Chapitre IV

Ecrit par imalado

------Anaïs Oyoko------

Ma petite fleur vient de sortir. Je sais à quel point elle est forte, voir plus que moi. Mais depuis hier, je crains de la briser en lui racontant exactement ce qui s’est passé. Son père, Athan Akué est un monstre. Et je pense qu’il est temps qu’elle sache la vérité, ce n’est plus une enfant.

Je n’ai jamais cru en l’amour je vous l’ai dit, mais je respecte et je vois à quel point l’amour fait du bien par moment. Naya y avait cru, voilà pourquoi toute sa vie n’a été qu’un combat. Elle était pourtant si belle et si jeune… Au retour de Belinda, je devrais lui dire la vérité. 22 ans c’est bien long pour soulever des poussières mais il le fallait.

Je prends le temps d’arranger la maison et de retrouver les documents que Naya avait soigneusement pris de rassembler pour que le jour venu, Bel comprenne ses choix. Et qu’elle vive avec sans que cela ne déteint sur sa vie. Je prie que tout se passe bien…

------Athan Akué------

Il s’est passé 22 longues années depuis que je suis à la tête de Green Goal. Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis, et je vis bien ma vie. Aujourd’hui j’ai 53 ans. Marié et père de deux enfants, deux garçons Josué et Amir. Seulement Amir n’est pas mon fils biologique. Vous allez comprendre. Josué est issu de mon premier mariage, celui avec Kayanda, que j’ai ensuite divorcé à cause de ses stupides crises de jalousie. Quand à Amir, c’est le fils de mon actuelle épouse Adilé qui malheureusement, ne m’a pas donné d’enfant. Mais je préfère ainsi. Elle est plutôt docile et accepte tous mes excès « hors mariage ». Ça me suffit. De toutes les façons, c’est bien pour ma fortune qu’elle reste.

Mon fils Josué a 21 ans et malgré son jeune âge il a déjà l’étoffe d’un chef, quoiqu’un peu étourdie et têtu, très dynamique dans les affaires de la société et un peu farouche pour les femmes. Amir, lui a 26 ans, posé et sans façon, il sait ce qu’il veut, et reste toujours en réserve quand il s’agit de la société.

Aujourd’hui la société marche bien et a atteint un point culminant. A mon âge, je veux prendre le temps de prendre soin de moi, et donc laisser la société à Josué, mon sang. Même si j’ai eu Amir quand il était encore bébé, je ne me vois pas vraiment en lui. Ce n’est pas de sa faute de toutes les façons. Mais Josué, lui je sais c’est mon fils.

Et ceci me permettrait bien de m’occuper de mes autres affaires, qui même dangereuses, m’apportent considérablement.

 

------Belinda Ottawi------

Il pleut des cordes dehors. J’aurais été à temps à la maison si je n’avais pas fait un crochet chez Mira. Sa belle-mère, la maman de Sofiane, lui fait déjà des misères. Mira est fille unique et a bien été gâtée par ses parents. Ne vous étonnez pas, madame si, elle ne sait pas cuisiner. Mais j’avoue, elle fait des efforts, et cette femme-là en fait trop.

Je laisse mon parapluie à l’entrée et défais mon chignon pour laisser respirer mes cheveux qui avaient pris l’eau. Et à ma grande surprise je trouve Anaïs dans la cuisine en allant me chercher un verre de vin.

-         Tu cuisines ? Ben dis donc… C’est Noel ?

-         C’est ça, moques-toi bien. Je t’attendais.

-         Ah oui ? Et dans la cuisine tu m’attends tante Anaïs ? (Pour la taquiner en l’appelant tante)

-         Je ne sais pas pourquoi je t’adore autant petite emmerdeuse. Sors déjà la bouteille.

Je prends la bouteille de vin, deux verres dans l’étagère et la rejoins dans le séjour. Elle avait déjà entamé une cigarette. Cela ne présageait rien qui vaille. Elle tire une bonne bouchée de cigarette, dont la fumée prend le temps de se dissiper… Avant de lâcher d’un calme sans reproche :

-         Athan Akué.

-         Pardon… ?

-         Il s’appelle Athan Akué. Ton père, Belinda.

A cet instant mon cœur fit un bond. Je ne m’y attendais pas. Suis-je seulement prête ? Est-ce le bon moment ? Et de toutes les façons, qu’est-ce que cela pouvait bien m’apporter ? Tout ce temps que j’ai passé sans lui, sans qu’il ne me cherche ou ne soucie de moi. Qu’est-ce que ça peut bien changer à ma vie, sinon que de me tourmenter ? Mais d’une part, c’est mon histoire.

