Chapitre 34
Ecrit par Annabelle Sara
Si
c’était ça le paradis, alors il avait un goût de cendre, pensa Victoire en
émergeant doucement de ce qu’elle croyait être le repos éternel. C’est en
ouvrant les yeux et en apercevant où elle se trouvait qu’elle comprit qu’il ne
s’agissait pas du paradis, mais de l’enfer. Vue la douleur qui lançait chaque
membre de son corps, c’était surement l’enfer sur terre pour elle.
Elle
ne reconnut pas l’endroit dans lequel elle se trouvait, mais vu la hauteur du
plafond il s’agissait surement d’un hangar ou d’une usine abandonnée, et si
elle avait remarqué cela aussi rapidement c’est parce que chacun de ses membres
étaient attachés aux montant d’un lit flanqué dans un coin de cette immense salle,
si elle pouvait le décrire ainsi. Ses chevilles et se poignets lui faisaient un
mal atroce et elle ne savait pas trop ce qui lui arrivait. La dernière chose
dont elle se souvenait c’est d’avoir eut un accrochage avec sa voiture et
d’avoir fini dans le décor. Elle ne savait ni ne comprenait comment elle avait
atterri dans cet endroit lugubre. Au pire, elle devrait se trouver dans un
hôpital, pas ici pieds et poings liés !
Soudain
elle se souvint qu’après l’accident, dans un état de semi-inconscience, deux
individus l’avaient sortie de sa voiture et l’avait emmenée… Bon Dieu !
Ils
la séquestraient, elle était tout simplement et tout bonnement retenue
prisonnière ! Elle n’aurait jamais cru se retrouver dans une telle
situation dans sa vie, elle ne comprenait pas ! Que lui voulait-on pour la
retenir ainsi attachée ? Assurément de l’argent ! Mais qui paiera sa
rançon si elle est retenue ici… Stéphane !
Seigneur !
Elle
espérait vraiment qu’il allait bien, lui et Ly également… une fraction de
secondes la peur de ne pas revoir ceux qui comptait le plus dans son cœur
traversa son esprit, alors elle s’effondra en larme tout en priant le Seigneur
de lui venir en aide !
« Je t’en prie mon Dieu ne me laisses pas là… toute seule ! »,
murmura-t-elle en tirant vainement sur les cordes qui la retenait.
Brusquement
elle entendit une porte s’ouvrir puisse se refermer au loin, elle vit là une
opportunité, un signe divin, elle se mit donc à hurler en demandant de l’aide.
Sa foi de chrétienne avait prit de sacrée coup, mais depuis un certain temps
elle savait pertinemment qu’elle pouvait compter sur celui qui la guidait
depuis des années.
« Je vous en prie je suis là, aidez-moi ! », cria-t-elle encore
plus fort en entendant les pas se rapprocher.
« Tu peux hurler comme une chanteuse d’opéra si tu veux, personne ne
viendra à ton secours… même le président de la cour suprême ne peux pas t’aider
cette fois ! »
Cette
voix, même parmi des millions elle serait capable de la reconnaitre.
« Ange ? », souffla-t-elle en espérant se tromper.
« La seule et l’unique ! »
Oh
non ! Non, elle n’avait pas fait ça !
« Ange… que… que se passe-t-il pourquoi suis-je attachée à ce lit ? »,
demanda-t-elle tandis qu’elle pouvait voir sa sœur se pencher au dessus d’elle
avec un sourire sarcastique sur les lèvres.
« Alors le beau joyau de 237, tu commences à perdre de ton éclat ?
Remarque ce serait très dommage si cela arrivait ! Qui te contemplerait
encore ? »
La
haine qui se lisait dans la voix de la sœur cadette de Victoire faisait froid
dans le dos.
« Pourquoi… est-ce que tu me retiens ici ? »
La
question était posée, Victoire avait vraiment besoin d’une réponse, car elle ne
comprenait pas pourquoi sa sœur en était arrivé là !
Sans
daigné lui répondre, elle défit un à un les liens qui la maintenaient collées à
ce lit, puis la prit par les cheveux sans aucun ménagement. Apparemment, elle
voulait lui faire ressentir toute la douleur et la frustration que l’on ressent
lorsqu’on a plus le contrôle sur sa vie. Elle la força ensuite à s’asseoir sur
une chaise soudée au sol, et lui attacha les mains dans le dos avec une corde
aussi grosse qu’une liane et un double nœud très serré.
