Les problèmes
Ecrit par Farida IB
Nahia…
J’émerge de mon sommeil et me tourne vers Khalil qui dort encore à poings fermés. C’est ce que je ferais aussi si je n’avais pas tant de questions et de doutes qui m’assaillent l’esprit. Il faut dire qu’être ici me met face à ma réalité, toutes mes craintes se confirment peu à peu. Ça me chagrine parce que je commence à m’attacher un peu trop à lui et il me le rend tellement bien que je n’aimerais pour rien au monde me réveiller un beau matin et me rendre compte que tout ça n’était qu’un rêve en couleurs. Vous connaissez mon sang de l’iguane là non ? Il faut même que je redouble mes prières, maintenant, je suis focus inh. Je ne dors plus la bouche ouverte (rire).
Je bouge avec précaution en faisant attention de ne pas le réveiller, je pose un pied à terre et veux poser le second lorsqu’il m’attrape par ma taille et me ramène vers lui. Je soupire, c’est ce qu’il a passé la nuit à faire après m’avoir laissé dormir frustrée en plus de l’avoir senti contre moi toute la nuit. Enfin nous sommes rentrés chez eux dans la nuit tardive et avons passé une partie de la nuit à discuter de nos projets futurs ainsi que des arrangements par rapport à la relation géographiquement compliquée qu’on s’apprête à vivre. Il est vraiment sérieux qu’il veut qu’on se marie au plus vite. Ce n'est pas que ça me déplaît pas hein, au contraire, j’en suis plus que ravie. Juste que je trouve que ça va trop vite entre nous et je redoute que son père s’y oppose, vu qu’il a déjà en horreur le fait que je sois une mère célibataire. Ajouter à cela le problème de la distance. Il propose pour un début de me rendre visite assez régulièrement et moi quelques fois. Il n’en reste pas moins qu’au fil du temps, l’un de nous deux devra quitter son pays pour s’installer dans celui de son prochain et vous vous doutez bien que ce n’est pas l’homme. Est-ce que je suis prête à faire ce sacrifice ? Franchement, je ne saurais le dire pour le moment.
Il me cale avec ses pieds lorsque j'essaie à nouveau de me dégager.
Khalil : tu penses aller où comme ça ?
Moi : on doit prier, le jour s'est levé dehors.
Il ouvre un œil qu’il pose sur la montre puis le referme.
Khalil (resserrant l’étreinte) : on a le temps de se faire des câlins, l'heure de la prière n'a pas encore sonné.
Moi : tu ne diriges pas ce matin ?
Khalil : mon père s’en chargera lui-même.
Moi narquoise : un imam qui désiste ?
Khalil ouvrant les yeux : je suis loin d'être un imam (bisou sur le cou) pour le moment, je veux juste me sentir plus proche de ton cœur.
Je penche ma tête sur le côté de manière à ce que nos regards se rencontrent et lui souris. Il pose sa tête sur mon épaule et dépose un baiser sur mon cou, ensuite sur l’omoplate, ensuite sur mes lèvres et finit par m’embrasser en pleine bouche. Je réponds comme une assoiffée.
Khalil : je veux qu’à chaque fois, tu me dises bonjour comme ça, j’ai bien dit à chaque fois. Genre tous les jours.
Moi hochant la tête amusée : d’accord chef c’est compris.
Khalil : est-ce que j’ai précisé que même lorsqu’on se boude ?
Moi pouffant : tu es sérieux ?
Khalil : réponds juste.
Moi : d'accord marché conclu.
Khalil : crois de bois, crois de fer.
Moi hochant la tête : crois de bois, crois de fer.
Khalil (me libérant) : tu peux y aller.
Je plonge ma tête dans son pour humer l’odeur musquée de sa peau avant de sortir du lit, pas sans l’avoir embrassé une seconde fois.
Khalil me lançant : c’est bien petite, tu assimiles vite les leçons.
Je traverse l’encadrement de la porte de la salle de bain en riant. Je prends une douche et un bain rituel (question d’assurance lol) et lui cède la cabine en un temps record. Après la prière, on s’installe dans le canapé ma tête posée contre son torse afin de discuter avec Nabil en appel vidéo sur ma tablette.
