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Write by lpbk

Zoé remercia le ciel d’avoir pris ces deux semaines de congés pour se remettre physiquement et moralement du mariage éprouvant de sa sœur . Elle avait profité des derniers jours qu’il lui restait pour ne strictement rien faire. Même penser était devenu un effort surhumain pour elle. Zoé traînassait toute la journée en grenouillère, cloîtrée dans sa chambre à enchaîner des teen movies. Elle ne se risquait à quitter sa couette que pour une raison vitale : s’alimenter. Tapie tel un rat, elle se trouvait, à des heures indues, à fouiner dans les placards de la cuisine à la recherche de quelques choses à grignoter.

Son attitude de nuisible n’avait pas échappé à sa mère qui lui rappela une bonne centaine de fois que sa maison n'était pas un hôtel et encore moins un restaurant. Elle prenait un malin plaisir à énumérer tout ce qui clochait dans la vie de sa progéniture et sa nouvelle coupe à la garçonne envenima davantage la situation. La liste était longue et Zoé n’eut pas assez de mémoire pour en retenir la moitié. En revanche, les remontrances expliquaient toutes, selon sa mère, pourquoi à un âge aussi avancé elle n’était toujours pas mariée.

Heureusement pour Zoé sa mère travaillait en semaine et ne s’adonnait à son sport favori qu'une fois le soleil couché. En revanche, la jeune femme devait vite trouver une échappatoire pour son dernier week-end de congés. Pour ce dimanche, c’était bouclé. Elle voyait les filles, sa bande d’amies de sciences po. Maintenant, il ne lui restait plus qu’à combler son samedi.

Elle fit défiler son répertoire d’amis, identifia ceux dont elle n’avait pas de nouvelles depuis un moment et supposa ceux qui pourraient potentiellement passer un samedi après-midi en sa compagnie. Elle remua la tête un bon moment, hésita quelques secondes et puis reprit sa recherche.

« Ah tiens Linda ! » pensa Zoé dans la partie L de ses contacts. Elle envoya un  premier message pour prendre des nouvelles de son amie d’enfance. À peine eut-elle envoyé son texto qu’elle reçut un message de Linda l’invitant à aller boire un café un de ces quatre. Elle lui avait alors proposé une nouvelle adresse parisienne pour goûter des petites douceurs qu’elle avait dénichée dans un webzine de mode. Zoé se rendit sur le site web du salon de thé en question. Elle saliva littéralement devant les dizaines de mignardises qui lui promirent une expérience gustative hors du commun.

Le reste de la semaine se passa sans heurts. Zoé avait soigneusement évité d’irriter sa mère. Le soir, lorsque toute sa famille se retrouvait pour dîner devant le journal de 20h,  qu’elle commentait allègrement auparavant, elle courbait l’échine. Zoé pensait que le simple fait de respirer pouvait horripiler sa mère. Aussi, elle se terrait dans un silence de plombs, aspirant le moins d'air possible. Il n’y avait que l’eau qu’elle osait réclamer à table. Cette situation la pesait. Elle se sentait de plus en plus étrangère dans sa propre maison. Rectification, « dans la maison de ses parents ».

 

Il était 15h50 lorsque Zoé arpenta la rue du salon de thé selon Maps. Elle regardait frénétiquement des deux côtés, le smartphone dans les mains, pour être sûre de ne pas louper l’endroit. Elle aperçut alors sur sa droite une devanture rose pastel où était inscrit en lettres scripturales et cuivrées : Gourmette. « ça y est j’y suis » se réjouit-elle.  

Des tartelettes, des cookies,  des biscuits ou encore des cupcakes agrémentaient la vitrine de Gourmette, happant de la frénésie parisienne, telles des sirènes, les passants qui les apercevaient. Zoé comptait attendre Linda, plantée devant le salon de thé, mais le soleil qui lui léchait la peau, l’en dissuada. Elle se hâta à l’intérieur de la boutique et se retrouva propulsée dans un univers de gourmandises et de fééries.