Une
fois le mannequin installé, Ange la fixa droit dans les yeux ! Victoire ne
reconnut pas la jeune femme avec laquelle elle avait grandi. Pas seulement à
cause de sa nouvelle coupe de cheveux, mais parce que c’était juste une
criminelle qui était prête à tout pour arriver à ses fins.
Le
coup qu’elle reçu dans le ventre la fit hurler tout en lui donnant envie de
vomir… mais rien ne sortit de son ventre, autre que de l’air à travers une
grosse quinte de toux qui lui coupa le souffle, le deuxième coup qu’elle reçue
la plia en deux. Entre ses mains attachées dans le dos et la douleur des coups
de poings que lui avait assénée sa sœur, Victoire avait quelque peu du mal à
respirer.
« Voilà ! Comme cela nous sommes quitte… »
« Pourquoi ? », murmura Victoire d’une voix inaudible.
« Les coups… ou le kidnapping ? », se renseigna Angèle usant
ainsi de sa position de force pour narguer sa sœur ainée.
« Tout… Tout Ange ! Pourquoi tu me fais tout ce que tu me fais ? »
« Oh ! commençons par la plus récent, le Kidnapping ! Je ne sais
pas vraiment pour avoir la réponse à cette question tu devras la poser
directement à papa ! »
Seigneur !
Elle n’en attendait pas moins, son père était mêlé à cette affaire, il devait
d’ailleurs en être l’instigateur.
« Et le reste ? »
Ange
sourit et fixa sa sœur droit dans les yeux.
« Je suppose que tu parle de ta
fille ? »
Victoire
regardait sa sœur et elle ne la reconnaissait pas ! Elle se demandait si
cette facette de sa sœur avant toujours été là et elle a refusé de le voir.
« J’avais besoin d’un background pour
ouvrir les portes qu’il fallait ! Et de naissance nous n’avions ni le
nom ni les moyens pour être accepté dans ce monde… Alors il me fallait un bon…
Mougou ! »
« David ! »
« Oui… Mais sa mère ! C’était un
fils à maman donc pour l’avoir je devais bien positionner mes cartes… Mais il
y’a un mais, la seule chose qui aurait cloué ce salopard avec moi était la
seule chose que je ne peux pas avoir ! »
L’information
fit son chemin dans la tête de Victoire.
« Tu es sté… »
« Stérile ! Oui ma pauvre !
Alors c’était un but sort ! »
C’était
donc prémédité ! Sa sœur et son père avait profité de sa grossesse pour
prétexter celui de sa sœur, pousser David à l’épouser et lui enlever sa fille.
« Tu as simulé une grossesse…
Ange ! », s’étouffa Vicky que l’envie de vomir menaçait.
« J’ai arrimé ma grossesse à la tienne,
j’utilisais tout ce que tu me racontais sur ton état pour que mon jeu soit
parfait… Tout ! »
Victoire
n’en revenait pas, elle avait les larmes aux yeux.
« Papa, je peux comprendre mais toi Ange qu’ai-je fais pour mériter ça de
ta part ? »
« Tu ne devrais pas essayer de comprendre comment nous fonctionnons dans
la famille parce que tu n’en fais pas partie… tu n’en as jamais fais
partie ! Tu as passé tellement de temps à raconter la vie de maman, que tu
as oublié que tu l’as abandonné ! Abandonné au bras de son bourreau, à
cause de ton absence, elle a sombré… »
La
voix d’Angèle transmit la douleur qu’elle ressentait à l’ainée qui comprit
qu’elle s’était sentie abandonnée, d’abord par elle et ensuite par leur mère.
Mais Victoire ne s’était jamais doutée du mal-être de sa sœur.
« Ma petite sœur… Maman était
malade ! Et si je suis partie pour me battre s’était pour ma mère et ma
sœur… »
« Tu n’es pas ma sœur ! Tu ne me connais pas ! »,
coupa-t-elle en tirant une table face à sa sœur.
