J'observe
Ecrit par Gioia
Michael Koumah
Je ris encore suite à la révélation de Yannick. La
virginité je comprends, je ne suis pas con, je sais qu’il existe encore des
filles « pures ». Mais c’est quoi l’histoire du choix de l’abstinence
par-dessus la virginité. Bon, n’assumons rien. D’ailleurs je n’écoute plus les
raisons de mon cousin. Je ne vais pas dire que je me voyais en couple avec
Madina le mois suivant, mais je ne suis pas indifférent à son charme. Avec le
temps je me suis attaché à sa réserve et son petit côté coquin qu’elle me sort
sans prévenir. Le mélange de ses deux facettes me donne envie de connaître les
autres parties enfouies d’elle. Et si je peux fouiner dans sa culotte dans la
foulée c’est plus qu’un bonus. Un gros bonus auquel j’ai hâte si je me fie à
l’attirance entre nous. Les jours suivants, je décidai donc de faire fi des
fameux conseils de Yannick et d’observer pour tirer mes propres
conclusions.
L’observation m’a pris un mois. En plus de la voir
chez elle, j’avais intégré la chorale de leur église donc on se voyait presque
au quotidien. Et non, je n’ai pas rejoint la chorale pour ses beaux yeux. En
dehors de mon désir primal tout à fait normal, je reste quand même un enfant du
Seigneur qui aime le servir. C’est juste que je suis comme les téléphones
tactiles, très sensible au toucher, donc refuser le sexe c’est une mission
impossible pour moi.
Ce soir en revanche, je me fais beau et j’attends
Madina de pied ferme chez moi. J’ai essayé le flirt, les sous-entendus et
blagues, mais la sœur ne mord jamais à l’hameçon au point que je commençais à
perdre mes moyens dernièrement. Je me demandais même si j’avais rêvé son regard
rempli d’intérêt que j’ai aperçu durant nos échanges et ses frémissements durant
nos câlins amicaux. J’ai donc décidé de changer de méthode. Je me lance ce
soir, tête la première et si je peux atterrir entre ses jambes, pourquoi pas ? Je serai plus que ravi de servir son temple. Ta
gueule, l’optimisme n’a jamais tué l’humain, dis-je à Didina qui s’est mis à
aboyer.
En ce qui concerne son état de santé, elle ne m’a
pas donné plus de détails, en dehors du fait qu’elle souffre d’une maladie
congénitale. Je n’ai pas voulu la presser, c’est après tout un sujet délicat,
mais ses épisodes de souffrance sont trop fréquents à mon goût et je n’aime pas.
Laure de son côté ne démord pas sur le fait que je dois laisser son amie
tranquille. Yannick pour sa part, a décidé de ne plus se prononcer, me
demandant uniquement d’agir prudemment.
La soirée était lancée. Petit vin à l’appui,
salade déjà prête, vinaigrette à côté et le poulet de Grillado’s, réchauffait
doucement au four. Elle n’était pas en reste côté classe. Une chemise en satin
vert kaki et un pantalon taille haute noire. Maintenant que je la côtoie régulièrement,
j’ai remarqué qu’elle a un style spécifique dont elle ne s’éloigne jamais. Tu
ne verras jamais ses jambes et c’est justement le truc le plus incompréhensible
pour moi. Comment expliquer le fait que je sois attiré comme un aimant par une
fille dont les parties les plus excitantes que j’ai vues en dehors de sa
silhouette dans ses tenues sont ses clavicules ? Je suis déjà dedans de toute façon donc avançons.
Je lui propose du vin, mais elle le décline à
cause des médicaments, détail que j’avais complètement oublié, et me note
mentalement de ne plus jamais faire. On se met à table sans tarder tandis que
Didina nous graciait de ses aboiements. Ce chien a des problèmes d’attention j’en
suis sûr.
– Coucou choupinou, dit-elle à son endroit.
– C’est parce que tu l’appelles comme ça qu’il
devient accro à toi
– Jaloux ?
rigole-t-elle espiègle.
– Oui. Papa aussi a besoin d’attention non.
– Lol le vieux.
Énième tentative de flirt à l’eau. On ne casse pas
l’ambiance des gens comme ça. Non. Ce n’est pas bien. Bref, je lui propose un
jeu de cartes classique à la fin du repas et rajoute une condition.
– Je veux une mise.
– Une mise ? De quel genre ?
