Détresse

Ecrit par Aura

Avez-vous déjà éprouvé cette sensation ? Ouais, je vous parle de l’impression d’avoir le cœur émietté, de ressentir la douleur la plus extrême. De regarder tout aller sens dessus-dessous, sans agir. Ce n’est pas que vous ne vouliez pas faire quelque chose, c’est juste que vous ne pouvez rien. C’est comme un film qui commence d’une belle manière, vous fait éclater de rire au point de mouiller votre pantalon, pour sombrer dans le drame, au point de vous faire couler les larmes ou de jeter la télécommande, voir zapper une autre chaîne, mais encore mieux, simplement éteindre le poste téléviseur et passer à autre chose. J’aurai aimé mille fois que ce soit un film dans lequel la dernière goutte d’eau fait déborder le vase. J’aurai aimé changer de chaîne et me dire : pff ce n’est qu’un fichu film après tout. J’aurai encore aimé louer les talents de chaque acteurs en disant : très réussi la scène où la meilleure amie prouve qu’elle tient à cette amitié, à tel point qu’elle meurt avec un bébé dans ses bras. J’aurai aimé ne jamais avoir été là, ne jamais connaître tout ceci, surtout ne jamais éprouver la douleur que je ressens.  

Je préfère supporter la douleur physique, celle des piqûres et des perfusions qu’on m’injecte, celle de mes mains complètement brisées après avoir donné des poings dans le béton armé, ou encore celle de la lame du couteau qui entaille mon ventre et fait gicler le ruisseau de sang qui sort de mon corps. Ah oui, cette douleur est bien meilleure. Elle, au moins me procure la sensation de basculer de l’autre côté, de ne plus me battre et surtout de mettre fin à toutes ces souffrances. Non au contraire, il m’a fallu tout autre chose. Il m’a fallu avoir le cœur brisé, les souvenirs à foison et ces larmes ainsi que cette détresse qui m’inondent. Je n’arrive juste pas à y croire : qu’ils ne soient plus là.

                *******Flashback*********  

Après la dispute avec Synthia, après son départ, nous avons quitté les lieux, son appartement. Les invités sont partis les uns après les autres parce qu’il se faisait tard. Ils me recommandaient chacun d’être forte et surtout de garder espoir sur le retour de David. Nous sommes restées pour nettoyer un peu avant de rentrer chez nous. Pendant que nous y étions, Lucien est revenu l’air de rien pour nous chercher. Et c’est à ce moment que je me suis rendue compte, qu’il avait complètement disparu de la circulation quand les événements se sont produits.  Il nous a fait comprendre qu’ils s’étaient disputé au préalable avec Synthia au sujet de la présence de ML à la fête, que la discussion avait tourné à la dispute avant d’en arriver aux mains. Pour ne pas aggraver la situation, il avait choisi de s’en aller pour se calmer avant de se décider à revenir. J’ai tout de suite compris qu’il n’était pas au courant de l’affaire. Maman qui était moins paniquée, lui a conté toute l’histoire. Moi j’étais toujours en train de sombrer dans le silence parce que je ressentais quelque chose de bizarre et je ne savais comment l’expliquer. Nous sommes rentrés à la maison, pendant que Lucien tentait de joindre Synthia. Elle a décroché au troisième coup de fil, avant qu’ils ne se prennent la tête encore une fois. 

- Putain !!! mais qu’est-ce que tu me veux au final ? Des excuses ? Pff !!! sale lache qui tape sur les femmes. Dis-toi que ce n’était qu’une chance. Prochainement, je t’en collerai une moi-même. Si tu crois que je vais retirer ce que j’ai dit Lucien, c’est que tu te trompes de personne. Je te dis et le répète que tu n’es qu’une femmelette. Et si tu ne sais pas comment séduire Arielle alors ne cherches pas à obtenir des infos de ma part. GONFLE. 

- Ohhhhhhh ! La ferme Synthia. Je ne t’appelle pas pour tes conneries, mais juste pour savoir où tu en es en ce qui concerne la disparition de David. 

- Occupes-toi de tes oignons et vas voir ailleurs si j’y ai déposé mon postérieur. 

- Minalmi ! Je vois que…laisses tomber. J’essaies de me contenir pour ne pas t’insulter, parce que là, tu dérailles. 

- Ohhh fiches le camp !!! Et puis quoi encore ? David n’est pas ton fils que je sache. 

- Mais c’est mon filleul !!

- Au même titre que moi. Alors tu te calmes, poussin et tu regardes comment une déesse peut se charger Toute seule de gérer les situations troubles que TOI tu ne saurais gérer. Mets ton pétard sur ce qui te sert de chaise et prends note parce que je ne me répéterai pas. Et si seulement, tu es avec Arielle, dis-lui que lorsque j’aurai ramené David à la maison, qu’elle s’attende à ce que je lui rende la monnaie de sa pièce. 

