110: Your love is king, I crown you in my heart
Write by Gioia
***Mally LARE AW***
Enfin on me l’a enlevé ce foutu plâtre. Je me sens revivre et ça ne pouvait pas mieux tomber parce que cette semaine, je commence la recherche d’alliance pour Snam. C’est la veille de Noël et je compte profiter des soldes si je peux en avoir parce que je commence à être juste sur l’argent. Je m’étais fait un planning de dépenses il y a quelques mois, mais il a fallu que ce vilain mot qu’on appelle « imprévu » pointe son nez. Mon frigo a choisi mon absence pour arrêter de fonctionner et mon appart sentait la merde à cause de la bouffe avariée au retour. Y penser m’énerve encore donc autant passer à autre chose. Je m’en vais à l’aéroport pour prendre mon vol en direction de Springs. Nous avons un lourd programme pour cette fin d’année. Noël en premier bien sûr, ma dot le 28 et la fin d’année. Vu notre situation, les parents se sont arrangés pour nous accommoder autant que possible. Papa se rendra chez les WIYAO en mon nom pour demander la main de Snam. Je lui ai envoyé 700 $ en début de mois et maman depuis Springs a contacté ses fournisseurs favoris au grand marché pour préparer minutieusement les effets conformément à la liste qu’on a reçue des WIYAO. Papa par la suite s’est chargé de récupérer les effets et comme je lui ai demandé, il remettra sous forme d’enveloppes ce qui reste des 700 $ à la famille de Snam. J’adore mes parents, mais ma reconnaissance pour eux est passée au niveau ultime cette année. Ils m’ont accompagné et guidé à chaque étape du processus.
Elikem est encore à l’hôpital alors je me prends un Uber dès que j’atterris. C’est maman qui m’ouvre, mais elle n’a pas mon temps, car affairée au téléphone. Elle me tapote juste la joue et continue sa conversation très animée.
— Le fiancé de l’heure, j’entends d’Océane qui sortait de sa chambre.
— Ah tu es là et je prends encore le taxi ? C’est comment ?
— C’est ta punition pour m’avoir trompé avec Snam, elle dit en me lorgnant et m’arrache un sourire.
— Dois-je te rappeler que tu m’avais barré ? J’ai eu mal au cœur au point d’en tomber malade.
— Pardon, j’allais emmener un garçon de 12 ans qui gonflait la voix pour saluer sa grande sœur ? elle rigole.
Petit, j’en ai fait des conneries quand même. Va savoir pour qui je me prenais à l’époque. Dans cette histoire de drague d’Océane, j’ai même acheté un pack de rasoirs pour m’épiler le menton qui était lisse, espérant que quelque chose sorte rapidement parce que je me rappelais des fois où Elikem se plaignait que ses poils poussent plus vite quand elle se rase. On se remémore le bon vieux temps Océane et moi le temps que maman finisse son appel. Elikem rentre environ deux heures plus tard. Maman nous surprend avec un Kontomire digne de ce nom. Les filles aussi étaient étonnées. Apparemment, elle a attendu d’être seule à la maison avant de commencer sa préparation. On se met à table, et c’est à la main qu’on attaque les ignames et bananes plantains bouillies qui servent d’accompagnement à la sauce. Un 24 tout juste parfait. Même le vin est à l’honneur. On passe ensuite aux cadeaux parce que bref, je ne pouvais pas attendre.
— Yiieee, Hermès ? Mally hein, s’étonne Océane quand ma sœur finissait de déchirer l’emballage de son paquet.
— C’est…tu ne vas pas me dire que c’est ce que je pense, ma sœur dit avec un air incrédule.
— Tu peux aussi ouvrir et constater en live, je dis amusé et rigole même quand elle ouvre tout doucement la boite comme si elle avait peur d’abimer le contenu.
Elle ouvre grandement la bouche et sort les chaussures que j’avais réservées pour sa graduation et finalement changé d’avis. Je lui présente la carte que Snam m’a remise insistant que je n’avais pas intérêt à l’oublier lorsque je remettrai notre cadeau à Elikem.
