Sam RENE

Ecrit par Marc Aurèle

Je m’étais installé là, observant et écoutant les parents de Jules, travestir l’existence de ce dernier. En un laps de temps, les tristes et éplorés personnages, s’étaient transformés en de véritables vampires. Je vis les titres de propriétés de mon ami changer de mains comme si de rien était. Je vis tirer au sort l’avenir de la progéniture de mon meilleur ami, regardant sa veuve, affalée, presque inanimée dans le fauteuil.

Les sœurs de Jules avaient attendu que les parents de Solange s’en aillent pour se lancer dans cette répartition des biens de leur frère. C’était à croire qu’il n’attendait que ce moment. Le corps de Jules devait être encore sur un brancard dans cette morgue.

Je regardais impassible, cette triste réalité. Je n’osais pas parler car je ne me sentais pas vraiment à ma place. Qui suis-je, moi pour parler ? Qui suis-je, pour intervenir dans les histoires de famille des autres alors que les miennes je ne les avais pas géré.

 

Oui mes problèmes de famille, je devais y penser. Je regardai autour de moi, cherchant du regard, quelque choses aux quelles m’accrocher dans cette tourmente.

Je n’eu, rien que le désarroi et l’amertume du regard de Solange. Je me levai, m’approchai d’elle et lui souffla à l’oreille tout mon courage.

-        Je vais revenir, en attendant, reste forte et confiante.

-         …

Je n’eu qu’un acquiescement comme réponse. De toutes les façons, je ne m’attendais pas à mieux. Je n’aurais pas fais mieux, si j’avais été à la place de cette pauvre petite femme. Je sorti sans demander mon reste. Toutes mes idées étaient loin, au delà de la bulle enchanteresse, elles me portèrent vers un passé assez lointain.

 

A vous, je me présente à présent. Je suis Sam RENE, j’ai trente cinq ans, je suis titulaire d’un PhD en Management des Organisations et Marketing, obtenu à l’Université d’Oxford en Angleterre. Je suis le troisième enfant d’une fratrie de cinq gosses. J’ai grandit auprès d’une dame formidable, ma grand-mère. Dame Agnès CELHY elle s’appelle. Mes parents dans cette quête permanente de l’épanouissement et du succès, avaient tôt fait de prendre des dispositions assez drastiques. J’avais cinq ans lorsque mère me déposa chez sa mère. Il fallu, dix longues années avant que je ne pu les revoir à nouveau. J’avais droit, à des appels et à pleins de cadeaux, mais rien de tout ceci, ne me réconfortait réellement.

J’ai vécu avec une rage et un manque. J’étais de cette tranche de personnes, pour qui la vie n’avait pas de réel sens et qui évoluait en automate. Durant le clair de mon enfance, je ressemblais à ses vases hors de prix, qui faisait s’exclamer quand on rentrait dans une maison de décoration. Je brillais et de mon être se dégageait un luxe insolent. Mes parents avaient cédé aux charmes de l’immigration canadienne. Ils étaient l’un des premiers à opter au programme ACCES CANADA et à cette époque, les familles avec plusieurs enfants n’étaient pas éligibles. Ils avaient dus nous sacrifier mes grandes et moi. Pour se rattraper de cette méprise, ils dévalisaient pour nous les galeries marchandes.

J’étais habillé avec des prêts à porter de dernière génération. A l’école, j’attirais sur moi la foudre des un et l’envie des autres. Je faisais partie des victimes les plus fréquentes de raquettes et de brimades. J’étais replié sur moi. Mon existence était répartie entre mon succès scolaire et la rengaine de mes camarades d’école. Je n’avais d’ami que ma solitude jusqu’à ce fameux jour là. Je m’en souviens comme si c’était hier.

Nous étions un lundi. Mémé, tenait que je sois présentable, et vu que les parents m’avaient envoyés de nouvelles fournitures scolaires, elle avait insisté pour que je brille de mille feux. Etant le seul petit fils qu’elle avait, elle me pomponnait, un peu plus que mes sœurs. Je ressemblais hélas assez souvent à un mannequin directement sorti d’une revue de mode pour enfant. Ce matin, j’arrivais ainsi à l’école et dès que sa voiture s’en était allée, je vis une nième fois, les caïds comme ils aiment se faire appeler, m’arracher mon cartable avec tout son contenu et partir avec. Je m’étais assis sur le banc le long du mur, recroquevillé sur moi et pleurant toutes les larmes de mon corps. J’en voulais à la terre entière de me retrouver toujours dans cette posture de la victime et quand je repense aux propos de ma grand-mère et de mes sœurs, je pleurais davantage.

Mémé m’avait promettre de devenir un homme en commençant par me protéger et protéger mes affaires. Les mots étaient si faciles à dire et mes oreilles les avaient également, facilement retenus. Mais pour ce qui est de devenir cet homme dont parlaient les miens, je ne me voyais pas dans ce rôle. Je venais de souffler ma septième bougie. J’étais là à me morfondre quand je vis un garçon de mon âge se rapprocher de moi avec mon cartable en main. Il n’avait rien des caïds, mais il en tirait un par le collet et avant même que je ne réalise ce qui se passait, il le jetait à terre au pied du banc.