« Je comprends que tu te sois sentie abandonnée, mais je ne t’ai pas
oublié… j’ai toujours été là lorsque tu avais besoin de moi ! », lui
rappela-t-elle les larmes aux yeux. « Toujours ! »
« Et alors, tu veux quoi en échange, un merci ? Tu te crois où dans
un roman à l’eau de rose ? La chèvre va te lécher… Nous sommes dans la
vraie vie ma pauvre et seuls les battants réussissent à survivre dans la jungle
de la vie ! Tu peux jouer les proies, moi je suis une
chasseuse ! »
« Je ne comprends pas ! »
« Quoi, il faut en plus que je te fasse un dessin ? », s’écria Angèle
en perdant patience.
La
lueur dans les yeux de sa sœur lui rappela ceux de son père le soir où il est
venu chez elle il y’a quelque temps…
« Stéphane ! »,
soupira-t-elle
« Voilà ! », s’exclama Angèle en déposant un plateau avec un
sandwich devant sa sœur. « Je dois avouer que son nom dans ta bouche a une
sacrée intonation… tu es fichtrement amoureuse de lui ma pauvre ! »
« Qu’est-ce que vous lui voulez au juste ? », demanda Victoire
le cœur serré.
« Nous… rien en fait ! Mais celui qui nous paie en a gros sur le cœur
et je crois qu’il se fera un plaisir de se farcir cet imbécile arrogant que tu
as choisi comme père pour ta fille. La pauvre petite ! »
Le
ton et l’expression d’Ange lui donnait des envies de meurtre.
« Dis-moi une chose Vicky, qu’est-ce qui t’a attirée ainsi chez ce
type ? »
« Tu disais que tu l’aimais ! »
« C’était un jeu ma belle du début jusqu’à la fin j’ai joué… mais il a
fallu que tu viennes t’interposer ! Et tu as fini par me rendre le travail
impossible Vicky ! »
« Quand je pense que nous avons le même sang dans nos veines ! »
« Quoi tu as honte de ta sœur ? »
« Non… ça ne serait pas assez… j’ai pitié de toi ! Tu es tout ce que
j’exècre… un petit toutou, un chienchien à son maitre qui exécute chacun de ses
désirs ! Tu n’as jamais été capable de réfléchir par toi-même, on a
toujours tout fait à ta place et maintenant tu n’es rien d’autre que la
marionnette de papa, mais le pire c’est que tu dois obéir aux ordres d’un type
que tu n’as surement jamais vu et qui va vous entuber toi et ton père ! Moi
qui croyais qu’avec les années tu avais appris ta leçon… »
Le
visage de sa sœur virait au cramoisie au fur et à mesure qu’elle l’a
déstabilisait, elle savait donc qu’elle tenait le bon bout, il suffisait
qu’elle l’a trouble assez pour la faire partir au quart de tour.
« Tu n’as donc pas encore compris que papa fait les plans les plus foireux
qui existent ? Il n’a jamais réussi les trucs les plus simples de la vie,
alors pour ce qui est d’élaborer un plan avec une issue de secours si ça tourne
mal… tu n’as qu’a regarder autour de toi… cette histoire va vous retomber
dessus et je t’assures que rien n’y personne ne donnera chère pour
vous ! »
« Tu vas te taire oui ! », la prévint sa sœur qui commençait
visiblement à perdre patience.
« Si je ne te dis pas la vérité qui le fera chérie ? En fait je crois
que tu es idiote au point où tu n’arrives toujours pas à comprendre que si tu
es si bas aujourd’hui, ce n’est que parce que ton sacrée saint de père s’est
toujours interposé entre toi et le succès ! Résumons un peu ta vie,
pourquoi tu n’as pas poursuivi tes études ; pourquoi est-ce que David a
hésité à t’épouser ; pourquoi est-ce que tu es recherchée dans tout
Yaoundé ? Papa ! C’est là la cause de toutes tes misères mais tu es
incapable de t’en rendre compte parce que tu es trop stupide… »
« La ferme ! », hurla Angèle en giflant sa sœur attachée de
toutes ses forces.
Malgré
la douleur, cet accès de rage de la cadette provoqua l’hilarité de sa sœur.
« Ça suffit Ange ! »
Le
père mettait ainsi un terme à un échange que chacune des sœurs avaient rêvées
d’avoir toutes les deux.