— Ça dit quoi, ça dit quoi ? Océane répète tout en essayant de lire le mot avec ma sœur qui la feinte en lui donnant le dos.
Elle tient la carte contre sa poitrine quand elle se retourne vers nous et son air ému est la récompense ultime pour moi. Elle se rapproche, m’embrasse la joue et me dit qu’elle m’aime.
— Always, je réponds sous le regard attendri de maman.
Elle se dépêche d’essayer les sandales qui lui vont parfaitement bien.
— La couleur et tout, non Mally tu connais. En plus c’est exactement la hauteur que tu préfères en chaussures, envoie bien le pied gauche devant, je vais prendre mes photos, dit Océane.
— Il ne faut pas aller mettre ça sur internet hein Annie, elle va inaugurer ça à sa graduation, continue maman et me fait rire.
— Donc si elle met sur internet, Elikem ne peut plus porter ça ?
— Personne ne doit voir ça d’ici là.
— Tu sais quand même qu’elle n’est pas la seule à avoir ce modèle dans le monde hein, je l’embête.
— Il ne faut pas mettre sur internet Annie, je les garde pour le mariage de Dara, Elikem qui contemplait ses pieds depuis là finit par dire.
— Oh d’ici le mariage de Dara, tu en auras des nouvelles. Ça c’est pour la graduation qui est toute proche, Dieu merci, se réjouit maman.
— Allez, à mon tour, Elikem dit et nous présente nos cadeaux sans commenter les plans de maman concernant sa graduation.
J’ai reçu un chèque pour ma part. C’est ce qu’elle me donne depuis un moment et franchement c’est plus que la bienvenue actuellement. Avant qu’on aille au lit, je la retiens pour la questionner.
— Ça va avec tes études ?
— Oui, pourquoi ?
— Comme tu n’as rien dit quand maman a parlé de la graduation, je me questionnais. Tu sais que la pression n’est pas nécessaire right ? Tu prends le temps qu’il te faut. Même si c’est à la fin de l’année ou la prochaine que tu finis on sera toujours fiers de toi.
— Ne t’en fais pas, je sais ce que je fais.
— OK. N’oublie pas, notre rdv chez Luisa Graff c’est à 11 h 30.
— Quel rdv ? Elle me demande d’abord confuse puis se couvre la bouche avec un air dépité. Ça m’est totalement sorti de la tête Mally, je suis désolée.
— OK ? Je dis confus à mon tour. Je lui en ai parlé depuis deux semaines pourtant.
— Eh mon Dieu. 11 h 30 ? Attends que je voie si je peux…à qui je peux même demander une permission pour demain ? s’interroge-t-elle.
— Permission pour quoi ? Genre tu travailles demain ?
— Oui. Ne sois pas déçu s’il te plaît, je vais me débrouiller, on ira ensemble, elle me rassure, mais ça ne marche qu’à moitié, peut-être parce que j’anticipais le résultat. Le lendemain, elle était debout aux aurores pour appeler qui de droit, mais elle ne l’aura finalement pas cette permission. Elle considérait même l’option de prendre une absence partielle pour maladie, mais j’ai refusé. Je l’ai rassuré avec l’idée que j’irai avec maman, mais cette dernière avait son programme de la journée aussi. Une livraison apparemment entre 10 h et midi qui exigeait qu’elle soit sur place. Océane qui était en congé pour la journée, s’est proposée pour m’accompagner.
— Alors tu as une idée de ce que tu cherches ? Elle m’interroge durant le trajet.
— Une alliance aussi jolie qu’elle.
— Aww, tu parles bien hein. Mais avec un critère pareil, le bijoutier ne saura pas forcément par où commencer. Tu ne sais pas ce qu’elle aime ?
