Partie 2

Ecrit par Fleur de l'ogouée

 Moussavou Marc-André

Ça va faire deux semaines que j’essaie en vain de joindre Gisèle ma tarée de grande sœur, il va encore falloir que j’aille chez elle dans les bas-fonds de Libreville, je lui ai demandé plusieurs fois de venir vivre ici mais elle n’a jamais voulu, elle s’entête à continuer sa vie désordonner alors que je pourrais un peu la soutenir. Je n’y ai pas mis les pieds depuis plusieurs années en général on se donne rendez-vous en ville pour se voir, mais là c’est important, Gémina notre petite sœur veut se fiancer et elle a besoin de nous, nous n’avons personne d’autre, ce sera une cérémonie symbolique, nous allons nous même représentés nos parents. Je suis repassé à la maison pour déposer mes affaires avant d’y aller, j’ai trouvé Nina ma petite amie avachie sur le canapé du salon, engagé dans une discussion téléphonique, certainement une de ses nombreuses copines.

-Chérie je vais chez Gisèle, à propos du mariage de Mina

-Marc même Gémina ta petite sœur qui est née hier se marie, mais toi et moi depuis 10 ans que nous sommes ensemble, même pas un semblant de bague, je dis hein je t’ai fait quoi Moussavou ?

-Ce n’est pas le moment Nina, ne commence pas avec ça, on se voit tout à l’heure

Je sors sans écouter ses protestations et pourtant elle a bien raison de réclamer ce mariage et cette bague, au début je trouvais comme prétexte ma situation financière, mais aujourd’hui moi-même je ne saurais dire ce qui me retiens, je l’aime mais j’ai toujours l’impression de ne pas être encore prêt à sauter le pas, il y a comme un doute qui subsiste dans mon esprit je ne saurai dire à quoi cela est dû. Je suis accueilli par l’insalubrité grandissante de ce quartier, heureusement que j’ai troqué ma paire de chaussure de ville pour une paire basket, il est bien vrai que j’ai grandi dans un quartier similaire, mais revenir ici me fait me sentir étrange, comme si malgré toute cette réussite je reste un gars des quartiers populaire. Je m’engouffre dans sa cour commune, il n’y a pas grand monde. Je toque à sa porte, elle me demande d’attendre, je suppose qu’elle est avec un client, rien qu’à cette idée je frappe plus fort la porte, elle sort de là ne portant qu’un pagne, et me désigne un tabouret sur lequel je dois m’assoir et l’attendre. Quel petit frère serai ravi d’attendre que sa sœur aînée finisse de coucher avec un client avant de pouvoir discuter avec elle, je me sens si impuissant, Gisèle est tellement têtue, elle ne veut pas de mon argent, pas de mes maisons, elle préfère continuer à être travailleuse du sexe alors que maintenant que j’ai une situation elle n’a plus besoin de faire cela. Je me tiens la tête entre les mains, je n’aurais pas dû venir ici. Quand je lève la tête je remarque la jeune femme qui se tient à côté de moi, elle est toute frêle, ses yeux sont si pâles, son regard est vide. Je sais ce que ça fait de vivre dans un ghetto, on se sent comme emprisonnés dans une vie qui n’est pas la nôtre. Je l’observe, elle est belle avec des grands yeux, son teint marron est d’un éclat sans pareil, si elle était tombée dans la bonne famille, ce serait une fille de la grande société, qui aurait attiré plus d’un homme influent, hélas. Contrairement aux autres collègues de ma sœur, elle est si simple, pas de faux ongles, coiffure simple, pas de dépigmentation, un corps harmonieux, peut être que je suis trop figé, les années ne sont pas les mêmes, c’est sûr que les clients demandent différents types de femmes. J’essaie de chasser tout cela de mon esprit en imaginant la dispute qui m’attend à la maison, mademoiselle veut devenir madame, j’ai intérêt à trouver les bons mots.

