CHAPITRE VI: UNE VIE POUR UNE VIE
Ecrit par Chroniques Femmes Fatales
CHAPITRE VI Après le coup de fil de Poupina, la sœur Faustine était venue lui rendre visite accompagnée cette fois-ci du père Daniel. Ils avaient eu un entretien avec la responsable du campement, celle-ci n’avait rien dit à Poupina ainsi qu’à ses camarades, mais Poupina remarquait bien les coups d’œil furtifs que lui lançait la responsable de temps en temps. Et ces rêves aussi revenaient. Le père Daniel leur avait remis un manuscrit pour les prières afin qu’elle ne puisse plus trop en souffrir. A part cela, tout allait bien dans son monde, elle pouvait même dire qu’elle était heureuse, elle se sentait bien. Ses amis étaient géniaux. Christelle s’émerveillait de découvrir le pays d’origine de sa mère, les petites filles du village lui faisaient même des tresses africaines, et Jane en voyant cela, en demandait aussi, ce qui n’était pas chose facile avec des cheveux fins, John et Jack après les travaux, rejoignaient les jeunes du village pour les entraînements du soirs, le championnat de football du village était un événement que presque tout le monde ne voulait pas manquer. Il réunissait les villages environnants, c’était une sorte de foire, tout le monde mettait son plus beau habit, certains vendeurs en profitaient pour se faire de l’argent, les femmes cuisinaient des beignets, de la bouillie avec la farine de maïs, ou du manioc. Pour Poupina, c’était un univers qu’elle adorait. Ils semblaient si heureux! Et pour la première, elle se sentit enfin bien. Elle n’enviait pas leur bonheur, elle aimait cela: les regarder courir, sourire, jouer, flirter. Oui, elle se sentait en harmonie avec tous ces gens autour d’eux. Le seul hic dans tout cela, c’était Richard, et la peste de Marina. Parce qu’au final, elle s’était ralliée à l’avis de Jack qui traitait Marina de la pire des pestes qu’on ait jamais vu. Dieu qu’elle était mauvaise! pas seulement envers elle, mais envers tous les gens qui l’entouraient. Elle ne pouvait s’empêcher de rouspéter pour un rien. Il faisait trop chaud, trop de poussière, il manquait des infrastructures, c’était le pire pays qu’elle ait jamais vu, et blablablabla! Poupina se demandait comment Richard arrivait à la supporter. Mais bon, à chacun ses goûts, sauf qu’elle aurait bien aimé être le sien. Richard hantait son esprit. Cette fois, ce n’était plus dans ses cauchemars ou autre chose de la sorte, mais d’une façon sentimentale. Elle ne pouvait s’empêcher de le regarder quand il ne la regardait pas, de rêver de lui, même en plein jour. Elle imaginait des trucs qui n’avaient jamais traversés sa tête. Elle imaginait la saveur de ses baisers, la douceur de ses lèvres, et que dire de ses étreintes? Rien que l’imaginer lui donnait chaud, elle avait du mal à être dans la même pièce que lui sans avoir envie de poser sa tête sur son épaule. Elle avait un pincement au cœur en le voyant sourire à Marina. Comment pouvait-il toucher Marina, alors qu’à chaque fois qu’il posait une main sur elle, elle avait l’impression d’être électrifiée? Pourquoi touchait-il une autre? Quand elle avait fait ses cauchemars la première fois, elle avait senti qu’il se passait quelque chose. Elle lui faisait confiance plus qu’à personne d’autre sur cette terre. Ils ne se parlaient que rarement, mais elle était pourtant sûre que s’il lui demandait de faire quelque chose, elle allait le faire. Puis, ce sentiment de sécurité qu’il lui prodiguait, avait disparu. Une gêne était installée entre eux plus qu’avant. Ils ne se parlaient qu’à peine, évitaient de rester dans une même pièce, comme avant certes, mais cette fois-ci plus accentuée. Richard était indifférent, ils passaient