Chapitre 5

Ecrit par Verdo

Je faisais les allers-retours entre Tabligbo et Lomé. Quand bien même que nous n’étions pas financièrement stable, je faisais tout mon possible pour que Sena et ma fille ne manquent de rien. Souvent, je me rendais dans les marchés des villages environnants de Tabligbo à mes heures libres et achetais de la nourriture car cela coûtait moins cher par rapport à Lomé. Je ramenais tout à Lomé les week-ends où je rentrais. 

J’assistais souvent Sena dans les tâches ménagères à chaque fois que je rentrais. Par exemple, je faisais la vaisselle, la lessive, la cuisine et tout le reste lorsqu' elle était fatiguée. Je ne voudrais pas qu'elle se sente délaissée. Quelquefois, nous sortions ensemble pour qu’elle se déstresse. Nous étions très heureux. 

Lors d’une discussion, elle m’annonça qu’elle aimerait reprendre le chemin du seigneur ; ce qu’elle faisait avant mais qu’elle avait laissé en suspens lorsqu’elle m’avait rencontré. Elle voulut aussi reprendre les études pour décrocher le master. Tout cela était faisable et je n’y trouvais aucune objection. J’étais partant pour l’église. Quant aux études, je lui demandai d’attendre un peu, le temps que notre fille grandisse et aussi que je sois financièrement stable. Elle approuva. 


Quelques mois plus tard, je fus officiellement nommé permanent de Scantogo Heidelberg Materials. Ma situation financière a radicalement changé. 


J’allai voir mon bienfaiteur monsieur Gervais et le remerciai de m’avoir intégré dans le circuit. Durant notre discussion, je lui demandai conseil entre acheter une voiture et construire une maison, lequel des deux était prioritaire. Il me clarifia qu’avoir un toit ou dormir était la première des choses à faire quand on commence par travailler. 

Une fois à la maison, j’eus la même conversation avec Sena. Elle, cependant, me conseilla d'acheter une voiture avec le prêt que j’allais recevoir de la banque ; que prochainement, je pourrais concocter un autre prêt pour la construction. Pour pousser loin ma curiosité, j’allai me ressourcer auprès de mes parents. Tous deux aussi me conseillèrent de construire une maison. Je devins donc favorable à la construction. 


J’avais un salaire qui avoisinait deux millions de francs CFA, ce qui me permit de demander un prêt de vingt millions auprès de la banque. Mon gestionnaire de compte me conseilla d'aller jusqu'à cinquante millions mais je n'étais pas encore prêt pour ce genre d'emprunt.

Ce jour-là, j’étais avec Sena. Après que nous fûmes sortis de la banque, elle me proposa de passer directement à CFAO Motors pour acheter une voiture qu’elle adorait tant.



Nous rentrons à la maison chérie. Nous aurons le temps de discuter à tête reposée. Comme ça, nous saurons quoi faire avec cet argent. Tu sais, c’est très important pour moi.


Comment ça ? Je ne comprends pas. Nous avions déjà discuté et convenu que nous allions acheter la voiture. 


Arrête ça s’il te plaît. Je n’ai jamais donné mon accord. J’avais dit que nous allions en reparler. 


Mais c’est pratiquement la même chose. 


Non. Ce n’est pas la même chose. Ce n’est pas ce que j’ai dit. Écoute, je me suis renseigné sur la voiture dont tu m’avais parlée. Ça coûte pratiquement seize millions de francs CFA. Nous venons de faire un emprunt de vingt millions. Combien nous restera-t-il finalement ? quatre millions ? Nous avons aussi un enfant à élever. Pourquoi veux-tu coûte que coûte que nous achetions cette voiture-là ? 


Je rêve ou bien tu me fais la morale ? Ce n’est pas comme si la banque va prélever tout ton salaire à la fin du mois. Ça ne coûte rien d’acheter cette voiture. Il y aura du temps pour nos autres besoins. J’ai beaucoup souffert avec toi. Il faut que tu redores mon image. 


Mais je ne suis pas d’accord Sena. Nous n’allons pas acheter cette voiture. On rentre à la maison.


Une fois à la maison, Sena insista avec force pour que nous reparlions de la voiture.



Pourquoi ne veux-tu pas me faire plaisir et m’honorer auprès de ma famille vu que ta situation est maintenant acceptable ? Ça te coûte quoi de payer cette voiture ? 


C’est le premier emprunt que je viens de faire. Nous sommes en location et il y a pour le moment beaucoup de choses que nous devons faire. Payer ce genre de bolide retardera nos objectifs. Il faut d’abord que nous ayons un toit où dormir avant de penser à une voiture. Je ne voudrais plus que ta famille me traite de tous les noms.


C’est justement pour ça que je veux que tu achètes cette voiture.


