107: Things will never be the same again
Write by Gioia
***Snam WIYAO***
Les jours ont
doucement évolué et je boucle mon sixième mois. J’ai enfin du ventre, même s’il
se voit mieux quand je suis de profil. Les cours ont enfin repris et par
extension le tutorat pour moi, grâce à ma prof de recherche, une dame que j’admire
tant. Sans elle, je n’aurais pas obtenu cette position de tutorat de sitôt. J’entre
à peine dans la phase rédaction de ma maîtrise et elle a des étudiants bien
plus avancés que moi, sans oublier qu’elle n’avait que deux places ce semestre,
et j’ai obtenu l’une d’elles. J’ai trois étudiants de licence pour le cours
intro aux PDE, pour l’équivalent de 1000 $ US comme salaire. Ce n’est
certes pas beaucoup, mais ça servira à acheter au moins les vêtements du bébé
puisqu’il ne me reste que ça. Les autres ont tout pris. Peut-être c’est mieux
que je raconte depuis le début, ou dirai-je depuis la nuit où Mally et moi on s’est
assis pour établir le « baby
registry », il y a deux semaines de
ça.
Je sortais comme
aujourd’hui d’une journée à l’uni où j’avais passé du temps à lire et annoter
les différents articles qui me servent dans le cadre de ma thèse. Dès que je
rentre, mon attention est réservée à Mally. Il a de plus en plus de mal avec la
distance parce qu’il pense manquer des moments importants de la grossesse alors
j’essaie de le rassurer autant que possible. La discussion évolue naturellement
vers les effets qu’on devrait à acheter et il évoque le baby registry.
— Les gens ne
font pas ça quand ils connaissent déjà le sexe du bébé ? Je pense que c’est tôt pour nous.
— C’est justement
parce qu’on ne lui a encore rien acheté qu’il a refusé de montrer son sexe pendant
ton premier scan, alors mettons-nous au travail d’ici ton scan de 22 semaines.
— Ce n’est pas
moi vous êtes hein, vous avez même les exigences dans le ventre, je dis avec un
sourire amusé.
— C’est notre marque
de fabrique. Maman t’a bien dit que j’avais joué aussi au cachotier jusqu’à 25 semaines
ou pas ? On aime se faire désirer
nous.
— On est là hein.
Je ne veux pas entendre les plaintes quand il ou elle te montrera comment il
aime se faire désirer, je le taquine tout en ouvrant Word sur mon ordi pour
commencer la liste.
— Au lieu de me
menacer parce que tu envies mon excès de confiance, va plutôt sur buybuybaby.com.
L’email c’est le mien, mon Yahoo et le mot de passe LovechildMKS23.
— Love child ? Le cliché ne te fait même plus peur, je dis avec
humour et pourtant transportée de joie comme toujours quand il est si
démonstratif. Le 23 c’est la date prévue pour mon accouchement.
— C’est le fruit
de notre réconciliation alors quoi de plus normal. Tu es déjà connectée ?
— Oui, j’y suis.
Euh…attend hein, je dis marquant une pause. C’est quoi la liste de quatorze
cadeaux que je vois ici ?
— Je ne t’ai pas
devancé hein, ne te fâche pas. J’ai juste ajouté ce que papa m’avait déjà
recommandé.
— Tu vas donc me
dire que c’est tonton Eli qui t’a recommandé le sac à langer Gucci ? Hein ? C’est
ce que tu comptes me faire croire ?
— Nah ça, je m’en
suis occupé moi-même, mais le reste des trucs techniques là c’est papa, il dit
avec un sourire fier
— Et tu n’as pas
honte de déposer un sac qui vaut plus de 1000 $ là pour que les gens
achètent pour toi ? S’ils
le font, ils feront donc quoi pour leurs propres enfants ?
— Pardon, laisse ma
liste comme tu l’as trouvé, je n’ai menacé personne avec l’arme pour qu’ils achètent
forcément. On appelle ça une suggestion.
