Chapitre 24: ce n'est pas ton heure.

Ecrit par Rhema 241

**Chapitre 24 : Ce n’est pas ton heure**


Aria Bijou LEKOUA 


C’est demain le grand départ pour notre maison, et je suis tout excitée et heureuse de pouvoir enfin rentrer chez moi avec mon homme et mes enfants. Cette semaine m’a permis de me remettre dans le bain de la prière, ce qui n’était plus le cas depuis un moment. Je ne serai peut-être pas pasteur demain, mais je ne veux surtout pas rester oisive et ne rien faire. J’ai des enfants, et je refuse de faire de ma maison un champ de bataille pour le diable.


Sean (la tête sur mon épaule) : J’ai hâte d’être à la maison.


Moi (souriant) : Trop hâte, surtout d’être sur mon lit.


Sean (pressant mes fesses) : Et moi d’être en toi.


Moi (me retournant) : Et moi donc, je suis impatiente.


Sean : Ton oncle nous attend.


Moi (soupirant) : J’ai peur.


Sean : Ça va bien se passer.


Moi : Hum.


Je rince mes mains puis attrape le torchon pour les essuyer. Comme on s’en va demain, papa Kouka a demandé à nous voir. J’espère qu’il n’y a rien de grave, ou qu’il ne nous demandera pas de rester une semaine de plus.


Nous arrivons dans la grande maison deux minutes plus tard et Aimée nous emmène dans le salon préféré du couple. Cette Aimée, je ne l’aime pas. Je trouve qu’elle fouine trop, elle est toujours partout, et ça ne me plaît pas.


En pénétrant dans le salon, le bruit des enfants me donne immédiatement des maux de tête, mais cela n’empêche pas papa Kouka et sa compagne de vivre. Ils soulèvent les enfants à tour de rôle et les balancent vers le ciel. On entend de partout : « Encore, encore. »


Vraiment, chacun son kiff dans ce bas monde. J’aime également répéter « encore, encore », mais certainement pas pour les mêmes raisons.


Moi : C’est notre tour, pardon, pardon, chez vos parents.


Les enfants courent tous vers nous. C’est Shamma qui me retient seulement. Il y a une semaine, quand je l’ai vu, j’ai voulu couler des larmes, car il paraissait tellement fragile, mais aujourd’hui il suit ses frères et sœurs partout, lentement certes, mais il y arrive, et pour moi, c’est le plus important. Je crois que petit à petit, ça ira mieux.


Je porte Shamma, puis Doudou, ensuite Ken, puis Lyana, après Seraya, les jumelles, Hulda et Hugues. Ce sont vraiment leurs grands-parents qui les gâtent ainsi. Quand tu soulèves une personne, sache que tous les autres viendront après.


Les enfants sortent ensuite du salon pour aller dans la salle de jeu, et nous prenons place près du couple.


Papa Kouka : Bonsoir.


Nous : Bonsoir papa, bonsoir maman.


Maman Tania (souriant) : Personne ne va vous manger, c’est comment ?


Moi (grattant mon dos) : Non, ça va. Juste qu’on ne s’attendait pas à être convoqués ici.


Papa Kouka : Ce n’est pas une convocation. Si je vous appelle, c’est parce que vous êtes en train de retourner. Même si vous dites que c’est votre maison à tous les deux, moi je dis que c’est celle de Sean. Ma fille n’est pas mariée à toi, dans ma famille, personne ne te connaît, car pour connaître quelqu’un, il faut le mariage. Et tu ne l’as pas épousée. Si demain les autres oncles de ta copine viennent me demander si je te connais, je vais dire non, je n’ai pas mangé, je n’ai pas bu. Demain, tu vas retourner avec ma fille et dire partout que c’est ta femme, rigolo.


Moi (amusée) : Oh.


Sean m’a appuyé la cuisse pour que je me calme. En réalité, je ris car je ne m’y attendais pas. En fait, papa Kouka a la douleur de Sean, car tous ses partenaires savent que Sean est son beau-fils, or lui, il n’a pas mangé la dot.


