Chapitre XXXIX

Ecrit par Tiya_Mfoukama

Chapitre XXXIX

« — Où est-ce que tu vas ? me demande Tiya
— Voir ma mère. je réponds en laçant mes chaussures.
— Attends-moi, je t'accompagne. 
— J'ai pas le temps, je vais l'aider à monter quelques meubles et je reviens. je lance déjà près de la porte d'entrée. 
— D'acco… »

Je sors et claque la porte d'entrée avant qu'elle ne termine sa phrase. 
L'idée de revenir sur mes pas, ouvrir la porte et lui expliquer que je ne compte pas mettre de temps, m'étreint pendant un bon quart de second, avant que je ne la chasse d'un revers de la main. 
Elle comprendra, elle comprend. Elle n'est pas stupide, je me dis en montant dans ma voiture. Direction Mazala.
Les sourcils froncés, je me demande si j'arriverai un jour à m'y faire. A ce nouveau chemin. 
Toute ma vie, j'ai marché puis roulé les yeux fermés vers Les Batignolles et aujourd'hui, je dois apprendre à prendre un nouveau chemin. Ce n'est pas sensé être la chose la plus difficile qu'il soit pour moi. D'autant plus que je suis une personne qui s'adapte assez rapidement. Mais la c'est différent. Je réussis à m'adapter parce que la vie m'a appris qu'il fallait savoir s'adapter pour se maintenir, elle m'a aussi montré où est-ce qu'il fallait s'adapter. Alors je me suis bêtement dit que le reste, ce qu'elle ne m'avait pas montré, était immuable. Je me suis bêtement dit que mon père et ma mère, leur union, était immuable. Mais j'avais tort. Et ça me tue. littéralement. 
Je n'ai rien vu venir, je n'ai rien soupçonné, je n'ai même pas une seule fois douté. C'est là que ça fait encore plus mal. 
Le fait d'avoir été aussi aveuglé remet tout en question. Le besoin de démanteler le faux du vrai en chacune des relations bâties s'installe et nous ronge un peu plus chaque jour. Si le seul en qui je pensais pouvoir mettre ma vie entre ses mains et le même qui n'hésiterai pas à la broyer, ma vie, en refermant chacun de ses doigts un peu plus fort pour ne former qu'un point, jusqu'à ce qu'il ne reste que de la poussière, qu'en est-il des autres. 
Je passe mon temps à me ressasser cette question, et pleins d'autres encore, sans jamais réussir à trouver de réponses. Comme s'il s'agissait d'un faite que je devrais simplement accepter. 

Je renonce une fois de plus à trouver une réponse à cette question lorsque j'arrive devant le portail de ma mère. Je klaxonne brièvement deux fois, puis me compose un visage plus joviale à travers mon rétroviseur, avant que le gardien ne vienne m'ouvrir. Comme je l'imaginais, je retrouve ma mère sur le perron en train de scruter le passage que j'emprunte. 
Elle a l'air tellement radieuse avec son large sourire et ses yeux pétillants. Rien, excepté sa perte de poids assez impressionnante, ne pourrait laisser présager qu'elle essaie de se remettre d'une douloureuse trahison. Et quand je pense que c'est de ma faute….

« — Ah, tu es finalement venu ? elle me demande lorsque je descends de la voiture. 
— Ouais. Mais je t'avais dit que je passerais. Non?
— Oui, en effet. elle rétorque une main sur la hanche. Tu m'avais dit que tu passerais à 14h, il est bientôt 17 heures!»

Tout en l'écoutant parler, je la suis jusqu'à l'intérieur de la maison, intérieur avec lequel je ne suis pas familier, et découvre qu'une partie des meubles qu'elle souhaitait que je monte, est déjà sur pied. 

« — Jesse est venu manger ce midi et en a profité pour t'avancer un peu. elle dit en suivant mon regard. Mais ne t'en fais pas, il y en a encore trois là, et c'est les plus gros. 
— Humm… Merci à lui et à toi. je réponds dans un sourire sans joie qui l'a fait sourire.
— Je vais te chercher de quoi oublier la lourdeur de la tâche ! elle lance en se dirigeant vers ce que je sais être la cuisine. »

Je balaie la pièce du regard, et essaie de reconnaître ce que je connais. Des photos, de mes frères et soeurs et moi-même, quelques babioles qu'elle a toujours affectionnées, et c'est tout. C'est tout ce qu'elle a pris, c'est tout ce qu'il reste de plus de vingt ans de mariage et trente ans d'une vie à deux….

« — Je crois que Jesse a dit tout à l'heure que les outils étaient entre les deux colis. m'informe ma mère de retour avec un plateau bien rempli.
— Clémence n'est pas là ? 
— Non. elle me répond en déposant le plateau sur la petite table basse qui trône au milieu du salon. Je lui ai donné sa journée, j'avais envie de faire les choses par moi-même. J'ai des mains et du temps, alors autant utiliser tout ceci à bon escient. Non ? »

J'acquiesce docilement, en essayant d'oublier que si mon père avait été là, il lui aurait probablement demandé de se reposer et aurait fait appel à une personne pour remplacer Clémence. Il n'aimait pas la voir se fatiguer, il disait qu'il voulait la préserver. Quelle ironie. 
Je me défais des images qui m'envahissent en retirant ma chemise et me mets en mode pilotage automatique pendant trois bonnes heures. 
Ce n'est que lorsqu'elle me demande de m'arrêter pour prévenir Tiya de ma localisation, que je me reconnecte en pilotage manuel.