Nabil (apparaissant à l’écran tout sourire) : bonjour,
Moi : bonjour loulou
Il grimace.
Khalil : bonjour mon grand, qu’est-ce qui te fait sourire ce beau matin ?
Nabil : bah vous, vous êtes mignon comme ça.
Nous : lol.
Moi : comment tu vas ? Tu es matinal aujourd'hui.
Nabil : je vais bien et vous ?
Moi : ça va.
Nabil : je me suis levé plus vite pour attendre votre appel (enchaînant) quand est-ce que vous rentrez ?
Khalil : bientôt.
Nabil : mais maman, tu avais dit deux semaines et nous y sommes presque. (ajoutant) Vous me manquez beaucoup, je m'ennuie vraiment sans vous
Voix de ma’a : tchrrr est-ce que tu n’as pas raison ?
Je ris doucement.
Moi : bonjour ma’a.
J’ai le temps de me relever et de poser ma tête contre le dossier avant qu’elle ne se mette derrière Nabil.
Ma’a : bonjour ça va ?
Khalil : bonjour, oui et vous ?
Ma’a : nous allons bien alhamdulilah (regard suspicieux) vous logez ensemble maintenant ?
Moi mentant : sa mère m’a invité à passer quelques jours avec eux.
Ma’a : ah d’accord (s’adressant à Khalil) tu lui passeras le bonjour de ma part.
Khalil : ok sans faute.
Je cause avec elle quelques minutes histoire de prendre les nouvelles de tout le monde. Elle échange quelque peu avec Khalil avant de prendre congé de nous.
Moi (dès qu’elle ressort de sa chambre) : tu aurais dû me dire qu’elle était là.
Nabil : elle venait d’arriver, tu es chez tonton Lil ? Je pensais que vous deviez dîner dans un palace.
Khalil : c'était le cas, on a dû rentrer.
Je les regarde tour à tour étonnée, donc ces deux là font même des plans dans mon dos quoi ?
Nabil se redressant : je veux voir comment c'est chez toi, tu as promis m’envoyer des photos.
Khalil : je vais te les envoyer toute à l’heure, il faut qu’on te laisse.
Nabil : ok bye, tonton on se texte plus tard dans la journée hein ?
Khalil sourire en coin : d'accord.
Moi : bye loulou.
Nabil : rhooo maman je n’aime pas quand tu m’appelles comme ça.
Moi : bou (dégage) je t’appelle comme je veux, tu es mon petit loulou à moi.
Nabil : pfff, ça c’est pour casser ma cote auprès des filles !
Moi roulant des yeux : tssrrr !
Khalil riant : à toute mon grand krkrkr…
Il coupe l’appel et se tourne vers moi.
Khalil : il faut que tu arrêtes de le traiter comme un enfant.
Moi : c’est un enfant, c’est encore mon bébé même s’il est précoce.
Khalil : tu as peur qu’il quitte le nid trop tôt ?
Moi acquiesçant : oui, il devient très indépendant.
Khalil : t’inquiètes, il t’aime trop pour ça.
Moi sceptique : tu crois ? Les démonstrations affectives ce n’est pas trop son truc et j’ai même peur pour son futur avec les femmes. (me cachant le visage entre les mains) Je dois t’avouer que parfois, j’envie votre relation. Il t'affectionne vraiment pourtant il te connaît à peine.
Khalil (se caressant la barbe) : ne sois pas jalouse, c’est mon charme qui opère.
Moi : mouais c’est ça !
Khalil sérieux : ton fils t’aime plus que tout, tu n’as aucune idée du nombre de fois qu’il m’a donné des ultimatums par rapport à toi. Il a toujours voulu qu’on soit ensemble parce qu’il pense que tu es plus heureuse et maintenant que c'est le cas, il a promis de me casser une côte si par malheur, je te brisais le cœur comme les autres.
Je le regarde abasourdie.
Moi : il t’a dit tout ça ?
Khalil hochant la tête : en insistant sur le fait qu’il est passé ceinture blanche-noire au judo.
Là, j’éclate de rire.
Moi secouant la tête dépassé : il est terrible cet enfant, je me demande d’où il sort tout ça.
Khalil : demande-toi plutôt de qui il tient !
Moi faisant la moue : je suis sage moi.