Une délicieuse odeur de cookies qui se dégageait des cuisines lui chatouilla les narines. Son regard fût aussitôt attiré par le comptoir qui débordait de friandises contenues dans des bonbonnières, de présentoirs truffés de biscuits ou encore de sucettes en chocolat. Si ses yeux pouvaient manger, Zoé serait déjà rassasiée à la vue de tout ce festin. Le petit lieu cosy donnait un côté intimiste qui plut aussitôt à Zoé. Malgré la climatisation qui tournait à plein régime, une chaleur se dégageait des murs et des chaises de velours aux tons rose pastel de la boutique. Des petites tables rondes blanches en bois aux pieds de cuivre étaient disposées à travers la pièce. Dans le fond, se trouvaient deux fauteuils autour d’une table basse en bois style scandinave. Une ardoise accrochée au-dessus de la tête d’un des fauteuils invitait à partager ses secrets. Ce lieu portait bien son nom c’était un véritable bijou, un plaisir pour les pupilles et sans aucun doute pour les papilles aussi. Son amie d’enfance était depuis le collège une férue de mode. A l’époque, elle piquait les magazines de ses tantes qu’elle ramenait en classe et s’amusait à faire tout un monologue sur les tendances, tout en imitant la démarche des mannequins lors des défilés, une paire d’Air Max aux pieds.

— Bonjour Madame, vous désirez ? demanda la serveuse menue aux lunettes rondes qui venait d’apparaître derrière le comptoir.

— Bonjour, mon amie a réservé au nom de Linda. J’ai cinq minutes d’avance, elle ne devrait pas tarder.

— Oui en effet. On vous a placées dans le coin papotage. Vous voyez, c’est dans l’angle avec les deux fauteuils style scandinave, indiqua la serveuse qui s’était hissée sur la pointe des pieds.

— Oui merci je vois.

— En attendant, je vous invite à regarder la carte derrière moi ou à vous laisser tenter par nos petites douceurs.

Le comptoir était en bois et peint d’un bleu canard qui se mariait parfaitement avec l’univers rose pastel de Gourmette. La carte du salon de thé était présentée sur une large ardoise accrochée au mur. Zoé lorgnait sur une citronnade faite maison et un carrot cake, mais elle commanderait uniquement quand Linda serait arrivée. En attendant, elle alla s’asseoir dans le coin papotage.

16h10, toujours aucune trace de Linda qui s’était contentée vingt-cinq minutes plus tôt d’envoyer un simple texto pour l’informer de son « petit retard ».

Une blonde décolorée franchit alors le pas de la porte au bord de la crise cardiaque. Linda n’avait pas changé d’un poil. Elle avait toujours cette fâcheuse manie d’être à la bourre et arborait toujours une couleur de cheveux peu naturelle qui lui rongeait les pointes. Les colorations plus le lisseur à outrance avaient rendu si secs ses cheveux qu’ils menaçaient de s’enflammer à la moindre étincelle. La jeune femme furetait le salon à la recherche de son amie quand elle finit par l’apercevoir elle fit un large sourire et se dirigea à la hâte vers le coin papotage. Elle marqua un temps d’arrêt, horrifiée par ce qu’elle apercevait.

— Zoé! Tes…tes cheveux ?

Zoé avait complètement oublié sa nouvelle coupe. Elle  passa rapidement sa main sur sa tête et éclata de rire. Couper ses cheveux était un sacrilège pour Linda. Un geste malheureux qui ne devait être réalisé qu’en cas d’extrême urgence. Elle avait jugé que même l’état lamentable de ses longueurs ne méritait pas un coup de ciseau.

— Pourquoi ? demanda-t-elle abasourdie.

— Comme ça. Envie de changer, répondit Zoé en haussant les épaules.  

— T’es pas en train de nous faire une Britney Spears là ?  

Zoé rit.