plus de temps avec Marina. Au fond, Poupina se disait que c’était mieux ainsi, ils n’avaient pas de points communs, Richard parlait à peine de lui, voir même pas du tout. Poupina savait qu’un jour, voir très bientôt, tous allaient s’en aller et elle allait rester seule comme avant. Alors pourquoi souffrir plus en s’entichant de l’un d’eux? Le jour où elle prit conscience de cela, elle redevint la Poupina d’avant, distante. John fut le premier à le remarquer. Ce jour là, ils avaient organisé un pique-nique collectif. Ils avaient invité les volontaires du village, ainsi que leurs familles étaient conviés, c’était un moyen de se détendre après l’énorme travail qu’ils abattaient. Petit à petit, le jardin des moines reprenait vie. Les jeunes étaient venus avec des tambours, des balafons pour animer le repas. Tous étaient dehors, à relaxer au son des rythmes du villages. John se trouvait dans le camping-car en compagnie de Jane venue chercher des couvertures pour installer sur les herbes. Les autres essayaient tant bien que mal d’imiter les pas des danseurs, sous les rires moqueurs de l’assemblée. Il regarda par la fenêtre et vit Poupina assise un peu à l’écart. - Poupina est devenue bizarre, dit-il en pliant la couverture que Jane venait de sortir du placard. - Tout chez Poupina est bizarre, rétorqua Jane, c’est cela qui fait en quelque sorte son charme. - Je ne dis pas le contraire, mais depuis un certain temps, je la trouve plus réservée que d’habitude, elle ne parle plus trop, trouve n’importe quel prétexte pour rester seule, et surtout loin de Richard. Jane suivit son regard, et constata qu’il avait effectivement raison. - Maintenant que tu en parles, je m’en rends compte. Il faut dire que la rénovation de l’école nous prend plus de temps que prévu, si bien que je n’ai plus le temps pour autre chose. Mais reconnais que Richard ne lui facilite pas la tâche à toujours être avec Marina. Il est le binôme de Poupina dans ce groupe, mais c’est Jack qui fait tout pour lui. Je sais bien que cela ne dérange aucunement Jack, mais Richard devrait y mettre du sien aussi, je crois. John regarda à travers la fenêtre, la grande cour du milieu était couverte de tissus en tout genre pour attendre le pique-nique, il remarqua de loin Richard qui l’observait sans qu’elle ne se rende compte. - Pourtant, je suis sûr et certain qu’il meurt d’envie d’être près d’elle, regarde la façon dont il l’observe en secret. Parfois, je l’ai surpris à l’espionner, quand elle est avec des enfants de sa classe. Jane regarda John sans rien comprendre. - Tu veux dire que Richard l’aime en secret ? Il fit oui de la tête. - Mais alors, pourquoi font-ils tout ce cinéma ? Elle aussi, je mettrai ma main au feu qu’elle ressent quelque chose pour lui. - Tu sais Jane, ce n’est pas facile d’avouer ses sentiments, parfois on ne sait pas si cela va gâcher le lien qui unit les deux personnes. On a peur de regretter si l’histoire ne se déroule pas comme on l’avait prévu, on le transforme en amitié. Dans le cas de Poupina et Richard, j’ai l’impression qu’il y a plus de la peur, pas d’être ensemble, mais ce que cela va créer après. On avait résonné étrangement dans les oreilles de Jane, comme si John savait de quoi il parle, mais c’était trop beau pour être vrai. - Cela me rend triste de voir deux êtres que je considère comme mes amis gâcher une belle occasion d’être ensemble, surtout qu’ils forment un beau couple. Mais tu sais quoi ? Je vais aller mettre mon grain de sel. - C’est pour cela que tu me plais Jane. Il rougit jusqu’aux oreilles, et prit sa main dans la sienne, tous les deux se regardèrent. - Jane, je voulais te dire que, je suis très content que tu sois avec nous ici