Au pied du mur
Write by Farida IB
Nahia…
Nous sommes en pleine séance photo pour la campagne publicitaire de la nouvelle collection de Tina. Tout se déroule bien jusque-là, les filles sont super motivées. Vanessa et Magnime nous sortent des poses stylées que le photographe a l’air d’apprécier, c’était le même tableau avec les enfants hier. Elles m’ont agréablement surpris en suivant comme si elles avaient eu à faire cela toute leur vie. C’est à croire que l’objectif de l’appareil photo réveille le mannequin qui somnole en tout un chacun de nous (rire).
Nous avions commencé en posant tour à tour ensuite deux par deux, tout en variant tenues vestimentaires et accessoires. Là, le photographe envisage de faire des clichés avec tout le groupe pour terminer la séance en beauté. Cependant, je ne me sens plus du tout d’attaque. Pendant toute la séance, j’avoue que j’avais eu du mal à suivre le rythme parce que je ne me sens pas au mieux de ma forme. J’ai un gros coup de fatigue que je néglige depuis trois jours compte tenu de mon programme hyper chargé. En ce moment, les demandes de prestations se sont encore fluctuées. Ce qui fait que je suis partout à la fois étant donné que j’aime me charger personnellement de mes affaires surtout s’agissant des nouveaux clients. Il faut dire qu’avec le temps, je suis devenue perfectionniste, enfin, maniaque comme le dirait Liam. Je trouve tout de même qu'il exagère parce que je suis simplement très pointilleuse sur le travail bien fait, et avec les fainéants doublés de cancaniers que j’ai comme employés ce n’est pas gagné d’avance. Du coup, je préfère me taper le gros lot du travail et leur confier des trucs sans importance.
Je prends toutefois sur moi de finir la séance avec les filles.
Le photographe : super les filles, vous avez fait un magnifique boulot même si Mlle Nahia n’avait pas l’air dans son assiette.
Je hoche la tête en forçant le sourire.
Le photographe (me tapant l’épaule au passage) : mais t'inquiètes, t'as assuré.
Moi : merci !
Le photographe (prenant quelques affaires) : je suis dans mon bureau au cas où vous aurez besoin de moi.
Moi : ok.
Dès qu’il s’en va, je cherche un siège dans le studio sur lequel je m'assieds lourdement. Vanessa et Tina me rejoignent ensuite et s’alignent à côté de moi.
Moi : purée, je suis éreintée.
Je le dis en renversant la tête derrière avant de poser une main sur les yeux.
Vanessa : c’est vrai qu’on ne t’a pas du tout senti durant la séance, tu es sûre que ça va ?
Moi : mouais ça va, j’ai juste besoin d’un peu de repos.
Tina : plutôt un tour de manège, ça détend plus. (clin d’œil)
Moi : lol
Vanessa (lui tapant dans sa main en l'air) : tu connais même !
Moi levant les yeux au ciel : le spa est aussi faits pour ça.
Magnime (nous rejoignant avec enthousiasme) : les photos sont trop époustouflantes, le rendu final sera juste (joignant son pouce et son index) perfect !
Moi : je n’en doute pas, Julio (le photographe) connaît son « travaux ».
Vanessa à moi : un choco en plus, tu l’as même dégoté où ? En fait tu les déniches où tes collaborateurs ?
Tina renchérissant : c’est vrai qu’elle est toujours bien entourée.
Vanessa hochant la tête : les genres qui te donnent matière à douter sur ton choix de vie.
Moi dépassée : lol Nessa c’est arrivée là-bas ?
Vanessa (dans son sérieux) : ça a même dépassé.
On éclate de rire.
Vanessa faisant la moue : mais c’est vrai, parfois, j’ai l’impression d’avoir choisi le moins beau de la bande. On prend le cas de Brad par exemple, il était mimi quand je l’ai connu, mais là il est beau plus plus (précisant) c’est-à-dire à l’extrême, le must have quoi.
Magnime et moi parlons toutes les deux à la fois.
Magnime riant : Vanessa, c’est bon, on a compris krkrkr.
Moi : l’homme d’autrui ?
Tina faussement scandalisée : donc, depuis le temps, tu n’as pas cessé de viser mon homme ?
Vanessa claquant la langue : fais juste un faux pas et je le récupère sans inhibition.
Tina trop zen : là, tu vas devoir attendre encore longtemps, he is my private property (c’est ma propriété privée.).
Vanessa : so let me appreciate things at their true value (donc laisse-moi apprécier les choses à leur juste valeur.)
Je ris, dépassée.
Vanessa (dans sa lancée) : il y a aussi Alfred, lui je ne sais même pas ce qu’il mange pour avoir cette virilité débordante et insolente. Même Bi… Enfin, les gars de la team sont tous classés beaux gosses sauf ma part de mari !! C’est prendre la bière et pousser un gros ventre sa priorité dans la vie. Parfois, j’ai l’impression que de nous deux, c’est lui qui a porté les deux grossesses.
