Chapitre 8

Ecrit par Annabelle Sara


  

Véronique

 

Nous étions à table  ce soir, Ma’a Josiane nous avait préparé du poisson braisé à la poêle. Les enfants semblaient contents de nous avoir Paul et moi pour manger. Ils nous racontaient avec beaucoup d’enthousiasme leur dernière journée de classe de la semaine.

J’écoutais avec une oreille ! J’avais beaucoup trop de chose qui me passaient dans la tête.

Je ne savais que penser du fait que mon Mari me trompait. J’aurais aimé lui en parlé mais si j’ouvrais cette boite de pandore je n’ai aucune idée de ce qui en sortirait. En même temps je suis très mal placée pour lancer la première pierre.

Et pour tout dire ce qui m’inquiétait ce n’était pas le fait que Paul couchait avec une autre femme, mais c’était le fait de ne pas savoir qui est cette femme. De savoir si elle va respecter ou pas son couloir.

Si elle a autre chose en tête ou pas !

Moi je sais comment protéger ma famille de ma double vie, mais Paul c’est autre chose. Il a l’habitude de faire les choses sans vraiment mesurer les conséquences de ses actes.

Celui ou celle qui m’a fait parvenir ces photos a un plan en tête et quelque chose me dit que la femme sur la photo avec Paul y est pour quelque chose.

Mais pourquoi on ferait de moi une cible, ou de Paul un pion ?

Nous en avions discuté avec Miriam, ce n’est pas possible que ce soit la femme d’un de mes anciens partenaires. Je ne vois pas une femme quitter, le Gabon, le Togo, L’Afrique du sud ou même la France pour venir nuire une ex-maitresse de son mari, sauf si elle est franchement folle.

Et puis si une femme monte un plan comme celui-là juste pour se venger d’un mari jaloux…

Je ne sais pas qui est derrière ce que j’ai vu, mais je dois rester sur mes gardes.

-         Véro ?, m’appela Paul avec insistance.

-         Hein ?

Je ne l’avais pas entendu lorsqu’il m’avait appelé alors il avait dû crier.

-         Tu n’es pas avec nous ?, demanda-t-il.

-         Non… Si… tu disais ?

-         Mon neveu Raoul, j’ai oublié de te le dire la semaine dernière… il a une compétition dans la ville la semaine prochaine ! Et il m’a demandé s’il pouvait venir vivre ici ! Il vient demain…

Le bouton d’alerte se déclencha directement dans ma tête. Raoul le fils de la sœur de Paul ?

Le fils de Carine ? Hors de question !

-         Pardon ? Venir où ?, ai-je demandé.

-         Chérie je viens de te le dire… Il m’a demandé s’il peut venir ici cette semaine !

-         Pour faire quoi ?

Mon ton annonçait la tension donc tout le monde s’est redressé sur sa chaise. Même mes enfants se sont ajustés.

-         Véronique, je viens de te dire qu’il a une compétition à Yaoundé…

-         Et alors ? Son équipe n’a pas prévu où le loger ?, ai-je demandé en fronçant les sourcils.

-         Chérie s’il te plait !

-         Non… Je pose juste la question !

-         C’est de mon neveu qu’on parle là…

-         Oui le même neveu qui a fait une semaine en cellule pour vole, ce même neveu pour lequel j’ai dû faire marcher mes contacts pour lui faire éviter la prison et qui au sortir de cela m’a insulté en publique avec l’aide de sa mère... Hors de question !

Les yeux de mon mari étaient noirs. Il savait qu’il ne pouvait pas réagir devant les enfants, je venais de lui rendre la monnaie de sa pièce mais je savais que ça ne s’arrêterait pas là.

Alors je ne fus pas surprise lorsqu’il vint régler ses comptes une fois que nous étions dans la chambre.

-         Véronique tu peux m’expliquer ce qui te prend ? Je te dis que mon neveu a demandé à venir ici le temps d’une semaine et toi tu réagis comme si je t’avais demandé de lui faire un chèque ?

-         Je n’ai aucun problème à lui faire un chèque tu sais cela… Mais il est hors de question qu’il pose ses pieds chez moi !

-         C’est aussi chez moi Madame !, me dit-il.

-         Oui c’est aussi chez toi mais tu n’as pas à prendre des décisions de ce genre et de me les imposer… Et on parle de l’enfant qui m’a traité de sorcière un jour en publique !

Il leva les mains au ciel.

-         Véro tu ne peux pas oublier quelque chose ?, me demanda-t-il. C’était un enfant, inconscient de ce qu’il faisait !

Je m’en fichais.

-         Ah oui ? Et ta sœur qui l’encourageait était inconsciente ?

-         Arrêtes de ressasser les vielles histoires ! Tu ne sais pas pardonner ?

-         Je pardonne mais je n’oublie pas ! Aucun membre de ma famille ne t’a jamais fait ou dit ce que ta sœur a eu le toupet de me faire…

-         Ma sœur t’a demandé pardon combien de fois ? Elle a essayé de te rencontrer combien de fois pour percer l’abcès ? Tu n’as jamais voulu… Jamais !

