21. La roue tourne
Write by SSS
……………dans la peau de Yani BALKA…………..
Depuis que Max m'a dit que Eugenio est hospitalisé et dans un état grave, je ne suis plus tout à fait tranquille. J'y pense assez souvent, pour ne pas dire tout le temps. Le pauvre… il est seul, sans personne, fils unique et orphelin avec une famille presqu'inexistante et une femme salope qui veut sa peau. Je me sens mal pour lui ; j’ai vraiment envie d’aller le voir. Mais ça fait tellement longtemps qu’on s’est vus….et tel qu'il est borné et orgueilleux, il va encore me rejeter. Ça risque de mal se passer et de faire remonter des souvenirs que je crois avoir enfoui. Et puis il est plein aux as, c'est pas l’argent qui lui manque. Il pourra trouver un professionnel pour prendre soin de lui.
Je suis au bureau depuis 7h à bosser comme une malade. Le pays est chaud donc écouler les marchandises devient un peu plus difficile. Malgré tout, les affaires avancent quand même et j’arrive à maintenir les choses. Au fil du temps je suis devenue une femme d'affaire accomplie et j'en suis assez fière. J'ai fait voyager ma mère pour le Canada il y a quelques semaines, elle avait besoin de se changer les idées ; c’est quelque chose que je n’aurais pas pu faire il y a cinq ans avec mon propre argent. Grâce soit rendue à l’Éternel.
Il est maintenant 15h et j’ai une faim de loup. Je me dépêche de ranger mon bureau pour rentrer à la maison, mon ventre n’attend pas. Soudain mon téléphone sonne. C’est le numéro de Max, mon cher Max. Pourquoi je ressens toujours ce truc quand il est dans les parages ou même quand il m'appelle ? Mes sentiments pour cet homme ne cesse d'augmenter et ça commence par me faire peur. Max est un vrai Don Juan, un peu fou parfois. Il n'est pas disposé à se caser avec qui que ce soit, encore moins l’ex-femme de son ex-ami. Je ne veux pas de ça dans ma vie, j’ai besoin de stabilité. Et qui me dit qu’il veut même de moi ?
Bref je décroche :
- Moi : Allô ? C’est même qui à l'appareil ?
- Lui : Ton arrière grand père depuis l'enfer, idiote. Donc tu ne sais plus lire mon divin prénom sur ton appareil ?
- Moi : Divin nom hein ? Tu ne va jamais changer toi. Ça va j’espère ?
- Lui : Oui mais il y a un truc dont je dois te parler impérativement. Je suis devant ton immeuble. Si tu peux te dépêcher c'est bien.
- Moi : Ayii je viens à peine de finir le travail, tu as d'ailleurs de la chance. T’inquiète je descend.
Le gars me raccroche au nez. Je me demande bien ce qu'il a à me dire de si important. Je prends mon sac, je sors et je ferme le bureau à clé. Mawa est déjà rentrée en laissant bien sûr son bureau en désordre. Encore la même chose à lui reprocher demain.
Je descends les escaliers en trombe en saluant quelques employés qui continuent à travailler. Effectivement je retrouve Max devant le bâtiment, en décontracté toujours chic. Mais il a la mine serrée, un peu préoccupée. On se fait à peine la bise.
- Moi : Hum c’est quelle tête ça ? Quand t'es sérieux comme ça c'est qu’il y a drap.
- Lui : Ah il y a gros drap et je devais t'en parler. Mais on ne va pas rester sous le soleil comme ça. Allons prendre un pot et je t’explique tout.
- Moi : Ah non moi j'ai faim. On va pas prendre un pot, on va manger un truc bien riche et bien gras.
- Lui : OK mais ça sera juste pour toi parce que moi j’ai déjà mangé. Allez on se dépêche. J’ai pas amené mon véhicule, j’ai juste L’Apache avec moi.
- Moi : Depuis quand tu as acheté une moto Apache toi ? Décidément les affaires vont bien pour toi, c'est bien. Félicitations.
- Lui : Ben merci. C’est Dieu qui donne. Faut dire que les grosses motos ça a toujours été mon kif donc j’allais pas rater l’occasion d'en prendre une. D’ailleurs tu montes avec moi aujourd’hui.
- Moi : Et ma voiture à moi alors ?