Le pire c’est que les
choqués par ce cadeau vont nous traiter ensemble de « gros yeux »,
pourtant c’est lui qui l’a mis là. Il nous reste à faire donc je propose qu’on continue,
avec l’intention de retirer quand même le sac à la dernière minute. Les couches,
c’est là que va la grande partie des dépenses de ce que m’a dit maman alors on
commence par ça. Vient ensuite le tour du travel system, soit la poussette et
le siège auto. De vidéos YouTube aux articles, on brûle presque une heure
dessus et trois choix se démarquent du lot pour nous. Au moins s’entend très
vite que l’un des choix, l’Uppababy bien que fancy et très équipé n’est pas le
meilleur pour nous.
— Je préfère le 5
en 1 du Maxi Cosi là, je lui dis.
— Le B-lively de
Britax c’est le meilleur pour nous.
— Mais il n’a pas
la fonction couchette pour le bébé, en plus il est juste noir et bien plus cher
que le Maxi.
— Snam, il commence
sur le ton qu’il emploie quand il ne me trouve pas raisonnable. Notre quotidien
sera mouvementé dans les deux ans à venir avec moi ici et toi là-bas. Il te
faudra venir ici, on devra emmener Lovechild à Lomé ainsi que les autres pays
qu’on veut lui montrer. Une poussette facile légère et facile à utiliser c’est
le must pour nous. On a lu les avis sur amazon, les articles, même les vidéos s’accordent
à dire que le point fort de ce modèle c’est sa légèreté. Mais en plus tu as un
grand auvent autant sur la poussette que le siège auto, et lorsque tu rabaisses
les deux, le bébé est entièrement protégé. Un autre must pour les curieux qui essaieront
de m’effrayer l’enfant sous prétexte qu’ils lui font des coucous.
— Tu es mauvais,
je rigole après sa dernière phrase.
— Tu sais qu’ils
sont nombreux comme ça surtout ici. Tu viens faire tes courses en paix et ça
envoie en désordre son visage un être qui ne peut même pas encore donner son consentement.
Justement tu me rappelles même que je dois ajouter une tapette à mouches sur la
liste pour ceux-là. Bref, contre toutes ses merveilleuses qualités, qu’est-ce
que ton Maxi machin propose en dehors du 5 en 1 et les couleurs ?
— Bon, va pour ton
britax que tu vends aussi bien que le concepteur de la chose.
— Tu vois ? La qualité on ne la discute pas longtemps. On
s’aligne simplement.
À la fin de l’appel,
on a étonnamment tout fait. Comme il l’a dit, il s’était déjà occupé des choses
essentielles comme le kit de soins pour bébé, l’aspirateur nasal, la crème contre
l’érythème fessier, ainsi de suite. Le berceau on a décidé de l’acheter nous-mêmes
ici. Pour le moment, on ne prévoit pas encore que je déménage, mais c’est
évident que je devrais le faire, alors on ne prévoit pas prendre de meubles. Toutefois
il y a un truc qui m’a tapé dans l’œil durant nos recherches, ou dirai-je
plutôt une couchette pour bébé, Evi de Trubliss. Elle me coûterait 360 $
de mes économies, mais ma question actuelle c’est l’utilité de dépenser ce
montant dans un truc dont mon bébé n’aura plus besoin après ses cinq mois.
Je me tourne encore
sur le lit, n’arrivant pas à dormir alors je décide de faire le fameux spreadsheet
d’Elikem que j’ai retardé, parce que j’ignorais quoi mentionner comme besoins. En
début d’année mon père paie toujours l’entièreté de ma scolarité. Mon « argent de poche » incluant mon loyer, je le reçois deux fois
dans l’année alors j’ai déjà le nécessaire en réalité. En plus Mally m’envoie 700 $
par mois depuis que je suis enceinte. Donc aucun besoin à mon niveau
honnêtement. Mais puisqu’elle a demandé, j’essaie de détailler ce que je peux, et
me retrouve à 200 $ le mois.