-         Oui pour qu’elle vienne jouer le cinéma devant mes yeux ?

Ce que je disais de sa sœur l’énerva encore plus.

-         Véronique tu exagères !, déclara-t-il.

-         Je n’exagère pas ! Tu veux m’imposer ta famille sachant que ces gens ne m’aiment pas, lui ai-je rappelé.

Il prit un moment de réflexion avant de revenir à une discussion que je croyais terminée.

-         Toi tu ne m’as pas imposé un chauffeur pour mes enfants ?, demanda-t-il.

-         Si je t’avais dis de laisser ses enfants se responsabiliser en prenant le taxi tu aurais refusé…, ai-je avancé. Je ne veux pas de ce garçon ici !

-         Il vient demain !

-         Ah d’accord, donc tu me l’imposes ?

Paul me lançait un défi, il ne m’avait jamais tenu tête, donc maintenant en plus de me tromper, il avait le courage de me tenir tête et de se défendre !

-         Je ne t’impose rien ! Je t’annonce juste que mon neveu sera des nôtres pour une semaine, si tu n’es pas contente ce n’est pas grave, tu prendras sur toi et tu passeras à autre chose !

-         Fais comme tu veux ! C’est toi qui commande Monsieur le Directeur !, ai-je lancé en me levant pour me diriger vers la salle de bain.

J’ai claqué bruyamment la porte derrière moi. Une fois devant le miroir j’ai souri, il se passe quelque chose ici. Paul me tient tête ?

J’avais envie de rire, mais je me suis retenue. Il faut que je découvre qui est cette femme le plus tôt possible. Elle donnait à mon mari quelque chose qui le transformait et je dois savoir ce que c’est.

Où c’est juste le sentiment de se sentir homme parce qu’il a une maitresse et que sa femme carnassière n’est pas au courant qui lui donne du pouvoir ?

Je me suis rapidement apprêtée pour la nuit. Je ne suis pas vexée par ce nouveau comportement de Paul, je suis une femme de défi, je vais le laisser s’imaginer que le fusil a été retourné avant de lui montrer qui commande ici !

Je suis retournée dans la chambre, il leva les yeux sur moi pendant que j’attrapais un oreiller et un drap pour les déposer sur le canapé de notre chambre.

-         Tu fais quoi ?

-         Je me couche !, ai-je répondu.

Il fallait que je joue le rôle de la femme énervée jusqu’au bout ! En réalité j’avais besoin de tranquillité pour réfléchir sur comment je devais découvrir avec qui mon Mari couchait.

-         Véronique…

-         Paul s’il te plait j’ai besoin de repos donc si tu pouvais juste me laisser tranquille !

-         Ok…

Quelle meilleure façon de le pousser à la faute que de le délaisser ? Les hommes ne savent pas gérer certaines émotions, si je le délaisse assez longtemps il ira se réfugier sous les jupes de sa maitresse et il sera imprudent en le faisant je pourrais donc découvrir plus facilement qui est cette femme.

 Le lendemain j’avais une tonne de chose à faire donc je n’avais pas du tout le temps à perdre dans les humeurs des gens qui m’entouraient. Je voyais bien que Paul se sentait ennuyé par ma décision de dormir sur le canapé, surtout parce qu’il détestait lorsque je l’ignorais.

Mais il allait devoir faire avec, me tenir tête entrainait systématiquement des représailles de ma part et il le savait pertinemment. Mais je savais aussi qu’il ne pouvait pas dire à son neveu qu’il ne pouvait pas l’accueillir durant cette semaine. Encore moins à cause de moi. Il est vrai que c’est gens ne m’aime pas beaucoup mais ils ont tendance à faire chanter mon mari et me voient donc comme une menace pour obtenir ce qu’ils veulent de lui.

A cause du genre de vie que je mène, je ne peux pas avoir une vie sociale classique, les rendez-vous entre femmes ou même les réunions je ne pouvais pas en faire partie.

Mais  j’avais mon petit groupe très proche vers  qui je pouvais me tourner. Alors je suis allée le voir. Ce n’est pas un ancien partenaire, mais c’est celui à qui je donnerais les codes de mes comptes bancaires les yeux fermés.

-         Bonjour Rodrigue, ai-je lancé en entrent dans le salon de coiffure de mon plus viel ami.

Oui il est coiffeur, oui vous allez me dire que les coiffeurs sont des commères, mais non pas mon Rodrigue, cet homme est ce que j’appelle ma boussole. Nous nous connaissons depuis des années et il me servait de caméra de surveillance, il connaissait tellement de personne qui connaissent du monde, tellement de gens lui devaient des faveurs, mais la seule personne à qui il était redevable c’était moi.

Je suis une amie, un mentor et surtout la seule personne vers qui il pouvait réellement se tourner si les choses deviennent difficiles pour lui.

