La discussion

Ecrit par Kossilate

Chapitre treize : La discussion.


« Qui ne risque rien n'a rien. ». Cette phrase de Kira ne faisait que tourner en boucle dans ma tête et au fur et à mesure, je m'imprégnais tout doucement du véritable sens de ces mots. Pourtant, il fallut que je me retrouve confronter avec le départ imminent de Zayn pour que je me décide à agir. Je ne savais pas trop comment m'y prendre mais j'avais décidé de parler à Zayn, de lui dire ce que je ressentais, de lui dire ce que j'avais vécu…..du moins dans la mesure du possible. Pour cela j'avais besoin de me retrouver seule avec lui, loin de Yelen qui pourrait nous interrompre toutes les deux minutes, ou de Mia qui m’en voudrait sûrement de ne pas lui avoir parlé plus tôt. Je décidai donc de passer aux aveux loin de la maison et dans un lieu calme.


- Bonjour Phoebe, lança Zayn en prenant place à la table du petit déjeuner.



- Bonjour……bien dormi ????



- J'ai dormi comme un loir. Tu sais je vais bientôt partir et je doute de retrouver avant un certain moment, un lit aussi moelleux que celui-ci….alors je profite, répondit-il avec un clin d'œil à l'appui.



- En parlant de départ…. Tu as déjà préparé toute tes affaires ??



- Ouais toutes les valises sont bouclées. Je n'ai gardé que quelques habits pour me changer pendant la semaine restante.


- Ok




Mon ok sembla installer un blanc dans la conversation. Comme s'il coupait toute perspective de poursuite de la discussion…j'avais tout planifié pour la journée, j'avais même demandé à Mia de s'occuper de Yelen, mais là je ne savais plus comment proposer à Zayn de m'accompagner au parc. Notre relation super amicale et détendue semblait avoir pris un plomb dans l'aile en l'espace d’un café…non plus exactement j'avais perdu de ma confiance en l'espace d'un café et cela se faisait ressentir dans chacun de mes mots et de mes gestes. Je me braquais de nouveau. Pourtant, c’était ce jour mais aucun autre si je voulais prendre des risques. 


- Zayn…dis-je lorsque je fus devant l’évier, dos à lui.



- Oui….



- Ça te dirait qu'on aille au parc de waterfront ??



- …..Ouais pourquoi pas ?? Tu veux y aller l'après-midi ou…..



- Pourquoi pas maintenant ? Dès que tu finis ton repas.



- ……


- ….



- Ok. Laisse-moi passer un truc plus décent et on y va



- Cool, dis-je avant de sortir de la cuisine comme si j'avais l'enfer à mes trousses.



Dans un certain sens ce n'était pas tout à fait faux, puisque j'avais vécu cette conversation, non j'avais vécu toute cette journée comme un enfer. J'avais pris ma décision mais je ne cessais de la remettre en cause, de penser que je ne devrais pas me jeter aux devants d'ennuis. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle je n'ai pas voulu aller au parc l'après-midi. Comme on le dit chez nous, l’après-midi « c'était  trop loin » et j'aurai sûrement eu le temps de me convaincre que l'une des fausses raisons que j'avançais pour ne pas avoir à parler, était assez tangible pour que je n'ai pas à le faire. 


De plus, je pense que Zayn a dû comprendre que si je l'invitais au parc Waterfront, c’était pour discuter d'un sujet assez important. En effet, ce parc était en bordure de mer  et je n'y allais que lorsque j'avais envie ou besoin de réfléchir, de me ressourcer ou juste de me calmer, et je n'y allais jamais accompagner si ce n'est de Yelen.


 Dans ma chambre, j'enfilai rapidement un jean, un pull et un manteau. Nous étions en plein mois de Novembre et la température avait pas chuté mais carrément fait un plongeon. Lorsque je finis de m’enrober avec plusieurs couches de vêtements, je me laissais tomber sur mon lit et me contentait de regarder ma petite fille dormir. Depuis la veille je m'étais arrangée pour laisser Yelen à Mia, je n'attendais donc que le signal de départ de Zayn pour déposer mon cœur près de sa tata Mia. Je ne pense pas vous avoir déjà dit combien de fois j'étais heureuse que ma fille me ressemble. Comme pour me féliciter d'avoir gardé cette grossesse, le ciel lui avait fait avoir les mêmes caractères physiques, et comportementaux que moi, en plus d'une énorme curiosité et d'un énorme sens du goût….bon cela, ça venait plus de Mia et Kira qui l'a comblait avec toutes sorte de tenues. En parlant de tenues, je me relevai pour chercher ce que Yelen  allait mettre à son réveil au moment où j'entendis trois petits coups contre ma porte.


- Deux minutes Zayn....