au Cameroun, sans toi, je crois que je ne serais pas venu… - Moi aussi, je suis contente d’être venue finalement. Un grand sourire illumina leurs visages, puis John relâcha sa main et ils sortirent rejoindre les autres. Jane remit les couvertures à John, puis chercha Poupina des yeux. Celle-ci se trouvait sous l’arbre, elle regardait les autres s’amuser. Jane se dirigea vers elle, et prit place sur les herbes. - Pourquoi aimes-tu rester toute seule Poupina ? - Je ne suis pas seule Jane, je voulais juste profiter pour corriger les devoirs de mes élèves, rien d’autres. - A d’autres! Depuis quelques temps, tu sembles lointaine, on dirait que tu veux t’éclipser. On l’a tous remarqué; que se passe-t-il ? Poupina posa le cahier qu’elle avait en main, et regarda Jane avec une lueur de tristesse. Elle ne voulait pas lui mentir. - Tu as raison, j’essaye de ne pas m’attacher de peur qu’après votre départ, dans un mois et demi, je me retrouve triste. Et je ne suis pas à l’aise quand il y a trop de monde autour de moi, j’ai l’impression que je vais étouffer. - Jamais on ne t’oubliera Poupina, tu te fais des idées pour rien. Je ne sais pas ce qui se passera après pour toi ou pour moi, mais tout le monde sera triste. - Je le sais Jane. Désolée d’avoir voulu m’éloigner, , je vais maintenant profiter, d’être le centre d’intérêt. - Tu le seras toujours, tu es très belle, cela fait en sorte que tu attires l’attention sur toi. Poupina soupira, ce qui n’échappa pas à Jane. - Je ne te dis pas cela par gentillesse, je le pense vraiment. Tu t’es regardée dans un miroir ? - Bien sûr, quelle question ! Tout le monde s’est déjà regardé dans un miroir et plusieurs fois. - Et qui vois-tu ? - Moi… Poupina voulait comprendre où Jane voulait en venir. - Tu vois ? s’écria celle-ci. Tu vois celle que tu aimerais voir, et non celle que tu es vraiment, c'est-à-dire une fille très belle, géniale. Si tu voyais cette fille au sourire ravageur, aux yeux remplis de mystère, qui se cache en toi, tu comprendrais pourquoi tout le monde veut être ton ami, malgré le fait que tu t’isoles tout le temps. Tu es fragilement attirante. Jane jeta un coup d’œil vers Richard, il les regardait. - Devine qui nous regarde en ce moment, il ne te quitte même pas des yeux. Le cœur de Poupina se mit à battre, elle savait de qui Jane voulait parler. - Richard… Et voila cette sorcière de Marina qui se dirige vers lui. Franchement, je ne sais pas à quoi vous jouez tous les deux. - Explique-toi, fit Poupina sous sa garde, avec Jane, on pouvait s’attendre à tout. C’était une fine observatrice. - Richard et toi, je ne sais pas à quoi vous jouez, répéta celle-ci; quand il ne te regarde pas, tu le regardes et quand toi tu ne le fais pas, il le fait. Et ça saute aux yeux que vous vous plaisez. - Jane, tu racontes n’importe quoi ! - Tu sais bien que j’ai raison, et puis, avoue qu’il est très beau… - Tu es sûre que John apprécierait que tu trouves un autre homme beau ? Moi j’en doute fort. Alors aide-moi à porter les cahiers au lieu de divaguer comme tu le fais. Le pique-nique va bientôt commencer, et il semble délicieux. Il l’était en effet, tout le monde s’amusait y compris Poupina. Les villageois chantaient, heureux de relaxer, les femmes africaines faisaient preuve de leurs talents de danseuses, elles tournoyaient aux rythmes des batteurs. Poupina ne pouvaient pas s’arrêter de rire quand l’un des volontaires essayait de suivre le rythme, c’était si hilarant. Après sa conversation avec Jane, elle avait décidé de profiter au maximum de leurs présences, tant pis si elle s’attachait trop à eux, l’essentiel était de garder de très bons souvenirs d’eux. Elle fut interrompue dans sespensées par la