— Je ne l’ai jamais vu en porter et Macy n’avait aucune idée non plus parce qu’elles n’ont jamais parlé de ça. Sur le Net ils ont dit que toutes les coupes sont compatibles avec les doigts fins alors ça ne m’a pas trop aidé dans mes choix. C’est pour ça que je voulais y aller avec Elikem comme elles ont les mêmes types de doigts, courts et minces.
— Bon, c’est vrai qu’avec mes grosses phalanges je ne vais pas trop t’aider sur ce coup.
— J’apprécie quand même.
— Déjà c’est quoi ton budget ?
— Euh, max 4000, mais comme c’est le Boxing Day, j’espère avoir un rabais et ne pas dépasser 3500.
— C’est bon alors, on va te trouver un beau truc, elle me dit avec confiance, mais l’heure qui suit, je déchante rapidement.
Celle qui était supposée m’aider finit par me souler avec ses nombreuses interventions. Les questions ne finissaient pas dans sa bouche et la vendeuse commençait à perdre patience.
— Océane, on peut finir et passer à autre chose ? Merci, je lui dis en mina.
— Pour que tu achètes une pierre de qualité douteuse ? Allons faire un tour.
— Pierre de qualité douteuse comment ? Ils sont certifiés, je lui réponds exaspéré.
Elle me prend par la main et nous conduit jusqu’à son véhicule pour qu’on aille se prendre un lunch.
— Quand on veut acheter du diamant, ce n’est pas juste la certification qui compte. Tu dois prendre en compte la coupe, la pureté et le carat. Au prix que tu m’as donné là, tu ne pouvais pas avoir un 2,5 carats d’excellente qualité. Les options que la femme t’a sorties n’étaient pas du tout de qualité acceptable.
— De quoi tu parles ? On les a regardés tous les deux, ils étaient brillants et beaux.
— Le diamant n’est pas la seule pierre précieuse incolore qui scintille sur le marché. En plus des diamants synthétiques, tu as les pierres comme le zircon cubique et la moissanite, les alternatives les plus répandues et surtout abordables. Un 2 carats coupé proportionnellement, au niveau de pureté VVS1 à VVS2, genre le niveau où les imperfections structurelles sont difficilement détectables à une échelle de 10, te coutera au moins 16K. Si tu montes au niveau IF ou FL, les imperfections sont totalement invisibles alors imagine le prix à ce niveau.
Mes dents arrêtent leur progression dans le sandwich. Je dépose doucement ce dernier et me racle la gorge pour mieux la questionner.
-16K, genre K américain ou K de l’alphabet ?
— Haha, 16 000 $ mon chéri et on ne parle que du caillou. Si tu choisis un solitaire, tu rajoutes 250 sur ça. Un pavé ou un halo tu iras vers les 1000 $, et tu continues à monter dépendant du design de la bague.
— Tu es sûr de toi ? Tu parles vraiment d’argent ? 16K ? je répète dépassé.
— Il y a quelques années je devais me marier à un non-évènement alors j’ai pris le temps de bien me documenter sur le sujet donc crois-moi, j’en connais un rayon.
— Donc je ne peux pas avoir un diamant de qualité si je n’ai pas cet argent ? Les gens font comment alors ? Je sais que le faux circule, mais tu…bref je suis dépassé.
— Au final tout est une question de choix mon beau, c’est pour ça que je t’ai demandé si tu avais une idée de ce que tu voulais. Si le carat est essentiel pour toi, tu peux sacrifier un peu sur la coupe et brillance pour rentrer dans tes prix. Entre le top notch et la mauvaise, il y a différents niveaux de qualité aussi hein. À certains niveaux, les imperfections ne sont pas visibles à l’œil nu. Il faudrait même qu’elle montre l’alliance à des connaisseurs pour qu’on lui dise qu’elle n’a pas le top. Sinon, si tu tiens à avoir un truc vraiment propre, tu peux le trouver dans les plus petits carats avec le prix que tu m’as donné.
— Plus petit genre combien ?
-0,50 ou 0,75, même 0,90 si tu as un rabais.