Papa Kouka : Quand vous rentrerez, partez avec l’idée que moi je n’ai pas mangé et je n’ai pas bu. Je ne suis témoin de rien.


Là, le père devient sérieux. Puis, il parle des enfants, du fait qu’ils portent tous le nom de Sean, oubliant que pour les plus grands, c’est à cause de lui.


Papa Kouka : Si on me demande pourquoi ils s’appellent tous BIYOGHE, je dirai : je ne sais pas, car je n’ai ni mangé, ni bu. Vous voyez les gens ?


Pourtant, c’est lui qui est allé mettre le nom de Sean dans l’acte de naissance des enfants. Il continue à parler un moment puis nous autorise à partir. Je commence déjà à culpabiliser. Il parlait comme s’il n’était pas d’accord avec mon départ. Rester ici pour laisser mon foyer à qui ? J’ai confiance en Sean, mais je n’aime pas trop l’idée de vivre loin de lui. On ne va pas rester ici tous les deux non plus. Sean a du mal à m’embrasser ici. Nous sommes restés ici pendant une semaine à prier, même pas un petit frottement, rien. Et ce n’était pas juste à cause de la prière. Monsieur Biyoghe n’a plus l’âge de damer sur le terrain familial de sa belle-famille, donc depuis hier qu’on a terminé le programme, il ne veut pas. Si on reste ici, on va faire comment ? Bref, je vais m’asseoir avec lui pour en parler, on ne peut pas ignorer ce que papa Kouka vient de dire.


On ouvre la porte de l’appartement. Sean va dans la chambre et passe près d’une heure au téléphone dans la douche. Je finis de tout ranger en attendant qu’il sorte de là.


Quand il revient dans le salon, on se regarde un moment. C’est fou comme on se comprend par le regard.


Moi (soupirant) : On fait comment ?


Sean : Tu vas rester ici.


Moi : …


Sean : Juste le temps pour moi de réunir ma famille et de venir avec eux te récupérer avec les enfants.


Moi (les yeux brillants) : Ok.


Sean : Je sais que c’est brusque, mais c’est nécessaire.


Moi : Je sais, mani, je sais.


Sean : Comme ça, on profitera de l’occasion pour demander la liste de la dot.


Moi : Merci, babe.


Sean : Je t’aime, et je ferai toujours tout pour toi et nos enfants.


Moi : Je t’aime aussi, bébé.


Sean : Tu penses que les enfants viendront aujourd’hui ?


Moi : Je pense qu’ils iront tous dormir dans la chambre de leur papi.


Sean : C’est sûr, on se fait un film ?


Moi : Je choisis le film.


Sean :Je te préviens, je ne vais pas regarder tes films de sourds-muets.


Moi :Ce sont des mimes.


Sean : Je ne vais pas regarder ça.


Il a boudé un moment, mais nous avons finalement regardé le film de mimes avec un pot de popcorn. À une heure, mon téléphone s’est mis à sonner ; c’était Alphie. Si elle est encore sortie pour se mettre dans une situation compliquée, elle ferait mieux de gérer cela avec Jessye. J’ai bien vu hier qu’elle était chez un homme ; elle sentait l’homme à distance. On dirait une personne à qui on vient de donner une leçon mais qui recommence tout de suite après. Je repose le téléphone et me concentre sur le film. Nous avons fini par nous endormir sur le fauteuil.


Le matin, je me suis réveillée avec le cœur lourd. Ce n’est pas à cause du départ de Sean, je le sais, mais j’ai cette sensation étrange d’anxiété qui ne me quitte pas.


Moi : Dis à Nora de vérifier mes affaires, s’il te plaît.


Sean : D’accord, je cherche la Bible que ton oncle nous a offerte ; je ne sais plus qui avait récupéré le carton.


Moi : Je ne sais pas, bébé. Demande à Alphie.


Sean : J’ai frappé, mais personne ne répond.


Moi : Comment ça ? Elle est là-bas depuis ce matin et elle n’est pas sortie ?