Je ne m’attendais donc
pas à recevoir 1000 $ dans mon compte, le jour où je bouclais mon sixième
mois. J’appelle la concernée sans succès. Mally dort à cette heure puisqu’il
travaille toujours de nuit donc je ne le dérange pas. Il ne me reste plus que
Dara à qui j’écris histoire de savoir si elle a des nouvelles de sa grande sœur.
— Pas depuis deux
jours, maman dit qu’elle met les bouchées doubles pour finir au moins l’année
prochaine. Quoi de neuf ?
— Il se fait qu’elle
m’a envoyé plus d’argent que prévu et je ne sais pas si c’est une erreur ou un
piège.
— Lol, un piège ? Pourquoi ?
— Je sais quoi
avec vous moi ? Un piège
pour voir si j’en ai après votre argent peut-être. Je ne veux pas les
histoires.
— Entre nous, tu vois
Elikem dans le genre qui jouerait des jeux stupides comme ça ?
— Ouais bon, je lui
envoie. Mais admets que c’est bizarre. C’est elle qui m’a dit de lui faire un
résumé de mes besoins et elle envoie quatre fois plus que le montant normal. Je
ne veux pas dépenser et que ça cause des griefs entre nous.
— Tu es même où ?
— À l’uni dans
mes recherches.
— Je viens te
chercher, on va manger un bout.
— Non je n’ai pas
assez avancé pour ça, je lui envoie. Non seulement elle ne répond pas, mais en
plus elle débarque et arrive à me convaincre de prendre une pause d’une heure.
C’est au CJ’s à qu’on
se rend pour se remplir la panse. La tante du bébé m’a ordonné tout ce que je voulais
incluant ce que je ne désirais pas également. L’ordre, c’est que je dois
manger, parce que le papa du bébé s’est plaint chez elle qu’il ne me trouve pas
assez dodue pour une femme enceinte. On s’est réconcilié depuis la fois où je
lui ai mis un vent au téléphone, alors je ne prends pas mal ses remarques
actuelles.
— Les joues que
vous cherchez là n’existent pas dans ma famille. Ma mère avec ses deux
grossesses ne prenait pas plus de 15 kg alors je ne vais pas dépasser ça d’ici
la fin.
— Ça c’est ce que
tchu djis, nous on attond le poids parce que maman a djit qu’elle était tchrès
rondje quand elle attondait ton copain.
— C’est qu’il
faut vite tomber enceinte de Marley et tu auras le poids auquel vous êtes tant
attachés, la taquiné-je.
— Hum, ça c’est
pour les gens qui se comportchent comme de bons copains, pas lui.
— Tu veux en
parler ?
— Non, il me
fatchigue assez, pas la peine.
***Aïdara LARE AW***
Oui il me fatigue
assez, je n’ai pas envie de m’en rajouter même s’il me manque aussi. Depuis qu’on
s’est disputé dans sa voiture, il ne s’est pas excusé. Non il m’a servi un semblant
d’excuse, et s’est justifié avec l’argument que j’ai mes torts. Est-ce qu’on s’excuse
comme ça ? Soit tu reconnais avoir
déconné, soit tu maintiens ta position. C’est quoi cette façon voilée de
rétablir les choses tout en se dédouanant ? Bref
on s’est encore un peu fait la tête, mais, on a fini par se retrouver parce que
faire autant de temps loin l’un de l’autre, ce n’est pas notre habitude.
Pourtant depuis qu’on s’est rabiboché, je ne le sens pas. La semaine dernière,
il a annulé un de nos rencards à dix minutes de l’heure prévue avec l’argument
qu’il était fatigué. Pourtant j’étais déjà sur les lieux. J’étais tellement en
rogne que je ne lui ai pas répondu. Deux jours après je l’ai croisé entrant dans
la gym de Godson, quand j’en sortais avec Kai. Ce dernier l’a finalement ouvert
son complexe et pour l’encourager comme m’a demandé Hilda je m’y étais rendue. Elle
est tellement aux anges qu’elle parle à tout le monde de cette salle de sport.