— Donc tu essaies de me dire que mon pote qui s’est fiancé avec une bague de 4 carats a acheté du fake ? J’étais avec lui quand il faisait son achat Océane. Le vendeur lui a sorti son certificat et tout. Il a versé les économies de quatre ans dedans. Presque 5000 $.
— Je t’ai déjà expliqué. La certification ce n’est qu’une partie et beaucoup d’ailleurs ne savent pas lire le rapport de certification. Ce n’est pas le vendeur qui te dira que tu achètes une qualité moyenne quand tu viens le voir avec la joie et l’excitation à l’idée d’éblouir ta chérie. Il n’est pas là pour te rappeler que tu es pauvre, mais te conforter dans l’idée que tu es roi, alors il te sortira ce qui va avec ton budget. Tu sors de là ravi avec la sensation d’avoir coché une grande case de ta vie et lui bah il a fait sa commission et son patron le félicitera. Tout le monde gagne quoi.
— Vous êtes mauvais dans ce pays, tu comprends, vous êtes mauvais, je dis la mine déconfite et elle éclate de rire.
— Ça va aller, nous-mêmes on est tombé avant toi. C’est le baptême seulement. En plus, ce n’est pas la fin du monde d’avoir une alliance qui a quelques défauts visibles au microscope, tant que ce n’est pas la pire qualité. Si votre objectif n’est pas de la revendre ou la léguer à vos enfants, tu peux opter pour ton gros caillou à ce prix. Moi par exemple, j’en veux une grosse et si mon futur mari n’a pas les moyens, j’ai déjà dit à ta sœur qu’il peut me prendre une moissanite au lieu d’acheter de la qualité questionnable en diamant. Le prix est plus raisonnable, la brillance est là, et je n’ai aucun projet de léguer ma bague à quelqu’un ni la revendre alors je m’en fous du reste tant que ça scintille sous la lumière.
— Hum, je maugrée, perdu dans mes pensées.
— Je ne t’ai pas dit tout ça pour que tu ailles analyser les doigts des filles désormais et les critiquer hein. Il faut te concentrer sur tes propres doigts secs là.
— Euh, sauf ton respect, critiquer les doigts des filles c’est plus ton délire.
— Je sais, mais comme je représente ta sœur ici, il fallait que je sorte une phrase qui lui ressemble, elle dit et arrive à m’arracher un sourire.
Nous retournons à la bijouterie, mais toutes les infos que j’ai reçues m’ont découragé. Je suis carrément d’humeur cafardeuse quand arrivons à la maison. Océane m’encourage, mais ça ne marche pas vraiment. Je vais me coucher dans la chambre d’Elikem après avoir bredouillé des salutations à maman qui était encore au téléphone. Perdu dans mes réflexions, je n’ai même pas levé la tête quand la porte s’est ouverte. Maman fait assez de bruit de toute façon pour que je sache que c’est elle.
— Alors ? On n’a pas le droit de regarder la bague avant la fiancée ? Elle me demande sur un ton taquin.
— Je n’ai rien acheté.
— Oh ? Pourtant, vous êtes restés longtemps. Tu n’as rien trouvé ou c’est comment ?
— Je suis trop pauvre pour ce que je veux.
— Comment ça ? elle demande et s’installe à mes côtés.
— Je voulais un truc bien maman. Un truc comme ce que tu as. Quelque chose qui me ressemble et on allait me vendre un truc beau en apparence, mais pas top en qualité si Océane n’était pas présente. L’ironie c’est qu’en m’ouvrant les yeux, elle a cassé un peu mes rêves alors je cuve ma déception.
— Il te manque combien pour acheter ce que tu veux ?
— Je ne veux pas de ton argent maman. Si c’était réellement l’argent, j’aurais pu toucher à mon héritage, mais je voulais l’acheter de ma poche, tu vois. C’est pour ma femme, alors c’est bizarre que je prenne ton argent ou mon héritage pour ça. Personne ne m’a dit d’aller chercher une femme. Je ne sais pas si tu comprends, mais ce n’est pas le genre d’homme que je veux être. Je voulais lui offrir un truc symbolique. Quelque chose qui lui témoignerait mon amour et qu’en le voyant, qu’elle se sente spéciale, choyée, mais tout ce que je peux avoir d’excellente qualité à mon niveau est petit.
