quelque chose à mon enfant à moi.

- Ton enfant? Thérèse, tu es enceinte? Demanda son petit-frère avec un grand sourire.

Thérèse leva un regard apeurée comme si une éventuelle grossesse serait une catastrophe, au final.

-Je ne sais pas… peut-être! Selon Julie c’est certain! Mais il n’est pas de DD… Je ne sais pas de qui il est! Je me suis faite inséminer, Léon! J’ai fait n’importe quoi!

Léon fixa sa sœur et se dit qu’il n’allait pas mettre son doigt entre l’écorce et l’arbre.

- Félicitations! Tu mérites de vivre les joies de la maternité… Et un enfant qui naît dans les liens du mariage est l’enfant de l’époux! C’est la loi! Le reste ne sort pas de cette salle de bain! Si tu as envie de parler tu m’appelle direct, nous sommes d’accord?

Elle acquiesça avant de se loger dans les bras de son petit frère. Elle retrouva de la force et de l’énergie pour affronter ce qui allait suivre.
A Sang Pour Sang