Sean :Elle ne répond pas.


Moi (agacée) :Elle commence à fatiguer les gens. Elle ne parle plus, ne fait plus rien ; elle est devenue comme un robot, comme si ce n’était pas de sa faute si elle s’est fait tabasser.


Sean : Allons-y, essayons de frapper encore.


Lorsque nous arrivons devant la porte d’Alphie, nous trouvons Jessye en larmes. Elle pleure intensément.


Moi :Pourquoi pleures-tu ?


Jessye :Sean, casse la porte !


Moi : Que se passe-t-il ?


Jessye (en larmes) :Je… je… cassez la porte !


Moi (fermement) : Dépêche-toi de parler.


Elle me tend le téléphone.


Jessye :En fait, c’est lui, le type avec qui Alphie était.


Moi (laissant tomber le téléphone au sol) : Eh ! Sean, casse, casse cette porte tout de suite.


Il essaie sans succès ; c’est trop solide.


Moi : Le double des clés, Jessye, va demander à maman Tania.


Elle part dans la grande maison pendant que je m’assois à même le sol. Mes pieds ne tiennent plus, je tremble.


Elle revient avec maman Tania et Jacques. Quand la porte s’ouvre, c’est Jessye la première à entrer. Le cri aigu qu’elle pousse me coupe le souffle ; mon cerveau se déconnecte un instant et me donne l’impression de perdre la tête.


Je me lève et découvre ma petite sœur à même le sol, son sang sur les carreaux. À côté d’elle, un bout de papier avec inscrit : « Veillez sur ma princesse et dites-lui que je l’aime. »


Moi (criant) :Non ! Non ! Tu ne peux pas me faire ça.


Je commence à secouer Alphie. Sans que nous nous y attendions, Seraya apparaît de nulle part.


Seraya :Pourquoi maman a-t-elle du sang ? Maman ? Maman !


Maman Tania : Ma puce, que fais-tu ici ? Va jouer avec les autres.


Seraya (secouant la tête) :Je ne veux pas jouer, mamie. Je veux rester avec maman ; elle a peur.


Sean soulève Alphie tandis que papa Kouka arrive en panique lui aussi. Je prends mon téléphone pour écrire dans notre groupe. Une fois à l’hôpital, tout le monde est présent : Saveur, Kevin, Jessye, Ponguy, Jacques et sa copine, Anna, Yvie, Monique, papa Kouka, maman Tania et même tata Rachelle ; Julie est restée avec les enfants.


Nous n’avons pas encore informé maman, mais depuis quelques minutes, elle n’arrête pas d’appeler tout le monde. Elle ne m’a pas encore appelée, mais selon son frère, elle est dans tous ses états.


**Sonnerie de téléphone – maman.**


Moi (essayant de garder mon calme) :Allô maman !


Maman : Pourquoi le téléphone d’Alphie sonne dans le vide ? Où est-elle ? Je veux parler avec elle.


Moi :Tu connais ta fille ; elle est…


Maman (inquiète) :Non, je ne me sens pas bien, Bijou. Je sais que quelque chose ne va pas avec l’un de mes enfants. Je le sais. Pour être rassurée, je dois parler avec vous toutes. S’il te plaît, cherche ta sœur. Quand tu l’auras trouvée, demande-lui de m’appeler. Et s’il y a un problème, dis-le moi et je prendrai le premier avion pour Libreville. Je ne suis pas en paix.


Moi (le cœur serré) :Calme-toi, maman. Tout ira bien.


Maman : Bisous aux enfants et à mon beau-fils.


Moi :D’accord, maman. Je t’aime.


Maman : Je t’aime aussi, chérie.


Click…


Seigneur, s’il te plaît, elle doit se réveiller. Saveur est en larmes, elle n’arrête pas de prier et dit qu’Alphie l’a appelée plusieurs fois hier. Jessye vient d’être elle aussi hospitalisée ; sa tension est montée. J’essaie de rester aussi lucide que possible, tandis que Jacques est assis à même le sol, les mains sur la tête.