– Je veux pouvoir te poser toutes les questions
que je veux.
– OK, va pour ça.
Je commence le cœur joyeux, avec des questions
anodines, la faisant rire puis me lance quand je sens le moment propice.
– Tu me plais énormément Madina.
– Euh ce n’est pas une question ça.
– Non, dis-je en souriant, la question c’est,
est-ce que c’est partagé ?
Elle baisse la tête puis la relève avec ce regard
qui réveille les sensations en moi.
– Oui je t’apprécie énormément
– M’apprécier ? Ça c’est pour les amis. Pour toi je ne suis que ça ?
– Non, en fait oui, comme un ami d’abord, mais
plus que ça. Je me sens en confiance et à l’aise avec toi. Toi tu ne m’apprécies
pas ? me demande-t-elle d’une petite
voix.
– Je n’ai pas envie des femmes que j’apprécie
généralement, je lui dis tout bas en me rapprochant d’elle pour lui montrer à
quel point je l’avais dans la peau, mais fus arrêté par sa main chaude sur ma
bouche.
– Je ne pense pas que ça serait une bonne
idée.
– Tu as dit ressentir plus que de l’appréciation
pour moi, dis-je confus.
– Oui bien sûr.
– Tu ne veux pas qu’on explore ça ?
– Si, justement.
– Alors pourquoi ne veux-tu pas que je t’embrasse ? poursuivis-je plus perdu que jamais.
– Ce n’est pas de cette exploration que je
parle. On peut apprendre à se connaître un peu plus.
– Mais on le fait déjà. Les baisers sont la
suite logique de l’apprentissage.
– Pas pour moi. Je ne veux pas de baisers, du
moins pas encore, avoue-t-elle calmement.
– Quel est le but au juste ?
– Que veux-tu dire ?
– Selon toi, nous continuons à nous connaître
et puis quoi ? On aboutit à quoi ?
– L’amour, murmure-t-elle.
– OK je comprends, tu préfères être sûr que
je t’aime d’abord. Il n’y a pas de problème, fis-je rassuré.
– En fait, je préfère être abstinente jusqu’au
mariage.
– Quoi ? Jusqu’au
mariage ? dis-je incrédule.
Certes Yann m’avait prévenu, mais l’entendre
venant d’elle m’étonne davantage.
– Yep
– Et quel est le but de cette démarche ?
– Aucun en particulier sinon que j’ai connu
beaucoup de souffrances dans ma vie et si j’en suis ici c’est par la grâce de
Dieu alors c’est le moins que je puisse faire, m’éclaire-t-elle et je comprends
mieux. C’est une affaire de reconnaissance.
– C’est très louable de ta part. Mais tu sais
que la grâce ne se rembourse pas n’est-ce pas ? On la reçoit par miséricorde donc, quel que soit ce que tu fais tu ne
pourras jamais rembourser Dieu.
– Je sais. Je n’ai pas dit que je le
remboursais. Ce sont juste les raisons qui me motivent vu que tu m’as demandé.
– Du coup comment ferons-nous alors d’ici le
mariage ? Je ne conçois pas de me
précipiter dans une union si sérieuse parce que je veux coucher avec toi et
j’ai une libido élevée qui demande que je consomme régulièrement, lui expliqué-je
aussi et ce fut à son tour de me regarder surprise.
– Je pensais que toi un fils de pasteur me
comprendrait mieux que quiconque.
– Fils de pasteur ou pas je n’ai que du sang
dans mes veines et m’imposer des limites en présence de ma go à cet âge est
absurde pour moi surtout si je vois qu’elle me désire comme je la veux. Les
relations ont déjà leur lot de complications alors pourquoi se rajouter la
frustration par-dessus ?
– Que veux-tu exactement dire ?
– Que je peux patienter le temps de te
rassurer, mais pas plus que ça. J’ai besoin d’une relation adulte et si on ne
peut pas avoir ça, je ne suis plus sûr d’être intéressé.
Elle me regarde pendant des minutes qui me
semblent durer une éternité puis s’avance vers la porte et marque une pause
main sur la poignée.
– Tu sais de tous mes handicaps, le sexe
était bien le dernier pour lequel je me voyais un jour être rejetée. Bonne
nuit, me souhaite-t-elle avant de fermer la porte.
Maintenant pourquoi j’ai l’impression d’être passé
pour un rigolo alors que j’ai été honnête ?