Khalil : ah oui, mesquinement sage. Bon, il faut qu’on descende avant que ma mère ne vienne me chercher.
Moi : ton père sera là ?
Khalil arquant le sourcil : tu as peur de mon père ?
Moi : maintenant que je suis descendue dans son estime oui.
Khalil : il aurait déjà oublié cette histoire. Mais bon si tu préfères, on mange ici ensuite, je te ramène chez toi pour ton entretien avec tonton Sharif.
Moi : et je fais comment pour sortir ? Je ne peux pas mettre les mêmes vêtements qu'hier, ça dévoile trop mon ventre.
Khalil : tu n'as pas à t'inquiéter pour ça.
Moi : ok ! Juste pour savoir, tu comptes me payer des vêtements à chaque sortie ?
Khalil : oui, parce que je veux que tu t’habilles comme je veux et non pour complaire aux autres.
Moi : mais quel macho !
Khalil : lol
Il sort de l'appartement et revient suivi d'une servante qui nous apporte de quoi prendre un petit-déjeuner copieux. À la fin du repas, une autre m'amène un sac rempli de magnifiques robes, des tuniques, des pantalons et tee-shirts... Enfin bref tout un tas de jolies choses devant lesquelles j'hésite un moment. Je finis par porter mon choix sur une tunique longue rose pourpre et un pantalon jean avec des baskets ensuite nous levons le camp. Il me fait passer par une sorte de tunnel qui débouche sur le parking. On s'installe à bord d'une de leurs nombreux véhicules, pendant qu'il attache sa ceinture sa sœur émerge du hall d'entrée et regarde autour d'elle avant de monter dans une 4x4.
Khalil : on change d'itinéraire.
Moi plissant les yeux : pour aller où ?
Khalil simplement : on va bientôt le découvrir !
Je me retiens d'ajouter quoi que ce soit quand je me rends compte qu'il file sa sœur. Cette dernière nous mène à une dizaine de kilomètres hors de la ville et gare devant une villa. Khalil s’arrête à distance et attend qu'elle y entre pour redémarrer et aller se garer derrière sa voiture. Il décline ensuite son identité à l'agent de sécurité qui nous laisse entrer sans forme de procès. Nous suivons des voix pour nous retrouver devant un studio. Il appuie sur le poussoir de la sonnette et la porte s'ouvre en quelques secondes sur un géant. Enfin, un beau gosse très (très) costaud. Khalil le scrute de bas en haut les sourcils froncés avant de demander.
Khalil en arabe : vous êtes qui vous ? Où se cache ma sœur ?
Il nous lance un regard perplexe avant de s’adresser à nous en anglais.
Le type : euh bonjour
Voix de Yumna s’approchant : bébé, tu attends...
Elle s’interrompt lorsqu’elle nous voit et pose une main sur sa bouche.
Yumna : Khalil ?
Khalil : qu’est-ce que tu fais là ? (lançant un regard en biais au type) C’est qui ce tas de muscle ?
Le type (s’adressant à Yumna) : euh je veux comprendre ce qui se passe, qui sont-ils ?
Yumna : c'est Khalil mon grand frère et sa copine Nahia.
Le type l'air surpris : ah ok, bonjour. Je suis...
Khalil (fixant Yumna sévèrement) : j'attends toujours que tu répondes à ma question.
Yumna (la petite voix) : euh c'est mon ami, Elias.
Moi surprise : c’est lui Elias ?
Yumna : oui
Moi impressionnée : wow !
Khalil plissant les yeux en me fixant : tu le connais ?
Moi : non, elle m'a seulement parlé de lui.
Khalil : vous êtes amis comment ? Comment se fait-il que personne ne le connaisse dans la famille ?
Yumna : en fait, je veux dire... C'est mon copain.
Khalil : ton copain depuis quand ? Pourquoi nous ne sommes pas au courant de ? (se tournant vers Elias sévèrement) Jeune homme toi, tu sors les filles des gens dans le secret ? Tu sors même d'où ?
Elias : je suis Elias Martins, je…
Khalil : encore un Américain ? Tu fais exprès de défier papa encore une fois ?
Elle baisse le regard.
Khalil tranchant : je ne veux plus vous voir avec ma sœur.