venue de ses élèves, ils étaient en repos, mais vinrent s’asseoir autour d’elle, pour profiter de la vue, et surtout pour écouter parler « madame la maitresse ». A croire qu’ils aimaient sa compagnie. Cyrille, comme d’habitude était assis plus loin que les autres, elle profita de la distribution des friandises que les bénévoles offraient aux jeunes enfants, pour se rapprocher de lui. Tous ces petits élèves étaient déjà en rang pour récolter les bonbons, mais Cyrille restait là, à la regarder. Elle avait remarqué qu’il passait toutes les journées de classe à la regarder, sans écrire ni parler, malgré tous ses efforts, Poupina n’avait pas réussi à lui faire dire un seul mot. Elle rapprocha son fauteuil de plus près, il ne bougea pas. - Cyrille, approche, fit-elle en tendant la main. Il ne bougea pas, mais cette fois-ci au moins, il lui souriait. Un sourire familier, remarqua-t-elle une fois de plus. Elle arriva près de lui, et décida de tenter le tout pour le tout. Ici à Obout, la langue maternelle était l‘Ewondo, son père étant de la région, elle comprenait la langue, mais parlait rarement, rien qu’avec son grand père et ses oncles. Elle prit une profonde inspiration, et répondit à son sourire. - Viens… Il arrêta de sourire, et la considéra de plus belle. - Je ne vais pas te faire du mal, continua-t-elle. Je veux juste parler avec toi. Si son grand-père était dans les environs, il aurait honte d’elle, tellement elle hachait la langue d’une façon horrible. Mais cela fit de l’effet sur Cyrille. Il lui tendit la main, et répondit dans la même langue. - Toi viens…. On t’attend… Elle t’attend… Poupina comprenait bien ce qu’il disait. Mais elle ne savait pas qui l’attendait. - Qui m’attend Cyrille ? Ta maman ? Il secoua affirmativement la tête. - Où est-elle ? Il montra la route vite, en direction du village près du monastère. - Elle veut me voir ? Il fit encore oui de la tête. - Elle t’attend, continua-t-il en tirant son bras. Viens, on part. Il semblait si sérieux, et Poupina était encore grisée par son exploit de lui avoir fait dire ses premiers mots depuis longtemps, et il avait sourit en plus! rencontrer la femme qui prenait soin de lui ferait apprendre beaucoup plus sur lui, elle savait qu’il était orphelin, et vivait chez une de ses tantes. DE surcroît, ce petit garçon, qui la fascinait étrangement. Elle regarda autour d’elle, ils semblaient s’amuser, et elle se dit que prendre un peu de temps pour elle lui ferait du bien, en plus il n’habitait pas loin. Sans un mot aux autres, elle suivit le petit garçon qui marchait tout confiant devant elle. Ils marchaient en silence, Cyrille ne semblait pas disposé à répondre à ses questions, il marchait juste, il semblait avoir oublié son existence, et Poupina ne fit rien d’autre que le suivre. Elle ne sut pas exactement le nombre de temps qu’ils mirent à marcher ainsi, les premières maisons n’étaient toujours pas en vue. Elle vit soudain une petite hutte à quelques mètres de là. La hutte était en terre battue, avec un toit de feuilles de raphia, elle semblait abandonnée, une vraie ruine. Autour d’elle, rien n’y était, pas même l’ombre d’une habitation. Sans crier garde, Cyrille se mit à courir, et entra dans la case. Poupina resta seule quelques instants, se demanda ce qu’il fallait faire, s’il fallait qu’elle aussi entre là dedans. Elle se mit à crier le nom de Cyrille, mais il ne répondit pas. Le vent se leva brusquement, un éclair scilla le ciel. Levant les yeux, elle remarqua que le ciel avait étrangement noircit. Une forte pluie s’annonçait. Poupina sentit ses poils se hérisser, ensuite ce fut le froid, elle commença à pâlir de peur, et regarda autour d’elle. Personne, juste cette