-Je t'attends près de ma voiture….


Dès que j'entendis ses pas s'éloignés dans le couloir, je pris Yelen et sorti de la chambre. 


- Coucou Mia, dis-je en rentrant dans la chambre de cette dernière sur la pointe des pieds.


- Pfff Phoebe…..on est samedi…..me réveille pas à cette heure-ci…


- Désolée Mia, je veux juste déposer Yelen.


- Ah ouais j'avais oublié…..met la près de moi.


- Ok, répondis-je avant de poser ma fille à l'emplacement indiqué par Mia.


-


- À tout à l'heure. S’il y a un problème tu m'appelles ok ???ajoutai après avoir baisé le front de Yelen.


- Hmmm...vas-y maintenant.


Chaque pas que je fis de la chambre de Mia à la voiture de Zayn, je le ressentis comme  un étau qui me resserrait peu à peu la poitrine. Le voyage se fit en silence et lorsque nous arrivâmes au parc, je n'attendis pas que Zayn descende avant de  me diriger vers l'allée près de la mer. J'y attendis que Zayn m'y rejoigne car à partir de cet endroit le lieu auquel je voulais accéder n’était pas facilement déterminable.  Lorsque Zayn fut à mes côtés, je lui fis signe de me suivre. Nous traversions plusieurs bosquets qui se trouvaient dans la pente reliant l'allée à la bordure d'eau. Nous finîmes par nous  arrêter à quelques mètres de l'eau mais nous semblions isoler du parc. J'avais découvert cet endroit un jour où je faisais mon footing quelques semaines après mon arrivée à Seattle. Ce jour là, je courrais un peu trop près de la pente. Alors lorsque j'ai trébuché, c'est tout naturellement que j'ai dévalé la pente en roulant. Heureusement pour moi, la pente n'était pas très raide et à part quelques bosquets il n'y avait rien de bien dangereux sur mon chemin. Ce jour-là je m'étais rendue compte qu'il n'y avait personne dans cette zone la du parc et j'étais comme isolée,  comme dans un autre monde.


Pour en revenir, à ma situation initiale, une fois que nous fûmes en bas, j'emmenai Zayn vers un banc juste à côté et je lui fis signe de s’asseoir tandis que moi j'étais debout. Je n'avais pas besoin de camoufler la gravité de ce que je voulais lui dire car le simple fait de l'avoir invité à m'accompagner dans ce parc en particulier démontrait l'importance de ce que j'avais à lui dire. Je pris quelques secondes pour calmer les battements désordonnés de mon cœur mais il sembla que mes secondes s'allongèrent vite en minutes car Zayn finit pas céder à l'impatience.



- Phoebe……



- ……. 


- Je sens que t'as un truc à me dire et vu tous les bosquets que j'ai dû me prendre dans la figure pour arriver ici, j'imagine que c'est très important mais là je suis en passe de mourir de curiosité, continua-t-il en me lançant l'un de ces sourires dont lui seul à le secret.


- T'es bête. On ne meurt pas de curiosité…..



- On ne peut être pas du sentiment mais on peut mourir des actes que ce sentiment nous amène à poser.


- Ouais…..



- …….



- En fait, je voulais te parler d'un truc qui me tient à cœur et que ton départ imminent à en quelque sorte intensifier….. mais  je ne sais pas par où commencer.



- Commence alors par le début.


- Tu as raison.



- ……



- Ouf, fis-je en soufflant pour reprendre un peu de contenance.



- …..



- Je ne pense pas avoir la force de tout te raconter dans les moindres détails aujourd’hui. Mais je voudrais que tu saches que j'ai un passé assez houleux. Mes sœurs et moi sommes nigérianes et avons toujours vécu dans un petit village de Abeokuta jusqu'à mes dix-huit ans. Au cours de l'année de mes dix-huit ans, nous avons perdu notre mère et avons  dû nous débrouiller toute seules. Notre père…..n'était pas très présent et lorsqu'il était là, nous nous disputions beaucoup. 


- …..



-



- Un jour….nous sommes disputés un peu plus qu'ordinairement et cela s'est soldé par ma séparation d'avec mes sœurs. J'ai dû me débrouiller seule au cours des huit mois qui ont suivi cette dispute. C'est dans cette période que j'ai rencontré Kira et elle est depuis comme une sœur….non comme un ange gardien pour moi. Pendant cette période j'ai aussi rencontré des gens moins bien……le résultat de ces rencontres c'est ma petite lumière, Yelen.



- …….



Je savais que Zayn aurait compris que je parlais d'un viol. Je fis donc une pause dans mon speech pour me retourner et l'observer. J’attendais de voir dans son regard ou ses gestes une réaction quelconque. Pourquoi ? Peut-être parce que j'espérais qu'il me tourne le dos car j'avais été souillée ou qu'il me montre de la pitié. Peut-être je cherchais juste une raison de ne pas aller au bout de mon initiative. Mais tout ce que je vis c'était un regard amicale et un sourire qui me faisait signe de poursuivre. 



