13. Quand le passé vous rattrape...

Write by SSS

*******Terrence*******

Ça fait trois jours que Nikita est dans le coma. Trois jours que j'angoisse comme jamais. Pendant le colloque ce matin, tout mon esprit était porté vers elle. Je m'en veux car c'est un peu de ma faute qu'elle est dans cet état. Si elle était resté au pays, elle serait saine et sauve maintenant et ses beaux yeux en amande ne seraient clos. Elle a reçu deux balles dans la poitrine et l'abdomen. Si elle n'avait pas perdu autant de sang, elle ne serait pas dans cet état végétatif. Apparemment ce serait des braqueurs du coin qui l'aurait agressé car son sac a été dérobé ainsi que ses boucles d'oreilles en émeraude. Ils devaient être expérimentés, vu comment le garde a été descendu d'une seule balle dans la tête. Une enquête a été ouverte pour les coincer.

Je suis à son chevet, sa petite main au chaud dans la mienne. Mon cœur se fend quand je vois tout ces fils branchés à elle. La dernière fois que j'ai ressenti autant de tendresse et de tristesse en même temps, c'était quand Diana mon ex-épouse était entré la vie et la mort sur un lit d'hôpital. 

Et si la même chose se répétait ?...

Non je préfère ne pas y penser. 

Au pays, la nouvelle s'est répandue en quelques heures. Ma'a Béné très inquiète m'appelle tout le temps pour prendre des nouvelles. Je n'imagine même pas comment elle doit se sentir, elle qui avait pris Niki comme sa fille.

Niki... Ma jolie petite épouse. 

Quand je l'ai rencontré à ce fameux dîner chez son père, quelque chose m'avait ébloui chez elle. Pas seulement sa beauté mais aussi quelque chose d'autre que je ne saurais nommer. Comme si on était appelés à se rencontrer. 

On aurait pu éviter toutes ces péripéties si seulement elle avait été franche dès le départ. Après, je peux essayer de la comprendre. Son père l'a mis au pied du mur et elle s'est sentie perdue. Un vrai connard celui-là. En tout cas, je laisserai la justice me charger de son cas.

Nikita peut être tout ce qu'on dit: têtue, insolente, au caractère agaçant mais... Je n'ai pas envie de la perdre. Ça, il en est hors de question. 

- Moi: (chuchotant) Eh petite sotte, ça va? Regarde comment t'es belle. Ces saletés de bandits ont vraiment choisi le pire moment hein... Tout commençait à aller mieux...

Une larme me monte mais je la ravale.

- Tu ne va pas m'abandonner maintenant, si? Ce n'est pas le moment pour toi de partir. Ta mère en mourrait. Même ton père aurait mal tu sais. Et ta petite maman, Ma'a Béné. Je n'ose même pas imaginer ce qu'elle ressentirait. Tout ce monde a besoin de toi. Toutes ces personnes ne veulent pas que tu partes...

Je soupire.

- ... Et moi non plus, je ne veux pas que tu partes. Je suis prêt à tout laisser de côté, le passé et toutes les erreurs commises. Je veux apprendre à mieux te connaître et à t'aimer. Je ne suis plus fâché, tu as entendu ? Je ne t'en veux plus. Les représailles sont finies. Je vais prendre soin de toi comme personne ne l'a jamais fait, je vais te choyer et t'adorer. Tu ne regretteras jamais de m'avoir épousé. Tu seras ma priorité. Tu n'auras plus à pleurer ou à être frustrée. Je vais te faire l'amour autant que tu voudras, tout les jours si tu veux. Je pourrais même annuler des journées de travail entières juste pour être avec toi si tu me le demande. Mais pour que tout ça soit possible, il faut que tu vives, que tu me revienne. T'a pas le droit de me quitter, non.

Je ne sais pas si elle m'a entendu mais laisser libre court à ce que je ressens m'a fait du bien. Je caresse son front pendant quelques secondes. On dit que les filles aux grands fronts sont les plus belles, et dans son cas, c'est plutôt vrai.

Je commence à sentir une pression au niveau de ma main. On dirait que Niki serre ma main dans la sienne. Mon cœur fait un bond. Ses paupières bougent tout doucement.

- Dis... C'est vrai que...tu... c'est vrai que tu me...feras l'amour... tout les soirs?

Mon Dieu elle est réveillée ! Mes émotions descendent en flèche et mon cœur se déserre enfin. La larme tant retenue s'échappe finalement. Je respire enfin.

- Oui chérie, tout le temps. Enfin, autant que je le pourrai.

Un sourire léger étire ses lèvres pulpeuses que j'embrasse tendrement. J'appelle le Docteur qui l'examine. Elle devra rester encore quelques jours à l'hôpital mais le pire est passé.

 Il faut que j'avertisse Ma'a Béné au plus vite. 

*******Bénédicte SAMBENO*******

Mon cœur est serré comme le poing d'un boxeur. Ma pauvre Nikita entre la vie et la mort. Depuis que c'est arrivé, je ne suis pas tranquille. Je ne sais pas pourquoi j'ai une affection toute particulière envers cette petite. Elle a certes fait des bourdes, mais je l'aime bien quand même. Qui ne fait pas des erreurs ? Et surtout qui suis-je pour la juger alors que ma vie n'est pas un exemple ?