-         Véro !

On se fit la bise. Son salon était toujours plein à craquer d’homme et femme qui voulaient en plus de se faire un coupe avoir des informations précieuses. Parfois en observant bien ses clients on pouvait croiser des policiers en civiles qui venait le voir pour un renseignement.

-         Waouh, ma belle… Ton rendez-vous privée était pour aujourd’hui ?, me demanda-t-il en faisant semblant de consulter son agenda.

-         Oui… Je t’ai envoyé un code bleu hier !

Son regard s’illumina en m’entendant parler de code bleu.

Il m’attrapa par le bras et me dirigea vers le salon privée où il recevait des clients VIP.

-         Assieds toi ma belle !, fit-il en me montrant le siège tournant.

-         Tu as vu les photos ?, ai-je demandé.

-         Oui… Ma belle… c’est bizarre hein ! Tu as demandé à ton mari ?

J’ai levé la tête vers lui pour qu’il devine la réponse à sa question.

-         Tu ne lui as pas demandé !

-         Non… Je l’observe un peu… je veux le prendre en flagrant délit !, ai-je répondu.

Il éclata de rire.

-         Confiance Mama, il n’y a rien de mieux que de le prendre en flagrant délit…

-         Tu as une idée de qui peut être la fille ?

Il soupira en vaporisant mes cheveux avant de commencer à les masser.

-         Je n’ai pas d’idée… Mais je connais où la photo a été prise, répondit-il. C’est sur la route de Mfou !

-         Ah bon ?

-         Oui tu sais il y’a un motel ou auberge comme les francophones disent… C’est très luxueux… qu’on vient d’ouvrir…

-         Oui je vois !

Je savais de quelle auberge parlait mon ami.

-         Je n’aurais jamais imaginé que ton mari te trompe ! Tu dis que tu ne sais pas qui t’a envoyé les photos ?

-         Non… la personne a déposé dans la boite à suggestion de mon restaurant, Personne ne l’a vu !

-         Je suppose que tu n’as pas de caméra de surveillance là-bas !, me fit-il en me montrant le bouton lumineux dans un coin du plafond plâtré de son salon.

-         Chez moi les clients on besoin d’intimité et de discrétion, ils courraient en vitesse s’ils trouvaient des caméras dans mon restaurant, lui ai-je répondu en riant.

-         C’est aussi vrai !

Rodrigue lui avait besoin de ces gadgets pour une certaines assurance vie. Si quelqu’un sait que ce qu’il a dit ou fait a été enregistré il ne s’attaquera pas vite à lui.

-         Tu connais quelqu’un qui peut le suivre cette semaine ?, ai-je demandé.

-         Oui… Quelqu’un de discret !

-         Très discret !, ai-je précisé en lui tendant une enveloppe.

Chez Rodrigue on ne paie pas juste la coiffure et l’info, mais aussi les services extra qui dépendent du résultat qu’on attend à la fin.

-         Tu veux qu’on le suive juste ?

-         S’il y’a une sorte de suite alors tu me préviens pour que je profite du spectacle le moment venu !

Il fit Ok en hochant la tête. Après avoir ajusté ma coiffure, j’ai quitté l’artiste capillaire pour retourner au restaurant.

D’ailleurs au restaurant j’avais remarqué des choses et des comportements bizarres et je n’aimais pas lorsque le personnel faisait des messes basses. La mutinerie est vite arrivée alors je devais garder l’œil et les oreilles ouverts.

A la fermeture tard le soir je suis d’abord allée honorer mon troisième rendez-vous avec Oluwa. Il n’y avait personne mieux que lui qui m’aidait à détendre mes nerfs et en ce moment j’avais vraiment besoin d’une double dose d’antistress.

Je suis entrée chez moi à plus de deux heures cette nuit, en traversant le couloir, j’ai vu la lumière dans la chambre d’ami. Raoul était arrivé, mais qu’est-ce qu’il faisait éveillé à cette heure de la nuit. Surtout pour un sportif ?

Je n’appréciais pas ce garçon pas juste à cause de son éducation qui laissait à désirer mais aussi et surtout parce que ce que je savais de lui allait au-delà d’une simple insulte ou du manque de respect.

Mais pour le moment j’allais laisser Paul se fourvoyer, le moment d’exposer sa sœur et son fils n’était pas encore arrivé.

En entrant dans notre chambre j’ai trouvé mon Mari éveillé, il était énervé.

-         Véronique c’est maintenant que tu rentres ? Donc tu as décidé de ne même pas rentrer pour accueillir mon neveu ? Ton neveu ?

-         Bonsoir !, ai-je répondu mettant de l’huile dans le feu.

-         Véronique ton comportement commence franchement à me taper sur les nerfs…

-         Raison de plus pour ne pas me faire une scène à cette heure de la nuit ! Dors bien !

Je me suis dirigée vers la salle de bain laissant mon mari hébété dans notre lit conjugale.

 
Et si demain mourrai...