« — Elle sait que je suis ici. 
— Mais tu lui avais dit que tu resterais aussi longtemps ? A aucun moment, je ne t'ai pas vu prendre ton téléphone pour lui envoyer un message. 
— Elle sait que je suis ici. je répète en rangeant les outils utilisés. 
— Ah bon ? C'est comme ça que tu fais ? Tu ne l'informes pas de ton arrivé, du temps que tu comptes mettre, encore moins de ton départ ? Et s'il t'arrivait quelque chose ? Ou si je te demandais d'aller faire une course pour moi et que tu la rencontrais dans la rue, comment te justifierais-tu ? 
— Maman, elle sait que …
— Non Dylan ! Il faut respecter ta femme ! elle me coupe sévèrement. Tout comme tu as le droit de savoir où elle se trouve, elle doit savoir où tu te trouves ! Et s'il t'arrivait quelque chose, qu'est-ce qu'elle nous dirait à nous tes parents ? Ce n'est pas un comportement à avoir!
— Je ne vais pas la tromper, si c'est ce que tu penses. Je balance irrité, avant de me reprendre. Pardon maman, ce n'est pas ce que je voulais…
— Je n'ai rien dit, encore moins pensé de similaire. Je partais simplement du principe qu'il faut de la communication dans un couple pour éviter les engueulades, rien de plus. elle marmonne le regard voilé. Je suis désolée si tu l'as mal pris.
— Non maman, arrête. Je suis désolée, je te demande pardon. je m'excuse en allant la prendre dans mes bras. Je te demande pardon. Pour tout…. Je suis tellement désolée maman. 

***

« — Dylan ? 
— Ouais. Désolé. Je ne voulais pas te réveiller. »

Je m'assieds au bord du lit, dénoue les noeuds de mes lacets avant de sortir mon téléphone, qui est en train de vibrer, de ma poche.

« — Non, c'est pas plus mal. Je lisais un livre en t'attendant et je me suis assoupie. elle me répond en se trouvant vers moi, toujours allongée. Alors ? Tu as pu montrer ses meubles ?
— …. Hummm. Jesse en avait monté quelques uns.
— Ah. Jesse aussi était là ? Dylan ? »

J'ai la tête qui bourdonne, comme si à force de trop fourmiller mes pensées, ma tête va finir par exploser. J'ai besoin de lâcher prise, de me vider la tête, l'esprit, de ne plus penser à tout ça. 

« — Dylan ? Dylan parle-moi, dis-moi ce qui ne va pas...»

Je me tourne vers elle, surprend l'air anxieux à moitié éclairé par la lumière tamisée de la petite lampe de chevet. 
J'ai une pulsion qui ne fait que monter de seconde en seconde, mais essaie tant bien que mal de l'enfouir. 
Sauf que je finis par monter sur le lit et passer ma main sur sa hanche.

« — Bébé, je te demande pardon. je marmonne au creux de son oreille. Je vais pas être tendre.»

Elle se tourne légèrement vers moi, et je peux voir l'entièreté de son visage, l'expression de son inquiétude dans sa totalité. Pendant de longues secondes, nos regards se fixent et se mêlent. Je la laisse lire ce qu'elle me demande de lui dire durant ces quelques secondes, avant de prendre ses lèvres. Elle ne me repousse pas, au contraire, elle me répond et me laisse se positionner entre ses jambes.
Ma main se retrouve sous sa nuisette, où je tire sèchement sur son string, avant de faire glisser mes doigts entre sa fente. Elle réagit assez vite. Faut dire que je ne l'ai pas touché depuis un moment. 
Elle se met à ahaner entre nos lèvres, et à se mouvoir au rythme de mes vas et viens. Et lorsque je me sens assez dur, je me dégage suffisamment pour défaire la boucle de ma ceinture, puis la retourner et la pénétrer. 

***
Message, elle, 2h53:
"J'ai besoin de toi. Est-ce que tu peux venir ?" 

« — Dylan ? Tu m'écoutes ? 
— J'ai un truc à faire. M'attends pas.
— Pardon ? »

Je descends prestement du lit, et rejoins, enfile rapidement mes vêtements puis emporte mes chaussures pour les mettre dans la voiture. 

« — Dylan, tu vas où à une heure pareille ? C'est qui, qui vient de t'envoyer un message ?»

Je suis déjà en bas des escaliers lorsque je la vois arriver, enrouler dans un drap, les cheveux ébouriffés et m'hurlant de lui expliquer ce qu'il se passe, mais ce serait trop long. Et puis je ne suis pas certains de vouloir lui dire. Ca, elle ne le comprendrait peut-être pas. 
Je monte en voiture, et roule pendant une demi-heure avant de la retrouver au bord du trottoir, balayant la rue du regard.
Je suis totalement épuisé et n'ai qu'une envie, celle de dormir et de me réveiller lorsque tout semblera aller, du moins un minima. Mais je prends sur moi et sors de la voiture, la retrouver. 
Elle aussi n'a pas l'air bien, malgré tout son maquillage et son habillement plus que festif.

« — Ca va ? je lui demande les mains enfoncées dans mes poches.»

Elle secoue négativement sa tête, et je comprends qu'elle n'a pas spécialement envie de parler. Ce que j'arrive à comprendre. Je me dirige donc en silence vers la portière passager que je lui ouvre avant de moi-même m'installer côté conducteur. 

« — Tu étais avec elle ? elle me demande le nez rivé sur la fenêtre.
— Oui.
— …..Je comprends mieux… On va où ? 
— A l'hôtel. 
— D'accord…. Tu…. Tu penses que tu pourras rester avec moi...Cette nuit ? Juste cette nuit.
— …. Ouais. »


Les jeux du destin