Chapitre 4 : Mon Ange

Ecrit par Prunsy

******Mère de Chancy******


Je ne cessais de me repasser le film de la scène atroce à laquelle j’avais assisté. Mes larmes n’arrêtaient pas de couler. Comment a-t-il pu faire une chose aussi atroce ? Depuis combien de temps le subissait-elle ? Si moi déjà, je n’arrive pas à me sortir cette image de la tête, comment mon petit bébé vivait avec ? 


Depuis environ deux ans, déjà, des retours me venaient à propos de Chancy. Elle qui était toujours taquine et espiègle, qu'on trouvait plutôt sociable comme enfant a changé du tout au tout. Il fallait la supplier pour qu'elle sorte s'amuser avec les autres enfants, lui tirer les vers du nez pour savoir ce qu'elle pensait. Alors que dès qu'elle a commencé à parler, ma fille était une petite pipelette. Je pensais que ce n'était qu'à la maison, mais ses enseignants aussi m'ont fait ce retour, et sont allés jusqu'à me raconter des histoires à propos de son agressivité grandissante. Je ne comprenais pas d'où cela pouvait bien provenir. J’en parlais avec Guy, qui ne montrait pas plus d’intérêt que ça. Il prétextait que c’était normal, que c’est une enfant qu’elle se cherche… Ses paroles ne me rassurait pas tant que ça, mais je ne laissais rien paraître. 


J’en ai parlé à ma meilleure amie, qui est d’ailleurs la marraine de Chancy. Elle m’a rassurée lorsqu’elle m’a confirmé avoir remarqué la même chose. C’est pourquoi j’avais décidé d’envoyer Chancy chez elle un petit moment afin qu’elle puisse se faire une opinion en étant avec elle H24. Quelle ne fut pas ma surprise lorsqu’elle me décrivit une Chancy telle qu’on la connaissait avant. On s’est conforté en se disant qu’au final ce n’était qu’une mauvaise passe. 


Au retour de Chancy à la maison, elle retomba aussitôt dans son mutisme. Je me suis sentie mal en me disant que peut-être quelque chose avait changé à la maison et que je ne l’avais pas remarqué. C’est là que je me suis posée et que j’ai essayé de tout ressasser. La seule chose qui avait changé, c’était le fait que ce soit maintenant son père qui allait la chercher à l’école. À part ça, rien d’autre… Je ne comprenais pas. Maintenant, c'est plus clair, après la scène à laquelle j'ai dû assister. 


Ce jour-là, j’avais décidé de prendre mon après-midi parce que je ne me sentais pas très bien. Je savais que Guy passerait prendre Chancy à l’école. J’ai donc décidé de faire un tour par l’ancienne Sobraga pour prendre du poulet braisé, je comptais faire des beignets et réchauffer les feuilles de manioc qui sont au congélateur, c’est ce que ma petite puce préfère. 


Après avoir fini mes courses, je me garai dans la cour de la maison. Tout me semblait normal, jusqu’au moment où j’entrai dans la maison et crus entendre des cris. Sur le coup, je n’ai pas tiqué. J’avançai donc avec suspicion dans la maison. Je posai mes affaires sur le premier canapé que je trouvai. En m’approchant du couloir, le cri strident de ma fille m’appelant me fit revenir à la réalité. 


Je courus vers sa chambre loin d’imaginer le scénario qui m’y attendait. Ce vieux porc était en plein sur mon bébé et prenait son pied. Comme on a l’habitude de dire, “mon sang n’a fait qu’un tour dans ma tête” et je me suis ruée sur lui. J’ai tout tenté, le pousser, le tirer, crier, donner des coups à mains nues, mais en vain, il était comme dans un autre monde. Quand Chancy a dit « AU SECOURS!!!! J’AI MAL!!!» j’ai eu une idée. 


Je suis partie en vitesse vers la cuisine, prendre un couteau assez tranchant. Une fois le couteau en main, j’ai foncé vers la chambre de tous les malheurs et sans plus de réflexions, je lui ai enfoncé le couteau de toutes mes forces dans sa jambe. Il a fait un grand bond loin de ma fille et je me suis précipitée vers elle. Mon bébé avait une cravate sur les yeux, elle avait la main sur sa vessie, n’arrêtait pas de pleurer et elle s’affaiblissait à vue d’œil. 


À cette vision, je me suis sentie comme la mère la plus bête, naïve et inconsciente qui existe au monde. Lorsque j’ai posé ma main sur sa joue, elle a eu une réaction. Elle a ouvert les yeux, a émis un petit sourire avant de pousser un : « … Maman… » Et de perdre connaissance. Je l’ai aussitôt mise dans la voiture pour l’emmener à l’hôpital, en chemin, j’ai appelé Clémentine. 


Elle m’y a rejoint et à peine, je l’ai vu que je n’ai plus pu me retenir. J’ai éclaté dans un grand sanglot, lui criant ma souffrance, je lui ai tout raconté d’une traite, il fallait que je me libère. Ma fille, était à l’heure qu’il est, inconsciente à cause d’un… Oh mon Dieu, Seigneur, épargne-la. 


Quelque temps après notre arrivée l'hôpital, des agents de police ont fait leur entrée et se sont directement dirigés vers Clémentine et moi. Cette dernière m'a expliqué qu'elle a joué de ses relations pour qu'ils se déplacent afin que je porte plainte. C'est donc sous ses encouragements que j'ai relaté les faits auxquels j'ai assisté. Je m'en suis débarrassé le plus vite possible et ai laissé Clem' gérer le reste. À l'heure actuelle, tout ce qui m'importe c'est la santé physique et mentale de ma fille. 


******Chancy******

Bip... Bip... Bip... Bip...


Mes yeux pesaient... Je peinais à les ouvrir. Quelqu'un serrait ma main droite très fort, cette personne tremblait et sanglotait. J'eu soudainement peur d'ouvrir mes yeux, mais il fallait bien que je le fasse. 


Puis je l’ai vu... Agenouillée, les yeux fermés me tenant fermement la main. Je vais peut-être paraître malade, mais à cette vision si triste... Moi, j'ai eu un sourire. Non pas un sourire mal saint, non loin de là, mais un sourire de reconnaissance et de gratitude. Je me sentais en sécurité auprès d'elle. 


Certes, elle pleurait, mais je la trouvais toujours aussi belle, si je pouvais, je lui aurais dessiné des ailes et une auréole. Je croyais ne plus jamais revoir son visage, son sourire, et ne plus jamais l'entendre me dire à quel point elle m'aimait. J'eus juste envie de crier : « Maman... » Que hélas, je murmurai au même instant. 


Elle leva les yeux vers moi, et là mon cœur se brisa. Elle avait les yeux rouges, le visage enflé et le regard désolé. Je n'aime pas ça (Qui aime voir sa mère pleurer même en temps normal?! Donc imaginez à 5 ans), ne pouvant me retenir, j'éclatai aussi en sanglots en criant : « JE SUIS DÉSOLÉE MAMAN ! PARDONNE-MOI, JE NE VAIS PLUS RECOMMENCER ». Elle me prit immédiatement dans ses bras, me serrant très fort contre sa poitrine, essayant de me rassurer du mieux qu'elle pouvait, mais sans résultat immédiat. 


J'avais cette culpabilité qui me rongeait, je ne voulais pas regarder ma mère dans les yeux. Je ne savais pas vraiment ce qui m'était arrivé exactement, mais je ne me sentais vraiment plus à l'aise dans mon corps. 

Chancy ou les aléas...