- Pendant ma grossesse, le ciel ne m'abandonna pas et je fis la rencontre d’âmes aussi pures que généreuses. Tati Joss et Grâce m’aidèrent à mener ma grossesse, à retrouver mes sœurs et à poursuivre mes études. Kira ne tarda pas à nous rejoindre à Cotonou.  Mes sœurs m'ont plus tard inscris à la loterie visa grâce à laquelle je suis aujourd'hui à Seattle.



- …….



- J'imagine que tu te demandes en quoi tout ceci te concerne. 



- …….


- Si je t'ai résumé mon passé, c'est parce que tu as changé certaines choses dans mon équation.



- Moi ??



- Oui toi. Ma vie se résumait à ma famille et à mes études mais depuis je dois aussi composer avec les sentiments que j'ai pour toi…..


-



- …..


- Tu ne dis rien…. ? Demandai-je en cherchant dans l'étendue d'eau devant moi la force de continuer ce que j'avais entamé



- Je veux que tu libères tout ce qui te pèse d'abord.


- …….


- ……


- Depuis ma séparation avec mes sœurs, je n'ai plus jamais regardé les hommes comme de potentiel compagnon. Sauf un, mais il était déjà promis à une autre. J'ai eu pour lui une sorte de coup de foudre. Mais je me suis tout de suite réprimandée lorsque j'ai appris qu'il se marierait bientôt, ajoutai-je précipitamment comme pour me justifier. 


- …….


- Depuis lui, je n'ai plus fait attention aux hommes jusqu'à ce que tu n’entres dans l'amphithéâtre il y a deux mois. Au départ, je faisais mine de ne pas comprendre les réactions de mon corps et je ne décidai fermement à ne pas céder au désir que tu éveillais en moi. Tu ne m'as pas rendu la tâche facile en me répétant tout le temps que je t'intéressais. Ni en te baladant dans l'appartement juste vêtu du jean qui te tombait sur les hanches. Ni en rendant ma fille amoureuse de toi. Et encore moins en me regardant comme si……..comme si je comptais…à tes yeux.



- Tu comptes à mes yeux ….



- Voilà….tu recommences à parler comme ça. Et même si moi je m'interdis de céder aux pulsions de mon corps, mon cœur n'est pas insensible à toutes ces attentions dont tu m'entoures. C'est d'ailleurs parce que tu intimides ce traite de cœur et qu'il me commande plus ce que mon cerveau que je te parle le dos tourné. On est devenu de très bons amis et cela n'a fait que me rendre plus mordue de toi. Là ce n'était plus une question de corps. J'appréciais,….non j'apprécie chacune de tes qualités et même certains de tes défauts. J'aime le fait qu'on est ait des idées tellement différentes, que nous passons des heures entières à discuter de tout et de rien et que nous finissons  toujours à trouver des ponts entre nos points de vues. 



- ……


- Je m'avancerai trop en parlant d'amour. J'en suis certaine. Mais je sais aussi que ce que je ressens est à des lieux du simple désir ou du béguin d'adolescence. Ton départ imminent m’a fait réfléchir et m’a aidé à me rendre compte de tout ce que je te débite là. Je me suis même surpris à rêver à une relation avec toi et c'est cela qui m'a amené à te parler de certains détails de mon passé. J'ai la conviction que le passé a cette fâcheuse manie de  toujours nous rattraper et je ne voudrais pas que si mon rêve se réalise, il te fasse changer ton regard sur moi. Je ne t’ai évidemment pas tout raconté mais c'est le peu que je peux te dire pour le moment.


- ……..



- Voilà tu sais tout, dis-je en me retournant pour le regarder.


Quand nos regards se croisèrent, il soutint le mien et se leva. Je me perdais dans son regard tandis que mon cœur accélérait ses battements à une vitesse exponentielle, dans l'attente d'une quelconque réponse. Réponse qui ne vint pas jusqu'à ce que Zayn se place devant moi, et s'immerge complètement dans mon regard.


- De tout ce que tu as dit, j'ai retenu tellement de choses mais ce qui m'a vraiment frappé, c'est que tu attendais que je te tende la main maintenant que tu as déjà fait un pas.


- …..


- Je vais alors commencer en te regardant dans les yeux pour que tu vois la sincérité dans chacun des mots qui vont sortir de ma bouche.



Juste une phrase, juste un seul regard et j'étais déjà toute chose. J'avais déjà vu Zayn sérieux, je l'avais déjà vu passionné, hilare, séducteur, drôle et même endormi. Mais jamais, je ne lui avais connu une expression pareille. 