- Sérieux, tu as complètement perdu…Ding. Allo, allo. 


Il a tenté de la rappeler par la suite, mais ça sonnait dans le vide avant que ce ne soit complètement indisponible. En tout cas, rien ne m’étonnait plus avec Synthia. 

A la maison, nous sommes restés ainsi en silence sans cesser un seul instant de rentrer en contact avec Synthia. C’est alors que Lucien a proposé de contacter la police et de déposer un avis de recherche ainsi qu’une plainte contre Marc-Levy. 

- Mais mon fils, il se fait tard, tu ne peux pas te rendre dans un commissariat à cette heure-ci. Avec tous les bandits qui traînent dans la rue, tu risques de te faire agresser sans pitié. Nous sommes déjà assez inquiets comme ça, n’en rajoute pas stp. 

- Je sais maman et je suis désolé. Mais je n’y peux rien, il faut que j’y aille. Il en va de la vie de David. Et je ne peux pas rester ici à me tourner les pouces pendant que ce gamin n’est pas à nos côtés. Je n’ai aucun ami policier à qui je m’adresserai et surtout je ne dispose d’aucun contact dans ce milieu. Je vais donc devoir m’y rendre.

- Maman a raison. Il se fait tard pour ressortir. Et nous ne te laisserons pas faire. Tu n’as peut-être pas des connaissances dans la police, mais moi si. 

Je suis allée fouiller dans mes affaires pour retrouver le nom de l’officier de police qui m’avait reçu le jour où j’ai ramassé David. Finalement, après avoir longtemps cherché, j’ai fini par le retrouver : Mr Serges FOUDOUX. Je l’ai contacté et lui ai fait état de la situation. Il est arrivé chez nous aux environs de 22 heures, avec deux autres de ses co-équipiers. Il a recueilli nos dépositions et nous a fait comprendre qu’il fallait attendre jusqu’au lendemain avant de lancer la procédure. Je n’ai pas fermé l’œil de la nuit, jusqu’à ce que je ressente un violent coup en plein cœur. On aurait cru qu’il m’avait été arraché. Et là j’ai commencé à redouter le pire.

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La procédure avait été lancée le lendemain. Les policiers se sont rendus au siège de Sublime pour prendre des renseignements sur Marc-Levy et sur son domicile. Sur place, ils avaient rencontré Alex qui leur avait fait comprendre que Synthia était passé par là la veille, et qu’il était étonné de savoir que le petit n’était toujours pas rentré. Il leur a remis l’adresse et s’est porté volontaire pour les accompagner afin de tirer certaines choses au clair avec M…, je préfère ne pas prononcer ce nom.  

Là-bas, ils ont découvert que le domicile de ML n’était qu’une maison abandonnée. Ce qui remettait en cause toute l’enquête. On a essayé de joindre Marc mais rien y fit. Et comme par hasard, son numéro n’était plus attribué. Quelle poisse !!! Pendant tout ce temps, il m’était formellement interdit d’être sur le terrain avec les policiers. On m’a fait comprendre que c’était un moyen pour moi de ne pas subir trop de pression ou encore d’en faire une affaire personnelle. J’étais donc obligée de rester à la maison, me contentant d’avoir mon téléphone entre mes mains pour recevoir les infos et surtout les appels probables de Synthia. Pour me rassurer, Lucien a rejoint l’équipe question d’être mes yeux et mes oreilles dans cette affaire. 

Après avoir découvert le faux domicile de ML, les policiers ont commencé à émettre des hypothèses. On a contacté les frères de Synthia pour savoir si elle s’était peut-être réfugiée chez eux par peur. Mais ils étaient surpris d’entendre parler d’elle puisqu’elle avait coupé les ponts avec eux depuis près de deux ans pour des raisons inconnues. On a cherché dans l’entourage de ce salaud. Quels sont ses amis, les membres de sa famille ? Rien, surtout qu’ils n’avaient pas ses empreintes, ni des pistes pour être orientés. Toutes les pistes, les astuces, les stratagèmes sont tombés à l’eau. Chacune menait tout droit contre un mur. Pendant les deux jours, ils ont fait le tour des hôpitaux et des morgues pour tenter d’y trouver quelque chose, mais rien. A un certain moment, on a pensé que nous n’allions plus jamais les revoir. Si j’avais pensé qu’ils devaient rentrer sans vie, j’aurai parié ma tête à couper. 

Le troisième jour, dans la matinée, quelqu’un a contacté la police ainsi que les urgences, pour signifier avoir frôler un meurtre et qu’une femme et un enfant étaient en danger. La personne a indiqué le lieu où elle se trouvait avant de s’évanouir. Le dit-jour, ladite matinée, j’ai décidé de faire un saut chez Synthia pour y récupérer ma pochette et quelques effets de David. Par rapport à mon état d’esprit de ce temps, maman a tenu à m’accompagner après avoir longtemps insisté. Et avec le recul, elle avait bien fait. Je ne sais pas comment j’aurai agi sans elle. Si j’avais un seul instant imaginé ce qui nous attendait.