-         Le « Athan Akué » ?

Qui ne le connait pas ? Le pays entier sait qui, il est. Le multimilliardaire et propriétaire de Green Goal est mon père ? C’est insensé. Pourquoi cet homme m’a tout simplement tourné dos ? Pourquoi ?

Au fur et à mesure que tante Anaïs me racontait l’histoire mon cœur se remplissait de haine. Exactement. Cet homme ne peut être mon père. Je me refusais déjà à cette idée. A moi seule, je finis la bouteille sans m’en rendre compte. Ce qu’elle me disait, passait difficilement.

-         Ma mère est morte d’un cancer du sein qui était opérable. Et parce que cet homme nous a ruinées, on n’a pas pu trouver le moyen de la sauver ?

-         Belinda… 

-         C’est un monstre ! Il n’a jamais voulu de maman, il n’a jamais voulu de moi. Tout ce qui l’intéresse c’est son argent ?

-         Ecoute ma chérie, ta mère voulait que tu saches la vérité, mais ce qu’elle voulait par-dessus tout, c’est que tu passes au-dessus de tout ça. Que tu connaisses autre chose que la déception.

Je tentais de comprendre. Tentais de savoir ce qui pouvait pousser un homme à laisser son enfant. Mais rien. Il nous a abandonné comme si, jamais on avait existé pour lui. Il a tranquillement mené sa vie sans se soucier de ce que nous vivons. Suis-je en vie ou non ? Il s’en fout. Tout ce temps, et lui, il se promène de pays en pays, des voyages de luxe par-ci, des voitures par-là, un jet privé et des villas de luxe ! Athan Akué… ?

Anaïs me remet le carton que ma mère avait pris soin d’arranger, je savais qu’à l’intérieur, je trouverais la voie pour la suite. Je trouverais une raison qui m’animerait.

Je monte dans la chambre et dépose le carton au milieu de la pièce. Prend une douche froide, afin de me remettre du vin et me sèche les cheveux. Je ne me presse pas. Déjà tout ce qui se dit dans ma tête n’en finit pas s’il fallait en rajouter d’aussitôt. Je passe en boucle les images sur le net de ce monsieur, Athan Akué, décrit comme « l’homme de la prise de conscience climatique », « Athan : un riche au cœur riche, donations ». Il n’est bombardé que d’éloges et de reconnaissance, identifié comme un homme du peuple, qui œuvre pour le bien être de son prochain. Une preuve que le net, c’est une poubelle à l’échelle mondiale.

A même le sol, je déverse le contenu du carton et une enveloppe attire mon attention, je l’ouvre et y trouve une lettre :

« A ma raison d’être, ma fille que j’aime tant…

Bel… Si jamais tu lis cette lettre cela veut malheureusement dire que maman n’est plus là pour te raconter la vérité, et que cette maladie a eu raison de moi, mais je suis sûre qu’Anaïs fera de son mieux, elle t’aime tout autant. J’aurais tellement voulu te préserver, préserver ton cœur et ton innocence…

Tu ne connais rien à la haine. Mais c’est cela que j’ai porté en moi, toute ma vie. Dans ce carton j’ai rassemblé tout ce qu’il faut pour que tu comprennes que Green Goal te revient de droit. Je ne te demande pas de te battre pour l’avoir, je ne veux pas qu’il t’arrive quoi que ce soit.

Je veux seulement que tu comprennes que ton grand-père Robéri Oyoko est parti de rien pour faire naître cette société, il y croyait. Je veux que tu voies là un exemple à suivre, celui d’aller toujours au bout de tes rêves et de ne jamais abandonner. Pardonne-moi d’avoir abandonné, car ce combat était mien, mais j’ai compris le jour où j’ai posé les yeux sur toi princesse, que tu es mon bien le plus précieux, voilà pourquoi Green Goal ne représentait plus rien.

Et si jamais tes rêves te mènent à cette société, sache que tu y as ta place ma fille, et sache que de là où je suis, je veillerais toujours sur toi. Tu pourras compter sur Maître Ayo, s’il est toujours en vie, pour te conseiller. Mais surtout aie confiance en toi Belinda.

Je t’aime fort ma petite princesse »

 

Je replie la lettre et la replace dans l’enveloppe. A cet instant mon choix était déjà fait. Je passe alors la nuit à lire les documents et tout ce qui concerne la société Green Goal. Il n’y a plus de temps à perdre, car pour Athan Akué, le compte à rebours venait de débuter…

   
Les larmes des liens