- Je te regarde comme si tu comptais à mes yeux parce que tu comptes à mes yeux. Toutes ces attentions que ton cœur apprécie….elles ne viennent pas de moi mais de mon cœur. Depuis que je te connais, mon cœur et mon corps se sont liés contre et mon cerveau et moi pour te conquérir et te connaître. 



- ……..



- Petit à petit, mon âme s'est ralliée à eux et maintenant je suis à un stade où je ne veux même plus lutter si ce n'est pas pour te conquérir et faire de toi ….celle qui compte, ma reine.



- Mais on ne se connaît que depuis deux mois…..



- Oui. Mais pour moi c'est comme une éternité. Tu dis que tu ne crois pas être amoureuse de moi. Mais aussi sûr qu'après la nuit il y a le soleil, aussi sure que la terre tourne autour du soleil, aussi sûr que tu hantes mes nuits et même mes jours, moi je t'aime. Je t'aime assez pour deux. Je t'aime assez pour accepter ton passé et même attendre que tu sois prête à m'en parler. Je t'aime assez pour ……juste je t'aime.


Je me mis à pleurer tant ce qu'il me disait me touchait. Jusqu'à ce moment, je ne m'étais pas rendu compte à quel point je voulais être aimée de lui. Plus ce que « manger la honte » comme je le disais à Kira, c'est surtout d'être rejetée par lui. D'avoir attendu trop longtemps, d'avoir un passé trop compliqué….



- Pour en revenir à ton passé, tu n'es pas la seule à en avoir un. Je n'ai pas l'arrogance de penser que mon passé vaut le tien mais le mien n’est pas glorieux non plus. Lorsque tu seras prête à l'entendre je me ferai un plaisir de le partager avec toi.


- ……


- Tu as fait le premier et je viens de te tendre la main Phoebe. J'espère que maintenant tu sauras la saisir pour qu'on voit ou tout ceci nous mène.


Cette phrase fit redoubler mes larmes et je m'effondrai dans les bras de Zayn. Je pleurai à cause de ces choses que m'avait dites Zayn mais pas que pour cela. Je pleurai parce que je me sentais conne d'avoir tant tardé à lui parler. Je pleurai parce que j'avais besoin de pleurer, envie de pleurer. C'est le moyen que mon corps a trouvé pour déverser sa tension donc je me laissai aller. Lorsque je finis, Zayn était toujours là. Il n'avait pas bougé d'un poil, n'avait pas dit un seul mot. Je lui souris.


- Merci.


- C'est un plaisir, murmura-t-il contre ma tempe.


- C'est bien beau tout cela mais….tu vas bientôt t'en aller et….



- Je ne pars nulle part.



- Comment cela ?? Tu pars à la fin de cette semaine….tu 



- Je ne pars plus. J'ai demandé mon transfert à Seattle.



- Quoi ???!



- Il y a un mois, j'ai demandé mon transfert définitif à Seattle et si je reste encore avec vous c'est en attendant de trouver un appartement à moi.



- Et tu ne m'as rien dit, affirmai-je en me redressant pour le regarder.



- Euh..



- Nous sommes amis !? Tu aurais pu me dire.



- Mia m'avait dit de ne pas t'en parler mais elle ne m'avait pas précisé pourquoi….



- Celle la si je l'attrape ….


- Je vais lui faire plein de baisers parce qu'elle m'a aidé à te rencontrer et maintenant, m'a permis d'envisager plus avec toi, fini Zayn à ma place.


J'en voulais à Zayn et Mia de ne pas m'avoir mentir ainsi mais d'un autre côté, je reconnais que s'ils ne l'avaient pas fait, je n'aurais peut-être jamais trouvé le courage de parler aussi franchement. D'un autre côté, j'aurai du m'y attendre vu que Zayn ne s'était jamais comporté comme quelqu'un qui voyageait.


Ce jour-là, nous sommes rentrés à la maison comme nous en étions sortis du moins physiquement. D'un point de vue émotionnel, nous avions partagé plein de choses et nous semblions encore plus proches à notre retour. Mia et Yelen étaient encore sorties faire les boutiques. Du moins Mia faisait les boutiques et Yelen lui servait de poupée. Je me dirigeai vers la cuisine pour préparer le petit déjeuner avec Zayn. Nous passions notre temps à parler comme d'habitude mais nous savions tous les deux que rien n'était plus comme D'habitude.

- Phoebe ???


- Oui, répondis-je en finissant de ranger de la vaisselle dans le placard….


- Euh….ça te dirait que demain on sorte manger dehors avec Yelen, histoire de vraiment faire connaissance, demanda Zayn.


- J'adorerais



Cher destin