Jour 21 : Under control

Ecrit par Owali

*** RACH ***


« Nous n’irons plus au bois, des têtes seront coupées, la belle que voilà, ira les ramasser

Entrez dans la danse, voyez comme on danse, coupez, brûlez, égorgez qui vous voulez

La belle que voilà, ira les ramasser, car les têtes du bois, finirons par tomber

Et chacun à son tour sera décapité »


Décapité ? Je ne l’ai pas encore fait, je devrais essayer. 


Quand les comptines de l’enfance sont aussi inspirantes que les muses, je ne peux que jubiler. Les paroles sont quelque peu différentes mais j’aime la flexibilité qu’elles offrent. 


On peut les remplacer par celles sorties de notre imagination sans que le chant ne perde sa douce sonorité et le calme qu’elle inspire.


Et si je décapitais la tête de Solène ? 


Naaan, même décapité, je mets ma main à couper qu’elle pourrait continuer à geindre et pleurer comme elle le fait depuis le début de cette aventure. Je la pensais plus résistante, plus forte et je constate avec effroi qu’elle est tout le contraire de la femme forte qu’elle prétend être, un peu comme Sissi. Elle aussi m’a déçue. Grande gueule pour rien, même pas capable d’ôter la vie. D’ailleurs je me demande ce qu’elle fait ?


Je fais pivoter mon siège pour me retrouver en face d’une multitude d’écrans, me permettant d’avoir un œil sur l’ile, mon île. 


J’entre les informations permettant d’orienter ma recherche vers Sissi et bien vite, les écrans me montrent sa position. 


Apeurée, recroquevillée sur elle-même ses bras entourant ses jambes dans un geste protecteur, elle observe d’un regard absent l’étendu d’eau se trouvant face à elle. J’appuie sûr le bouton zoom, et agrandis l’image de son visage. 


Elle est complètement paumée.

Je souris. 


Je devrais lui préparer une petite surprise afin de mettre un peu de piment dans sa vie sur l’ile. 


La tuer pour la tuer ce n’est pas intéressant. 

La briser et la tuer à petit feu les beaucoup plus. 


Soudain, elle se lève, se met à courir sur une bonne distance avant de s’arrêter spontanément et crier:


« AAAhhhhhhhhhhhh Qu’est-ce que vous nous voulez, montrez-vous et dites nous ce que vous nous voulez. Ça vous amuse de nous voir souffrir et perdre la tête ? »


Ôh que oui, tu n’as pas idée. Vraiment pas Sissi. Je vous ferai tous souffrir et ressentir la douleur que j’ai ressentie, l’amertume qui m’a habitée après que vous m’ayez estimé indigne. 


« Tu n’as pas cette flamme qui fait danser l’imagination, qui exalte les sens, assèche l’esprit à la recherche de plus d’intrigue, plus de passion ». 


Mais aujourd’hui vous êtes aux premières places pour admirer l’œuvre de ma vie. J’ose espérer que vous saurez dorénavant revoir votre jugement erroné à mon propos après ces quelques jours passés sur mon île. 


Quoi qu’au vu du temps mis pour découvrir que vous étiez plusieurs, j’ai quelques doutes chère Sissi. 


Le spectacle devient pathétique, elle s’est jetée au sol et pleure à chaude larme. 

Ça me dégoute. Je vais regarder ce que font les autres.


Pitoyable. Ils sont tous dans un état pitoyable. 


Ils passent leur temps à se plaindre, à se suspecter les uns les autres sans réellement chercher qui se cache derrière tout ça. Pourtant je fais l’effort de leur donner un indice à chacune de mes interventions. Les douze bougies, les douze flèches dont les pointes sont rouges et ont toutes une gravure « verba volant, scripta manent » ( les paroles s’envolent, les écrits restent) et pourtant personne ne les a vues. 


Quelle déception. 


Seul Délomè et JK semblent intéressants. En parlant, de lui, il a sûrement dû recevoir ma surprise. 


J’oriente les caméras vers la cabane et souris en voyant JK, saliver devant le corps nu de Bella, telle un animal en rut, au point de donner l’illusion que sa queue frétille comme celle d’un bon petit chien. 


Il va adorer sa gâterie. 


Je vais le laisser profiter pendant quelques minutes, ce sera sa récompense pour avoir fait preuve d’autant d’entrain depuis le début du jeu. 


Mais pour l’heure je dois nourrir mon invitée.


