Chapitre 20 : Prise de décision

Ecrit par Néfi

************************Quelque part dans la ville d’Abomey*************************

 

Il fallut près d’ 1 heure à Koffi pour atteindre la maison du boutiquier malien, qui faisait aussi office de cabine téléphonique. Ses enfants lui avaient maintes fois proposé un téléphone portable, mais il avait toujours refusé. Il s’en voulait à présent. Le voilà, entrain de traverser toute la ville, juste pour pouvoir passer un coup de fil. Il toqua bruyamment à la porte.

-          Momo, ouvre-moi s’il te plaît. J’ai un appel urgent à passer.

Il attendit 10 bonnes minutes et toqua à nouveau.

-          Mais qui est-ce ? demanda enfin Momo,  non content qu’on vienne l’emmerder en pleine nuit.

-          C’est moi, le vieux Koffi.

Momo alla chercher les clés et ouvrit la porte, tout en ronchonnant. Que diable me voulait-il à cette heure-ci, ce pauvre vieux, pensa-t-il encore plus en rogne.

-          Désolé de te déranger Momo, mais je dois absolument passer un appel cette nuit, lança Koffi en entrant directement dans la modeste maison.

-          Koffi ça suffit, tu ne peux pas venir chez moi à minuit passé et vouloir que je t’ouvre ma boutique quand même.

-          S’il te plaît, regarde j’ai fait plus d’une heure à vélo pour venir ici.

-          Bon, maintenant que tu es là, je vais te laisser passer ton appel, dit Momo, pris de pitié pour lui. Attends-moi ici, je vais ouvrir la cabine téléphonique.

 

Quelques minutes plus tard, Koffi avait réussi à joindre celui qu’il voulait.

-          J’ai vu quelque chose qui ne présage rien de bon, Fofo (Grand frère en fon, langue parlée dans le sud du bénin).

-          Qu’as-tu vu Koffi ?

-          Alex n’a pas du tout suivi nos recommandations.

-          Comment ça ?

-          Il est toujours derrière  cette fille. Je peux même t’assurer qu’ils se sont parlés tout à l’heure. Et cette fois-ci, j’ai peur que le pire ne se passe si ça continue ainsi.

-          Ce n’est pas possible, dit-t-il , surpris. Je l’avais pourtant bien averti des dangers qu’il encourait avec elle. Il n’en fait qu’à sa tête. Je vais définitivement régler ce problème. Merci Koffi.

 

**************************Le lendemain, chez Alex***********************

-          Alex réveille-toi, il est midi passé.

Alex ouvrit les yeux,  presque aveuglé par la lumière du soleil, pendant que sa mère tirait les rideaux.

-          Mais mam’, je suis en vacances, dit-il en s’étirant.

-          Et alors Alex, je m’en fous. Tu te lèves, un point c’est tout. Les hommes vaillants ne dorment pas autant.

-          Rha mam’, laisse-moi dormir, toi aussi. Même les hommes vaillants ont le droit de se reposer de temps en temps.

-          Je te laisse 30 minutes de plus. Nous passons à table dans 45 minutes, et tu es attendu par ton père ET ton oncle.

-          Quoi ? Tonton Claude est là ?

-          Oui ! et figure-toi qu’il souhaite ardemment te parler. Il m’a paru contrarié tout à l’heure.

-          OK je fais vite mam’.

 

40 minutes plus tard, Alex était assis à table, avec ses parents et son oncle Claude entrain de déguster un bon amiwo (pâte de maïs à base faite avec un bouillon de tomate) + poulet braisé. De plus, l’ambiance était tout à fait chaleureuse. La chaleur maternelle, les bons petits plats de sa mère et les histoires toutes plus intéressantes les unes que les autres de son cher père lui avaient vraiment manqué. Il espérait au fond de lui, connaître un jour, cet épanouissement avec Dona. Oui un jour peut-être pensa-t-il. Mais la présence de son oncle ne le rassurait pas. Il avait même senti dans la façon dont ce dernier l’avait salué tout à l’heure, un certain mécontentement. Tout était passé dans son regard. Et il le connaissait bien, Tonton Claude. C’était lui, son maître spirituel. C’est lui qui lui avait tout appris tout ce qu’il savait de cette religion qui était la sienne. Et il était vraiment loin de tout savoir.

Après être sorti de table, Tonton Claude demanda tout naturellement à parler avec Alex. Ils s’installèrent alors dans le bureau de son père.

-          Alex, mais qu’est-ce que tu es entrain de faire là ?

-          Comment ça Tonton ?

-          Tu sais très bien de quoi je parle ? Tu as vu cette fille hier n’est-ce pas ?

Alex était incapable de mentir à son oncle.

-          Oui, c’est vrai. J’étais censé ne pas la voir. Mais c’est la fille que j’aime. Toutes ces années sans elle ont été dures.

-          Je sais mon fils, mais tu sais très bien le risque que tu encours. Je sais que tu es un jeune homme sage. Alors agis comme tel.

-          Tonton, ce que tu me demandes est réellement au-delà de mes forces, surtout que je l’ai revue hier. Dieu, qu’elle était belle.

-          Ressaisis-toi Alex. Tu ne dois pas te laisser aller. Tu risquerais de le regretter plus tard.

-          N’y a-t-il pas d’autres solutions hein ? Ne pourrait-t-on pas implorer les divinités ? Leur demander la permission d’outrepasser tout ça ?

-          Non mon fils, nous avons déjà fait tout ce qui est en notre pouvoir. Sache que tout acte que tu poses, a une répercussion que ce soit dans cette vie ou dans les suivantes. Ceci est le résultat de vos actes. Nous ne pouvons rien y faire.

Alex était au bord des larmes. Il savait  bien que son oncle avait raison. Il ne pouvait pas supporter que Dona ait mal. Il ne pourrait pas dans 10/15/20 ans se regarder dans un miroir, lorsque le malheur s’abattra sur eux. Non, il ne pourrait pas se mirer et se dire qu’il aurait pu tout éviter. Il fallait qu’il prenne la bonne décision, pour elle, pour eux, pour lui maintenant car il se connaissait bien et il connaissait le pouvoir que Dona avait sur lui. Ils se reverraient, feraient l’amour et ce serait encore plus dur de se quitter. Peut-être même qu’elle tomberait enceinte et le pire arriverait. Il avait résisté pendant toutes ces années, même si la distance avait facilité les choses. Mais, tout reposait sur lui encore une fois. Il le savait et répondit à son deuxième papa.

-          Ok tonton, je ferai le nécessaire.

-          Je compte sur toi mon fils.

 

C’était décidé, il disparaitrait à jamais de la vie de Dona et qu’un malheur s’abatte sur lui s’il ne tenait pas parole.

Amour ou raison