— Non, j’avais juste envie de nouveauté. Attends, c’est pas toi qui va me juger alors que tu changes de couleur comme de culottes.

— Ouais…mais…

Linda s’arrêta de nouveau sur la coupe courte de son amie et scruta ses contours.

— C’est là qu’on voit la vraie beauté. Tu restes magnifique quand même.

— Merci !

— Au fait dé-so-lée pour mon retard, s’excusa mille fois Linda. J’ai eu une grosse galère avec ma voiture sur le périph’ j’ai vraiment cru que j’allais y passer. Ça va sinon ? Finit-elle par demander.

— Ouais t’inquiète l’important c’est que tu sois là.

— J’ai appris que ta sœur s’était mariée, félicitations à elle. Tu lui feras de gros bisous de ma part. Ça ne nous rajeunit pas tout ça hein ?  

— C’est clair. Oui, oui je lui dirai.

— Mesdames, vous avez choisi ? demanda la petite serveuse venue prendre la commande des deux jeunes femmes.  

— Oui oui, pour moi, ce sera un carrot cake et une citronnade s’il vous plaît.

— Et moi, un milkshake vanille cookie s’il vous plaît.

La serveuse nota hâtivement les commandes et retourna au comptoir.

— Alors tu deviens quoi ma belle ? demanda Linda.

Zoé réfléchit un instant et ne sut par quoi commencer exactement.

— Bah écoute ça va, sourit-elle nerveusement.

— Ok il y a du nouveau dans ta vie ?

— Non, rien de nouveau, la routine quoi.

— Et ton mec il va bien ? Il s’appelle comment au fait ?

— C’est fini entre nous.

Linda, gênée, rechignait à poser de nouvelles questions à Zoé.

— Mais t’inquiète ça va hein, la rassura-t-elle pour ne pas plomber l’ambiance.

— Et ta famille ça va ?

Zoé sourit de nouveau.

— C’était quand la dernière fois qu’on s’est vue ? Il y a trois ans non ? Je te disais déjà que je m’en prenais plein la gueule avec cette histoire de mariage. Depuis les fiançailles d’Elsa c’est encore pire. Sainte Marie, ma mère, mes tantes et même mes cousines s’y mettent. Tu te rends compte ma petite-cousine qui a attrapé le bouquet, me l’a offert pour que Dieu me donne un mari. Elle a dit ça devant tout le monde la petite. J’avais tellement honte.

— Oh c’est trop mignon, lança Linda attendrie.

Elle se ravisa lorsqu’elle aperçut le regard furieux que lui jeta Zoé.

— Ma pauvre ! C’est la mentalité de nos parents. J’espère au moins que ça changera avec notre génération. Je suis sûre que si j’ai fait la plus grosse bêtise de ma vie, c’est à cause d’une espèce de syndrome post-traumatique. Depuis toute petite, je vois mes cousines, mes tantes, ma sœur se marier. Et chez nous, il y a toujours la légende d’une femme de la famille qui passée la trentaine n’avait toujours pas trouvé d’époux dans le même délire que la vieille fille et ses centaines de chats.

— On a la même chez les Sia sauf que c’est moi maintenant, s’esclaffa Zoé.  

— On en a toutes une. Je pense que j’ai dû être traumatisée par ces histoires et depuis je fais une fixette sur le mariage. Il fallait absolument que je sois mariée jeune. C’était un objectif que je m’étais fixé.  Ça a toujours été ma hantise de finir seule et ça m’a foutue dans un sacré merdier. Je me suis mariée trop jeune. Vraiment, je t’assure, quelle que soit la pression ne te précipite pas.

— Ne t’inquiète pas pour moi, ce n’est pas mon intention. Je faisais aussi une fixette et ironie du sort ça m’a foutu en l’air mon histoire.

— Désolée pour toi ma belle !

— Mais ça ne va pas avec ton mari ? D’ailleurs, tu étais dans le sud non ?