Snam m’interrompt dans
ses pensées en faisant une grimace. Je me lève pour qu’un serveur me remarque
et nous apporte de l’eau. Elle descend toute la carafe qu’on nous dépose. Les
remontées sont terribles chez les femmes enceintes, ou du moins Snam. Parfois
elle ne finit même pas ses repas que ça commence, comme c’est le cas aujourd’hui.
Si je dis ça, je vais me recevoir des bonnes insultes, mais je trouve ça
tellement adorable quand elle caresse son ventre lorsqu’elle se sent indisposée.
Plus rien n’entrera, c’est ce qu’elle me dit et je suis déjà pleine aussi alors
je demande qu’on emballe le reste puis je la dépose à l’uni avant de retourner
à la firme.
Je rencontre aujourd’hui
un couple de sexagénaires dont l’histoire m’attriste depuis que Sir MELEDJE a
pris cette affaire. Des parents qui se sont fait rouler par leurs propres
enfants. Le papa, à qui on a diagnostiqué un début de Parkinson il y a trois
ans de ça, a commencé à expérimenter des troubles cognitifs incluant des pertes
sporadiques de mémoire et ses enfants n’ont trouvé rien de mieux que lui faire
signer des engagements financiers pour leurs entreprises. Le pire c’est que la femme
du monsieur ne s’en est rendu compte que tardivement, la pauvre ne s’y connaît
pas tant que ça. Lorsque confrontés, les enfants ont osé jouer aux innocents, utilisant
la maladie du père pour se défendre. Pour eux, il n’a plus toute sa tête et essaie
de revenir sur son engagement. Ce sont les cas comme ceux-ci qui me font trembler
de rage et regretter mon handicap. Des cas comme ceux-ci j’aurais tant aimé les
défendre si j’avais la possibilité de m’exprimer clairement. J’y aurais mis
toute mon énergie comme si cette famille était la mienne, mais une chose qui me
rassure, c’est que le taux de réussite de Sir MELEDJE fait partie des meilleurs
de la firme et sous ses airs de femme froide, j’ai découvert avec le temps, une
personne qui ne se ménage pas quand elle doit défendre les plus faibles, alors
je m’applique particulièrement dans mon travail pour lui rendre la tâche
facile.
À la fin de la
journée, j’ai besoin d’être entourée. J’envoie un long message d’amour à mes
parents, les remerciant pour tout et prie aussi que Dieu leur accorde une
excellente santé pour les jours à venir. Papa me répond en premier donc je
discute un peu avec lui. Le savoir seul à Lomé ne me réjouit pas, mais il insiste
qu’il s’y est habitué et les WIYAO en plus de Romelio lui rendent régulièrement
visite alors on n’a pas à craindre pour lui. Au lieu de rentrer, je vais chez Marley.
Ça suffit comme ça les boutades. Les gens sont cruels dehors et la maladie nous
rappelle que la vie ne tient qu’à un fil alors je préfère aimer quand j’en ai l’occasion.
Du moins, j’en prends la résolution à cet instant.
***Marley BOULDER***
Il faut le faire, c’est
ce que je me répète depuis un bon moment. Je dois me décider à parler avec Dara
et surtout lui demander ce qu’elle ressent pour moi. J’ai essayé plusieurs
fois, mais je finis par flancher, ne voulant pas passer pour celui qui quémande
l’amour si jamais il advenait qu’elle ne ressentait pas la même chose que moi. Nous
avons après tout fait plus d’un an ensemble et jamais je ne l’ai entendu me dire
« je t’aime ». Le sexe c’est top, l’entente entre nous j’y
suis accro, et au début je m’étais lancé dans cette aventure avec l’idée que
peut-être nous évoluerions vers des sentiments plus profonds. Seulement ces
derniers jours, ma patience s’amenuise et j’ai souvent l’impression d’être en
avance ou plus impliqué qu’elle.