étrange maison. Elle respira un bon coup d’air, et poussa son fauteuil vers la hutte. Elle se sentait mal à l’aise placée ainsi seule. Et de toutes façons, il fallait s’abriter. Cyrille avait en plus dit que sa mère l’attendait. - Cyrille…appela-t-elle en arrivant vers la cabane. Tu es là ? Sors, il faut qu’on rentre retrouver les autres. Il va pleuvoir, je verrai tes parents une autre fois, viens on rentre. Elle essaya de voir ce qu’il y avait à l’intérieur, mais rien ne bougeait, pas même l’ombre d’un chat. - Cyrille… Juste le silence. Un dernier coup d’œil, elle décida d’entrer le chercher, rester dehors ne servirait à rien, elle allait être trempée de toute façon. Elle poussa son fauteuil jusqu’au seuil de la porte. C’était une minuscule pièce carrée, elle regarda tout autour, aucune présence de Cyrille. Elle aurait aimé faire demi-tour et rentrer, mais elle ne connaissait pas la route. Il faisait noir dans la pièce, mais très vite ses yeux s’habituèrent à la pénombre. Elle put ainsi distinguer un petit lit, et un feu qui était presque éteint. - Cyrille ?... Tu es là ? Le feu reprit soudain vie, et les flammes rouges répendirent leurs lumières dans la petite pièce. Elle vit une femme couchée sur le petit lit en bambou. Elle ne distinguait pas les traits, mais tout lui disait de fuir au loin. Les flammes commencèrent à monter, et en quelques secondes, ce fut un brasier géant. - Non…Non…Non… fit-elle en sursautant. C’est sûrement un rêve, ce n’est pas la vérité, tout ceci est le fruit de mon imagination. Cyrille ! La femme se redressa d’un geste brusque, et commença à murmurer à voix basse, Poupina n’entendait rien, mais la voix de la femme se mit à monter, tandis que celle-ci se levait du lit. - Une vie, pour une vie… Cette fois-ci, Poupina sut qu’elle ne rêvait pas. Elle tourna les freins de son fauteuil, qui firent un crissement et restèrent bloqués. Elle ne pouvait plus bouger, son fauteuil ne voulait plus avancer. - Une vie, pour une vie…Et c’est la tienne que je veux… La vieille femme était presque proche de Poupina, avec un dernier effort, elle fit une manœuvre, le fauteuil fit un bond, et elle se retrouva au sol. La pluie battait son plein. Très vite, elle se retrouva couverte d’eau, de boue et de déchets. Poupina commença à hurler de toutes ces forces, quand elle vit la femme devant la porte, et Cyrille près d’elle, un couteau en main. Il avait toujours ce sourire qui ne le quittait plus, un sourire humain. Poupina gardait les yeux ouverts malgré la pluie qui couvraient ses yeux, elle ne voulait pas fermer les yeux, et de peur de se retrouver en enfer, il ne fallait pas! - Un enfant, pour un enfant, une vie pour une vie… C’est ce qu’il avait dit. Un enfant pour un enfant, et je réclame mon dû ! Un éclair traversa le ciel quand la femme cria ces mots, tandis que Cyrille levait sa main où il tenait le poignard. Et avec un cri, il se mit à courir vers Poupina. Celle-ci commença à ramper avec son ventre pour fuir, les cailloux et les écorces pénétraient sa chair, mais il fallait qu’elle aille loin d’eux, le sang coulaient de ses éraflures, mais elle ne s'arrêta pas, il fallait fuir. - Le sacrifice saute une génération…L’enfant par le pacte doit engendrer le sacrifice, telles sont les lois depuis la nuit des temps. Elle parlait tout en s’approchant de Poupina, elle ne marchait pas, mais flottait, Poupina ne distinguait pas son visage couvert par les haillons. Cyrille la rejoignit avant qu’elle n’aille loin. Il s’arrêta à quelques pas, et attendit la femme qui l’accompagnait. - Offre-moi ton sang ! cria-t-elle en regardant Cyrille. Verse ton sang, et donne-le moi en sacrifice. J’ai attendu un demi-siècle pour l’avoir, il est