« Oh ! Le père Esso’o… tu en es arrivé enfin à m’enlever, c’est
magique ! », railla Victoire en regardant son père s’avancer vers
elle.
« Je t’avais dit de te tenir loin de ce type ! Tu vois bien que tu comptes
pour moi chérie ! Ma fille ainée, la prunelle de mes yeux… »
Elle
éclata de rire en l’entendant dire cela, elle rit tellement que son père décida
tout seulement de lui scotcher la bouche.
« C’est tout ce que tu avais à faire ! », dit-il à Angèle.
« N’oublis pas qu’ils la veulent en un morceau pas en pièces détachées,
alors tiens toi loin d’elle ! Et toi Victoire, tu as pris plaisir à dire
au monde que tu n’avais pas de père alors ne t’étonnes pas si je ne te traite
pas vraiment comme ma fille ! Tiens toi bien et je ne me ferais pas un
plaisir d’esquinter le joyau de la nation, j’espère être assez
clair ! »
Sa
fille lui répondit en le toisant.
« On ne l’emmène pas maintenant ? », s’inquiéta la petite sœur.
« Non, ils vont nous contacter ! Ne t’inquiète pas tout va bien se
passer ! »
C’est
aussi ce qu’espérait Victoire qui se débattait en silence avec les nœuds qui la
retenait, elle priait en silence pour que ce cauchemar s’achève et qu’elle
puisse revoir ceux qui l’aimaient.
Ça
faisait à peut près une heure que les membres des entreprises Edang discutaient
afin de trouver comment ils allaient agir pour faire face à la menace qui pour
le moment était bien camouflée. Tous les directeurs généraux étaient réunis
dans la demeure de Samuel Edang, ils avaient répondu à une invitation à diner
de travail du P-DG du holding.
Ils
se mirent donc à faire le diagnostique de vie de chacune des entreprises, les
unes après les autres. Déterminer les forces et les faiblesses de chacune
d’entre elle, et surtout où ils étaient le plus vulnérable. Cet exercice leur
prit trois bonnes heures et ceux juste pour un début. Par ailleurs une fois que
la réunion était achevé, Etienne, ses neveux et Pierre se rassemblèrent dans le
bureau de son frère qui certes était mort aux yeux de la loi mais qui ils le
savaient tous aujourd’hui se planquait quelque part loin de ses détracteurs.
« Que pensez-vous de toute cette situation ? », leur
demanda-t-il les nerfs à vif.
Ils
prirent tous le temps de réfléchir, car ils savaient que la précipitation et
les conclusions faciles ne les aideraient pas vraiment.
« Nous devons trouver un moyen de renforcer les défenses informatique de
l’entreprise, ils vont peut-être lancer une OPA sur nous. », annonça
Ronald. « Nous devons centraliser les données à la centrale de Douala afin
de faire bloque… »
En
entendant les paroles de son frère Stéphane eut un déclic. Ils se posaient tous
depuis le début les mauvaises questions, au lieu de qui et de pourquoi, ils
auraient dû se demander quand et comment ?
« Je crois que j’ai une idée de ce qui va se passer ! »,
murmura-t-il en quittant son siège pour se planter devant le tableau qui
trainait dans la pièce. « Vous vous souvenez de la loi qui a été votée il
y’a deux ans… la loi sur les entreprises… »
« La loi sur les entreprises de grande catégorie ! », dit Pierre.
« C’est ça ! Elle stipule bien que pour assurer la sécurité des
emplois dans les industries à fort taux d’emplois il fallait de l’Etat puisse
posséder un certains nombre de part pour assurer la sécurité des emplois ! »
« Oui, nous nous souvenons de cette loi ! D’ailleurs nous l’avions
approuvé et supporté parce que cela permettait de garantir
l’emploi ! », affirma Etienne ne voyant pas trop où voulait en
venir son neveu.
« Oui nous étions d’accord sur la forme, mais dans le fond nous savons
très bien que l’Etat en lui-même ne peut pas réussir à approvisionner les
grosses entreprises qui ont des problèmes de la sorte ! Donc elle a
légalement le droit d’accordé cette mission à une institution financière
parapublique voir privée si cela est nécessaire. »
« Selon
les cahiers de charges. », compléta Pierre.