Moi : oh ?
Yumna : Khalil je…
Khalil se retournant vers elle : toi, tu la fermes ! D’ailleurs, va m’attendre dans la voiture. (précisant) Dans ma voiture.
Yumna : il a …
Khalil criant : tout de suite Cheikha !!!
Elle s’exécute juste.
Moi : Khalil calme-toi.
Khalil (faisant fi de mon intervention) : toi si je te revois avec ma sœur, soit sûr que tu te finiras dans les décombres dans un sac-poubelle.
Moi : rhooo Khalil !
Khalil se tournant vers moi : on y va !
Je lance un regard compatissant à Elias avant de le suivre vers la voiture. On retrouve Yumna adossée contre la portière arrière droite arquant une moue furieuse. Il deverouille simplement la voiture et lui ordonne de monter.
Yumna : qui va ramener l'autre voiture à la maison ?
Khalil : je m'en chargerai.
On s’installe tous en même temps et démarre en silence. C’est lorsqu’on arrive sur la grande voie qu’il entame.
Khalil : Yumna tu...
Moi l'interrompant : attendez au moins d'arriver à la maison pour en parler.
Khalil sec : je ne vais pas étendre sur ce sujet, elle l'oublie juste.
Moi : ne sois pas si radicale, elle a l'âge d’avoir un petit ami.
Yumna : vraiment !
Il lui lance un regard noir à travers le rétro.
Khalil (me jetant un coup d’œil) : un Américain qui plus est un non-musulman ?
Moi : mais c’est son choix.
Khalil : un choix qui l'a autrefois conduit dans les caniveaux du regret ! (jetant un coup d’œil à travers le rétroviseur) Tu as le courage de te remettre avec un Américain, tu as vraiment la mémoire courte inh ?
Yumna : mais on apprend juste à se connaître.
Khalil : dans quel but? Tu comptes l'épouser ?
Yumna : ce n'est pas encore le cas, pour le moment c'est avec lui que veux être et réciproquement.
Khalil : et ça ne vous mènera nulle part !
Moi : je crois que cette décision leur revient.
Khalil (me lançant un regard réprobateur) : toi ne l’encourages pas dans les bêtises. De toute façon, nous en reparlerons à la maison.
Elle soupire bruyamment, mais n'ajoute plus rien et lui non plus jusqu'à ce qu'on arrive chez les Singh. Je descends et me mets à la portière pendant qu'il baisse la vitre.
Moi : ne va pas me déranger la petite s’il te plaît.
Khalil : hmm.
Moi : bébé ?
Il sourit.
Khalil : je reviens te chercher ce soir, je veux vraiment qu’on discute.
Moi : d’accord, je suis à ton entière disposition.
Khalil : ravi de l’entendre.
Je me redresse et me tourne vers Yumna.
Moi : bonne chance ma belle.
Yumna : merci, on s’écrit plus tard. Tiens je n’ai pas ton numéro.
Khalil : pour quoi faire avec ?
Moi (sortant ma carte que je lui tends) : on s’écrit sur whats’app.
Yumna : merci ma belle.
Il me lance un regard désapprobateur que je soutiens. J’attends qu’il redémarre pour me retourner en direction de la terrasse et ce n’est qu’à ce moment que je remarque la présence de la copine Alisha qui se tient droite, buste en avant et me regarde comme une moins que rien. Je prends une grande inspiration avant d'avancer vers elle.
Alisha (lorsque j’arrive à son niveau) : tiens tiens la voleuse de mari est de retour.
Je plisse les yeux mais ne réponds pas. Je veux quitter devant elle lorsqu'elle me stoppe d'un geste de la main.
Alisha : je demande, tu dors en paix en sachant que tu retiens le bonheur d'une autre ?
Moi : tu parles de quoi ?
Alisha : du fait, que tu te pavanes à l’aise avec le mari d’autrui.
Moi encore plus perdue : mari de qui ?
Alisha : de ma copine, Khadija. (je plisse les yeux) Oh je vois, le prince a omis de te dire qu'ils sont presque fiancés. Venant de lui ça ne me surprend pas, c'est sa nature de jouer avec le cœur des filles rêveuses comme toi. Ma pauvre fille, tu as vraiment cru que le prince tomberait sous le charme d’une renoi (rire dérisoire) non mais vraiment, tu t’es vue ?