J’attrape le jeu de clés posé sur mon bureau, fais un tour dans le coin cuisine avant de me diriger vers la porte menant au sous-sol. 


Je me tiens à la rambarde, descends les escaliers puis appuie sur l’interrupteur se trouvant près des marches. 


Une odeur nauséabonde, mêlant la pisse, la merde et la moisissure, vient titiller mes narines, et cette odeur amplifie à mesure que je m’avance vers elle. Cette forme qui tient à peine debout et dont les mains sont liées par de lourdes chaines suspendues en hauteur.


-Bonjour Liliane…


Les cheveux en avant, cachant son visage, elle se met à gémir et bouger légèrement sa tête sans parvenir à la relever pour me faire face. Je relève sa chevelure pour me retrouver devant un visage pâle, aux yeux-mis clos, les pommettes creuses, et les lèvres asséchées. Même ses clavicules sont visibles. 


Stan manque cruellement de savoir vivre.


-Je te prie d’excuser la rudesse de Stan. Oublier de t’alimenter et te permettre de faire tes besoins pendant 7jours est totalement impardonnable mais que veux-tu, je ne peux pas le changer.


-..Huuumm..


-Oh oui, la lumière, dois surement t’aveugler les yeux, je te prie de m’excuser…. Mais tu vas devoir prendre sur toi. Je t’ai ramené du jus d’orange, que j’ai fraîchement pressé ce matin, et quelques fruits dont des baies de goji, je sais que tu aimes ça. Une gorgée. En même temps, si tu n’as pas mangé depuis tout ce temps, je doute que ce soit une bonne idée. Il y a de l’eau de ….merde ! Des chaussures neuves Liliane !


Quelle conne, elle vient de se pisser dessus agrandissant la flaque d’urine déjà présente.


Stan viendra s’occuper d’elle !


Je sors de la pièce, après avoir éteint la lumière puis retourne dans mon bureau, récupérer mon… tiens tiens. Que fait-elle là…


Décidément cette Solène sera toujours accro à la queue de Jilly… 


Tel une mise en abyme, je l'observe, observer JK recevoir son petit cadeau avant d’aller se cacher dans les fougères lorsque Stan et Bella sortent de la cabane. 


Voyons voir jusqu’où va son courage du moment.


Grâce aux caméras installées à quasi chaque m2 de cette île, j’arrive à la suivre et entendre ce qu’elle dit. Ça me rappelle qu’il va falloir que je bloque le réception satellite du téléphone de JK, et que je restreigne les images qu’il pirate via la salle de contrôle. Cette salle où sont réunis divers ordinateurs, un peu à l'image de mon bureau, et qu'il a découvert il y a quelques jours et qui lui permet d'avoir accès aux caméras se trouvant sur l'île. 


J’ai crée cette salle pour le distraire et ça marche assez bien.


C’est assez drôle de le laisser croire qu’il a un coup d’avance sur moi. Il se sent bien trop intelligent pour ne pas se faire manipuler, s’il savait qu’il faisait exactement tout ce que je veux…


Et voilà qu’elle me déçoit de nouveau, aller lui mettre un pansement ? Alors qu’il vient de fourrer sa queue dans le vagin d’une salope autre que toi ? 


Tu devrais prendre ta dignité pour l’enrouler autour de sa queue, Solène, elle guérira sûrement plus vite.


-Boss. Ai-je entendu derrière-moi. Co...


-Chut. Ne m’adresse la parole que lorsque tu auras nettoyé le sous sol, et mes chaussures. Fais-je sans même avoir besoin de me retourner. 


-Rach, je peux y aller. Me demande Bella


-Pourquoi ? Tu es pressée de nous quitter ?


-Non, c’est que…


D’un geste impérieux, je l’invite à se taire et me laisser écouter le récit qu’expose Solène à Jude grâce l’un des micros se trouvant dans leur campement.…


«Je pense qu’on peut réussir à retourner la tendance»


«Comment ça ?»


«Je crois avoir un plan pour enfin partir de cette île…»


Et bien et bien…


-Boss, on fait quoi de l’inviter ? Me demande au même instant Stan 


-On va prendre soin d’elle. Bella, retire tes vêtements.


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(JOUR 20)


Après avoir passé la soirée à décrasser notre invité, j’ai décidé de la libérer et l’ai gentiment conduit vers la cabane.


-Je ne comprends pas pourquoi vous la libérez, elle sait maintenant qui vous êtes


-Justement, je ne te paie pas pour comprendre mais pour exécuter. Puis sache qu’après une semaine passé dans le noir, sans alimentation, elle n’a pas pu être en mesure de voir quoi que ce soit.