C’est aujourd’hui ou
jamais, c’est l’objectif que je me fixe alors lorsqu’elle appelle, je suis
plutôt surpris.
— Oui je suis à
la maison, tu veux venir ?
— Oui, j’ai besoin
de câyins.
— Ça va ? Tu as l’air bizarre.
— Une djournée dégueyasse
en fait.
— OK viens bébé,
je t’attends, je dis rassuré qu’elle vienne vers moi pour ça. C’est avec ça que
je me dis souvent qu’elle doit tenir à moi. En tout cas, je suis assez
important pour elle.
J’ai oublié de lui
demander si elle voulait se mettre un truc sous la dent à son arrivée, mais sa
ligne est occupée quand je rappelle alors je finis par choisir un truc rapide à
faire. J’ai emménagé dans un nouvel appart dont elle ne connaît pas le code alors
elle sonne à son arrivée. J’ouvre et à son arrivée, elle jette ses effets sur
mon sofa et file aux toilettes en s’excusant. Le contenu de son sac s’était renversé
alors je vais le ranger pour elle et tombe sur un message entrant de son collègue
Kai, qu’elle appelle parfois Chacha. Je sais que c’est le nom du type, mais ça
m’énerve quand je l’entends dire ça.
— Ta journée s’est
bien passée tchoi ? elle
me demande depuis les toilettes.
— Hum, rien de
spé. Tu sors bientôt ou…
— Nan, je purdje,
désolée.
— No stress. J’ai
fait un truc épicé en revanche, tu pourras manger ça ?
— Je vais ezayer zinon
je ferais autchre chose. Alors ton nouveau job, tchu aimes ? C’est comment de fabriquer tes outchils de
médecine ?
— Je suis encore
en formation bébé, ce n’est pas le moment pour ça, je dis avec humour.
— Oh oui c’est
vrai, j’avais oublié. Tchu sais pas ce qui s’est passé au tchravail aujoud’hui.
Un couple de…
J’écoute d’une oreille
distraite à ce moment quand je vois que ce Kai a envoyé maintenant deux
smileys. Un de pêche et une langue. Pourquoi il lui envoie ça ?
— Maryey, tchu es
là ou pas ?
— Hum, continue.
— Djis le surtchout
hein si je t’ennuie, elle me dit sur un ton agacé.
— Parle j’ai dit,
je réponds bien que mon esprit soit en ébullition.
Son code je le connais.
Elikemally avec à la fin la combi de leurs dates de naissance. Mais fouiller
dans son téléphone est incongru. Ce n’est vraiment pas mon style. Je finis par
craquer la minute suivante et j’entre dans leur conversation.
Avant les smileys, il
avait envoyé une vidéo de cinq minutes que je joue après avoir baissé le volume
et tombe des nues devant. Une femme se fait démonter par un mec qui lui presse
les seins. Les mains tremblantes, je remonte un peu dans leurs échanges pour
comprendre.
— Hey, still at
work ? il l’a envoyé il y a une
semaine.
-Nope, why? elle lui a
répondu le même soir.
-Wanted to see if you could pick something
at my desk fa me.
-Oh sorry.
-Never mind, see u 2morrow then.
Elle lui envoie un clin
d’œil. Le message suivant date de deux jours.
-I was eating this huge bowl of oatmeal
after work and thought of u. What’s up?
-Huh? Me ? OK, elle lui envoie avec un smiley qui sourit
en transpirant.
Il lui en renvoie trois
(le même smiley) et ils parlent d’autre chose. Je découvre qu’ils se visitent. Genre
elle le visite ? Le
lendemain, dans la nuit, il envoie une vidéo.
— One day, et il
lui envoie aussi un clin d’œil à la suite.