-        présente tes excuses et promets ne plus jamais toucher à un seul de ses cheveux ;

-        je …

-        si tu ne le dis pas à haute voix ; je vais te taper et je t’amènerai chez la directrice tu vas voir…

Je vis le garçon hurler de toutes ses forces. Il n’était ni grand de taille, ni fort ou encore tout obèse comme la plupart des caïds de l’école, mais il avait ce quelque chose qui lui donnait de s’imposer à mes assaillants. Je vis le jeune garçon à terre, obtempérer, s’excuser et promettre ne plus jamais recommencer. Je le vis aussi disparaître en courant, et mon sauveur me tendit mon cartable.

-        Je suis Jules, nous sommes dans la même classe, vient on y va. Désormais, tu ne crains plus rien. Je serai à tes cotés.

-        Merci fis-je, en le prenant dans mes bras. Je le serrai si fort, qu’il faillit s’étouffer. Il se dégagea et me regarda.

-        Ca va allons y…

Cette rencontre changea ma vie. Grace à cette amitié, j’avais retrouvé un sens à mon existence. Je n’étais plus le taciturne ou le sournois, mais de plus en plus je m’épanouissais. Mes résultats scolaires s’en étaient également améliorés et ma grand-mère me permettait de partager mes nombreux cadeaux en provenance du Canada, avec mon frère ami. Jules vivait dans le même quartier que moi, il était le seul garçon de sa famille et passait le clair de son temps avec moi.

Notre amitié, avait cessé d’en être un. Elle avait franchi le cap de la fraternité et jules et moi étaient à présents inséparables. Mes parents m’accordèrent de le soutenir de leur mieux et c’est ce qu’il fit jusqu’à la fin de notre cycle secondaire. Ensemble nous avions obtenu notre baccalauréat et j’avais à présent la possibilité de les rejoindre pour poursuivre mes études. Ce n’était hélas pas le cas pour mon ami.

 

Loin de lui, j’étais comme dépossédé de mon âme, et c’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles je préférai rentrer au pays. Je le voyais à présent revivre et j’en étais heureux, mais le ciel en avait autrement décidé.

Je venais de me garer et j’accédai à l’ascenseur pour rejoindre mes appartements. Je compris, que mon devoir était plus énorme que je ne pensais. Je résolu en moi de devenir enfin un homme. Un vrai qui défend les autres, tout comme Jules l’a fait pour moi ce jour là. Je me résolu de ne plus me refermer sur moi ou d’être la victime des choses. Je devais à présent reprendre du poil de la bête et  saisir les cornes de la situation.

 

Ray était assise au salon quand j’y entrai. Je remarquai qu’elle avait beaucoup pleuré. Je l’a pris dans mes bras et elle me serra si fort qu’il me revint le souvenir de cette étreinte que j’avais donnée à jules la première fois que nous nous sommes vus. J’étais à présent un homme, un vrai, qui en plus de ces responsabilités devra prendre celles de son frère.

-        ils ont convenu de l’inhumer jeudi prochain.

-       

-        il faudra que tu soutiennes Solange. Les sœurs de Jules ne sont pas commodes du tout.

-        Qu’est ce qui s’est passé…

-        C’est à croire qu’elles attendaient ce braquage ou qu’elles l’ont orchestré. Ta copine risque de se retrouver dans la rue à cette allure.

-        Qu’est ce que tu racontes, qu’est ce que Jules avait comme bien à leur avis ? ne me dit pas qu’elles se partagent déjà les biens de leur frère.

-        Hélas Oui ; j’ai assisté impuissant à la réunion tout à l’heure. J’ai résolu de gérer ce que je peux pour les funérailles, mais je mettrai le maximum pour les enfants et leur maman.

-        Je suis d’accord avec toi. Tu peux compter sur moi.

Mon épouse m’embrassa et se retira du salon. Je la suivi dans la chambre où après m’être déshabillé, je me plongeai dans le bain qu’elle avait préparé pour moi. La senteur de la vanille et de la lavande avait envahi la salle d’eaux. J’y passai près d’un quart d’heure, et quand j’en sorti, je n’eu qu’une envie m’allonger et tout oublier.

 

Il existe des êtres dont l’essence est d’être. Oui être tout simplement. Ces êtres sont comme des anges chargés de veiller sur des gens comme vous et moi. Ici bas, ils prennent cette apparence humaine et dans le silence de la nuit, ils reprennent leur forme d’ange. Ils combattent pour nous, mais hélas personne ne combat pour eux. Puis vint, le malin qui trouve quelque part un indélicat, une personne insensée, sans cervelle qui l’aide à faucher cet ange. Mais c’est sans compter que cet ange nous préparait à être des anges comme lui et pour que s’accomplisse la loi de la formation, l’élève devient plus fort que le maitre.

Désormais je suis un ange, je ne protégerai pas un, ni deux mais je protégerai plus d’un. Je protégerai les enfants de mon ami, de même que son épouse. Je ferai au delà de la reconnaissance et si son essence à lui Jules était de me protéger, je ferai de ma naissance, son essence, ma raison d’être.

Rayons de soleil