Je reporte mon attention sur les écrans, où apparaît Liliane, vêtue des vêtements que Bella portait la veille, en train de tituber à la recherche d’un appui. C’est à peine si elle tient debout. Elle est sur le point de s’écrouler lorsqu’elle se retrouve tiré par une corde et que Solène sort des bois…Avec un énorme caillou en main et se rue sur Liliane. 


Là ça devient intéressant…


-Elle se contentera de l’assommer. Lance Stan


-Oh non, c’est une femme, elle est jalouse et en colère. Il n'y a pas plus stupide comme combinaison. Elle va la tuer. Murmuré-je fièrement. Elle va avoir du sang sur les mains


« Non non non ! Pas ça, s’écrit Jude »


« Pas quoi ? L’interroge JK »


« Ce n’est pas sa copine, c’est … c’est … Seigneur Dieu tout puissant aide nous ! »


« Tu vas parler oui » crie JK 


« Oh merde ! Liliane ! » repend J.K qui s'est rapproché après le silence de Jude


«QUOI ? »


La scène qui se joue devant moi et tout simplement fascinante à souhait, Solène le visage baigné du sang de Liliane qui a giglée sur elle à chaque coup profond qu’elle assénait. 


Son visage ensanglanté déformé par la peur et les remords,qui contemple avec horreur son exploit. 


Je me suis trompée sur elle, elle remonte dans mon estime.


-Allez, maintenant, regarde ton cadeau


Comme si Jude pouvait entendre ma voix, il retire lentement le bâillon qui empêchait Liliane de parler, puis porte son attention sur le petit bout de papier qui dépasse du point fermé de Liliane,


« Oh mon dieu » dit-il après avoir lu le ce qui y était inscrit

« Qu’est-ce qu’il y a d’écrit » demande J.K

« C'est un passage de son livre et... et... il y a inscrit dessus : Plus que 10 » lui répond Jude d’une voix monotone 


« Oh non... Qu’est-ce que j’ai fait ?!?»


Une douce sérénité m'envahie très vite suivie des paroles revisitées de la fameuse comptines:


« La belle que voilà, aura les mains souillées, car la tête du bois, elle va la cabosser » chanté-je fièrement


Au même instant, l’écran filmant Dolémè attire mon attention. 


Elle semble être parcouru de spasmes et ses yeux deviennent blanc quelques secondes avant de s’évanouir.


-Je sens que je vais dormir comme un bébé ce soir...


-Et pour l’avion ? Me demande Stan


-Chaque chose en son temps boy. Chaque chose en son temps…


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Je n’ai pas pu dormir. 


L’excitation était à son paroxysme. J’ai passé la nuit à regarder ce lâche de JK dépourvu de toute sa superbe face « au malencontreux drame qui s’est déroulé » comme le répète Jude complètement aliéné. 

Il doit être reparti quelques années en arrière celui là. 


Ce matin, vers les coups de 5 heures, après que tout le monde se soit enfin endormi, je l’ai vu réunir le peu d’affaires, dont il disposait, sur la plage. Il compte les abandonner, dommage pour lui, l’hélicoptère qu’il attend ne viendra jamais.


Je sors d’un des tiroirs de mon bureau une petite boite noire qui n’est autre qu’un brouilleur de fréquences longues portées. 


Une fois activé, ce petit bijou va affoler les commandes de l’hélicoptère et empêcher qu’il s’approche de l’île. Il ne pourra que tourner en rond sans jamais parvenir à se poser. 


Je m’empare du téléphone puis du modificateur vocal et compose son numéro


-J’ai décidé de rester un peu plus longtemps, il est inutile de m’envoyer l’hélicoptère. Pour des raisons pratiques, je ne pourrais pas vous faire signe pendant plusieurs jours.


-Monsieur est-ce que tout va bien ?


-Parfaitement


-Vous n’avez donc besoin de rien ?


Je souris


-De rien malgré l’absence de notre présence bienveillante 


-Bien monsieur, passez un agréable séjour


Je souris de nouveau


-Assurément. Prenez soin de vous. Terminé-je avant de raccrocher et rire franchement


Ces deux dernières phrases étaient des questions de sécurité pour s’assurer que JK n’était pas en danger et qu’il ne s’exprimait pas sous la contrainte. 


Il est paranoïaque. A raison.


Je peux maintenant allumer le brouilleur.

LE CERCLE