- Lui : Tu viendras la récupérer après non. Allez viens.
Je le suis à cœur joie. Ça me changera un peu de la fraîcheur un peu trop condensée de la voiture. On va vers la moto, garée non loin de là ; elle est effectivement belle et a du coffre, toute à l’image de Maxime. On y grimpe et j’en profite pour me lover contre son corps d’athlète. Ça me fait un bien fou, surtout avec un parfum aussi viril. On roule quelque minutes avant de s’arrêter à un petit resto sympa. On prend une table et je m'empresse de commander un plat de sauce de légumes verts bien garnie avec de la viande de mouton accompagnée d'une pâte noire. Hmmm j'en salive d'avance.
- Moi : Alors rabat-joie, de quoi souhaite-tu me parler ?
- Lui : Cette Leila est vraiment terrible. J’ai eu la confirmation par rapport à nos soupçons vis-à-vis d’elle.
- Moi : Sois plus explicite s'il te plaît.
- Lui : J'ai la preuve que Leila a tout manigancé : les vidéos de soi-disant toi et moi, les photos, tout ! Et devine quoi ? C’est celui qui a fait le montage pour elle qui m'a tout avoué, face à face.
Je savais que ça ne pouvait être que Leila, mais je manquais de preuves pour appuyer mes dires. Vraiment Max est trop fort.
- Moi : Sans blague ! Comment as-tu fait pour trouver cette personne ??
- Lui : Tu oublies que c'est de moi qu'il s'agit. Leila est certes intelligente mais pas assez rusée. Elle m’a elle-même donné le numéro de l'individu concerné la pauvre. Et elle est fragile émotionnellement depuis les derniers événements. Ça sera beaucoup plus facile de l'avoir.
- Moi : Hum Max si tu le dit. Fais quand même attention, ne la sous-estime jamais. Je l'ai fait et je m'en suis mordu les doigts.
- Lui : T’inquiète ma chérie, je vais gérer. Tu me minimise ou quoi ?
- Moi : mais non. D’ailleurs où sont les fameuses preuves ? Je veux voir tout ce que cette sorcière a fait.
- Lui : Un peu de patience. Demain je les aurai entre les mains et je te les transférerai illico, promis. Ah, voilà ton plat fumant qui arrive. Régale toi bien, la suite des événements risque de beaucoup te plaire.
- Moi : Hum monsieur le stratège. En tout cas je te fais confiance.
En fin de compte, Eugenio est innocent. Du moins c’est pas lui qui a monté tout ça. Ça me fait du bien de l'apprendre, mais n'empêche, il a très mal réagi et ça nous a détruit. C'est quand même du passé.
Finalement, ma journée de travail se termine bien avec cette nouvelle. C’est avec plaisir que je vais déguster mon repas.
………….dans la peau de Eugenio Da Silva…………..
Encore une journée de supplice vient de s'écouler. J'en peux plus de cette situation, de cet hôpital. Les docteurs m'ont dit qu’on devait encore me suivre une semaine avant de me libérer mais moi je veux rentrer dès demain. Je vais engager une infirmière pour prendre soin de moi à domicile s'il le faut mais il faut que je m'en aille.
J’ai réfléchi toute la nuit à la suite que je doit donner à ma vie. Dans mon état, il y a beaucoup de choses que je dois revoir, notamment mes priorités. Je veux m'éloigner de tout ces gens faux et hypocrites et m'occuper de moi et de ma fille. Prendre une année sabbatique me ferait le plus grand bien. Alors j’ai pris une décision cruciale concernant mon entreprise. J’ai donc appelé ma secrétaire Claudia pour qu’elle vienne me voir, je veux lui en faire part personnellement.
L’infirmière qui me suit vient m'annoncer que Claudia est là. Elle entre .
- Elle : Bonjour Monsieur Da Silva. Alors, comment allez-vous ?
- Moi : Moi ? Aujourd’hui ça va plutôt mieux. Faut dire que j’ai beaucoup réfléchi……oh assieds-toi d'abord Claudia. Toi ça va ? Le travail et tout ? Ça fait longtemps que je t’ai vu du coup.
- Elle : Euh….oui monsieur. Merci...c'est la première fois que vous êtes si aimable avec moi.