Quand je sors de mes pensées je vois la jeune fille osciller mais avant qu’elle ne s’écroule totalement je l’attrape puis alerte Gisèle. Madame ressort pagne nouer puis on essaye de la réanimer à notre manière, elle finit par lui donner un peu de soupe au poisson qu’elle a préparée auparavant, au fur à mesure qu’elle lui donne à manger la demoiselle revient à elle. Je suis soulagé je n’aurai pas aimé être témoin d’un drame, son aspect en dit long sur le manque qu’elle ressent. Une heure après mon arrivée je décide de rentrer chez moi, j’ai déjà trop attendue Gisèle, son client qui est là depuis ne part toujours pas, je donne 10.000 à la jeune fille avant de m’en aller, je vais tenter d’appeler l’autre folle ce soir pour lui faire part de la nouvelle ou je vais revenir demain. Je retourne à la station où j’ai garé ma voiture et je rentre aussitôt, je prie pour que Nina se soit calmée, je vais l’épouser un jour mais là je ne suis vraiment pas d’humeur à ce qu’elle me fasse une scène. À chaque fois qu’il y a un mariage dans notre entourage elle me met la pression, dans ces moments là je n’ai qu’une envie me barrer de la maison, malheureusement mon meilleur ami est parti au village pour voir son père mourant, je rentre donc sans grand enthousiasme. Le salon est vide quand je rentre, à la salle à manger la table est dressée, c’est dans une sublime robe en dentelle, que ma petite chérie fait son apparition, sa taille fine et ses hanches légèrement proéminente sublime à merveille cette lingerie, c’est une beauté, je sens que ce repas va débuter par le dessert. Vu l’état dans lequel je l’ai laissée, je ne m’attendais pas à une attitude aussi coquine de sa part, c’est agréablement surpris que je lui donne autant d’amour et de plaisir que mon humble personne peut lui offrir, quand son corps m’appartient j’ai l’impression d’être le maître du monde, sa beauté, son physique, son intelligence, ses petites manies tout de cette femme m’attire. Après une partie de jambe en l’air endiablé on finit par s’endormir tout les deux, réveillé par ses doux baisers nous n’hésitons pas à recommencer cet acte si ludique, quelle manière agréable de finir la journée.

Dans la soirée quand nous passons à table, elle m’annonce une nouvelle à laquelle je ne m’attendais pas, son père veut me rencontrer afin de discuter ensemble des cérémonies de nos futurs mariages, le coutumier et le civil. Je comprends toute cette attention, le repas commandé, la lingerie fine et le sexe, tout ça pour m’annoncer que son père veut parler de mariage, comment pour mon propre mariage c’est mon beau père qui me convoque ? Je suis plutôt censé aller le voir avec ma famille afin de demander la main de sa fille, je suis sûr que Nina à tout planifié, dès qu’il y a un mariage elle se sent obligé de me mettre la pression, cette fois elle va trop loin, jusqu’à faire intervenir son père, je n’en reviens pas. Depuis son annonce je n’ai pas dit un mot, je préfère terminer de manger avant de sérieusement lui dire quatre mots.

-Je dis hein Nina, j’aurais droit à ce genre de discours à chaque mariage, parce que ton cinéma me fatigue ?

-Ah mais si ça te fatigue déjà épouse moi, le modèle de la robe, les invités, la salle, le menu, j’ai déjà toutes mes idées en tête, mais toi tu ne veux pas les concrétiser

-Tu sais bien pourquoi ?

-J’en ai marre de tes excuses bidon, tout le monde se marie dans Libreville sauf moi, et mon honneur alors, mon père est prêt à aider financièrement, qu’est-ce qui peut bien te faire hésiter, tu deviendras le beau-fils d’une ancienne grande journaliste et d’un ministre de cette république, tu n’auras besoin de rien faire, je m’occupe de tout. Juste épouse-moi, en fin d’année cette opportunité sera révolue. Je refuse d’entrer dans une onzième année de concubinage, je refuse d’être humilié à ce point, cette année c’est la dernière que je t’accorde pour m’épouser, passer ce délai il faudra que chacun prenne son chemin.