Le
raisonnement de Stéphane commençait à faire son chemin dans les esprits et cela
se traduisait sur les visages qui changeaient un à un de couleur.
« Voyons voir les entreprises de catégories sont les mines et
l’exploitation forestière, l’industrie agro-alimentaire, le tourisme, et
l’innovation technologique ! »
Stéphane
parlait en illustrant ses propos sur le tableau par des ronds.
« Notre empire est essentiellement constitué de ces différents secteurs,
la quotte part revient à l’agro-alimentaire dont tu es à la tête tonton, avec
quarante-cinq pourcent du capital familiale, ensuite le bois qui pèse trente
pourcent, la centrale qui parce qu’elle pompe beaucoup pèse quinze pourcent, et
la chaine hôtelière de Cassie qui ramène dix pourcent… »
Les
chiffres que donnait Stéphane avaient une telle résonnance dans les esprits
qu’à un moment ils voulurent tous l’arrêter de peur d’entendre ce qui allait
suivre.
« Imaginons un peu que nous soyons dans la noise et que l’Etat ne puisse
pas elle-même reprendre les actions de nos différentes entreprises pour sauver
les emplois, elle devra choisir parmi des pourvoyeurs de fonds ! Ils feront
en sorte que le Holding soit financé à hauteur de 40% qui seront répartis à la
hauteur du secteur, soit 12% sur l’agriculture, 20% sur le bois, 8% sur la
centrale et 5% sur la chaine… nous deviendrons minoritaires sur notre propre
patrimoine… »
« Bon Dieu ! », s’exclama Etienne Edang en ce levant de la
chaise de son frère. « Il y’aura un étranger assit à notre
table ! »
L’analyse
de Stéphane avait laissé tout le monde stoïque, ils n’en revenaient pas, le
plan que venait d’énoncer l’homme d’affaire était brillant, malin, ingénieux et
diablement légal, tous priaient pour que ce ne soit pas celui de leur
adversaire, car ils n’avaient pas de vrai chance de s’en sortir si c’était le
cas.
« Qu’est-ce que tu proposes ? », demanda Pierre encore sous le
choc.
« Il
faut que nous revoyions notre système de sécurité avant que tout ne bascule, il
faut renforcer les barrières et faire bloque plus que jamais ! »,
déclara Ronald en vidant son verre de scotch.
Stéphane
n’était pas tout à fait d’accord avec cette idée.
« Si nous faisons cela nous allons droit à la catastrophe… je t’explique
ce grand cercle c’est la Centrale, là tout son système de transmission et de
réception des données des entreprises dont elle entretien la gestion, elle est
donc reliée à chacune de nos entreprises et ainsi elle les protège des attaques
et des fuites. Mais ce que nous avons oublié c’est qu’elle est notre talon
d’Achille car elle freine certaines informations, à cause de son besoin
d’énergie et si elle se fait prendre ou infiltrer alors tout va en
sucette ! »
« Tu veux dire que nous devrions décentraliser ? »
« Oui, exactement, comme papa et moi nous le voulions il y’a quelques
années afin d’éviter l’effet domino, si jamais on pirate le système comme l’on
surement fait Angèle et son
père ! »
Ronald
acquiesça à l’idée de son frère et se lança tout de suite dans la mise en
exécution en appelant le directe IT qui était sur le qui-vive.
« Quand est-ce que les contrôleurs passent ? »
La
question fatidique, quand !
« Dans trois jours les contrôleurs et les inspecteurs feront leur décente
annuelle dans les entreprises afin de récolter les données et ensuite ils
donneront leur rapport avec les catégories de chaque entreprise au bout d’une
semaine, et la semaine suivante nous sauront qui s’assiéra à notre table en
notre compagnie dorénavant ! », répondit Stéphane avec un sourire en
coin.
« Qui peut bien vouloir nous prendre tout ce que nous possédons de la
sorte ? »
« Moi je sais qui cela peut-être ! », annonça une voie raide, chantante
mais obligeamment raide.
Pulchérie
venait de rentrer de voyage et elle semblait encore plus préoccupée qu’à son
départ. Elle avait découvert l’identité de celui qui menaçait sa famille en
discutant avec sa sœur. Bien de mal lui a pris, car elles ne parlaient pas vraiment
toutes les deux, elles s’engueulaient mais pour une fois cela avait été
bénéfique pour Pulchérie.
