Chapitre 6

Ecrit par Olys_ Soul


Une fois dans la rue ce matin là, tout me paraissait exacerber : les odeurs, la nourriture. L’akasan était d’un jaune plus clair, l’odeur du chocolat que j’humais dans la rue en était presque enivrante. Ayant une heure devant moi pour arriver au cabinet qui était à 15 minutes de la 1ere ruelle Nazon en taxi je voulais prendre le temps de m’imprégner de cette émanation. Je marchais avec tant d’assurance. La station de taxi ; du moins ce qui en faisait office se trouvait à quelques mètres de chez moi j’étais donc tranquille. 

Le feuillage verdoyant des arbres, leur hauteur, l’histoire dont ils étaient imprégnait,  il faut savoir que pratiquement chaque quartier de cette ville à au moins un arbre témoin. C’est cet arbre sur lequel nos grands-parents nous racontaient des histoires une fois la nuit tombée. C’était pour la plupart des histoires quelque peu folkloriques mais elles étaient souvent racontées sur le ton de quelques événements d’un passé lointain.

Une fois mon grand père, un homme si doux avec un talent rare pour conter les histoires nous avaient dépeints  à ma sœur et moi ainsi qu’à mes cousins, une de ces histoires sur un mapou du quartier. Evidemment cet arbre se trouvait dans la cour d’une voisine sur qui il circulait toute sorte d’histoire. C’était lors d’une de ces soirées de vendredi où l’on buvait du gruau d’avoine et à tour de rôle racontait des blagues de « bouqui et malice », lançait des devinettes etc. Selon lui « un soir de novembre alors qu’il était très tard un petit garçon a suivi madan misère, une très vielle dame du quartier qui habitait dans la cour trente-un. Si seulement le ti-garçon avait su. La veille dame marcha, marcha encore et encore et le petit garçon n’arrêtait pas de le suivre jusqu’au moment où brusquement elle s’arrêta devant le mapou » 

Dans ces moments là nous étions tous suspendu à ses lèvres.

Il continuait l’histoire « Elle ne perdit pas de temps et commença à baragouiner des incantations  et au bout d’une minute le tronc du mapou s’ouvrit  pour la laisser entrer. Le petit garçon s’enfuit à toute vitesse pour aller raconter ce qu’il avait vu mais une fois à la maison…  »

Dès que l’on s’approchait de la fin de l’histoire il se mettait toujours à chuchoter.

« Plus aucun son ne sortait de sa bouche »

_ Quoi ? 

_ C’est tout grand père ?

_ Mais comment tu peux savoir si le petit garçon ne pouvais plus parler

Après certains de ses contes il pouvait nous arriver de le bombarder de questions auxquelles il répondait à chaque fois.

_ On ne questionne pas les grandes personnes.

Ce que mon insouciance me rendait heureuse à cette époque.


_ Belle madame vous y allez.

La voix d’un chauffeur de taxi en moto m’arracha à mes vieux souvenirs. J’étais arrivé à la station. Un vrai casse-tête pour en trouver un qui soit en bon état.

Je fis non de la tête. Je n’étais pas très pressée et franchement il me fallait préserver la fraicheur de mon look, ce qui aurait  été impossible en taxi moto.


_ Ou prale bèl madam. Me demanda un autre chauffeur de taxi perché à la fenêtre de sa voiture.


J’étais assez tiraillée lorsqu’on m’appelait ainsi. D’abord tu te dis que cela fait veille « madame » puis que madame est élégant et quelque peu prestigieux, tu ne manques pas de t’attarder sur l’adjectif qui accompagne le titre et tu choisis de retenir cela. Parce que qu’importe  « on te trouve belle ». C’est ce que tu choisis de retenir car cela te fais du bien. C’est fou ce que qu’un si petit mot peut provoquer chez une femme et cela qu’importe qui le prononce.

Je fis le trajet avec lui jusqu’au numéro  8 de la rue Désirée sur Turgeau.

Lorsque j’arrivai j’eu le souffle coupé. Sur la façade était inscrit le nom du cabinet et dans le hall d’entrée se trouvait, en demi-cercle un grand comptoir en marbre avec une réceptionniste, une jeune femme d’environ vingt-cinq ans, elle paraissait plus petite que moi, le teint matte, des yeux noirs. Lorsqu’elle me vit avancer vers elle, j’ai eu droit à un large sourire en guise de bienvenue.

_ Bonjour 

_ Bonjour Mme. Que puis-je faire pour vous aider ?

_ Je suis Mlle Millot et  j’ai rendez-vous aujourd’hui à 10hr. 

_ Attendez un instant. Je vérifie dans l’agenda.

Elle regarda une minute l’écran de son ordinateur.

_ En effet vous êtes sur la liste. Assoyez-vous un moment, je vais la prévenir de votre présence. 

_ Merci.

Elle prit le téléphone prévenu de ma présence et m’indiqua où je devais aller.

J’ai suivi ses indications et me retrouvai vis-à-vis d’une porte en vitre avec «  DIRECTION DES RESSOURCES HUMAINES » gravé dessus en gris irisé. 

J’ouvris la porte et saluai la secrétaire en lui signifiant que j’étais attendu. Elle m’annonça à son tour puis m’indiqua où je devais me rendre.

Une fois devant la porte je pris une grande respiration et frappai à la porte. Je devais rencontrer la directrice, Mme Fouchard.

Elle était assise  et me scrutait  derrière son bureau.

_ Mlle. Millot

_ Bonjour Mme. la directrice

_ Comment allez- vous ?

_ Bien merci.

Nous fîmes connaissance. Elle n’arrêtait pas de me poser une foule de question sur moi. Ce qui m’avais poussé à faire mon droit, avec qui je vivais, quels étaient mes projet etc. J’avais déjà répondu à toutes ces questions et ne comprenais pas trop pourquoi je devais y répondre de nouveau mais le fis quand même avec le plus grand calme. Je n’avais d’autre choix. Elle continua ainsi pendant au moins une bonne trentaine de minutes avant de finalement entrer dans le vif du sujet.

_ Nous n’offrons de chance qu’aux meilleurs vous savez ? Il faudra beaucoup de sérieux. Vous commencerai le lundi  la semaine prochaine et aurai une période d’essaie de trois mois en comptant à partir de cette date. 

_ Bien sûr madame la directrice. Vous n’aurez pas à vous plaindre de mon engagement. 

_ Je nous le souhaite. Bien… dans ce cas bienvenue chez Tanis et Ass. Tina, ma secrétaire se chargera des derniers détails.

Au terme de notre entretien, j’eu à remplir une tonne de paperasse. Mais en sortant de là j’étais soulagée et assez contente de moi. Un bon salaire, un bureau digne de ma personne, je jubilais au fond de moi. L’entrevue c’était très bien passé. J’avais encore une semaine devant moi pour compléter ma garde-robe. Il était encore tôt  lorsque je suis sortie du cabinet. Je n’allais pas gaspiller trente autres gourdes pour rentrer. Je résolu de faire le chemin jusqu’à la maison à pieds.

J’avais mes écouteurs, des ballerines aux pieds que j’avais mis dans mon sac comme à chaque fois que je portais des talons et que je n’étais pas un moyen de transport à ma disposition, je n’avais plus qu’à mettre un pied devant l’autre. Quinze minutes plus tard, alors que je m’apprêtais à traverser la rue je sentis une main sur mon épaule et lorsque je me retournai je fis un bond dans le passé.


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