C’est dans cette ambiance électrique que nous finissons le diner qui avait si bien commencer, cet ultimatum qu’elle m’a lancé me fait peur, j’ai peur de la perdre si je dis non et j’ai peur de regretter quel que soit ma réponse. Il va falloir que je pèse le pour et le contre. Le divorce de mes parents m’a laissé des cicatrices, j’ai toujours eu une certaine phobie de l’engagement, j’ai néanmoins réussi à aimer cette femme de tout mon cœur, malgré que certaine fois quand j’étais en plein moment de doute j’ai voulu mettre fin à notre histoire, elle a toujours été là pour moi. Je lui dois beaucoup. C’est dans cette ambiance électrique que nous passons la soirée, chacun cantonné à son téléphone. C’est à 23h que Ya Gisèle m’appelle enfin

-Je dis hein tu ne pouvais pas attendre ? En plus tu voulais quoi ?

-Mina veut organiser ses fiançailles, elle a besoin de notre aide

-Mais aide-là, moi quoi ?

-Tu es l’aînée, c’est à toi de nous dire comment faire les choses

-Ne me fatigue pas. Passe demain, tu t’arrête au carrefour au restaurant qui s’appelle Chez bibi, tu m’attends là on va en discuter

-D’accord bonne nuit Yaya

Elle a raccroché sans ajouter quoi que ce soit, ma sœur elle n’est vraiment pas commode comme personne, mais elle a très tôt du renoncer à sa jeunesse pour nous, si je suis quelqu’un aujourd’hui c’est entièrement grâce à elle, je lui dois tout, je donnerais ma vie pour elle, je sais qu’elle est aussi dure parce qu’elle est brisée de l’intérieure. Au moment d’aller retrouver Nina au lit je me rends compte qu’elle a fermé la porte, nous dormons toujours ensemble même après de violente dispute, c’est la première fois que je vais passer la nuit dans la chambre d’ami, je me sens si mal.

Après une matinée assez charge je vais rencontrer Gisèle à l’heure de ma pause, j’ai envoyé un message à Ya Gisèle pour lui dire que j’étais en route, SMS auquel elle n’a pas répondu comme d’habitude mais je sais qu’elle l’a lu donc je me rends au lieu de rendez-vous. Je m’assois dans le fameux restaurant, c’est un petit coin sympa, mais loin des endroits que je fréquente habituellement, pour aujourd’hui ça fera l’affaire. C’est quand la serveuse s’approche de moi avec son sourire narquois que je remarque l’arrivée de la jeune femme d’hier, elle va tout droit vers la caisse, demande un renseignement, elle a l’air déçue, c’est quand elle se dirige vers la sortie que je l’interpelle

-Bonjour monsieur, je tiens encore à vous remercier pour hier, vous m’avez sauvé

-Ce n’est rien, quel est votre prénom ?

-Je m’appelle Marimar

-Comme la série qui a fait fureur dans les années 90 là ?

-Exactement

- Mais d’où vient le choix de ce prénom ?

- Il faut savoir que ma mère était un vrai fan, on avait d’ailleurs des posters et plein de produits dérivés de la série dans notre maison, et vous votre prénom ?

-Moi c’est Marc-André tout simplement, vous buvez quelque chose ?

-Oh, merci mais je dois m’en aller, je venais pour un poste de serveuse mais il a déjà été pris, par contre le monsieur m’a parlé d’un bar qui cherche une serveuse, j’y vais de ce pas

-Attendez je crois que j’ai mieux

Je sors mon téléphone pour appeler Raoul, un ami de ma petite sœur, il a un restaurant en ville et il a posté une publication pour annoncer qu’il est à la recherche d’une nouvelle serveuse. Il me confirme qu’il a un poste vacant, je lui dis donc que j’ai une personne travailleuse, soignée et polie pour lui, très respectueux il me dit qu’il se fie à mon jugement et qu’elle pourra débuter dès mardi matin sans même passer d’entretien. 

-Il y a un poste au Bybloss Coffee c’est un restaurant et salon de thé qui est au centre-ville, pour les détails vous allez régler ça directement avec le patron. Il me faudra juste votre numéro pour que je lui envoie, ensuite il vous appellera sous peu

-Je ne sais pas comment je peux vous remercier, vous êtes une bénédiction pour moi

-Jadis, une personne a fait beaucoup plus pour moi, juste il faudra être à la hauteur, accomplir chacune des tâches avec détermination, c’est comme ça qu’on gravi les échelons

Pendant que nous discutons de tout et de rien, mademoiselle Moussavou fait enfin son entrée, aussitôt ma jeune partenaire de conversation si souriante, devient crispée. 

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