Elle pouffe de rire.
Alisha : bah, tu ferais mieux de redescendre sur terre parce que le prince ne tombera jamais amoureux d’une femme comme toi. Ouvre bien tes oreilles de lièvres et écoute moi, il se marie avec Khadija (articulant) une princesse comme lui dans quelques mois. Je te conseille de prendre tes clics et clacs et de retourner dans ta misère d'Afrique avant de le regretter amèrement. Sale ariviste que tu souffres !
Moi commençant à m'énerver : tu délires ou quoi ? C’est quoi cette histoire de prince et de princesse ?
Alisha âprement : tu es bouchée ou quoi ? Qu'est-ce que tu ne comprends pas dans "arrête de tourner autour du Prince Khalil Ben Zayid ?"
Moi hébétée : Khalil est un prince ?
Alisha haussant le sourcil : tu veux insinuer quoi ? Que tu ne le savais pas ? Lol on sait tous que c’est pour ça que tu t’accroches à lui comme un pou. En tout cas, je tenais seulement à te mettre en garde. Tu t’éloignes du mec de ma copine sinon…
Le reste, je n’entends plus parce que je viens de prendre la direction de l’entrée principale. Il faut que Khalil lui-même m’explique un peu cette histoire non-sens de prince et de mariage. Quand j’émerge du domaine, j'ai la chance de tomber sur un taxi et donne les indications au conducteur.
Lui : oui moi connais, palais du cheikh.
Je rentre seulement sans rien dire. Je rumine tout ça durant le trajet sans trouver une explication plausible à cette cachotterie. Qu’il hésite à me parler de son titre, je peux encore comprendre. Mais me cacher la vérité sur son futur mariage et me faire miroiter un entre nous après tout ce qu'il sait de moi, après tout ce qu'il a mis en œuvre pour me mettre en confiance !! Il s'est vraiment foutu de ma gueule, ça dépasse même le seuil du foutage de gueule. C'est de la sorcellerie pur et simple et la bêtasse que je suis s’est encore laissée duper ! Cette fois ça ne se passera pas comme ça, je le tuerais de mes propres mains si tout cela s’avère vrai.
Le taxi me laisse devant leur forteresse dans le même état de colère et d’indignation. Je me fais escorter en voiture sur les ordres du chef de sécurité qui m'a reconnu dès ma descente du taxi. Dans le hall, je demande la route à l'un des serviteurs qui arrive tant bien que mal à me comprendre et me conduit devant la pièce où il se trouve. Je m’approche pour ouvrir la porte lorsque je surprends une conversation entre sa mère et lui.
Voix de sa mère : réfléchis bien avant de décider parce que si tu la choisis, tu choisis son fils. C’est un fardeau que tu devras supporter toute ta vie et tu dois savoir que c’est pas mal de responsabilités. Au cas où le père de ce dernier tente un jour un retour, qu’adviendra-t-il de vous ? Le lien qu’elle a avec lui est plus fort que celui qu’elle aura avec toi puisqu’ils ont un enfant ensemble.
Je n'attends pas sa réponse avant de faire volte-face les yeux brouillés de larmes. « C’est un fardeau que tu devras supporter toute ta vie » cette phrase a terminé de m’achever.
*** Un instant plus tôt ***
Khalil…
Je continue ma tirade avec Yumna sur son pseudo petit copain jusqu’à la maison où elle descend furieuse vu que j’ai mis un véto sur lui. Pour moi, c’est juste inconcevable qu’elle se mette une fois de plus dans ce genre d’histoires. Une histoire sans lendemain ! Elle me boude aujourd’hui, mais elle me remerciera plus tard.
Je me gare et pénètre le hall pour voir maman descendre la dernière marche des escaliers.
Moi : houbi kouli hayati (amour de ma vie)
Elle sourit.
Maman : il faut qu'on parle.
Je lève le sourcil.
Moi : il y a un problème ?
Maman : aucun à part celui que tu dénies.
Moi soupirant : je ne le dénie pas.
Maman : mais tu refuses d’en parler (regardant autour d’elle) je veux qu’on en discute à l’ombre des regards.
