Dans la nuit noire.

Ecrit par Rre Byzza

Mactar baignait dans ce monde irréel où Penda l'avait basculé, il ne comprenait pas, il ne comprenait rien de ce qui lui arrivait. Tout son esprit se tournait vers Astou, son état avancé de grossesse. Toute cette histoire va la retourner, mais il avait confiance en elle, il savait que Astou saurait, qu'elle sentirait qu'il était innocent. Il était innocent, toute cette histoire n'était que résultat de l'esprit malade de Penda. 

"Mon mari", il se remémora ce qualificatif qu'elle lui servait tout le temps et les conversations rythmées devant la famille, quand elle rivalisait avec Astou en prétendant qu'elle fait meilleure épouse qu'elle, ces pseudos luttes qu'elle faisait avec sa soeur pour s'asseoir plus près de lui ou à défaut sur ses genoux. Mactar ne lésinait sur aucun moyen pour contenter Penda, son argent de poche mensuel, ses besoins contextuels, les cadeaux permanents. Pour lui sa relation avec sa belle famille devait toujours être au beau fixe, il se dévouait son amour pour sa femme à travers tous les membres de sa famille.. 

Serait-il fautif en fin de compte? Toutes ces largesses pour Penda auraient- elles pu lui tourner la tête et la faire s'imaginer des choses qui n'étaient point? Rien n'était à laisser de côté pour expliquer ce qui est arrivé aujourd'hui. 

Son corps endolori se rappela à lui, il était en piteux état. Les yeux boursouflés, le corps griffé de toute part, la douleur se répandait telle une ondée rémanente sur tout son corps. Torse nu, son corps noir coloré par les gouttelettes de sang qui avaient coagulé, pantalon en loques il ressemblait plus à un vulgaire voleur qui avait été pris à partie par la population.

Ils' agrippait aux barreaux de cette geôle où l'avait enfermé les agents de la police qui étaient venu le cueillir. Ils auraient pu l'amener à l’hôpital, se dit-il en ressentant cette douleur aux côtes qui se rappelait perpétuellement à son souvenir quand il respirait. Presque quatre heures de temps qu'ils l'avaient déposé là sans "vouloir" l'écouter, au contraire, face à ses "jérémiades", termes que le préposé au poste de garde lui avait attribué, avant d'ajouter quelques coups de matraque de police à son supplice. Il désirait seulement qu'on l'écoute, qu'il parle et rétablisse les faits pour retourner chez sa femme pour la rassurer, mais on ne désirait pas sous ces cieux l'entendre dire quoi que ce soit. 

La porte du cachot s'ouvrit dans un cri de fers qui se rudoient férocement. Mactar n'aurait  jamais cru vivre ce moment de sa vie, lui si respectueux des lois et des personnes! Lui en présence de ces gens aux mines patibulaires dans ce cachot aux relents cataclysmiques. Il sortit de ses réflexions par son nom qui retentissait sur la bouche de l'agent de police. 

- Mactar Diallo, suis moi !

Mactar s'avança, l'agent lui prit les mains sans ménagement et lui remit de nouveau les menottes, s'agrippa d'une main à celles ci et de l'autre l’empoigna au collet, il le poussait plus qu'il ne le laissa marcher. Il le fit entrer dans une salle avec plusieurs autres agents, derrière des bureaux poussiéreux et couverts de dossiers. Un écran d'ordinateur trônant au milieu. Le bureau était bondé, Mactar trouva des gens comme lui, les yeux hagards, face à d'autres qui, visages renfrognés, cachaient mal un sentiment de satisfecit d'avoir amené tel quidam devant l'autorité de police.

Comment les inspecteurs de police pouvaient raisonnablement travailler en ces lieux, en de telles circonstances?  Cela explique surement  leur mauvaise humeur permanente et ce manque apparent d'empathie. 

On le fit s'asseoir devant l'inspecteur du fond, un homme svelte, presque chauve mais au regard pétillant derrière ses lunettes de myopie. Celui ci lui adressa à peine un regard et se concentra dans une saisie effrénée sur son clavier, s'arrêtant de temps en temps pour scruter longuement l'écran d'ordinateur. 

- Nom, Prénom, Date et lieu de naissance lança-t-il.

- Enfin quelqu'un pour m'écouter, laissez moi enfin vous donner ma version des faits!

- Désirez vous du café Monsieur?

Le ton était si soudainement doux que Mactar se laissa emporter, il se dit en lui même, après tout pourquoi pas? 

- Euh oui s'il vous plait!

- Vous n'êtes pas dans un hôtel mon gars, tonna l'inspecteur! Nous nous foutons bien de ce que vous pourriez bien désirer, répondez aux questions et ne m'emmerdez plus! Nom, Prénom, Date et lieu de naissance répéta-t-il sous un ton qui ne laissait aucun doute sur son sérieux.

- Diallo, Mactar, 06/05/1980.

- Voilà Monsieur, aidez moi à faire mon travail, je suis là pour vous écouter d'ailleurs Monsieur Diallo, donc ne précipitons pas les choses, adresse?

Après quelques séries de questions sur lui et son environnement, ils en vinrent au faits.