Moi : rhoo Vanessa arrête de descendre ton chéri, il n’est pas mal dans son genre. C’est le style Vin Diesel (acteur) sans les pectoraux bien sûr.
Vanessa : voilà, tu as trouvé. C’est ce qui lui manque en fait, un peu de musculation. J’avoue qu’il m’arrive d’avoir honte de l’afficher.
Magnime et moi parlons encore en même temps.
Moi : tu es même sérieuse ??
Magnime : ohh !?
Tina la réprimandant : Vanessa tu gaze !! C’est simple, envoie ton homme à la salle de gym ! C’est même quoi ton problème à la fin ? C’est à croire que les beaux mecs, on les expose au musée tsuiipp !! Ton homme, il te donne le gain ou pas ?
Vanessa : si !
Tina : il tourne bien les reins ou pas ?
Vanessa : il a même tout le Congo autour de sa taille.
Akaa !!
Tina continuant : est-ce qu’il vous traite bien tes filles et toi ?
Vanessa : je trouve même qu’il exagère parfois sur ce point !
Magnime riant : elle répond en plus du tac au tac.
Tina (s’adressant à Vanessa) : alors de quoi te plains-tu ? Préoccupe-toi des choses utiles au lieu de chercher les poux sur la tête d’un chauve.
Vanessa haussant l'épaule : tu dis ça parce que toi ton homme est le plus sexe !
Tina : ça, je m’en fiche. Ce n’est pas ça ma priorité dans la vie.
Moi la taquinant: de toute façon, tu es calée la go, il t’a épousé et t'a fait deux gosses. Très bientôt, tu auras ta part de jumeaux.
Vanessa faisant la grimace : lui avec qui ?
Tina la toisant : avec toi, je vais d’ailleurs lui dire de se mettre au travail pour te faire une équipe de foot. Là, tu feras moins la maligne.
Vanessa : tchhuiipp !
Nous éclatons de rire devant sa moue boudeuse. On change de sujet puis Tina entreprend de ranger ses affaires. Je veux lui emboîter le pas, mais je me sens encore plus mal que toute à l’heure. J’essaie de retenir un haut-le-cœur en les écoutant trimer sur le sujet du Chilling de la saint valentin. Je les écoute distraite parce que ça ne m’intéresse franchement pas. À un moment, Tina revient à la charge.
Moi : nan, je préfère glander dans ma chambre, devant ma télévision.
Tina roulant des yeux : en d’autres termes, te confiner comme toujours.
Moi : ouais, c’est mieux que de venir vous tenir la chandelle.
Vanessa : en quoi c’est bad ?
Je la fixe genre « tu es sérieuse ? », elle hausse les épaules.
Vanessa : ça va te motiver à te trouver un mec !
Moi me couvrant la bouche : no way, si le mec lui-même ne va me trouver bah qu’il reste dans son coin. (hoquet) Ce qui est certain, nous souffrons tous les deux !
Tina arquant le sourcil : de quoi ?
Moi : des échecs dans nos vies amoureuses. Si je suis supposée être son âme sœur, il n’aura pas de répit tant qu’il ne m’aura pas retrouvé.
Tina l’air exaspérée : donc tu vas t’asseoir bonnement dans ta chambre attendre qu’il vienne te retrouver ? Tu penses que la vie, c’est le lait ?
Vanessa renchérissant : ohhooo ? Souvent, aide-toi pour que le ciel puisse t’aider à son tour !
Moi balayant l’air de la main : ce n’est pas ma priorité en ce moment !
Vanessa me grondant : c’est même quoi ton problème à la fin ? Tu te plains d’être célibataire alors que tu ne veux pas faire des efforts pour te trouver un mec.
Je roule des yeux et m’apprête à lui répondre lorsque le haut le cœur se fait plus abrupte. Je me retrouve directe la tête enfoncée dans la cuvette des toilettes. J’espère vraiment que ce n’est pas ce que je pense, il ne manque plus que je sois enceinte !
Quand je relève ma tête, elles étaient debout dans le vestibule de la porte de la douche les yeux rivés sur moi. Je prends un grand souffle, car je sens que je vais passer un virulent interrogatoire.
Moi : une serviette s’il vous plaît.
Magnime s’exécute.
Tina à elle : finis de ranger, on arrive.
Magnime boudant : oohhrr là tu me chasses !
Elle lui lance un regard réprobateur.
Tina (dès qu’elle s’en va) : Nahia t’es enceinte ?
Moi biaisant : enceinte ? Moi ?
Tina : non la reine d’Angleterre (un geste bref de la tête) relève toi et regarde ton reflet dans le miroir en ce moment.
C’est vrai que je n’ai pas du tout bonne mine.
Moi hésitante : non, bof, enfin je ne sais pas.
Vanessa : comment ça tu ne sais pas? Tu vois quelqu’un ? On le connaît ?
Moi (prenant appui contre le lavabo) : c’est une longue histoire.
Tina recroisant les bras : j’ai mon aprèm de libre.
Vanessa : dis toujours !
Moi (dans un souffle) : c’est Manaar.
Vanessa : qui Manaar ?