à moi. Cyrille arrêta son poignard de deux mains, et regarda Poupina qui s’était arrêtée, à bout de force, elle se retourna pour lui faire face. - Je… Je t’en prie Cyrille, ne fais pas ça… Je t’en prie… Je ne vous ai rien fait… Je n’ai rien fait… les larmes se mélangeaient à la pluie, à la boue, mais Cyrille resta de marbre. Il l’enjambe et elle se fut au milieu de ses jambes, le regard absent, il leva le couteau dans les airs. - Zanga Michel, je reprends mon dû ! cria la femme, en levant ses deux bras au ciel. Un tonnerre retentit, accompagné d’un éclair, au moment où Cyrille rabaissa le poignard. Poupina eut juste le temps de ressentir la douleur pénétrer sa chair, avant de s’évanouir. Une voix… Oui, elle entendait une voix l’appeler au loin, les gouttes de pluie tombaient sur son visage, mais c’était la douleur sur son bras qui la fit retrouver petit à petit ses esprits. Elle ouvrit les yeux lentement et vit ses amis courir vers elle. Tout avait disparu, Cyrille, la cabane, la femme, à la place, il ne restait que le cimetière du village. Elle retomba sur le sol fatiguée, tandis que Richard, le premier à arrivée, la prenait dans ses bras. - Poupina, Poupina ! fit-il en la secouant pour la réveiller. Jane poussa un cri en voyant le sang qui couvrait ses habits, mélangé à la boue et l’eau de pluie. - Elle est morte ! Elle est morte ! cria-t-elle en pleurant. John la prit dans ses bras, les larmes coulaient dans leurs yeux malgré la pluie. - Ce n’est pas possible, s’il te plaît Richard, dis-nous qu’elle va bien ! supplia Christelle en s’approchant. Il secoua la tête, puis prit Poupina dans ses bras. - Elle est juste évanouie, elle respire encore Jane, arrête de pleurer… - Que j’arrête de pleurer ? Tu as vu dans quel état elle se trouve ? Son fauteuil se trouve de l’autre bout du cimetière, elle a rampée pour arriver jusqu’ici! Et tu veux que j’arrête de pleurer ? Tu n’as aucun ordre à me donner c’est clair? Personne ne voulait calmer Jane, tous se posaient autant de questions qu’elle. Rien n’expliquait que son fauteuil soit à l’autre bout du cimetière en effet, si ce n’est l’horreur, qu’elle voulait fuir à tout prix. - Jack, va prendre le fauteuil, il faut qu’on prenne soin d’elle. - Tu n’as pas d’ordre à donner ici, Richard ! Tout est de ta faute ! - Jack…commença Christelle, je t’en prie… -Quoi? Tu le penses aussi bien que moi, tout est de sa faute! Il l’a laissée pour aller fricoter avec cette peste de Marina! On avait fait des duos, il était supposé être tout le temps avec Poupina. La surveiller, on sait tous qu’elle est fragile, mais monsieur préférait jouer les jolis cœurs, résultats, regarde l’état dans lequel elle se trouve! Tous pensaient exactement cela, mais Christelle essaya de calmer la situation. - Aucun de nous ne pouvait prévoir que cette histoire prendrait cette ampleur. Cette histoire nous dépasse tous. Et ce n’est pas le moment de chercher les coupables. - Mais il est là le coupable! Tu veux encore qui? Il devait être avec elle! - Jack! On a voulu venir en aide à Poupina, alors comportons nous comme des adultes ! Au lieu de rester là à se rejeter les fautes, ramenons la au campement. Je veux juste qu’il ne lui soit rien arrivé. S’il vous plaît rentrons…supplia Christelle en éclatant en sanglots, je vous en prie, rentrons… Jack la prit immédiatement dans ses bras, sa colère avait disparu. - Je suis désolé Christ, tu as raison, rentrons. Richard se mit en marche Poupina dans ses bras, tandis que Jack allait récupérer le fauteuil, il le plia et tous ensemble, ils retournèrent au campement, sans pour autant s’empêcher de jeter un coup d’œil derrière eux, pour voir ce qu’elle avait bien pu voir de si monstrueux.