« Il s’agit du descendant du plus vieil ennemi de cette famille ! Les
Melingui… »
Ils
eurent à peine le temps d’accueillir leur mère qui semblait épuisée, qui tout
de même voulait savoir où en était son fils ainé, qu’une voiture de police
banalisée garait dans l’allée et qu’on leur annonçait l’inspecteur Olivia Ntone et son collègue l’inspecteur Moudji. Ils souhaitaient rencontrer Stéphane le
plus vite possible, Cassie eut juste le temps d’accompagner sa mère dans sa
chambre tandis que les hommes restèrent dans le salon principal afin de
recevoir leurs invités surprise.
En
entrant dans la grande pièce au décor semi baroque aux couleurs rouge, noir et
blanc, la jeune femme ne sembla pas du tout impressionnée contrairement à son
coéquipier, on aurait dit qu’elle était habituée à ce genre de décor luxueux.
La seule chose que Stéphane pouvait lire dans son expression, c’était le doute,
elle avait le sentiment que quelque chose ne tournait pas rond et il savait
qu’elle ferait tout pour découvrir ce qui se passait dans sa famille.
« Inspecteur Ntone… nous sommes ravis de vous revoir ! »,
commença Ronald en lui serrant la main avec courtoisie.
« Le plaisir est le mien Mr Edang… Mr Medou… »
« Inspecteur… je vous présente mon oncle Etienne Edang… et voici
notre conseiller juridique … »
« Pierre ! », acheva l’inspecteur en faisant un signe de la tête en
direction de l’avocat.
« Bonjour Olivia ! », répondit ce dernier.
Tout
le monde prit place et l’on proposa aux nouveaux arrivants un verre, offre
qu’ils déclinèrent à l’unisson.
« Etant donné que votre avocat est présent aujourd’hui je crois que vous
pouvez répondre à quelques questions Mr Medou ? »
« Stéphane n’a rien à cacher Olivia, ni lui ni aucun membre de cette
famille alors tu peux poser toutes les questions qui te semblent
utiles ! »
« D’accord ! Nous savons déjà que Victoire Esso était votre compagne
vous avez d’ailleurs été désigné comme le tuteur légale de sa fille était-ce
donc une relation sérieuse ? », commença-t-elle.
« Oui ! »
La
réponse de Stéphane était simple et tout à fait crédible.
« Je sais que la majorité des hommes d’affaires de cette ville ont un
garde du corps… si vous teniez tant à Victoire pourquoi ne pas lui avoir assuré
une sécurité renforcée surtout sachant tout ce qui s’est passé dernièrement
dans vos vies ? »
« Elle n’en a pas voulu… », intervint Etienne. « Pulchérie la
mère de Stéphane et moi le lui avons proposé, elle a accepté de faire garder Cathy
Ly mais a refusé d’être tout le temps suivit par un garde. »
« De toute façon nous n’avons pas l’habitude dans notre famille de vivre
sous cloche ! », renchérit Ronald.
« C’est le moins qu’on puisse dire ! »
« Pardon ? Inspecteur nous acceptons de répondre à vos questions mais
nous refusons de subir des insultes de votre part ! », s’impatienta Stéphane.
Pierre
lui fit signe de se calmer.
« Pardon Mr Medou nous n’avons aucunement l’intention de vous manqué de
respect ! », dit le policier en lançant réprobateur à la jeune femme
qui se tut et garda néanmoins un regard critique sur les membres de la famille.
« Nous avons le droit de penser que l’accident de votre compagne a été provoqué ! »
Stéphane
et Ronald échangèrent un regard furtif qui disait prudence.
« Nous aimerions donc pouvoir entrer en possession du corps afin de
procédé à des analyses plus poussées ! »
« Qu’est-ce qui vous a fait croire que ce n’était pas un simple
accident ? », s’enquit Ronald calmement, ne laissant rien
transparaitre.
« Une nouvelle analyse du lieu de l’accident… »
« Donc le dossier a été réouvert ? »
La
question de Pierre sembla déstabiliser une seconde l’inspecteur, il se tourna
vers sa coéquipière qui ne pipa mot. Stéphane comprit tout de suite ce qu’il
devait faire.