Le docteur : La famille de mademoiselle Lekoua ?


Papa Kouka et moi nous rapprochons de lui, tandis que maman Tania et tata Rachelle ont rejoint Saveur dans la prière.


Moi (le cœur battant) : Je suis sa sœur, et voici notre père.


Le docteur :Suivez-moi.


Docteur : (sérieux ) Votre petite sœur et fille est dans un état extrêmement critique. Elle s’est vidée de son sang pendant plus de quatre heures avant d’être trouvée. Nous avons réussi à arrêter l’hémorragie, mais elle a perdu une quantité de sang considérable. Nous avons commencé une transfusion sanguine, mais ses signes vitaux sont toujours très faibles.


Moi : (la voix brisée) Non… Je… Elle m’a appelée hier, plusieurs fois, mais je n’ai pas répondu ! Je pensais qu’elle faisait encore une bêtise… Je n’aurais jamais imaginé que ce serait si grave. 


Papa : (Secoué, les yeux humides) Comment ai-je pu ne pas voir ça ? Comment avons-nous pu la laisser arriver à un tel point ?


Docteur : Personne ne peut prévoir ce genre de chose monsieur… Le plus important maintenant est de rester concentré sur sa survie. Elle a besoin de tout le soutien possible. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour stabiliser son état, mais elle a subi un choc énorme. Il faut qu’elle se réveille… Elle est encore très fragile.


Moi: ( dévastée) S’il vous plaît, docteur, sauvez-la ! Je ne peux pas la perdre, pas comme ça… Je n’ai pas répondu à ses appels ! C’est de ma faute si elle est dans cet état… ( j’éclate en sanglots, incapable de contrôler la culpabilité qui vous submerge)


Papa : (L’air abattu) Nous devons la sauver… Peu importe ce qu’il faut faire. Je ne veux pas la perdre, ma sœur m’a confié son enfant, elle est sous ma responsabilité, ma responsabilité seigneur s’il-te-plaît ne laisse pas le diable de réjouir.


Docteur : (Regardant chacun d’entre nous ) Nous ne la laisserons pas tomber. Nous allons faire tout ce qui est en notre pouvoir. Mais il est crucial que vous soyez là pour elle lorsqu’elle se réveillera. Elle aura besoin de savoir qu’elle n’est pas seule, que vous l’aimez et que vous êtes là pour la soutenir… Mais vous devez aussi vous préparer. Elle n’est pas encore sortie d’affaire.


Moi : (Hochant la tête, déterminée malgré les larmes) Je serai là. Oh Alphie pourquoi sniffff ….


Papa (sincère) : Nous sommes tous là pour elle. 


Docteur : (Sérieux) Très bien. Pour l’instant, priez, espérez, et soyez prêts à l’accueillir lorsqu’elle se réveillera.


1 jour Avant …


**Alphie Lafee LEKOUA.**  

Je refais passer le film de notre rencontre dans ma tête, de comment il s’est montré attentionné envers moi, et comment il a réussi en un laps de temps à enlever la tristesse qui me tourmentait depuis des jours. Avec ses blagues, son côté protecteur et ses cadeaux, la façon dont il me regardait, qui me faisait me sentir importante, il est arrivé dans ma vie à un tournant décisif et m’a aidée.


Aujourd’hui, j’apprends qu’il est séropositif et qu’il s’amuse à distribuer cette maladie partout. En réalité, il n’avait rien à faire de moi. Je pensais l’avoir dans la main, pourtant c’était lui qui m’avait dans la main. Il s’est servi de moi. On s’est servi de moi une fois de plus. Une fois de plus j’ai cru que…  


J’essuie lourdement la larme qui tente de descendre à toute vitesse sur ma joue.  


Je compose le numéro de Nicky, j’ai besoin de parler à quelqu’un qui me comprend, qui sait que je ne suis pas qu’une pute, que parfois j’ai moi aussi des sentiments. Son téléphone sonne plusieurs fois, mais il ne prend pas l’appel. Puis à la troisième tentative, il décroche.  