Je ne suis née bien loin d'ici, dans un pays voisin. Je suis à l'origine une enfant de la rue. Je n'ai jamais connu mon père et ma mère était une prostituée de seconde zone. J'ai juste fait le cours primaire et malgré que j'avais de bons résultats, je n'ai pas pu continuer faute de moyens. J'ai beaucoup mendié et volé pour ne pas mourir de faim. Ma mère trop occupée à folâtrer avec ses multiples clients, ne s'occupait que très peu de moi. À mes 15 ans, elle avait tenté de me forcer à coucher avec certains de ses clients, ce que j'ai farouchement refusé. Je me suis enfuie dans un autre quartier où j'ai commencé à faire la plongerie dans les bars pour avoir de quoi manger. Je dormais dans une construction abandonnée, vulnérable aux bandits et aux aléas climatiques. 

Tout ça dura jusqu'au moment où j'ai trouvé un travail de bonne dans une grande maison. Mes patrons étaient très riches et me donnaient un bon salaire. Ils avaient deux garçons, de 23 et 20 ans. Grâce à l'argent que je gagnais, je m'entretenais et je m'embellisais, ce qui ne passa pas inaperçu aux yeux du plus jeune des garçons. Il commença à me séduire et moi, naïve, je me suis abandonnée à lui. Il prit mon cœur ainsi que ma virginité. Je pensais que j'avais trouvé l'amour, quelle idiote...

Un jour où seule la patronne n'était pas à la maison, mon soi-disant amoureux m'invita dans sa chambre où m'attendaient, à moitié nus, son grand frère et son père. La suite est évidente: j'ai été violée et humiliée par ces trois hommes des heures durant. Ils m'ont ensuite interdit d'en parler sinon mon cadavre finirait dans une rivière.

Quelque chose a beugué en moi ce jour. J'ai eu un déclic.

Remplie de haine, je n'avais qu'une seule envie : me venger. J'ai donc élaboré un plan terrible. J'ai acheté de la morora au marché que j'ai mis dans la nourriture de toute la famille. Ils se sont tous effondrés autour de la table comme des insectes. Grâce à mes économies, je me suis enfuie de mon pays pour atterrir dans l'État de l'Ekavango. Alors que j'étais sans abri, remplie de remords et de regrets et au bord du suicide, une soeur catholique me donna un travail dans un orphelinat qui allait changer ma vie puisque j'y ai rencontré mon petit Terry, ce petit garçon qui a donné un sens à mon existence.

Le reste appartient à l'histoire.

Une sonnerie de téléphone me tire de mes souvenirs. Ah c'est Terry.

- Moi: Mon fils pardon, ne me donne que de bonnes nouvelles.

- Lui: Elle s'est enfin réveillé Ma'a! Elle a ouvert les yeux tout à l'heure et le médecin a dit que le pire est passé.

Ouf de oulala! Quel soulagement ! Mon cœur de femme âgée n'en pouvait plus. Dès que je raccroche, je m'en vais allumer la télé pour trouver une bonne chaîne de divertissement. Il faut que j'évacue toutes ces émotions avec quelques piches de danse.

Je zappe les chaînes lorsqu'un titre attire mon attention:

« Le multi-milliardaire Evariste EBAHO toujours assigné dans sa résidence principale. »

Je roule de grands yeux. Evariste ??? Le même que je connais ? La journaliste continue en parlant d'une accusation de pédophilie. Evariste pédophile ? Cela m'étonne car quand on s'est connu, il n'aimait pas les petites filles, bien au contraire...

La voix ajoute : « La réaction de son gendre, Son Excellence Terrence GARBRO en personne, est attendue sur cette affaire. »

Non j'ai pas bien compris. Gendre??? Terrence est le gendre de cet homme ? Donc... Nikita est sa fille ??? Je consulte rapidement Google pour savoir l'âge de Nikita.

Nikita Lily-Rose EBAHO. 25 ans.

Non c'est pas possible.

Non ça ne peut pas être vrai. Nikita ne peut pas être...

Oh Seigneur, pourquoi ?

Je manque de peu de m'évanouir. Mon cœur bat à se rompre. À tant éviter le passé, voilà qu'il me rattrape aussi sournoisement. Pourquoi ces gens ne peuvent-ils pas simplement sortir de ma vie?

Je regarde une photo de Nikita. Certaines choses me paraissent maintenant tellement évidentes. Pourquoi je n'avais rien remarqué ? 

Dès qu'elle reviendra, je devrai lui dire toute la vérité, quoi qu'il m'en coûte. Même s'il elle me déteste après, elle a le droit de savoir.

................ Deux mois plus tard...................