Moi : ok, allons dans mon bureau.
On se retrouve entre les quatre mûrs de mon bureau. Elle s’assoit sur un fauteuil pendant que je fais des va-et-vient dans la pièce.
Moi prenant la parole : tu connais ma position maman, je ne peux pas l’épouser. Je ne veux pas faire un mariage de raison.
Maman : et je ne suis pas non plus adepte à ce genre de pratiques, mais ce n’est pas une mauvaise proposition qu’on te fait. J’ai pris le temps d'observer cette Khadija, c’est une fille bien et je suis convaincue qu’elle fera une bonne épouse pour toi.
Moi (me retournant vers elle) : mais je ne l’aime pas.
Maman : tu as quand même couché avec elle
Moi soupire : ce que je regrette d’ailleurs.
Maman (remuant la tête) : la seule chose que tu regrettes vraiment, c’est d'avoir pris son innocence à cette fille et que tu te sentes maintenant lier à elle, comme piéger. Khalil ce sont tes erreurs du passé et tu dois les assumer.
Moi : j'en suis conscient et je suis prêt à les réparer, mais pas en épousant Jedah. Je ne l'aime pas, je suis amoureux d'une autre.
Maman : de Nahia n'est ce pas ?
Je lève un regard surpris sur elle.
Moi : comment tu le sais ?
Maman : c'est plus qu'une évidence, il n'y a qu'un aveugle pour ne pas s'en rendre compte. Chacun de tes regards te trahit.
Moi : c'est vrai ?
Maman : bien sûr !
Moi saisissant la balle au vol : en fait, j'attendais le bon moment pour t'en parler. C'est elle que je veux épouser et le plus tôt sera le mieux.
Maman soupirant : tu sais bien que c'est compliqué, tu devras trouver des arguments solides pour convaincre ton père et encore faut-il que tu trouves une solution au problème actuel.
Moi : papa, je m'en occupe. J'irai voir le père de Salim pour qu'il parle au sultan. Jedah elle-même m'a dit qu'elle trouvera une solution pour son cas.
Maman : que ton père sorte indemne de cette situation, c'est ma principale préoccupation. Par contre, je suis un peu sceptique par rapport à Nahia. Je l'apprécie énormément et la manière dont elle arrive à te maîtriser avec douceur et candeur me fascine, mais le fait qu'elle ait un enfant change toute la donne.
Moi : ça ne me dérange pas du tout.
Maman : réfléchis bien avant de décider parce que si tu la choisis, tu choisis son fils. C’est un fardeau que tu devras supporter toute ta vie et tu dois savoir que c’est pas mal de responsabilités. Au cas où le père de ce dernier tente un jour un retour, qu’adviendra-t-il de vous ? Le lien qu’elle a avec lui est plus fort que celui qu’elle aura avec toi puisqu’ils ont un enfant ensemble.
Moi : c’est tout vu, j’aime son fils comme si c’était le mien et inch’Allah ce n’est pas l’argent pour m’en occuper qui me manquera. En ce qui concerne son père, c’est loin d’être un problème.
Maman l'air surprise : je suis ravie que tu penses ainsi, ta décision est la mienne. L'essentiel pour moi c'est qu'elle prenne soin de toi.
Moi (lui souriant depuis la fenêtre) : merci Oumi, tu vois pourquoi je t'aime ?
Je quitte la fenêtre dans l’intention de la prendre dans mes bras quand je vois une silhouette qui ressemble étrangement à celle de Nahia traverser la cour à pas pressés et en plus avec les mêmes vêtements que toute à l'heure. Je fronce les sourcils incrédule, mais me précipite quand même vers la porte pour vérifier.
Moi : oumi je vais devoir te laisser.
Maman : tu vas où ?
Moi (ouvrant la porte) : je dois te laisser, j'ai une course urgente à faire.
Je sors du bureau en grandes enjambées et me ruer dans l'ascenseur. C'est pendant la descente que j'appelle la guérite pour avoir confirmation.
Balram : salam mon fils.
Moi : Salam Balram, tu sais par hasard si ma copine est dans le palais ? Celle que je t’ai présentée.
Balram : affirmatif, je l'ai faite accompagnée par Djibril et Maktoum qui sont déjà de retour.