Nous sommes arrivées dans la concession. L’appartement de Synthia se trouvant au troisième et dernier étage, nous avons commencé à gravir les escaliers. Au fur et à mesure que nous montions, j’ai constaté qu’il y avait des gouttes rouges, on aurait cru du sang, après ce sont devenues des tâches, pour faire place aux flaques et enfin des grandes empruntes à même le sol marqué par le sang. J’ai tout de suite paniqué et me suis tournée vers maman qui a eu la même expression intriguée que moi. J’ai commencé à courir en gravissant les marches avant de découvrir : 

- Oh non !!! SYNTHIAAAAAAAAAAAAAAAAAA !!!!!!!! ai-je crié. Il était difficile de la reconnaitre. Son corps était tuméfié, son crâne chauve, une robe trop grande pour elle. Etant couchée sur le ventre, je l’ai retournée et là j’ai découvert….. Non, non, NONNNNNNNNNNNNN !!!!! David !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

Il était déjà en train de se décomposer. Mon enfant !!!! Synthia. J’ai essayé de la remuer, pour qu’elle se réveille, mais, maman a stoppé ma main, pour me dire

- Chérie, ils…ils ne sont plus là. 

- Comment ils ne sont plus là ? Ils sont là devant nous, ne les vois-tu donc pas ?

- Je veux dire qu’ils sont morts. 

- Ils sont ? 

Je ne sais plus ce qui s’est passé, mais lorsque je suis revenue à moi, j’étais en train de gigoter et Lucien me serrait dans ses bras pour m’empêcher de me débattre. La maison était pleine à craquer des personnes que je connaissais et d’autres qui m’étaient inconnues. Mes voisines me regardaient d’une manière suscitant la pitié. Et ma mère tellement sereine, que je me demandais comment elle faisait pour ne pas éclater en sanglots.  

Je ne sais combien de temps s’est écoulé, mais à mon réveil, je me suis sentie toute étourdie. Je me suis souvenue de ce qui s’était passé et là j’ai éprouvé une douleur que je n’avais encore jamais ressentie, même lorsque j’avais perdu mon père. J’avais l’impression d’étouffer de l’intérieur. J’ai donné des coups de poing dans le mur pour me défouler mais rien n’y fit. C’était toujours là, dans mon intérieur, en train de grandir, de prendre de l’ampleur, de m’embraser. C’est alors que j’ai eu la somptueuse idée… Je me suis dirigée vers la cuisine, j’ai cherché dans mes armoires et j’ai trouvé ce qu’il me fallait : un couteau. Je l’ai pris et enfoncé de toutes mes forces dans mon ventre. Quelques minutes plus tard, j’ai vu le sang se déverser et j’avais la sensation de basculer, de passer de l’autre côté, d’échapper à toutes les souffrances………

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A présent je suis attachée de part et d’autre de mon lit d’hôpital. On m’a dit que j’y suis depuis trois semaines et que je suis sous sédatifs. Ce qui m’aide à me calmer. Pendant tout ce temps, Lucien est à mes côtés. Le voilà qui vient :

- Te voilà réveillée !!!

- Hum !!!!

- C’est bien. Ne te laisses pas abattre. Je sais que c’est dur ce que tu traverses mais tu dois te relever ne fût-ce que pour que justice soit rendue. 

- Hum. 

- Bien, le médecin dit que tu ne peux pas encore bien parler mais ça viendra. 

- Hum !!!

- J’ai une bonne nouvelle pour toi aujourd’hui. 

- Hum !

- Oui. La personne qui a aidé la police à trouver la planque de ce taré n’est autre que : roulement des tambours,  Mr Cédrick.

- Hum ????

- Oui, il avait contacté la police avant de tirer sa révérence. 

- Hummm !!!!!!!

- Calmes-toi !!! Enfin, ils l’ont retrouvé mort sur place avec deux balles en plein abdomen. Ils ont déduit qu’il était mort. Mais….

- …..

- A leur grande surprise dans l’ambulance qui le ramenait à la morgue, il a commencé à bouger ses doigts puis sa main. Ils l’ont emmené aux urgences. Et là il se retrouve aux soins intensifs dans le même hôpital que toi. Il a les côtes cassées, deux organes touché et lui-même plongé dans le coma. Les radios ont montré que son cœur est du côté 

- Droit.

- Oui, c’est bien ça !!!

- Hum

- Marc-Levy c’est ça ? Oui, il n’a pas encore été attrapé malheureusement. 

- Hum, il…va ….me ….payer, tout ça. 

- Oui, il va nous le payer et ce amèrement. 



Cœur en chantier