— Je comprends, ne t’en fais pas. Ce que je vais ajouter par contre c’est que tu n’as pas à être triste parce que tu n’as pas les moyens. Ton père avait 36 ans quand il m’a demandé en mariage. Il a eu le temps de se construire financièrement avant de me rencontrer. Tu as à peine 22 ans et même pas un an d’expérience professionnelle sous la ceinture. Je ne compte pas tes stages. C’est maintenant que tu apprends à devenir un homme et même si j’aime que tu sois attaché à tes valeurs, je te demande de laisser cette pression inutile que tu essaies de porter depuis que Snam est enceinte. Tu sais très bien qu’elle t’aime et s’il y a une chose que je sais sur les femmes amoureuses, c’est qu’on peut ne pas aimer le modèle de bague, mais la joie qu’on ressent à l’idée que notre amoureux veut unir sa vie à la nôtre est inexplicable. C’est la joie qui nous fait parler, sourire, et pour certains montrer la bague à notre entourage. Même si la taille est importante pour certains, aucune femme amoureuse ne s’offusquera qu’on ne lui ait pas donné ce dont elle rêvait. Vous avez de longues années qui vous attendent. J’ai acheté trois bagues à ton père parce qu’à notre mariage, mon salaire d’enseignante ne me permettait pas de faire plus. Dès que j’ai pu, je lui en ai donné une autre et à ses 50 ans, je l’ai renouvelé par pure envie. Il interchange les trois selon ses humeurs. Tout ça, c’est pour faire joli au final. Le véritable mariage, c’est ce que vous vivrez au quotidien, alors même si je comprends le désir de vouloir mettre en haut ta chérie, je te demande d’y aller doucement.
Le poids que je portais s’évapore aussitôt et je me redresse pour déposer ma tête sur sa poitrine après qu’elle m’ait ouvert ses bras.
— Si tu n’étais pas là maman….
— Profite bien pour faire le bébé, ce sont tes dernières heures, elle me taquine en rigolant et me câline le dos.
— Merci pour tout, je dis le cœur reconnaissant.
— Allez, viens goûter ton gâteau.
— Quel gâteau ? je lui demande confus pendant qu’on se dirige en cuisine.
— C’était la livraison de la pâtisserie que j’attendais aujourd’hui. Bon j’ai demandé le red velvet là, et puis les autres je ne connais pas, mais c’est Perla et Dara qui ont fait les deux autres choix.
— Madame, je dis après m’être déplacé pour attraper sa main, c’est de quel gâteau tu parles ?
— Tu as oublié la dot ?
— Bella ! La dot qu’on va suivre en ligne ? C’est pour cette dot où toi et moi ne serons pas que tu as commandé un gâteau ?
***Belle LARE AW***
Qu’est-ce qui est si étonnant sur ça pour qu’il arrondisse les yeux ici et me regarde comme si je venais de pousser une seconde tête ? C’est le premier mariage qu’on va mener jusqu’au bout et on ne va pas laisser la distance nous gâcher la fête. Non seulement j’ai commandé un gâteau, mais Ciara a organisé une vraie fête au pays. Ce sont quand même nos benjamins, les petits bébés qui se marient alors bon, j’admets que peut-être on a un peu exagéré, mais personne ne va se retrouver sur la paille pour ça. Il a choisi le gâteau au café et cognac même si j’espérais secrètement qu’il opte pour la vanille et les pêches caramélisées. Je l’empêche de finir tous les échantillons, parce qu’Elikem n’a encore goûté à rien.
Après une journée éreintante, je vais profiter d’un long bain reposant, mais ma session est interrompue par un coup de fil de Jeanne. Je raccroche aussitôt et la rappelle sans tarder.