Moi : d’accord, elle revient vers vous. Ne la laisse surtout pas partir. Je viens tout de suite.
Balram : bien reçu mon prince.
Je monte dans la première voiture que j’arrive à déverrouiller et démarre sur des chapeaux de roue. Je la retrouve à quelques mètres en pleurs et ralentis à son niveau avant de baisser la vitre.
Moi : Aynia tu as oublié quelque chose ?
Elle éclate en sanglots et se met à courir le plus rapidement possible. Je la dépasse et reviens me mettre en travers de son chemin.
Nahia (lorsqu'elle arrive à mon niveau) : Khalil laisse moi passer.
Moi : monte !
Nahia : non
Moi (durement) : Aynia, je ne vais pas me faire répéter.
Elle essuie ses larmes d’un revers de main avant de monter ensuite elle croise les mains sous sa poitrine.
Moi : qu’est-ce que tu as ?
Elle me répond d’une voix étrangement calme.
Nahia : tu comptais me dire quand que tu devais te marier ?
Moi tiquant : qui t’a parlé de ça ?
Nahia : c’est oui ou non que tu épouses la (appuyant sur les syllabes) princesse Khadija dans quelques mois ?
Moi posément : non
Elle a un mouvement de recul avant de se tourner pour me regarder droit dans les yeux. Le regard plein de mépris, de rage concentrée qu’elle m’adresse actuellement ne me plaît pas vraiment.
Nahia : il vaut mieux pour toi que tu me dises la vérité parce que cette information, je la tiens de source sûre.
Moi : enfin, c’est en partie vrai. Mais laisse-moi t’expliquer.
Nahia fulminant : il n’y a rien à expliquer. De toute façon, je n’ai plus rien à faire ici.
Je me dépêche de verrouiller les portières.
Moi : tu vas m’écouter que tu le veuilles ou non.
Je fais demi-tour et la traîne par le tunnel, pendant notre ascension elle regarde droit devant elle. On sent que la miss est vraiment en colère parce que je n’ai jamais vu cette facette d’elle. Ce qui est bien, c’est que ça la rend plus sexy que d’habitude et ça me donne des idées interdit aux moins de dix-huit ans. Focus Khalil, tu es en sursis et cette fois, ce serait quitte ou double. C’est ce à quoi je pense lorsqu’on passe le pallier de mon appartement, je m’assure qu’elle soit bien à l’intérieur pour fermer la porte à double tour.
Nahia : tu veux me séquestrer en plus ?
Je souris.
Nahia maugréant : tu crois qu’il y a matière à sourire là ? (tournant en rond) Tu as raison de sourire pour m'avoir pris pour une conne. Depuis le début, depuis des mois, tu te joues de moi.
Moi : j’ai toujours été sincère avec toi.
Nahia sarcastique : et je dois te croire sur parole ? Tout ce temps qu’on a passé ensemble et ça ne t’a pas effleuré l’esprit de me dire que tu es le fils d’un Cheikh ! (j’écarquille les yeux) Tu n’as pas jugé utile de me le dire pour m’éviter de faire des plans sur des comètes. Tu m'as bien eu ! Que fera un Prince d'une pauvre fille comme moi ?
Moi (d’un ton sévère) : je t’interdis de dire ça ! Je t’interdis de douter de mes sentiments pour toi, pas après tout ce qu’on a traversé.
Nahia faisant la moue : pourtant, tu vas épouser une autre.
Moi : tu es prête à m’écouter ? S’il faut que je mette le coran entre nous pour que tu me crois, je le ferai sans hésiter.
Nahia : comme tu veux !
Elle recroise sa main sous sa poitrine et me regarde fixement.
Nahia : alors ?
Moi commençant : te rappelles-tu de la fille que j’ai rencontrée à Singapour ?
Elle fait mine de réfléchir avant de hocher la tête.
Nahia : la fille vierge.
Moi : exact.
Je lui raconte tout dans les détails, de ma descente en avion jusqu’à ma dernière conversation avec Jedah. Son visage prend diverses expressions pendant tout le récit jusqu’à la fin où elle marque un temps de pause avant de me fixer une expression neutre dans le regard.
Nahia : tu vas l’épouser !