- Moi : Hum c’est vrai ça ? Je m'en excuse alors. Ça va changer désormais. Tu n'auras même plus à me voir souvent.
- Elle : Ah bon ? Pourquoi monsieur ?
- Moi : Je vais voyager Claudia, je ne sais pas où mais je vais m'en aller. Pas pour toujours, juste quelques mois, histoire de changer d'air. Et je ne veux plus subir tout le stress lié au travail. Donc j’ai décidé de vendre la majorité de mes parts de l’entreprise. 80% pour être plus exact.
- Elle : Hein ??? Mais monsieur… vous voulez laisser l'entreprise à une tierce personne ? C’est votre entreprise ! Et puis… dans votre état, un tel voyage n'est-il pas risqué ??
- Moi : Claudia ! Bien sûr c'est mon entreprise. Mais j’ai besoin de m'éloigner, juste un moment. Et puis j’ai toujours mes 20% d'actions, je suis toujours de la partie. J’attends juste que ma fille se rétablisse pour m'en aller. Pour mon état ne t’inquiète pas. Je suis un battant, je saurai m'adapter.
- Elle : Mais monsieur….
- Moi : Trêve de discussion Claudia. Envoie une note aux autres actionnaires de ma part pour leur faire part de ma décision. Et dès demain je met officiellement mes parts en vente. Je suis sûr que beaucoup de personnes vont se ruer sur l'offre.
Claudia n'a pas l'air vraiment d’accord mais elle acquiesce. J’espère trouver un acheteur à la hauteur. Et surtout je prie pour que Key se réveille, il le faut. Si en plus de tout ce que j’ai subit, je la perds, je ne pense pas être en mesure de le supporter.
*******le lendemain matin*******
………….dans la peau de Yani Balka………….
Je n'en crois pas mes yeux : j'ai devant moi les preuves qu’ils me manquait, les preuves de la machination de cette sorcière de Leila. Max m'a envoyé le colis ce matin même à mon bureau, ainsi que l'audio de sa conversation avec le complice de celle-là. Quand Mawa me l'a remis il y a quelques heures, j’ai eu du mal à l'ouvrir bien que j’étais excitée à l’idée de tout voir de mes propres yeux.
Sur les photos, on voit clairement le visage de Leila et de Maxime, on ne peut pas se tromper. C’est elle et lui, rien à faire avec moi. Enfin !! Enfin je peux le prouver. Une larme de joie perle sur ma joue. Hey Leila ! Je te tiens. Je peux même l'envoyer en prison pour ça. Mais calmos, je vais prendre mon temps pour lui faire ça à l'envers.
Eugenio a donc aussi été trompé, il est innocent. Cela fait des années maintenant mais malgré tout, il y a au plus profond de moi de la colère. Colère pour mon fils qui n'est plus, colère pour la manière dont il m'a traité. Mais tout ça m'a fait grandir, je suis aujourd’hui une autre femme, plus mûre, émancipée. Pour ça, je peux les remercier tout les deux.
Tout ça me fait mal au crâne même, je m'assois et je souffle un bon coup. Bon, je dois me remettre au travail. Je fais venir Mawa dans mon bureau.
- Moi : Alors, tu devais me remettre un dossier important non ? Concernant les commandes du mois.
- Elle : Euh oui. Le voici( elle me tend une chemise dossier). Les rapports sont plutôt intéressants.
- Moi : OK merci. Attend un instant.
Je consulte le dossier et tout me semble correct. Les résultats sont superbes, mes yeux brillent de satisfaction devant les chiffres enregistrés.
- Elle : Ah Madame, félicitations, vous êtes vraiment une grande patronne. À cette allure, l’entreprise deviendra aussi importante que les boîtes comme PC-Ds Company.
Hum PC-Ds Company ? Pourquoi celle-là mentionne l'entreprise de Eugenio ??
- Elle : Figurez-vous qu’il vend même des parts de son entreprise ! Il en a tellement qu’il vend ça et…..
- Moi : Attends ! Quoi ? Il vend des parts ? T'a vu ça où toi ??
- Elle : c'est officiel hein, vous pouvez vérifier sur le net. Il l'a officiellement annoncé aujourd’hui.
Hum c’est bizarre ça. Pourquoi prend-t'il une décision pareille ? Il a bâtit cette boîte de ses propres mains, avec pleins de sacrifices. C'est étonnant. Mais en même temps je me dit….pourquoi pas ? Et si j'achetais ses parts ?