Elle lui envoie un
smiley qui rit en transpirant. Le lendemain ils parlent uniquement de travail.
-Was lovely seeing u tonight, u should go
out more often, il lui envoie.
-Yeah, was fun, but I am not really a night
owl.
Je suis de retour à la
vidéo que j’ai regardée il y a une minute alors je remonte et rejoue celle d’avant.
Elle commence sur une femme qui marche quand un type en voiture la siffle et
les deux minutes suivantes c’est…
-Ehhhhh qu’est-ce que
tchu fais ? j’entends sa petite voix
dire.
— Eh ? Je m’écrie sans pouvoir me contrôler et elle
a un mouvement de recul.
— Pourquoi tchu…qu’est-ce
qui se passe ? elle dit faiblement,
mais je boue tellement de rage que je n’arrive pas à reprendre le dessus sur
mes émotions.
— Qu’est-ce que
tu venais faire ici ? Ton
black n’est pas libre pour te monter alors tu as décidé de prendre le petit
blanc en attendant ?
— Mais…mais de
quoi tchu…
— Tu dégages de
chez moi, je lui dis après avoir déposé son téléphone et vais m’isoler dans la chambre
pour éviter de faire une connerie.
J’ai l’impression que
mon cœur à l’intérieur se rétrécit. Je revois Cédric mon ami qui me déconseille
de m’engager dans une relation sans être certain des sentiments de l’autre. Il
l’a fait et ça ne lui a pas réussi. Mais j’avais tant d’arguments. Dara est
différente. Je ne suis pas non plus pressé de fonder une famille comme toi,
ainsi de suite. Voilà où j’en suis aujourd’hui. Elle ose débarquer en fracas
dans la chambre l’air en colère.
— C’est quoi
cette histchoire de je sais pas quoi là ? Et qu’est-ce
que tchu faisais avec mon téléphone ? Je n’ai
jamais…
— Vous vous envoyez
du porno depuis quand avec ton Kai ? je l’interromps.
— Hein ? elle s’écrie.
— Oh, brusquement
tu es tombée sur la tête. Tu ne sais pas de quoi je parle. Tu me diras même
bientôt qu’il s’est trompé de personne et que j’ai mal compris ce que j’ai lu.
Ou non, en fait. C’est à quelqu’un qu’on tient qu’on ment pour essayer de se
sauver. Je ne suis que ton sex toy vivant alors…
— Ahête ! elle m’interrompt à son tour en criant et tremble
de partout. Je comprends pas de quoi tchu parles et tchu me fais peur.
— Tu ne comprends
pas ? Ce n’est pas Kai ton
type au travail qui t’a envoyé du porno ?
Ses yeux s’arrondissent
si grands qu’ils auraient pu sortir de l’orbite et pour une seconde j’ai un
moment de doute. Se peut-il que…, non j’ai vu. Il en a envoyé deux à différentes
reprises. Elle-même avait détalé et revenait une minute plus tard, téléphone en
main, l’air toujours médusé.
— Eh ! Je….je comprends pas Maryey, je djure que….mais….enfin…qu’est-ce,
elle dit main sur sa bouche.
— Tu ne comprends
pas ? Pourquoi il en a envoyé deux ? Pas une, mais deux et à différentes reprises ?
— Je sais pas ! Je…il m’envoie parfois des vidéos idjiotes et
j’ai djit d’ahêter, donc j’ai djuste pas regardé quand…
— Et le I was eating a bowl of oatmel ?
Ça aussi tu l’as lu sans le lire
Dara ? C’est ce que tu veux me
faire croire ?
— De quoi tchu…parles ? j’ai pas vu qu’il….
— Il t’a dit qu’il
mangeait un bol d’avoine Aïdara ! Tu
sais très bien que « thicker
than a bowl of oatmeal » c’est
une expression utilisée pour des femmes comme toi. Des femmes qui sont faites
de courbes généreuses alors…
— Mais je…j’ai
pas pensé jusque là. Quand ce qu’il djit n’est pas lié au tcharvail je lis jamais
sérieuse….