Moi (en larmes) : Allô, Nicky ?  


… : Ce n’est pas Nicky, c’est sa copine. Y a-t-il un problème ?  


Moi (la voix rauque) : Non, s’il vous plaît, puis-je parler à Nicky ?  


… : Une minute, s’il te plaît.  

… Deux minutes plus tard…  


Nicky : Oui, petite.  


Moi (en larmes) : Nicky, je suis foutue… *sniffff*  


Nicky : Ne dis pas ce genre de choses. On avait convenu que ce ne serait rien de sérieux entre nous, et après ce qui s’est passé chez vous, tu sais que c’est impossible, carrément impossible d’envisager cela. Donc réfléchissons simplement à comment dire la vérité. Aujourd’hui, je suis en couple avec une femme bien, je n’ai pas envie de tout gâcher, s’il te plaît.  


Moi : Une femme bien ? Où est le rapport avec ce dont je parle, Nicky ?  


Nicky : Je ne dis pas que tu n’es pas une femme bien, juste que présentement, il se fait tard et je ne peux pas rester avec toi au téléphone. Bonne nuit, petite, et bonne chance.  


Click…  


Je regarde le téléphone et me rends compte qu’il a raccroché.  


J’essaie d’appeler Jessye, mais elle ne répond pas. Aria, Saveur, maman… Personne ne prend le téléphone. Elles sont sûrement en train de dormir, ou elles passent du bon temps dans les bras de leurs conjoints.  


Je n’arrive pas à fermer les yeux, mais les pensées finiront par me tuer si je ne dors pas.  


J’avale des cachets pour dormir, mais j’ai l’impression que ça n’a aucun effet aujourd’hui.  


Je revois le père de Seraya, la violence de ses coups, les injures de sa femme à mon endroit, ses injures également, la souffrance que j’ai dû endurer.  


Je revois ces hommes avec qui j’ai dû coucher pour payer le lait, les couches de mon enfant, du temps où je ne pouvais compter sur personne.  


Je revois Thibault me dire qu’il m’aime, qu’il n’a d’yeux que pour moi. Je revois sa copine me traiter comme une chienne, je le revois se marier.  


Je revois mon soi-disant calmant me séduire, faire ses crises de jalousie, me manipuler et…  


Je revois Nicky… Sa simplicité, son bon cœur. Je le revois me dire que je suis une grande dame. Je le revois me traiter comme une personne censée.


Et il a fallu que Nicky soit le meilleur ami de mon oncle… Cette nouvelle me brise.  


Je revois l’amour de ma famille et mon cœur se gonfle lui aussi d’amour. Ils m’aiment vraiment, je le sais, mais je ne cause que des problèmes, que des déceptions. Je suis vraiment le vilain petit canard, comme on me le dit si bien. Je suis une prostituée, celle qui ne sait pas rester les cuisses fermées, la reine des bêtises, la reine des mauvaises choses. Je suis ce qu’il y a de pire, et ce n’est pas la faute de quelqu’un, c’est la mienne, c’est moi qui ai toujours tout foutu en l’air.  


Seraya, ma fille, c’est à cause d’elle que je pleure, c’est à cause d’elle que je culpabilise.

  

Tant que je serai en vie, on dira de ma fille qu’elle a une mère volage, mais si je pars, mes sœurs prendront bien soin d’elle, j’en suis sûre. Je suis tellement triste et j’ai mal quand je pense que je suis une mauvaise mère pour elle, un mauvais exemple.  


J’ai déjà essayé de changer, j’ai essayé de me calmer, de me concentrer sur autre chose que les hommes et le sexe, mais je n’y suis jamais arrivée.  


Peut-être qu’il faut couper le problème à la racine.  


On m’a dit de prier, mais je n’y arrive pas. Je n’arrive pas à faire comme Saveur et prier. Ça m’ennuie et je ne sais même pas si quelqu’un m’écoute. J’en ai plus que marre.  