— Ahaha nous y voilà ! La saga ! L’histoire digne d’une télénovela.

Zoé s’enfonça dans son fauteuil, les oreilles attentives au récit qui allait suivre.

— Donc tu te souviens que je me suis mariée il y a six ans ?

Zoé acquiesça.

— Au début, tout allait relativement bien entre nous deux. Pas d’histoires, pas de disputes. Il a galérait financièrement mais ça passait. Il enchaînait les petits boulots. Alors que moi, j’avais déjà ma situation très stable, CDI et compagnie.  Après tu me connais, ça ne m’a jamais gênée, je précise. Je n’ai jamais voulu un mec blindé. Il a commencé à travailler après le BAC, il ne pouvait pas se permettre de faire de longues études malgré son potentiel.

— Ouais je comprends, répondit Zoé qui suivait attentivement l’histoire de son amie

— Il avait toujours des petits plans de merde par-ci par-là pour s’en sortir. Forcément, il ne gagnait pas des mille et des cents. Monsieur se refusait toute activité. On ne sortait pas, pas de restos, pas de cinés, rien ! Tu me connais, c’était impossible pour moi de vivre dans ces conditions-là. Je me suis mise à payer nos factures et nos activités de couple, sinon on ne serait jamais partis ni week-end ni en vacances. Apparemment Monsieur a été touché dans son orgueil. Il avait besoin de renouer avec sa virilité, de sentir qu’il était un homme quoi et il a donc commencé par me tromper.

La serveuse les interrompit en ramenant leurs commandes. Zoé saisit sa citronnade et en but quelques gorgées. Elle secoua sa tête en signe de dégoût à la révélation que venait de lui faire Linda.

— Donc j’en étais où ? Demanda Linda après avoir mis deux crocs dans son cookie.

— Ton mari a commencé à te tromper.

— Oui, voilà donc ce connard a commencé à me tromper. Bien sûr quand il a commencé, je n’étais pas du tout au courant, je l’ai su bien après. Mais attends la suite.

Zoé était pendue aux lèvres de son amie et ne manquait pas une miette de son récit la paille dans la bouche.

— Un soir, il arrive et me dit qu’il a une superbe opportunité à Montpellier grâce à un de ses cousins. Il prétend que c’est la chance de sa vie et qu’il ne peut pas la laisser passer. Il me fait part de ses sentiments comme quoi il a l’impression d’être émasculé et qu’il a perdu confiance en lui, qu’il a l’impression qu’il n’a aucune valeur à mes yeux et qu’il ne me sert à rien. Foutaises ! C’était pour mieux me manipuler. Naïve que je suis, je finis par le rejoindre à Montpellier : le début des ennuis.

Zoé exaspérée secoua la tête. Elle prit sa première bouchée du carrot cake. Le feu d’artifice de cannelle, de noix de pécan et de crème lui donna une pincée de réconfort.

— Donc je descends à Montpellier et en parallèle, ça devient de plus en plus tendu avec ma belle-famille qui me reproche de ne pas être tombée enceinte. Et ouais, j’ai réussi à me marier mais je ne suis pas tombée enceinte. Ce n’est pas faute d’avoir essayé mais avec du recul je me dis que c’est Dieu qui m’a préservée d’avoir un enfant avec cet enfoiré. Tu t’imagines ? J’aurais dû être lié à lui toute ma vie.

Linda marqua une pause et engloutit une partie de son milkshake.

— Bref, nous sommes à Montpellier, je cherche un nouveau boulot, lui il a été embauché par son cousin qui avait ouvert une petite boîte de réparation IT. J’ai été trois mois au chômage. Il fallait le voir se pavaner. Il était fier d’être celui qui ramenait la thune à la maison. J’ai fini par trouver du boulot. Lui, était souvent de sortie avec son cousin et ses amis. Moi, je ne connaissais personne dans la région, donc pas de vie sociale et ça me tuait à petit feu.