— Mais oui ! C’est aussi pour ça…
— Maryey ahête ! elle dit et fond en larmes. Dje veux expliquer,
mais chi tchu me coupes tchout le tchemps, comment je fais ? elle bégaie énormément, ce qui me rend la compréhension
difficile. Son élocution ne s’était pas empirée de cette façon depuis des
années.
— Je préfère que
tu t’en ailles, je n’ai pas envie que ça devienne laid entre nous, je lui dis d’une
voix que j’essaie de maîtriser après lui avoir tourné le dos.
— Dje djis la véritché
Maryey, chur la vie de je…je sais pas moi, ma mamie, che zais pas pourquoi il a
fait ça, elle dit tout en reniflant doucement.
— Aïdara, je suis
un homme. Un homme n’envoie pas de porno à une femme s’il ne pense pas avoir
une chance de l’accomplir avec elle. Il t’a même envoyé un message explicite.
Une langue et une pêche. Tu me diras que ce ne sont pas des mots, mais dans le
monde actuel on comprend facilement ce que l’association des deux signifie. J’ai
compris de vos messages que tu t’es déjà rendue chez lui.
— Faux ! Dj’ai été avec Hilda chez Godzon qui a
hébergé Kai pendant un moment.
-How convenient is
that? j’ironise pour ne pas exploser.
— Qu’est-ce que
je djois faihe pour que tchu me crois Maryey ? Dje sais pas quoi te djire zinon que je
comprends pas, mais dje djure, j’ai rian fait. Je t’ai pas tchrahi. J’aurais djamais
pu tche faihe ça.
— Beaucoup trop
de coïncidences Aïdara, beaucoup trop qui se rajoutent à mes doutes. Je préfère
que tu t’en ailles, je te le demande pour la dernière fois.
— OK, mais ne
djoute pas de moi s’il te plaît…., tchu es mon seul amouheux, dje jure, elle
renifle encore.
Je ne réponds rien et
après quelques minutes de sanglots faibles, elle finit par s’en aller. Une fois
seule, je relâche le souffle que je retenais et donne un coup dans le mur. Il
lui a envoyé du porno, pas une, mais deux fois. Comment je suis supposé la
croire ? Je ne suis pas con non
plus.
***Aïdara LARE AW***
Dès que j’entre dans
mon véhicule, je laisse libre cours à mes larmes de frustration et incompréhension.
Qu’est-ce que Kai m’a fait comme ça ? Et
pourquoi diable n’ai-je pas regardé jusqu’au bout la première vidéo lorsqu’il l’a
envoyé ? Le pire c’est que
lorsque tu vois la vignette de la vidéo, tu ne peux pas imaginer que c’est du
X. Est-ce donc pour cela qu’il me souriait autant récemment et me faisait des compliments
sur mes tenues ? Plus j’évoque
les différentes hypothèses, plus mon sang bouillonne. Je pleure tout mon soûl
dans la voiture et nettoie mon visage avant de conduire pour rentrer. Le lendemain,
je suis debout aux aurores. Ma nuit fut courte et remplie de différents
scénarios, mais je pense avoir trouvé la meilleure option pour moi. Ce matin, je
cherche les meilleurs mots pour exprimer à Marley ce que je n’arrivais pas à bien
transmettre hier à cause de l’affolement que je ressentais face à sa colère.
— Bonjour Marley.
Je viens te présenter encore une fois mes excuses pour le malentendu d’hier. J’utilise
ce mot non pour me dédouaner, mais expliquer ce qui est. Celui qui s’est fait
des idées c’est l’autre. Je reconnais que ne pas regarder jusqu’à la fin la
vidéo a créé cette situation ambiguë et ça me fait vraiment mal que tu sois
déçu ou dans le doute. Je ne t’aurais jamais fait ça sciemment. C’est ce que j’essayais
de dire hier, mais les mots ne voulaient pas sortir comme mon esprit les concevait.