- Moi : Mawa je veux que tu te renseigne sur cette offre. Je suis intéressée.
- Elle : Madame, c'est une grosse boîte, ça doit coûter les yeux de la tête deh !
- Moi : Fais ce que je te dit Mawa. Tu bavardes trop déjà. Va travailler maintenant.
Elle sort du bureau en boudant. Au moins ses bavardages m'auront appris quelque chose aujourd’hui. Je sais, on ne peut pas comparer mon entreprise à celle d'Eugenio. Mon niveau social non plus. Chercher à acquérir ces actions va sûrement me secouer financièrement puisqu’il y aura forcément d'autres propositions bien juteuses, n’importe qui n’achète pas des parts à la PC-Ds Company. Mais aussi prétentieux que ce soit, j'ai envie de montrer à Monsieur Da Silva que je ne suis plus cette femme fragile qu’il a connu. J'imagine sa tête quand on se reverra.
********* environ deux semaines plus tard********
C’était improbable mais j'y suis arrivée. Moi, la petite femme soumise qu'on a piétiné, humilié auparavant, qu’on a traité de tout les noms. J’ai réussi à avoir les fameux 80% des parts appartenant au PDG de la PC-Ds Company, mon ex mari. Ça m'a coûté cher, très cher, mais j’ai fait une offre qu’il n'a pas pu refuser, la meilleure de toutes. Il ne sait pas encore que c’est moi mais il sera bientôt sidéré de le savoir.
On est lundi soir. J’ai rendez-vous avec lui et son avocat ainsi que le mien dans un cadre somptueux , un restaurant hyper chic dans le centre-ville, pour officialiser l'acquisition . Sa secrétaire m'a expliqué qu’il tenait à ce que les choses se fassent dans un cadre décontracté où nous serions plus à l'aise. Moi je pense qu’il ne sera pas très à l'aise pendant toute la soirée dis donc.
J’ai porté une magnifique robe sirène turquoise pour l’occasion. Je n'ai pas lésiner sur mon apparence, ce soir je dois être parfaite. Il doit y avoir des étincelles autour de ma tête. J’ai amené mon nouveau véhicule aussi. Je me sens tellement classe, c’est trop bien cette sensation. Mon avocat et Mawa sont dans la voiture avec moi et cette dernière ne fait que me lessiver de compliments.
On arrive au restaurant, il est chic en effet. Nous entrons tous à l’intérieur et nous sommes immédiatement accueillis par une jeune femme très bien habillée que je reconnais immédiatement, c'est Claudia la secrétaire de Da Silva. Elle est courageuse cette fille, rester des années à travailler pour un homme difficile comme Eugenio , ça ne doit pas être la fiesta. Mais un salaire conséquent en vaut bien la peine. Elle me complimente sur ma robe et nous guide ensuite vers une table tout au fond de la salle où nous attendent sûrement nos hôtes.
On arrive à une table plus ou moins grande et bien arrangée. Je lève les yeux, et là….je le vois. Eugenio Da Silva, le PDG arrogant, l'homme intransigeant, mon ex mari, assis dans un fauteuil roulant. Il a changé : des cernes assez profondes, un regard assombri, il a même laissé ses barbes pousser, ce qu’il ne faisait jamais. Et qu’est-ce qu’il a maigri ! Ces derniers moments n'ont pas dû être facile pour lui. Mais il est toujours aussi élégant, toujours aussi beau. Bref, ce n'est plus mon problème.
Son visage change automatiquement quand il me voit. L’étonnement se voit comme une tâche d'huile sur son visage. Il fronce les sourcils en me dévisageant. Il a l'air de ne pas capter.
- Lui : Yani ?? Toi ici ? Qu’est-ce que cela signifie Claudia ?
- Claudia : Euh Monsieur, c'est la Présidente Directrice Générale dont je vous ai parlé. C’est Mademoiselle Yani BALKA qui va tout à l'heure acheter vos actions. Mais je pense vous l'avoir dit Monsieur, plusieurs fois. Vous étiez sûrement ailleurs.
Il se retourne lentement vers moi et me regarde, complètement ébahi, les lèvres entrouvertes. Eh oui mon cher, je suis de retour.