Trop c’est trop ! (1)

Ecrit par Saria

Chapitre 14 : Trop c’est trop ! (1)

***Sous d’autres cieux***

***Cotonou-Bénin***

***Adesua***

Selma devrait être rentrée depouis une semaine au moins mais elle me dit que son retour est repoussé. J’ai cru comprendre que les choses avaient évolué avec Kader. Hum mais quand, c’est comme ça, tou rentres d’abord ou bien ? Elle fait ses conneries et c’est sour moi que Michel va se défouler.

Je prends mon téléphone et lance son numéro.

Selma : Hey mum ! Comment vas-tu ?

Moi : Ça va un peu !

Selma : Han, comment ça un peu ? Tu es fâchée contre ton chéri ?

Moi : Ah pas encore !

Selma : Aïe maman, tu me fais peur hein ! Il y a quoi ?

Moi : Tou trouves normal de rester comme ça dans le pays là-bas ? Sans explication ?!

Selma : …

Moi : Selma tou connais ton papa et ses principes ! Après il dira que je te couvre. Même si les choses se sont arrangées, il faut qu’on comprenne. Quand tou es rentrée ici, tou voulais mourir là, on était seuls ! Toi tou te ramasses pour t’installer chez lui comme ça ? Tou as vu ça où ?

Selma : Maman pardon, je ne suis pas installée. Je rentre…

Moi : Quand ?

Selma : Maman ! Je rentre bientôt, pardon. Je t’appelle après pour te donner une date !

Moi : Non, tou m’appelles, c’est pour me dire que tou as atterri et je viens te chercher !

Je raccroche et tombe nez à nez avec mon époux.

Moi (fake) : Hey love, tou es là ?!

Michel : Adesua… Hum… Oui je suis là ! Où veux-tu que je sois ?

Moi, je me mets à parler de façon volubile en me demandant quelle partie de la conversation il a entendue. Je sais qu'il nous observe ma fille et moi… J’espère que l'enfant-là va m’écouter.

   

***Sous d'autres cieux***

***Chez les Sidibé – Ouagadougou***

***Selma***

J'ai raccroché avec maman toute pensive. Elle a mis le doigt sur un point qui me tracasse : ma mission est bouclée, j'ai envoyé mon document au magazine, Kader et les enfants ne veulent pas que je parte donc j'ai repoussé mon voyage de quelques jours.

Nous vivons ensemble et apparemment ça lui suffit. Par deux fois j’ai sondé le terrain, par deux fois il est resté silencieux. Vous-même vous connaissez Kader et ses silences. Je ne vais quand-même pas lui dire « Tu m’épouses quand ?! ». Ce n'est pas comme ça que j’ai été éduquée ! Sans compter que sa phrase « J'ai déjà donné avec les femmes » qu’il m'a servie un jour où nous parlions d'engagement me tourne dans la tête. Hum.

 J’ai l’impression d’être piégée. Mon papa est bien gentil mais il ne transige pas sur certains sujets. Je soupire. J'entends des voix ; apparemment, ils sont tous rentrés. Je suis dans « notre » chambre. La porte de celle-ci s'ouvre et mon cœur fait un bond comme à chaque fois que mes yeux se posent sur lui. Il s'avance vers moi et m’embrasse, de cette façon qui me fait oublier qui je suis. Après, il se décolle et dit de sa belle voix grave :

Kader : Bonsoir mon cœur. Ta journée a été ?

Je souris et oublie mes soucis.

Moi : Bonsoir bébé. Oui merci… J'ai passé le temps à essayer de me projeter pour…

Kader : Viens me raconter tout ça pendant qu'on mange… J’ai sauté le repas du midi. Actuellement c’est la folie au bureau.

Je sais que le sujet s’arrête là, je ne me vois pas en parler à table comme ça devant les enfants. Pas que c’est un secret mais ce n'est pas un sujet qui concerne tout le monde tout de suite. Il ne le perçoit même pas je crois.

 

Yacine : Bonsoir tatie !

Moi : Bonsoir chéri.

Il se penche sur moi pour me faire un bisou. A douze ans, il était presque aussi grand que son père.

Audrey : Bonsoir petite mère !

Je secoue la tête, cette fille et ses lubies. C'est la nouveauté de la semaine. M'appeler petite mère. Nous mangeons en devisant gaiement. Après le repas, Yacine et Audrey débarrassent et enchaînent avec la vaisselle.