Mactar expliqua avec fortes détails les événements, ponctuant de gestes et de remarques son récit. Mais pour l'inspecteur Kébé en charge du dossier, sa longue carrière  lui avait appris que tous les suspects baratinaient. Et le récit rocambolesques de l'homme assis devant lui, presque nu ne sortait pas du cadre habituel. Il rompit la montée volubile de Mactar en appelant depuis son combiné téléphonique un autre agent à qui il demanda qu'on lui enleva son pantalon pour lui en mettre un autre ainsi qu'un tee shirt. 

Mactar commençait à croire à l'humanité de l'inspecteur. A son retour, il tint à l'en remercier vivement. Intérieurement, L'inspecteur Kébé riait, ces scènes se répétaient si souvent. 

- Monsieur Diallo, je suis loin d'être votre ami, rappelez vous ça. 

-  Bien sûr, mais vous me rendez ma dignité là où vos collègues ne me donnaient que du mépris. 

- Continuons je vous prie, avez vous éjaculé sur votre victime après l'avoir pénétré?

- Quoi, mais vous ne m'avez donc pas entendu? Je vous répète que je ne lui ai rien fait, au contraire, c'est elle qui a tout manigancé.

- Ok, Monsieur DIallo, voilà le rapport préliminaire de l’hôpital où a été acheminé votre belle sœur, elle souffre d'une défloration, ce qui donne à dire qu'il y'a bien eu pénétration. Voulez vous dire qu'elle s'est violée elle même?

- Je ne sais pas comment elle a fait mais je ne l'ai pas touché!

- Le sang sur votre pantalon, c'est le vôtre? Réfléchissez avant de me répondre, j'ai envoyé votre jean au labo pour des analyses. 

- Je pense que non, bégaya--il sans convaincre. Telles que se dessinaient les choses, Mactar sentait que sa vie avait basculé, Penda avait réussi à le mettre à terre. Rien de tout ce qu'il dirait ne plaiderait en sa faveur, d'ailleurs comment pourrait-il convaincre de quelque chose qu'il ne pouvait pas lui même comprendre?

- Monsieur Diallo, je vais vous aider! Mactar releva ses yeux et regarda béatement l'inspecteur qui continua:

- Oui je vais vous aider. Vous semblez intelligent, vous savez  bien que votre tentative de défense ne vous aidera pas, il est mal conçu. Personne ne vous croira! Dites simplement que quelque chose dans l'attitude de votre belle soeur vous aura fait croire qu'elle vous désirait et que vous avez répondu à la tentation, après tout vous n'êtes qu'un homme.

- Rien de ce que je vous dirais ne vous convaincra, je veux un avocat !

- C'est votre droit, d'ailleurs, n'oubliez pas qu'on vous l'a conseillé lors de votre arrestation, mais vous étiez trop volubile en explications pour vous rendre compte. Monsieur Diallo, je ne vous le cache pas, votre dossier parle de lui même, les carottes sont cuites, et ce n'est pas vos explications tirées par les cheveux qui vous sauveront. Avouez votre crime odieux et on passe à autre chose !

- Je répète, je veux un avocat!


Astou tenait la main de sa soeur, elle ne voulait pas la lâcher. Elle sanglotait spasmodiquement, le visage bouffi. Le gynécologue s'affairait encore sur Penda, celle ci absente, avait le regard rivé sur le plafond blanc de cette salle toute peinte en blanc.  Pas un regard vers sa soeur qui prenait cela comme une accusation formelle de complicité avec son mari. Et cela faisait encore plus mal à Astou. 

- Madame, vous pourriez attendre dehors s'il vous plait le temps que je prenne la déposition de votre sœur? Lança une voie douce derrière elle. Elle se retourna et vit une femme en veste noire et jupe.

- Inspectrice Sylla de la police nationale, lança de nouveau la voie douce, elle tenait entre ses mains sa carte professionnelle. 

Penda s'accrocha alors au bras de sa soeur fermement et dans une supplique théâtrale s'époumona:

- Non, non, je ne veux pas que tu t'éloignes de moi Astou, je ne veux pas.  Avec tendresse celle ci lui caressa le visage en posant sur un regard consolant.

- Non, je n'irais nulle part petite soeur, je reste là avec toi, rassures toi!

- Bon du moment que vous ne nous interrompiez pas Madame, je n'y vois pas d'inconvénient lâcha l'inspectrice.

Penda jubilait intérieurement. Faire vivre à sa grande soeur le récit qu'elle avait concocté lui procurait une jouissance inouïe. 

Et effectivement, à chaque fois que Penda répondait aux nombreuses questions intimes de l'inspectrice de police, Astou sentait son coeur se serrer encore plus dans sa poitrine.  Et Penda maîtrisait son histoire, elle la racontait avec toute la dose nécessaire pour s'accaparer la sympathie de ses interlocuteurs. 

- A-t-il jouit en vous ? Lança l'inspecteur.

- Je ne sais pas, je n'en sais rien répétait-elle dans un gloussement de sanglot avant de reprendre les yeux embués de larmes que non, Mactar n'a pas eu ce temps de pouvoir jouir. Elle s'es défendu de toutes ses forces et crié, crié jusqu'à ce que les voisins viennent la délivrer.

- Il m'a sali cria-t-elle en s'acrochant à sa soeur, toutes deux s'enlaçant dans un concert de pleurs. L'inspectrice Corréa ne put retenir de verser une larme.

Le viol