— Bonsoir maman Belle, je suis désolée de te déranger, j’espère que ça va.
— Oui ça va. Tout va bien avec mon mari ? je demande inquiète. C’est vrai qu’Eli me rassure au quotidien qu’il se porte bien et je suis avec Elikem parce qu’on l’a décidé tous les deux, mais je ne suis quand même pas rassurée de le savoir seul au pays.
— Oui, il n’y a pas de problème. Il est rentré plus tôt aujourd’hui et faisait la sieste quand je suis partie vers 16 h comme il m’a autorisé. En fait, je sais pas si tu as le temps maintenant, mais j’appelais pour demander que tu parles à Imogen.
— Ah d’accord. Qu’est-ce qui se passe ?
— Est-ce que je peux parler maintenant ou c’est mieux de te rappeler ?
— Non, vas-y.
— Hum, fait-elle en prenant une profonde respiration, comme tu le sais on a enterré notre maman en décembre de l’année dernière. Avant ça, il y avait un monsieur qui s’est présenté à la maison pour récupérer ses lunettes. J’ai su le premier jour que c’était le papa d’Imo, et vers avril comme ça, le monsieur a rappelé sur le numéro de maman que j’ai gardé pour me dire qu’il rentre à Lomé et aimerait nous rencontrer. Il est donc venu à la maison et nous a expliqué qu’il voulait connaître Imogen, mais maman, ta fille m’a fait honte jusqu’à. Le monsieur dit qu’il s’appelle Aristide, Imogen lui demande ce qu’elle va faire avec son nom. Le monsieur la questionne, Imogen lui demande s’ils ont les anciens comptes à régler. Elle a fait ça jusqu’au départ du gentil monsieur et pourtant il voulait seulement la connaître.
— Maintenant hein, je dis c’est forcé de connaître les gens ? j’entends de l’intéressée même.
— Tu sais combien de gens cherchent les pères dehors? Toi ton père se déplace pour toi et tu fais ta grande, pygmée comme ça !
— Mais il faut aller le donner à ses gens non, c’est quoi vous cherchez sur la pygmée ? On dirait vous m’avez vu, arrêtée à un carrefour avec une pancarte que je cherche un parent. Jusqu’à il vient me demander que j’aime quoi dans la vie ma. D’ailleurs même sa bouche sentait le jour là, c’est pour ça.
— C’est pour ça que quoi ?
— C’est pour ça que c’est pour ça.
— Tchrrr ! Toi qui sens mal ici quand tu rates une douche tu parles de la bouche des gens ? C’est la preuve que c’est ton père ça. Vous sentez ensemble.
— Jeanne ta mère.
— Pardon maman Belle, tu es encore là ?
— Tu as d’abord demandé la permission à madame Belle avant de l’appeler maman ? Elle ne cherche pas les enfants hein comme tu cherches à donner les parents aux gens.
— Jeanne, continue, ne l’écoute pas, je dis tout en m’efforçant de contenir mon amusement.
— Si tu as un merci, dis-le après à madame Belle, niama va ! Donc maman je disais que le comportement d’agouti de Imogen a fait fuir le monsieur, mais je me suis quand même assurée de lui expliquer comment ma sœur est. Je lui ai aussi remis la brosse à dents d’Imogen pour qu’il fasse les tests appropriés et sans surprise il m’a contacté vers la fin de mai pour me dire qu’Imogen est de sa famille. Et depuis mai, on est en contact régulièrement. Je lui ai demandé de faire quelque chose pour Imo et après les recherches il a expliqué qu’elle pouvait venir en France pour faire des études d’ébénisterie. Je pense un certificat, je ne m’y connais pas vraiment, mais selon ce qu’il m’a envoyé par e-mail, Imogen doit avoir au moins le BEPC. J’ai donc dit à ma sœur de venir s’inscrire aux cours du soir avec moi maman Belle. Depuis les vacances, Imogen me feinte jusqu’à l’année est sur le point de finir. Tu peux comprendre ça ? Qui voit une opportunité pareille et fait des manières ?