J'ai introduit depuis quelques jours la participation de tous aux tâches domestiques. Ceci permet à Loubna d'avoir plus de temps pour elle-même et améliorer la qualité de son travail. Au début, ce n'était pas évident mais en me voyant mettre la main à la pâte, ils ont compris.

 

***Tard dans la soirée***

Nous venons de nous mettre au lit. Je me prépare à peine à ouvrir la bouche quand son téléphone sonne. Vu qu'il est posé pas loin du mien, je vois le nom s'afficher. Automatiquement, je me crispe.  Il coupe, elle insiste au bout de la cinquième fois en 2 mn.

Moi (exaspérée) : Kader… Tu peux décrocher ce téléphone, s'il te plaît ?

Kader : …

Moi : hum

Kader : Allô ?

Moi : Tchroum !!!!!!

Kader me jette un regard d’avertissement. Il s’éloigne un peu et commence à parler mais moi j'entends tout.

Kader : Tu as vu l'heure ?

Kader : Appelle des amis ou des collègues.

….

Kader : Prends un antidouleur ou quelque chose jusqu’à demain matin et je t'envoie quelqu’un.

….

Kader: Ok… J’arrive !

Dans ma tête, il y a un truc qui se déconnecte ! C’est une blague !!! Mais non, votre parent se chausse sous mon regard éberlué, attrape ses clés de voiture ! C’est au moment de partir qu'il me regarde :

Kader : Chérie… Carmen ne se sent pas bien et…

Moi : Tu es médecin ?!

Kader (ton patient) : Si tu veux tu peux venir avec moi !

Moi : Tu es sérieux ?! Ça fait des jours que j’essaye de te parler de quelque chose de déterminant pour nous mais « Monsieur » est occupé ; et là cette fille appelle à une heure du matin et tu fonces la voir ?

Kader : Ce n’est vraiment pas le moment-là !

Moi (explosant) : Et c’est quand, dis-moi !

Il ne répond plus rien. Imperturbable, il prend ses affaires et s'en va. OK ! Parfait ! Je sais ce qui me reste à faire !

 

***Kader***

Ah les femmes ! Franchement peut-être que je suis bête ou il y a un truc qui m’échappe mais Selma n’avait pas de raisons de réagir comme ça ! En plus, je lui ai proposé de venir !

A cette heure-là, les rues sont vides ; en 10 mn, je me gare devant la maison de Carmen. La porte s'ouvre toute seule. Je referme quand même. Je m'avance sur l’allée qui mène à l’appartement. Selon elle, les voisins semblent absents, pourtant je vois de la lumière là-bas. Bref, je me dirige chez elle d’un pas rapide.

La porte de l’appartement aussi est ouverte. Je me dis que certainement qu'elle a du mal à se lever.

Moi : Carmen ?

Moi : Carmen ?

Je vois de la lumière dans la chambre alors je m'avance. Je vois une forme allongée ; je me précipite le cœur battant. Je soulève les draps ; au moment même où je réalise que c’est un leurre, j’entends distinctement le bruit d'une clé dans la porte. Je me retourne pour voir Carmen qui glisse la clé dans son soutien-gorge.

Carmen : Bonsoir bébé !

Moi : Mais qu’est-ce que c’est que ce cirque ?!

Elle est dans une tenue aguicheuse, la sensualité faite femme. J’avale difficilement la salive. Je commence à recenser dans ma tête toutes les raisons pour lesquelles je ne devrais pas la toucher.

Posant ses deux mains sur sa poitrine, elle me dit :

Carmen : Fais-moi l'amour… toute la nuit et je te libère.

Moi : Carmen…

Carmen : Allez chéri… Tu connais mon corps parfaitement… Et je connais le tien.

Ce faisant, elle se colle à moi… Je recule d’un pas, il faut que je trouve le moyen de la raisonner.

Moi : Carmen, tu m’as dit que tu n’allais pas bien !

Carmen : Oui Kader, je ne vais pas bien ! Tu me manques, chéri… C’est vrai qu’au début entre nous c’était que du sexe. Mais moi je t’aime, tu ne peux pas me laisser tomber comme ça, juste parce que Selma est revenue !

Moi : Je ne t’ai jamais rien promis ! Je suis venu parce que tu semblais aller mal !