Je me rends compte après cette nuit que ma remarque concernant tes origines t’a
marqué, et au risque de sonner comme une vieille radio qui répète le même
disque, ce n’était pas mon intention. Blanc, noir, je m’en fiche depuis que je
suis amoureuse de toi Marley. Je ne t’ai jamais considéré comme mon numéro
deux. Tu as réveillé ma nature curieuse, m’as donné un cadre sécure dans notre relation.
Un cadre dans lequel j’ai pu m’épanouir sans jamais me sentir diminuée et pour
moi ça n’a pas de prix. Je ne t’ai peut-être pas choisi dès le début, mais je
ne veux pas te perdre. Non pour rien au monde, je ne veux ça. Je comprends que
ça te demande du temps pour que ta colère baisse, alors je vais rester dans mon
coin et t’attendre. Je t’aime.
Telle une petite
nature, j’ai pleuré en écrivant chaque mot et je me sentais tellement mal. Si seulement
j’avais réussi à lui dire tout ça hier au lieu de sonner comme une attardée. Bref,
je vais me préparer pour le travail. Pour Kai, c’est devant Sir MELEDJE que je
vais régler sa part. Je ne pense pas que mon cas rentre dans le harcèlement
sexuel puisqu’il ne m’a rien fait durant les heures de service, toutefois je ne
veux plus travailler avec lui. S’il faut que je quitte la firme, je suis prête
à le faire. Je laisse Sir MELEDJE me proposer ce qu’elle trouve de mieux pour
moi, mais l’objectif c’est de ne plus avoir aucun lien avec Kai, même le
professionnel. Il faut être un sacré malade pour envoyer du porno à une femme
avec qui tu n’as même jamais échangé un câlin. J’arrive enfin au travail et pendant
que je descends de ma voiture, je reçois un message. Comme une affamée qu’on
appelle à manger, je cours pour sortir mon téléphone de mon sac et le fais
tomber. L’écran se fissure, ce qui me fait pester de rage. J’arrive à lire le
nom de Marley quand même. Les mains moites, je déverrouille mon cell, priant qu’une
bonne nouvelle m’attende.
— Bonjour. J’ai fait
des mois avec toi, on a fait l’amour plusieurs fois. Tu as pleuré, ri, dormi
dans mes bras et jamais tu ne m’as dit que tu étais amoureuse de moi. Qu’est-ce
que je dois penser de cette déclaration subite ? Tu es sûr de m’aimer ou tu te contentes de ce
que je te donne ? Ce sont
les questions qui me viennent à l’esprit te concernant. Bonne journée.
— Bonne djournée
de mon cul ouais, je dis tout haut, les yeux embués de larmes. Pourquoi les
choses décident de tourner au vinaigre juste maintenant ? Je vois Kai qui arrive au loin et me fais violence
pour ne pas m’élancer avec mon sac à main pour lui fracasser la tête.
D’abord, je règle le
cas de Kaï. Ensuite, je m’occupe de Marley. J’ai été maladroite, je le
reconnais. Je n’ai jamais pensé qu’il attendait une confession de ma part
puisqu’il ne m’a jamais exprimé ce désir. S’il est vrai que je lui ai ouvert
mes jambes sans être amoureuse de lui, je ne lui aurais cependant pas donné l’accès
à mes pensées intimes, craintes ainsi qu’aspirations s’il n’y avait pas de l’amour
entre nous. Je suis de ceux qui ne réservent leurs jardins secrets qu’à ceux qu’ils
aiment et en dehors de ma famille, il est le seul à y avoir accès. Alors pour
moi c’était clair depuis un moment. Je l’aime cet homme. C’est avec lui que je
suis moi, bien et à ma place. Il ne me reste plus qu’à le lui faire comprendre dès
qu’il me le permettra.