— Le pire quand on quitte sa région natale c’est de n’avoir aucune connaissance à laquelle s’accrocher. T’es tellement isolée.

— C’est exactement ça. J’étais mariée mais je me sentais tellement seule. Franchement, je suis tombée de haut. Un soir, je reçois un appel d’une meuf qui me demande si je suis bien Linda mariée à un certain Adil. Elle me donne pleins de détails sur sa vie. Elle connaissait le nom de sa mère, sa ville d’enfance, bref, plein de détails. Et là, elle m’avoue tout : Adil a une double vie. Ironique non ? Je suis mise au courant de sa liaison par sa propre maîtresse. Elle ne supportait pas qu’il rompe avec elle, donc Madame a décidé de tout me balancer.

Linda visiblement émue reprit quelques gorgées de son milkshake. Zoé lui tint alors la main.

— Merci ! Donc ça faisait un peu plus d’un an que…Monsieur me trompait avec cette bouffonne. Il l’a rencontrée sur une appli et apparemment elle n’était pas la première. Même quand on était sur Paris c’était le même manège. Ce connard flirtait et couchait à tout va. Je me suis sentie tellement salie. Mon monde s’est écroulé et je suis vraiment tombée de très très haut. Je n’arrivais pas à croire que le mec que j’aimais, à qui j’avais accordé toute ma confiance me trompe sans aucun scrupule. J’étais dégoûtée.

— Tout se…passe bien mes…mesdames ?

La serveuse se rendit compte à la vue des yeux rougis de Linda qu’elle était venue au mauvais moment. Elle tourna les talons et partit importuner d’autres clients.  

— Sabrina, sa maîtresse, m’a dit qu’elle était persuadée qu’il s’était trouvé une autre nana et voulait m’avertir d’être plus vigilante. La blague ! Tu me connais, l’adultère, c’est rédhibitoire pour moi. Je l’avais prévenu. Il était hors de question que je reste avec lui.  

— Mais tu as directement cru cette Sabrina ?

— Pourquoi elle mentirait ? Elle avait trop d’infos sur lui, sur nous ? Et puis au fond de moi, j’avais quelques signes mais j’ai préféré me voiler la face en était certaine d’être dans un bon mariage.

— Ouais je comprends.

— La nuit de l’appel de Sabrina, il est rentré super tard, j’étais déjà couchée et j’ai fait semblant de dormir. Le lendemain matin, j’ai pris mes affaires et je l’ai quitté sans un mot. J’ai pris le premier train pour Paris et j’ai filé.

— Et ton boulot ?

— Je regrette mais je les ai plantés. Je ne pouvais pas rester dans cette ville. C’était impossible pour moi.

— Oui normal.

— Dans la journée, il ne m’a pas envoyé un seul texto, ni même appelé, rien ! C’est le soir en rentrant qu’il a dû paniquer et se rendre compte qu’il m’avait perdue. Je reçois son premier appel, je décroche. Il me demande où est-ce que je suis et je lui réponds tout simplement que je suis à Paris, que je suis au courant pour Sabrina et pour toutes les autres et que je veux divorcer. Là, silence, j’aurais adoré voir sa tête. Ça fait six mois et il ne me lâche pas. Il est passé par toutes les phases : le déni, le mensonge, les larmes de crocodile, la douceur, la violence, la menace de suicide, la caution familiale. Il m’aura tout fait mais je n’ai pas cédé. Même sa famille qui crachait sur moi parce que soi-disant, j’étais une femme infertile a tenté de me dissuader de divorcer. Je les ai tous envoyés chier.

Zoé tentait d’attraper les dernières miettes de carrot cake qui traînait dans l’assiette tant le gâteau était excellent.

— Donc t’as divorcé ?

