ET L'OBSCURITÉ S'INTENSIFIA...
Ecrit par Chelso
Point de vue Georges :
'' Deux semaines. Deux semaines que mon univers a basculé. Deux semaines que je broie du noir. Deux semaines que Féli a perdu la vie. Deux semaines que je culpabilise a fond.
Je ne sais même pas ce dont je suis coupable... D'être tombé amoureux ? D'avoir fait un rêve ? Mais cela arrive a tout le monde ! Pourquoi le destin s'acharne t'il contre moi alors que je n'ai fait qu'avoir des sentiments et un subconscient ?
Maman a essayé comme elle pouvait de me redonner le sourire. Elle n'y est pas arrivée. Elle a essayé comme elle pouvait de me faire dormir. Mais j'avais tellement peur...
Depuis le drame, j'ai du mal a me coucher et a fermer les yeux, pour dire que je veux dormir. Impossible. J'ai trop peur. Alors, depuis deux semaines, je me gave de fortifiants, de café, de jus de citron, de coca, de Lamaline ( médicament assez puissant, a base d'opium et de caféine, qui booste énormément ). Tout pour ne surtout pas m'endormir. Ma pauvre mère. Elle avait pitié de moi. Je ressemblais a un zombie. Un vrai mort-vivant. Je lui faisais de la peine, je le savais, mais avais-je le choix ? D'autant plus qu'elle pas au courant de mon rêve. Elle pensait simplement que j'étais aussi mal a cause de la mort de ma ménagère. Et je ne voulais rien lui dire. Même si elle faisait de son mieux pour prendre soin de moi, je sentais qu'elle se fatiguait beaucoup trop.
Alors je décidai de lui faire une surprise. Un après-midi, je quittai mon boulot, et pris la direction de la ville, avec l'intention de lui offrir une séance au spa. Relaxation et détente. Je voulais quelle oublie un peu les malheurs des derniers jours. J'étais au volant depuis a peine quelques minutes, quand je sentis un parfum doucereux me chatouiller les narines. Pour avoir eu un frère aîné agent fédéral, je connaissais certaines odeurs. Et celle là, c'était clairement celle d'un somnifère. Puissant, apparemment, puisque je me sentis faiblir. Très rapidement.
J'eus a peine le temps de me garer sur le bas-côté. La dernière pensée que j'eus fut de me demander qui avait pu mettre cet assommant dans ma voiture. Et ce fut le noir complet.
Deux heures plus tard, je me réveillai en sursaut, paniqué et désorienté. Peu a peu, j'émergeai. Et au fur et a mesure que je repris connaissance, une peur irrationnelle m'envahit.
Je démarrai au quart de tour. Avant que le somnifère dissimulé je ne sais où ne m'abrutisse encore plus. J'avais une autre préoccupation a régler.
Je m'étais endormi.
Pendant deux heures.
Et j'avais rêvé.
De ma mère.
Il fallait que je la retrouve. Et plus vite que ça. Freinant en catastrophe devant la maison de mes parents, je sortis en trombe du véhicule; d'autant plus qu'un mauvais pressentiment me tenaillait. Un mauvais pressentiment qui ne fit que s'aggraver lorsque j'entendis le cri déchirant de mon père traverser l'espace. Je n'eus pas besoin de le voir de mes yeux. Je compris... Je compris qu'elle était partie.. Je ne sais quelle force me propulsa a l'intérieur de la maison. Je ne sais où je trouvai l'énergie pour me rapprocher de son corps, étendu par terre, sans vie. Elle était exactement habillée comme dans mon rêve. En robe fleurie, et sandales. Sauf que cette fois ci, la couleur n'avait pas été identique. Dans mon rêve, sa robe était rouge. Dans la réalité, elle était grise. Le gris était la couleur préférée de maman, a cause de son impersonnalité, de son caractère froid et de son aura neutre. Maman adorait les vêtements et les couleurs passe-partout... Et le gris faisait partie de cette catégorie.
Pourquoi ? Pourquoi l'avoir tuée dans la couleur qu'elle adorait ? Pourquoi cet acharnement contre moi ? Pourquoi ... Pourquoi tout, merde ! Tellement de questions.. Tellement de non-dits.. Tellement de mal.. Ce jour-là, je ne résistai pas. Effondré, a bout, je racontai tout a mon père. Sans rien omettre. Et je supoortai son regard accusateur pendant de longues minutes.
Quand enfin il prit la parole, ce fut pour m'asséner des paroles qui me plongèrent encore un peu plus dans le gouffre profond où je me noyais déjà. En quelques mots, il me brisa. En quelques mots, il me renia. Le pire, c'est que je savais qu'il avait raison. C'était juste une tentative désespérée de sauver le reste de sa famille. Même s'il savait que c'était inutile. Il ne savait comment c'était possible, ni pourquoi, mais au fond de lui, il savait, en tant que père, que c'était irréversible. Ce processus, enclenché contre leurs volontés, ne pouvait être arrêté en un claquement de doigts, alors autant essayer de limiter la casse. Et c'était ce que mon père essayait de faire en me bannissant.
Tête basse, je tournai les talons. Je déposai la clé de ma voiture sur le guéridon, pour lui montrer que je renonçais de moi même a tous les biens qu'il m'avait donnés. La clé de mon bureau, que j'avais quitté en catastrophe, pour lui montrer que je renonçais aussi a l'entreprise familiale. Que je partais, loin, pour essayer de me reconstruire, de me refaire. Et surtout, que je partais. Oui, mon départ était nécessaire. Alors, je tournai le dos a ma maison d'enfance. A ma famille. A mon avenir foutu en l'air. Mais je ne pouvais partir sans dire au revoir a maman. Au revoir et surtout.. Pardon..
Le jour de son enterrement, je restai loin...
De loin, je vis le cercueil descendre en terre. Les larmes coulèrent.
De loin, je vis mes proches jeter une poignée de sable sur le cercueil en bois. Les sanglots me secouèrent.
Au revoir maman... Pardon, maman... Je t'aime... Tu me manques... Pardonne moi ... Et protège moi.. Ne m'oublie pas. Mais surtout, pardonne moi..
Je me retourne, le coeur broyé par un étau qui se resserre a chaque pas que je fais loin d'elle. Et je m'en vais.
J'ai quelque chose à aller faire. Je dois aller voir cette tante. Elle a toujours été une bonne conseillère, elle saura me guider...''
Les choses se passaient plutôt bien. Beaucoup mieux que ce qu'elle avait espéré. En quelques semaines a peine, ce stupide enfant avait tué Félicité et ensuite sa propre mère. Et en plus, ses affaires étaient a terre, sa famille lui avait tourné le dos et son argent s'était fait la malle. Mais le plus drôle, dans toute cette histoire, c'est qu'il l'avait appelée pour prendre rendez-vous. Ce niais de Georges DaSilviera l'avait sollicitée pour ses ''judicieux conseils'' . s'il savait.
Mais, elle allait lui en dîner, des conseils. Et en quantité suffisante, même.
Il devrait arriver d'une minute a l'autre...
Elle sourit. Sereine. La sonnerie retentit. Et son sourire s'élargit...