— Moi je demande que hein, c’est quelle brosse tu lui as donnée quand moi je me brosse avec une fois par mois et le reste du temps c’est le cuir dent. Tu es sûr que ce n’est pas pour toi que tu as envoyé là-bas.
— Tu es trop bête. Comment je peux être la fille d’un blanc avec mon teint noir ?
— Je sais quoi ? Vous avez le même nez et il n’a pas honte de pleurer devant les gens comme toi.
— Je t’ai donné trop d’importance si je te réponds.
— Donc ça que tu as fait là c’est quoi ? C’est l’air que tu envoies un peu dans ta bouche ?
— Tu as fini Jeanne ?
— Oui pardon maman Belle.
— Il faut donner le téléphone à Imogen.
Un petit bruit suit, signe qu’elle transfère l’appareil et dans la foulée, elle gronde Imogen de ne pas lui coller ses doigts remplis d’huile sur son écran.
— Humm, petit blanc tu as vu cette année et tu parles sur huile de beignet, c’est bien ton parent là-bas.
— Imo ça va ?
— Je suis là madame.
— Et le travail ?
— L’argent ne vient pas vite, mais on est dedans.
— Pourquoi tu ne veux pas connaître ton…le monsieur ? Je me ravise sur la fin.
— Premièrement le monsieur là ne parle jamais droit. Il doit toujours faire les détours pour à la fin ne même rien dire d’intéressant.
-…..
— ……
— Imo ? Tu es là ?
— Oui oui.
— Ah, le deuxièmement ?
— Ah il y a un deuxièmement ? Ou bien tu le connais ?
— Et c’est toi qui critiques la façon de parler d’autrui. Tu ne sais pas que deuxièmement doit suivre quand on utilise premièrement ?
— Depuis que Jeanne a recommencé l’école on ne peut plus respirer dans cette maison oh madame. Elle fait le gendarme sur les bouches de tout le monde. Si elle ne devient pas présidente du pays quand elle aura son bac, on ne va pas respirer.
— Hein ! Je peux le devenir si je veux donc moque-toi bien.
— Pimporte, elle commence et me fait éclater de rire.
— Imogen….
— Jeanne, laisse-moi, même sans mon deuxièmement je sais qu’on doit rester concentré au téléphone. C’est donc ça en conclusion, madame Belle. Je ne sais pas pourquoi Jeanne me fatigue avec son papa, peut-être elle veut le marier et m’envoie en mission là-bas. En tout cas, dis-lui de me laisser tranquille. Nous sommes nées en détail.
— Même si tu ne veux pas connaître ce monsieur, ça te ferait du bien de continuer tes études. C’est important de porter plusieurs casquettes de nos jours.
— Avec mes cheveux gros grains là ? Les casquettes ne me vont pas si je ne me suis pas fait les nattes.
— Je veux dire que tu dois savoir faire beaucoup de choses comme on ne sait pas ce dans quoi tu auras du succès. Et ne me dis pas que tu sais couper et polir le bois. Ça ne compte pas dans le « beaucoup » dont je parle.
— Madame, tu sais l’école et moi, ça n’a jamais marché. On ne se mélange pas. Et puis on ne m’a pas frappé depuis longtemps. Je ne vais pas aller là-bas pour qu’un papa qui n’a pas mangé le matin déverse sa faim sur moi parce que je ne sais ce qu’on fait avec le plus-que-parfait.
— Alors, applique-toi. Il n’y a aucune difficulté d’apprentissage qu’un humain ne peut surmonter. Je t’ai vue et entendue plusieurs fois, tu es intelligente.
— Pour chercher l’argent et créer les problèmes qui me conduiront vers l’argent oui. Le reste on laisse à Dieu seulement.
— Imogen, je dis avec humour
— Tu vois maman Belle ? Tu vois ce que je dis ?
— Je te dis que la dame a déjà les enfants. Elle ne cherche pas quelqu’un qui a les gros seins pour allaiter tout le quartier.