Alors elle se braque. Une lueur que je n’avais encore jamais vue apparait dans ses yeux.

Carmen (hystérique) : Tu as l'option de me brutaliser pour récupérer la clé dans ce cas… Je crierai au viol ou me faire l'amour comme avant…Jusqu'à ce que j'oublie qui je  suis...

Moi : …

Carmen : Ce sera ta parole contre la mienne… le temps qu'on vérifie, chéri… ta réputation sera bien entamée… Moi je n'ai rien à perdre… Je pourrais même m’offrir une dépression… Je pourrai passer pour la pauvre petite femme désespérément amoureuse.

Elle s’avance vers moi en se déhanchant de façon lascive. Elle pose ses mains sur mon torse ; moi, je suis de marbre, mon cerveau tournant à cent à l'heure.

 

***Quelques heures plus tard***

***Chez les Sidibé***

***Selma***

J'entends sa voiture se garer… 6h45 sur l’écran de mon téléphone. Je n’ai pas pu fermer l’œil de la nuit. J’ai ramassé toutes mes affaires et les ai bouclées dans mes deux valises. Je les ai poussées à l’entrée de la chambre.

Ses pas se rapprochent… Il ouvre la porte, je fais semblant de dormir. Il marque un arrêt au niveau du lit, pousse un soupir, se déshabille et passe à la salle d'eau. Il prend une longue douche… A sa sortie, je continue de faire la morte. Il se prépare pour le bureau et ressort rapidement. C’est lorsque j’entends sa voiture ressortir de la maison que je réalise que j’ai retenu mon souffle tout ce temps.

Je me lève et soulève le polo qu'il portait la veille, des traces de maquillage et un parfum capiteux qui monte à mes narines… Mon cœur fait un raté. Là c'est bon !

Je commence à me préparer avec des gestes d’automate. Les larmes ont arrêté de couler. Lorsque je finis, je descends voir les enfants. Il faut leur faire les adieux ; là, je sens une grosse boule dans la gorge. Comme d'habitude, je les trouve avec Loubna à la cuisine. C'est Yacine qui me voit le premier ; je ne sais pas s'il perçoit quelque chose mais il vient vers moi.

Yacine (regard interrogateur) : Tatie ?

Je passe ma main sur sa joue et la caresse. Avec ses lunettes, on dirait un petit génie.

Moi : Je dois y aller… Je veux dire à Cotonou.

Yacine, Loubna et Audrey : Pourquoi ?!!!!

Je sens mon regard s'embuer. Je suis censée répondre quoi là ? Votre papa n’arrive pas à se détacher d'une autre femme, je suis ici sans statut et il s'en fout, j’estime que votre père n'a pas d’égard pour moi ?!

Moi : Hum… Je… Disons que j'ai besoin de recul. Vous avez mon contact Whatsapp, vous m'écrivez quand vous voulez.

Yacine : Tu t'en vas, toi aussi !

Je voyais bien à quoi il faisait allusion : sa mère. J’inspire fortement et le regarde droit dans les yeux et là je vois de la peine… et des larmes.

Moi (le serrant contre moi) : Oh chéri ! Je suis désolée…

On se fait un long câlin. Quand j’ai fini, Audrey a le visage fermé. Hum… la fille-femme de son père.

Moi : Pupuce, j'ai fait de mon mieux ! Mais… là… ce n'est plus tenable pour moi !

Audrey : Tatie… Ne pars pas, je t'en prie ! Je ne sais pas ce qui s'est passé mais ça peut s’arranger !

Moi, incapable de parler, je me contente de secouer la tête. Seigneur pitié, je ne VEUX pas pleurer devant eux ! Je lui fais un bisou sur le front ; alors contre toute attente, elle me serre contre elle.

Après près de vingt minutes d'adieux, je me tourne vers Loubna, les yeux rougis (oui, j'ai fini par craquer).

Moi : Prends soin de mes bébés, s’il te plaît… Invite-moi à ton mariage hein !

Loubna : Tantie, toi tu pars les yeux rouges comme ça et puis tu veux que moi j’aille dedans ?!

Moi : C’est différent.

Je monte me débarbouiller rapidement et prendre mes bagages. J’arrête un taxi, il faut que j’aille à Air Burkina d’abord pour voir comment on gère pour le billet.

 

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