Mise au point
Ecrit par Saria
Chapitre 22 : Mise au point
*** Chez les parents de Selma – Cadjèhoun – Cotonou, Bénin***
***Michel Koukoui***
L’ambiance à la maison est vraiment pourrie, on dirait que je ne suis plus le bienvenu chez moi. Mon épouse et ma fille arrêtent de parler dès que j’arrive : Selma se retire dans sa chambre et Adesua plonge ou dans la télévision ou dans le magazine Amina.
Hum ! En gros c’est la grève, même dans la chambre c’est la grève. Tout ça parce que je dis à l’autre écervelée d’assumer ses actes !
Aujourd’hui tout ça va finir, j’intercepte Selma qui filait.
Moi (autoritaire) : Toi, tu reviens t’asseoir !
Selma avance à petits pas et revient s’installer dans le fauteuil qu’elle vient de quitter.
- Chérie, il y a Raoul et Joseph qui viennent manger ce samedi à la maison. Tu pourrais nous faire ton Pepper soup-là ?
Adesua : Je ne sais pas Michel… Ce n’est pas préparer le problème…
Donc affaire de chéri, de Boo, c’est fini dans la bouche de mon épouse. Aujourd’hui c’est du Michel sec.
Moi : Tu peux m’expliquer s’il te plaît ?
Adesua : …
Moi (explosant) : On est où là ? Que je sache, je suis encore chez moi et je suis ton époux ! Ta fille fait une connerie et je ne suis pas en droit de me fâcher ?!
Selma : Papa, excuse-moi je vais me retirer !
Moi : Tu vas où ? Ce n’est pas toi qui es venue mettre le bordel dans mon foyer ? Tu restes ! Adesua, c’est comme ça maintenant ? Tu prends parti pour Selma !
Adesua : Michel, on est les parents de Selma. L’enfant est malheureuse et tou augmentes ça en te fâchant ! Je n’ai pas dit qu’elle s’est bien comportée mais toi aussi !
Moi : Donc je ne peux plus parler dans cette maison, je ne peux plus dire que je ne suis pas d’accord !
Adesua : Michel ! Je peux comprendre ta position. Tou vois qu’elle est assez punie. S’il te plaît mon chéri, tou sais que je n’aime pas te faire les histoires mais Selma c’est ton bébé ! Tou laisses la colère envahir ton cœur ! Je ne prends pas parti, j’essaye de jouer notre rôle à tous les deux en attendant que tou sois moins fâché. Toutes ces tensions me rendent triste et je ne pourrai être l’hôtesse souriante que tou veux que je sois quand tes amis vont venir !
Je savais qu’elle n’avait pas entièrement tort. Mais je ressens un mélange de choses : de la colère quand je pense que Selma a pu me cacher des choses aussi graves ! Envahi de peur quand je pense que ça aurait pu mal tourner et triste quand je pense que je n’arrive pas non plus à l’empêcher de souffrir… Je m’en veux de n’avoir pas vu clair dans son Kader-là ! Un cœur de père est un tout et je crois que l’engagement que nous prenons quand nos enfants naissent, c’est de les protéger de tout.
Moi : Selma, viens ici !!
Ma fille avance vers moi, un peu craintive à son regard, et se met à genoux devant moi. Je sens alors quelque chose tourner en moi, une grosse déferlante d’amour envahir mon cœur et mon corps. Je l’attire et elle se serre fort contre moi et commence à pleurer.
- Chuuut c’est fini chérie ! Tout va bien !
Ces mêmes mots, je les ai toujours eus pour elle, toutes les fois où gamine, elle était effrayée par les gros orages.
- A l’avenir, je voudrais savoir ce qui se passe dans ta vie ! On a toujours été proches et même si c’est dur, je veux être là ! Ne me fais plus échouer dans mon rôle, ma puce !
Selma : Oui Pa !
Je lève les yeux vers ma Ade, je lui tends la main et elle vient nous rejoindre. Elle a tenu bon alors que je déraisonnais. Je bénis le ciel d’avoir quelqu’un comme ça dans ma vie.
***Selma***
C’était vraiment bon que papa me reparle. Le froid entre nous a quand même duré un mois. Tout ce temps, je suis restée ici dans cette maison ; un mois que Kader m’a virée de sa vie, un mois que je suis incapable de faire quoi que ce soit par moi-même. Le congé maladie que j’ai pris au boulot est presque fini. Le jour ça va encore, j’essaie de m’occuper mais les nuits sont terribles pour moi. Dès que je ferme les yeux, il est là Kader ; j’entends sa voix me susurrer des mots d’amour, je sens son odeur, je sens ses mains se poser sur moi. Je crois que je deviens folle !
La sonnerie de mon téléphone vient me sortir de ma rêverie. Je prends l’appareil, le numéro de ma mère s’affiche… Pas Maman Adesua… L’autre…Maman Vera…
Moi : Allô ?
Maman : Comment vas-tu ?
Moi : Je vais bien merci maman, et toi ?
Maman : Moi ça va, un peu contrariée… Alexander avait promis baptiser son dernier Yacht de mon prénom ; depuis il tergiverse et ça m’irrite. Ah la-la ces hommes ! Ils pensent que c’est en m’offrant le bracelet en diamant que je lui ai demandé que je lui pardonnerai…
J’écoute ma mère me raconter ses déboires, sa vie luxueuse sans broncher. A quoi bon ? J’ai l’habitude depuis des années.
Moi : Ok… Je vois.
Maman : Chérie, tu trouves que j’exagère ?
Moi : Non maman.
Maman : Toi tu as l’air trop bizarre, je crois que c’est pour ça que ton frère voulait que je t’appelle. Ah oui, ça m’était sorti de la tête !
Moi : ça va maman, t’inquiète.
Maman : J’espère que tu ne te morfonds pas pour un homme hein ! Un de perdu dix de trouvé, il faut que tu vives et que tu avances… Sans compter que pleurer donne des rides, je trouve que c’est trop cher payé pour un couillon qui se met debout pour faire pipi !
Moi : Euh…
Maman : Crois-moi ! Dieu sait que j’ai de l’expérience.
Ah ça, maman en est à son troisième mariage donc…
Moi : Ok maman… Mais…
Maman : Pas de mais qui tienne… Je veux que tu te prennes en main. Dans la semaine, je t’enverrai plein de trucs assez sympas pour te relooker… Tu verras c’est radical !
Moi (épuisée) : Ok !
Je raccroche complètement lessivée. Ma mère est un cas à part quoi. Je suis sûre qu’elle est convaincue que le shopping guérit même le palu ! Elle a toujours eu des hommes pour la gâter et la choyer. Jamais aucun mal à s’engager, pareil pour ma sœur tandis que moi ?! Hum… ils viennent faire leur démo et s’en vont.
Toc toc toc !
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