*********Nikita*********

Je me sens beaucoup mieux à présent. J'ai encore des crises de panique à cause de l'autre soir mais heureusement, mon mari chéri est là pour me rassurer. S'il y a un point positif dans cette histoire, c'est bien le rapprochement qu'il y a eu entre Terry et moi. Il a été à mon chevet tout les jours jusqu'à ma sortie de l'hôpital il y a trois jours. C'est un véritable gentleman, tellement doux et attentionné. Qu'est-ce que j'étais stupide ! Comment être malheureuse aux côtés d'un homme comme lui? Je lui ai pourri la vie alors qu'il était prêt à tout pour me rendre heureuse. Je m'en veux tellement mais je suis décidée à être la femme dont il a besoin et a rattraper tout le temps perdu.

J'ai voulu qu'on rentre au pays car je n'étais plus à l'aise au Brésil. Terry n'était pas trop d'accord mais il a fini par céder face à mon incomfort. Notre docteur s'occupera de moi à domicile. De toute façon je me sens beaucoup mieux à présent, surtout avec mon bel Appollon à côté.

Nous voici donc dans le jet en direction de l'Ekavango. Je suis assise à côté de mon mari, ma main dans la sienne. 

- Lui: Tu supportes le trajet?

- Moi: Oui, surtout que tu es là avec moi.

Il sourit et dépose un baiser dans mes cheveux. C'est si doux... J'essaie de chasser les souvenirs de cette nuit affreuse mais je pense que ça ne passera aussi facilement.

J'étais sur la plage depuis à peine 10 minutes, mes pieds nus dans le sable blanc et mes poumons se remplissant de cet air pur et vivifiant. Ni une ni deux, trois hommes cagoulés et armés nous entourent et pointent leurs revolvers sur nous. Le garde du corps voulut sortir son arme mais l'un d'entre eux, trop rapide, l'abattit froidement d'une balle dans la tête. Ça ne ressemblait en aucun cas à des bandits de bas quartier mais à des personnes bien entraînées. Au moment où j'ai tenté de m'enfuir, j'ai reçu un coup sec dans les côtes qui m'a fait tomber dans l'eau. Heureusement pour moi, d'autres personnes ont commencé par venir sur la plage. Ils ont eu le temps de me mettre deux balles et d'arracher mes boucles d'oreilles avant de partir en courant tout en emportant mon sac. Je me suis ensuite réveillé dans un lit d'hôpital, avec la promesse de mon Terry de me faire l'amour tout les jours.

- Moi: C'est vraiment vrai ?

- Lui: De quoi parles-tu princesse ?

- Moi: Qu'on va s'envoyer en l'air tout le temps ?

- Lui: (étouffant un rire) Fais attention à ton langage en public, les employés peuvent t'entendre.

- Moi: Pardon. Alors c'est vrai, dis???

- Lui: Perverse va. Étant un homme très occupé, je ne peux pas te promettre de satisfaire à mon devoir tout le temps mais je te jure que je ferai de mon mieux. Promis.

Achhh cet homme est charismatique même quand il dit des choses simples.

Quelques heures plus tard, alors que les rayons du soleil laisse place aux ombres de la nuit, nous atterrissons, attendus par un cortège de véhicules blindés. Pour la première fois depuis mon mariage, je me sens fière d'être appelé première dame. 

Dès que nous arrivons à la Maison des Gouverneurs, nous sommes accueillis par nos employés. Ma'a Béné me serre dans ses bras, très émue. Un peu trop même, à voir les litres de larmes qu'elle verse. Mais ça me fait plaisir qu'elle se soucie autant de moi étant donné qu'elle est presqu'une mère pour moi maintenant. Un peu fatiguée par le voyage, je remets la séance"kongossa" à plus tard. Je dois être en forme pour qu'on s'affaire bien.

Un copieux festin a été affrété par ma super belle mère. Nous nous mettons à table sans plus tard. Pendant tout le dîner, Ma'a Béné est très silencieuse et ne fait que me regarder, les yeux chargés de tristesse. J'ai beau lui demander ce qu'il y a mais elle me répond qu'elle est juste heureuse de me voir sainte et sauve. 

Elle ment, je le sais.

Après le dîner, je suis allée la voir dans sa chambre. Assise sur son lit, elle pleurait à chaudes larmes. Le cœur touché par ce spectacle, je vais m'asseoir à ses côtés.

- Moi: Ma'a il faut me dire ce qui ne va pas. Qu'est-ce qui te fait pleurer comme ça ? Qui t'a fait du mal?

- Elle : Ah ma fille (snif), il y a de ces erreurs que l'on fait qui nous rattrapent, peu importe ce que l'on fait pour les fuir (snif). 

- Moi: Des erreurs ? De quoi parles-tu ?

- Elle : Ma fille, (snif) j'ai fait des choses terribles dans ma vie, des choses que tu ne peux imaginer. Je n'arriverai jamais à me le pardonner à moi même.

- Moi: Mais n'est-ce pas des erreurs du passé ? Tout homme a droit à une seconde chance. Et tu es une personne merveilleuse aujourd'hui. Il faut que tu arrives à faire la paix avec toi même.

- Elle : (me fixant)  Comment faire la paix avec moi même alors que la conséquence de mon erreur est juste sous mes yeux? 

Je suis intriguée et complètement bleue. De quoi parle t'elle ainsi? 

La Femme du Gouverne...