Bon, écoute, je pourrais faire une exception. Comme tu insistes, nous pourrions aller au port autonome de Lomé et trouver pour le moment une voiture d’occasion avec peut être quatre millions. Je veux construire Sena. Je ne pourrais pas mieux faire pour toi.


Si tu ne peux pas acheter cette voiture, ce n’est plus la peine pour le reste. Fais comme bon te semble. De toutes les façons, c’est ton argent.


Je…


S’il te plaît, je ne veux plus rien entendre. 


C’était la première fois que Sena se comportait de la sorte. Je ne pouvais jamais imaginer qu’elle pouvait être aussi incompréhensive. Cela faisait des années que nous vivions ensemble et jamais elle n’avait sorti ces genres de comportements. Elle ne me parlait plus et même si cela arrivait, c’était par rapport à notre fille Trinidad. Elle refusait également de me cuisiner et tout le reste. Son comportement ne pouvait guère me faire changer d’avis puisque je savais d’où je venais. Ma famille n’était pas riche et je ne pouvais pas me comporter pareillement. 


J’avais quitté Sena pour Tabligbo. Un de mes collègues m’avait proposé une parcelle de terrain à Sanguera à un prix abordable. Il en était le propriétaire mais dû à certains problèmes, il était obligé de la vendre. J’étais son meilleur choix puisque nous appartenons à la même société. J’acceptai son offre puis achetai le terrain. Dans le même mois, je commençai les travaux de construction.

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J’escortai Sébastien à l’aéroport international GNASSINGBE Eyadema. Cela faisait deux semaines que son visa pour l’Italie était sorti et qu’il préparait le voyage. J’étais très content pour lui. Akpedzé fondit en larmes lorsque son mari s’éloignait de lui. Elle ne pouvait pas se retenir. Je la comprenais parfaitement. Même si ce n’était pas un adieu, se séparer de quelqu’un qu’on aime, avec qui on vit sous le même toit doit être très douloureux. 



Je pris toutes les dispositions pour que ma maison, trois chambres salon plus une cuisine, quatre pièces, un garage et une boutique soit prête en deux mois. Tout fut presque fait y inclus un forage. Malheureusement, mon budget était à terme et je n’avais plus les moyens de payer les portails et la porte des quatre pièces. Je n’avais pas aussi fait de peinture. Néanmoins, je me suis débrouillé pour confectionner deux portails en tôle ondulé pour l’arrière et l’avant de la maison pour que nous puissions y aménager le temps que je termine complètement le chantier. J’en avais littéralement marre de payer le loyer. 


Je n’irai pas dans cette broussaille. Je ne vivrai pas là. Était ce que m’avait répondu Sena lorsque je lui en avais parlé.


J’en avais marre d’elle et de ses comportements enfantins. Alors, je lui donnai un ultimatum. Soit elle restait en location et elle payait elle-même le loyer par ses propres moyens ou elle emménageait dans notre nouvelle maison avant que je ne revienne de Tabligbo. Je lui laissai les clés et la quittai. En rentrant à Tabligbo, je fis escale chez sa grande sœur et lui expliquai les faits. Elle me rassura qu’elle allait discuter avec elle pour apaiser la situation. Selon elle, tout irait bien ; de ne donc pas m’inquiéter. 



Quelques jours plus tard…


Je reçus un appel téléphonique de Sena où elle me présenta des excuses. Elle me confia qu’elle allait déménager avant mon retour dans la nouvelle maison comme je la lui avais intimée l'ordre. Pour moi, ces changements de comportements ne venaient pas d’elle, plutôt de sa grande sœur. 



Tout allait bien comme sur des roulettes. J’avais fait des sacrifices pour achever notre maison pour que cela ait l’air d’un vrai building. Personne ne pouvait passer dans les parages sans y faire un commentaire positif. Vu que Sena n’effectuait pour le moment aucun travail, j’aménageai la boutique pour qu’elle puisse commercialiser les produits d’alimentation générale. Monsieur Gervais m’épaula sur ce coup en nous aidant avec cinq millions de francs CFA qu’il avait remis à main propre à Sena. 

Nous installâmes la boutique et les activités y marchaient à merveille. Quelquefois même lorsque j’étais dans des impasses de fric, c’était avec l’argent des ventes que Sena m’aidait et même payait les factures. Une parfaite harmonie fût à nouveau installée entre nous deux comme lors de notre première rencontre. Nous voyagions un peu partout à mes temps libres pour découvrir les merveilles du monde.

Nous prévoyions qu’elle reprenne également les cours, vu que notre fille avait grandi. 


Yawavi était avec sa mère lorsque j’arrivai à son domicile. Elles me souhaitèrent la bienvenue puis me firent asseoir. Après les salutations, sa maman prit la parole.


Thierry, il y a quelque chose qui me tracasse et j’aimerais discuter avec toi devant Yawavi.


De quoi s’agit-il belle-mère ? Je suis à l’écoute. 