— Imogen arrête de provoquer les gens, je dis après qu’elle ait crié aïe, signe qu’elle avait reçu un coup. Je vais rentrer bientôt à Lomé et je pourrais te donner des cours de maison si tu as des difficultés.
— Hum, madame, je ne veux pas te décevoir.
— Commence et on verra.
— Bon, comme c’est toi qui me dis. Mais il faut bien dire à Jeanne et son papa de me laisser.
— D’accord et toi, il faut cultiver la paix là-bas le temps que j’arrive, je dis amusée et les laisse dans leurs chamailleries.
Le 27, c’est la journée calme. Auxanges avait recommandé que chacun prie de son côté pour le jeune couple et c’est cette journée qu’Eli et moi avions choisi. Ça nous prend deux heures à méditer les versets et prier. On se quitte avec la promesse de se parler demain. Comme je m’y attendais, Mally qui jouait au type qui maitrise tout est subitement stressé aujourd’hui. Il a tourné de longues minutes au salon à la recherche du fer à repasser pour le trouver au lieu habituel, soit le meuble de rangement dans le vestibule de la maison. Ensuite, c’est son père qu’il voulait appeler pour supposément confirmer avec lui le montant de l’enveloppe. Je lui ai donc retiré son téléphone pour le reste de la journée et avec le temps il a réussi à se calmer. Le 28, chacun est sur son 31. J’ajuste proprement la tunique traditionnelle qu’il a portée pour l’occasion et l’embrasse sur le front. Perla nous interpelle depuis le salon et nous la rejoignons, mais avant je m’assure que mes préparations sont bien dressées. On installe Mally au milieu. Perla à sa gauche, suivie d’Océane, et je suis sur la droite de mon fils. Nous portons tous des tenues que j’ai fait faire au pays durant mon dernier voyage.
— Prêts ? Perla nous demande et nous confirmons avant qu’elle ne demande à son fameux Facebook Portal TV d’appeler Macy.
Macy apparaît sur l’écran sans tarder et le groupe de Nairobi composé des filles rejoint la conversation par la suite. Les salutations fusent de partout. La joie transpire dans la voix des tourtereaux du jour.
— Tu es magnifique King, mon fils dit d’une voix vibrante.
— Merci, tu es trop beau, glousse la fiancée en se levant pour nous montrer le résultat. C’est Ciara qui s’est occupée de leurs tenues et ma petite Snam est vraiment élégante. Ciara a même fait un ensemble pour Marley, détail que j’avais totalement oublié. Dieu merci pour mon amie.
— Je ne vois pas Hilda. Elle n’est pas là ? je demande après avoir complimenté chacun.
— Elle avait un empêtchement, m’explique Dara.
— Ah, OK.
— C’est bon, vous êtes là ? Je vais faire un tour de la pièce avec l’ordi pour que vous puissiez saluer tout le monde, nous informe Macy.
Heureusement qu’elle est rentrée au pays pour les vacances cette année, parce que sa présence nous facilite beaucoup les choses. Nous saluons dans cet ordre, les Wiyao, Bemba incluant Romelio et Jennifer, Adamou et je pousse un cri de surprise quand on arrive sur les Lare Aw.
— Tata Ali, Lala, Aïssa et tonton Lenny ? s’étonnent aussi mes enfants.
— C’est qui ce beau monde ? Océane demande sur un ton plus bas à ma Perla.
Et bien sûr ce cachotier d’Eli qui a un sourire aussi large qu’une banane s’est gardé de me dire que sa sœur et quelques cousins allaient faire le déplacement. Je crie à nouveau quand Macy nous emmène vers un gâteau royal portant les initiales SM que Macy s’est assurée de bien nous montrer en se rapprochant autant que possible.
— Mais maman…, dit Snam sur un ton surpris tandis que Macy rigolait. Dire que je croyais avoir exagéré. Ciara pour la première fois m’a surpassé dans ce domaine. Je me lève et lance un chant joyeux pour lancer le début des festivités.