« Inspecteur
que voulez vous réellement savoir ? »
La
question qu’il lui posa en la regardant droit dans les yeux la surprit, mais
quelque chose chez cette femme lui donnait envie de lui faire confiance. Il
n’avait aucune intention de laisser les gens qui lui voulaient du mal
l’atteindre et dans son for intérieur il savait que Olivia Ntone pouvait leur
venir en aide.
« Où es votre compagne Mr Medou ? »
La
froideur qui se lisait il y’a une minute dans les yeux de la jeune inspectrice
laissa place à un autre sentiment beaucoup plus convivial, d’un regard à
l’endroit de son oncle et de son frère, Stéphane se décida et lui
répondit :
« Je n’en ai aucune idée inspecteur ! »
« Est-ce son cadavre que vous avez identifié ? », demanda
l’autre inspecteur en un souffle.
« Non ! »
Sa
réponse provoqua une réaction de soulagement chez les policiers, comme s’ils le
savaient mais ne pouvaient le prouver.
« J’ai une théorie, arrêtez moi si je me trompe. Victoire Esso’o est votre
compagne depuis quelques mois, vous vivez tous les deux sous le même toit, elle
découvre que sa nièce est en réalité sa fille et décide de récupérer l’enfant,
sa sœur prend la fuite et à peu près deux semaines plus tard elle fait un
accident mortelle, sauf que le corps qui se trouve dans la voiture n’est pas
celui de Victoire mais celui de quelqu’un d’autre. Pour finir vous recevez une
lettre anonyme qui vous demande une somme d’argent en retour si vous voulez
retrouver celle que vous aimé ! »
« Tout est juste sauf la fin, nous n’avons rien reçu du tout, nous savons
que ce n’est pas Victoire mais nous ne savons ni où elle est ni qui a orchestré
tout cela ! », affirma Stéphane
« Vous ne savez peut-être pas où ils la détiennent mais vous avez tout de
même une idée de celui ou ceux derrière cette histoire ! »
La
déclaration de la jeune femme amusa un peu Stéphane, elle était perspicace,
c’était une bonne chose qu’elle soit au courant tout compte fait.
« Vous vous appelez Olivia Ntone ? Ne seriez vous pas la fille
d’Elisabeth Ntone ? » demanda Etienne.
Elle
acquiesça d’un simple geste de la tête.
« Alors vous connaissez les usages de la classe à laquelle nous
appartenons ! »
Elle
les fixa un moment avant de sourire.
« Un duel de clan ! Vous avez l’intention d’aller en guerre messieurs
parce que je détesterais venir dans cette belle demeure compter des cadavres,
pour le moment il y’en un je préfèrerais que ce soit le
dernier ! »
Le
ton qu’elle utilisait ne plut pas à tous.
« Mr Medou je suis certain que vous n’êtes pas un vulgaire brigand et que
vous comprenez que ma démarche n’a pour but que de vous venir en aide, en tout
cas du mieux que je le peux ! »
« Je sais mais je ne peux rien vous dire parce que je n’ai aucune réponse
à vos question, et quels sont mes devoirs et encore mieux mes droits… Ronald
vous remettra le corps de cette innocente personne au plus vite et moi je me
ferais un plaisir de vous rendre une petite visite dès que j’aurais un semblant
de réponse à vous donner. »
Cela
annonçait le terme de cet entretien, les Edang voyaient désormais en ces deux
représentants des forces de l’ordre des alliés potentiels. Ils prirent congé et
furent raccompagnés par Pierre et Ronald.
« Ils acceptent de ne pas vous poursuivre pour obstruction Ron et toi,
tout en poursuivant leur enquête sur l’accident qui sera maintenant traité
comme un homicide volontaire, ils ne feront pas mention d’un enlèvement pour le
moment parce qu’ils n’ont pas assez d’élément ! », expliqua Pierre
lorsqu’ils revinrent dans le salon.
« Je me suis porté garant pour leur donner les infos nécessaires, ajouta
Ron. Tu as finalement eu raison de lui faire confiance à cette fille, Steph ! »
« Espérons seulement que tout se passe bien pour Victoire
maintenant ! »
C’était
la prière de tout le monde.