C’est par rapport à Sena. Tu sais, dans notre famille, tout le monde a fréquenté et tout le monde travaille sauf Sena. Tu nous avais promis qu’elle allait reprendre les cours en année de master mais depuis là nous ne voyons aucune action. Plutôt tu lui as ouvert une boutique pour qu’elle fasse du commerce. Sena n’a pas fait tout ce parcours pour devenir une femme de maison ou commerçante. Ça, je ne l’accepterai pas. 


J’ai beaucoup de respect pour vous belle-mère ainsi que vous belle-sœur. Mais je ne pense pas que je dois vous donner une réponse par rapport à cette question. C’est un sujet qui ne concerne que Sena et moi. D’ailleurs, nous sommes en train d'y réfléchir. C’est tout ce que je peux dire.


Tu fais fausse route Thierry. Intervint Yawavi. Ce sujet nous concerne tant que vous deux. Dis-nous clairement les projets que tu as envers ma sœur. C’est très important pour nous d’autant plus que c’est elle-même qui m’a confiée qu’elle ne se sentait pas épanouie en restant dans la boutique tous les jours. 


Je ne suis pas au courant de ça.


Eh bien nous si. Dit sa mère. 



Ecoutez, même si Sena vous a dit ça, c’est à elle et moi d’en discuter. Pas avec vous. Je n’ai aucun compte à vous rendre. 



Ah bon ? Fit Yawavi. Tu n’as aucun compte à nous rendre Thierry ? Après toutes les actions que j’ai menées pour te soutenir ? Si tu es là où tu es aujourd’hui, c’est grâce à moi et à mes actions. Nu été moi, tu ne trouveras pas ce travail à Scantogo.


Mais de quoi parles-tu ? Dis-je en écarquillant les yeux.



Demande à Gervais, il te le dira. 


Je dois vous laisser. Dis-je en me levant et en les quittant sans même les calculer. 


Une fois chez moi à la maison.


Je ne savais pas que tu n’étais pas épanouie dans ce commerce provisoire au point d’aller en parler à tes parents sans même m’en parler. Dis-je ironiquement.


Je ne te suis pas là. C’est quoi le souci ? Me répondis-Sena. 


Arrête de faire l’innocente. Ta sœur et ta mère viennent de me sermonner sur le fait que tu sois toujours à la maison. Il parait que tu leur as confié que tu n'étais pas épanouie en restant provisoirement dans la boutique.


Écoute, ce n’est pas exactement ce que leur ai dit. C’était lors d’une discussion et moi je m’amusais. Je ne savais pas qu’elles allaient le prendre au sérieux. 


Tu es pathétique Sena. Arrête de mentir. Je te connais. Si tu n'as pas été sincère, elles ne m’auraient pas proféré des balivernes. Ce sujet n’était pas à discuter avec ta mère et ta sœur. D’ailleurs, pourquoi ta famille veut toujours fouiner dans nos affaires ? Je t’ai épousée, pas eux tous. 


Elle veut juste mon bonheur. C’est tout. Rien de plus. 


Je rêve ou tu veux me dire que tu n’es pas heureuse ? Que veux-tu finalement ? Que je me tue pour toi ? Parce que là j’essaie de tout faire mais tu n’es jamais satisfaite! 


Je me levai et voulus la quitter lorsqu’elle dit :


Je suis enceinte. C’est parce que je suis à nouveau enceinte…


Cela ne justifie en rien tes actes.


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Monsieur Gervais sortit un de ses vins préférés que nous sirotons sous la paillote de sa maison. Il était très contrarié après que je lui avais répété ce que Yawavi m’avait dit. 



Même si c’était le cas, elle n’avait pas le droit de se servir de ça contre toi ou de te le claquer en pleine figure. C’est ridicule ce qu’elle a fait et je m' en excuse. M’avoua-t-il.


Hum…


C’est vrai qu’elle était passée me voir pour me parler de toi et de la relation que tu entretenais avec sa petite sœur. Elle était très inquiète à cause de ta situation financière. Ce qui la dérangeait, c’était le regard que les alentours allaient porter sur sa famille. Tu étais un gars bien qui ne ménageait aucun effort pour accomplir toutes les tâches que je te donnais. Depuis que je te connaissais, je t’observais. Je lui ai alors proposé de changer ta situation financière pour que tu profites du bonheur auprès de sa sœur. Ce n’était pas un truc que je pouvais te dire comme ça. Je ne comprends pas pourquoi elle en est arrivée là. Nous nous étions mis d’accord pour que vous deux ne soyez pas au courant. Tu sais, dans cette vie, on passe toujours par quelqu’un pour devenir quelque chose. Un exemple, elle-même qui se déchaine sur toi, c’est moi qui l’avais proposé au directeur général de l’époque de la nommer chef service de son département. Je suis vraiment désolé fiston. J’aurais mieux fait de te mettre au courant.




À suivre…


Écrit par Koffi Olivier HONSOU. 


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