— Je suis en train. Il était hors de question que je reste avec ce mec. Il n’avait aucun respect pour moi. J’ignore dans combien de draps il a couché avant de revenir dans les miens. Je suis allée faire des tests de dépistage, la boule au ventre, de peur qu’il ne m’ait refilé une saleté. J’ai bien trop d’amour-propre pour vivre avec ce genre de type. Il pensait que j’allais rester comme toutes les petites idiotes mariées à ses amis. C’est mal me connaître. J’ai hâte que le divorce soit prononcé pour enfin tourner la page.

— Putain ma pauvre, tu dois être dégoutée. En tout cas moi je le suis et ça ne m’encourage pas à me marier de sitôt.

— Non ma belle, lui, c’était un connard de la pire espèce. Je ne suis pas dégoûtée du mariage, au contraire, je veux conjurer le mauvais sort, je suis sûre que dehors il y a un mec parfait qui m’attend. Je me suis déjà remise en chasse pour trouver le mari parfait.

Zoé manqua de recracher sa citronnade.

— Mais ton divorce n’est même pas encore prononcé ! Pouffa Zoé.

— Oui et ? Je suis dans le futur moi. Tu te rappelles de ma liste ?

La révélation de Linda n’étonnait guère Zoé. Adolescente déjà, elle fuyait le célibat comme la peste. Elle était incapable de rester seule plus d’un mois. Ses pensées étaient toujours occupées par le garçon de telle classe, de tel lycée ou de telle ville. Sa règle d’or était de ne jamais mettre fin à une relation sans être garantie d’en avoir une autre.  Son physique avantageux lui permettait de mener ce train de vie amoureux. Linda s’amusait à imaginer la vie qu’elle mènerait avec ses différentes conquêtes. Est-ce qu’ils seraient riches, pauvres ? Dans quelle ville habiteraient-ils ? Combien d’enfants auraient-ils ? Autant de questions que Linda se posait constamment lorsqu’elle était en couple. Elle avait toute une liste de critères précis sur l’époux parfait.

— Bien sûr que je me souviens sale folle ! Se moqua Zoé en repensant au nombre de cœurs que Linda avait brisés car non conformes à ses ambitions maritales. Elle se souvint notamment du fameux critère qui empêchait à son futur époux de manger des fruits de mer.   

— Tu me crois si je te dis que j’ai retrouvé la liste dans mes affaires ?

— C’est pas vrai ? T’avais gardé une trace écrite de ces conneries ?

— Et ouais, j’étais beaucoup plus atteinte que je ne le pensais mais au final ça m’aurait peut-être évité de tomber sur mon futur ex-mari si je l’avais suivie cette liste. J’avais indiqué qu’il me fallait un homme ambitieux et de pouvoir. Il était à l’opposé de ça.

Les deux filles éclatèrent de rire.  

Entre Linda et Zoé ça avait toujours été l’amour fou malgré la distance et le temps. Elles parvenaient toujours à garder un lien fort et lorsqu’elles se retrouvaient, elles redevenaient ces deux jeunes lycéennes pleines de rêve, brûlant d’un désir ardent de vivre des romances dignes d’un Jane Austen. Elles restèrent là deux bonnes heures à papoter et à déguster les douceurs de Gourmette.

Elles se quittèrent ravies du moment qu’elles avaient passé ensemble et se promirent de multiplier ces occasions.

Zoé sur le chemin du retour eût envie de déambuler dans les rues parisiennes, profiter du bon temps avant de retourner dans sa banlieue lointaine. Elle marcha quelques instants sur le boulevard des Italiens. Elle eût un bref moment de nostalgie en passant devant le café où autrefois elle venait boire des coups après le boulot. Une vibration dans la poche de sa veste la sortit de sa stupeur. Zoé saisit alors son smartphone et zieuta un instant les notifications. Elle venait de recevoir le message d’un numéro qu’elle ne connaissait pas. Elle l’ouvrit.

« Besoin de te parler.

Djibril »

Son cœur fit un bond dans sa poitrine lorsqu’elle lut le message. Était-ce seulement possible que ce soit bien lui ?

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