Je mets sur une feuille mes numéros de compte, je dépose également mes cartes. Ma fille ne manquera de rien.  


Oui, je suis lâche et égoïste, je suis tout ce que vous voulez, mais si je peux ressentir autre chose que ce vide au fond de moi, je veux bien essayer.  


Et si Dieu existe et que son fils c’est Jésus, je prie qu’ils m’acceptent dans leur paradis.  

Je n’ai jamais perdu de parents très proches, et je ne sais pas si je pourrais supporter une telle douleur, mais si je pars la première, je m’évite de vivre dans la tristesse et d’assister à des événements tristes comme la mort d’un proche.  


La seule chose que je peux dire, c’est pardon. Et dites à ma fille que je l’aime. Je veillerai toujours sur elle.


Je prends finalement le couteau et décide d’en finir, j’ai envie de ressentir de la douleur, une douleur physique, en espérant que cette douleur puisse apaiser celle de mon cœur, une douleur physique avant de partir définitivement.


Je commence par le bras gauche e, je vois un homme près de la porte me regarder avec tristesse , sans parler je comprends ce qu’il attend de moi , mais je ne peux plus faire marche arrière .


 

Je fais la même chose sur le deuxième bras mais une force retient mon bras et je rate la veine .


Mais la douleur que je ressens m’empêche de recommencer à nouveau , il est 3 h du matin .


Petit à petit la fatigue me gagne , mon corps me démange et j’ai envie de fermer les yeux .


Mais cet homme est là , là tout près de moi et me secoue à chaque instant.


Moi: Laisse moi partir.


L'homme : non Alphie.


Moi : Toi et moi savons que si je reste , je ne deviendrais pas un enfant de coeur , toi et moi savons que je suis une tête brûlée.


L'homme ( souriant): Je te connais Aphie , mais ce n'est pas ton heure , ce n'est pas ton moment , tu ne peux pas partir .


Moi: Tu veux vraiment que je revienne ? Je ne suis pas digne de confiance .


L'homme : Tu n'iras nulle part, pour revenir , tu dois d'abord partir quelques part or toi tu n'iras nul part.


Il reste avec moi jusqu'à ce que le jour se lève , j'entends les bruits de la porte et enfin il le laisse fermer les yeux.


**Ségolène MOUYIBA**


Retour au présent.


Nous sommes à l’hôpital, et je n’arrive toujours pas à comprendre la situation. Tu es riche, tu as tout ce qu’il faut, et c’est toi qui essaies de te suicider ? 


C’est incompréhensible quoi . 


Si c’était mon enfant, je... hum, j'allais la frapper une fois réveillée .


Regardez comme tout le monde pleure pour elle. C’est vraiment exaspérant.


Je vois qu’Anna est ici avec les sœurs de Jacques, ça m'énerve . 


Elles semblent tellement préoccupées par la situation de leur petite sœur et tiennent Anna informée de l’état d’Alphie, comme si c’était encore son rôle.


 Cela m’agace profondément. 


Je suis la petite amie de Jacques, et pourtant c’est elle qui est constamment en contact avec sa famille.


 Je suis là et pourtant, je l’ai accompagné parce qu'il était trop bouleversé pour conduire, je suis censé être au travail mais j'ai tout laissé , j'ai pris un taxi à 6 h du matin pour venir ici .


Mais personne ne se soucie de moi. Anna, s'il-te-plaît va chercher tonton Paul en bas , Anna s'il-te-plaît tu peux aller à la maison me prendre l'assurance d'Alphie dans sa chambre, Anna tu as mangé , Anna par ci et par là.


Elle, semble toujours avoir une place prépondérante, comme si elle n’était jamais vraiment partie.


Mieux je vais travailler. Je n'ai pas ma place ici.


Jacques( se rapprochant de moi) : Va au travail, je te tiendrai informée.


Moi (me levant) : D'accord, je t’appellerai plus tard.


Jacques : Merci, vraiment, merci beaucoup.


Moi (caressant son visage) : C’est normal, c’est mon rôle.


SAVEUR GABONAISE TOM...