Tina lui répondant : son ex, le tout dernier. (à moi) Donc où on est là, tu en as remis une couche avec lui et il a fallu que tu sois enceinte pour qu'on le sache ?
Moi exaspérée : si enceinte, je le suis !
Vanessa : si si, tu l’es.
Je soupire agacée.
Tina : et tu comptais garder ça pour toi jusqu’à quand ?
Moi : c’est arrivée qu’une ou deux fois.
Tina : ça ne change rien au fait ! (ton assimilable à l'indignation) Tu te rends compte qu’il a fallu te ramasser à la petite cuillère la dernière fois qu’il t’a de nouveau largué ?
Moi : je n’espère rien de lui cette fois.
Vanessa me fixant : et tu couches avec lui pourquoi ?
Moi : on prend juste du bon temps ensemble.
Tina écarquillant les yeux : avec ton ex ?
Moi haussant l’épaule : vous voulez que je fasses quoi ? Il s'amène lui-meme keh.
Tina : c'est parce que tu le laisses faire !
Vanessa en appui : vraiment !
Moi : qu’est-ce que vous en savez ?
Tina (pointant mon ventre) : en tout cas ton père ne va pas te rater cette fois.
Je blemis un laps de temps avant de me reprendre. Elle fait mine de quitter le lieu et fait volte-face après deux pas. LOl, c’était trop facile qu’elle lâche l’affaire.
Tina commençant : je ne sais pas si tu es bête ou tu fais exprès de l’être ! (élevant la voix) Un éternel indécis qui de surcroît affiche fièrement une autre, ça ne te dit absolument rien hein ? Après tout ce que cette relation t’a laissé comme séquelle. Tu as déprimé toute une année où il a fallu te réapprendre à acquiescer le simple sourire et tous les ragots qu'il a raconté sur toi après ! Tu sembles oublier ces détails de l'histoire. (très furieuse) Est-ce que tu n'as pas raison d'oublier ? Ce n’est pas toi qui as dû passer des nuits blanches en sachant sa meilleure amie mal en point. C’était même du sérieux que je l’aurai compris, tu acceptes te faire gérer dans l’ombre et sans protection en plus. Un deuxième enfant dans une relation compliquée ! Non mais tu ne t’aimes pas hein Nahia ! Tu n’as même pas pitié de ta propre personne !! Au moins Bilal on sait tous que c’est lui qui a déconné, cette fois quel excuse vas-tu trouver ? (soupir frustré) De toute façon de quoi je me mêle ? Tu as l’air de savoir ce que tu fais, voilà pourquoi tu as gardé ça secret.
Elle tourne le dos et s’en va.
Moi la suivant : Tina ? Rhoo arrête !
Tina à sa sœur : tu as fini ? (elle hoche la tête.) On y va !
Magnime (oscillant son regard entre nous) : il y a un problème ? Pourquoi affichez-vous des mines si graves ?
Vanessa : Nahia a zaillé !
Magnime arque un sourcil interrogateur et nous regarde sans rien ajouter. On quitte l’agence de photographie sur cette note. Je mets d'abord le cap sur mon appart et décide à mi-chemin de faire un tour chez les parents dans l’intention de me servir dans les tests de grossesse d’Amou. Je suis plus penchée sur une crise de palu, mais bon, il faut quand même que je m’en rassure. En fait, je ne veux même pas penser à une éventualité de grossesse, pas maintenant et surtout pas de Manaar (soupir).
À la villa, je fonce droit dans la boîte à pharmacie d’Amou et en sors trois différents tests. Je m’enferme dans leur salle de bain et les utilise rapidement. Je les pose ensuite sur le vanity et vais rejoindre mamie dans sa chambre pour faire diversion. J’arrive et la retrouve assise sur son lit, un tas de comprimés dans le creux dans sa main droite et s’apprête à les prendre.
Moi refermant la porte : bonsoir mamie (plissant le front) tu veux avaler tout ça ?
Elle le fait en une prise avant de se tourner vers moi, je m’assois à côté d’elle et la regarde seulement dépassée.
Mamie : tu me connais pourtant.
Moi : ce sont des médicaments de quoi en fait ? Je te vois souvent les prendre.
Mamie : les maux de vieillesse !
Moi la taquinant : je vois qu’on a peur de mourir krkrkr.
À vrai dire je ne sais pas comment je fais pour me contenir alors qu’en réalité je stresse à mort.
Mamie : Nahia bou (dégage) laisse-moi me reposer.
Moi la fixant intriguée : tu es sûr que ça va mamie ?
Je demande parce que j’ai l’impression qu’elle dépérit au jour le jour et son visage plus pâle que la normale.
Mamie : et pourquoi ça n’irait pas ?
Moi : hmmm (me levant) je viens !
Mamie regard appuyé : tu vas où ? Tu es sûre que tout va bien ? Tu sens l’intrigue à mille kilomètres.
Moi : tu vas chercher ça encore où ? Je ne cache rien, je veux juste me désaltérer.
Mamie (me fixant au coin du nez) : vas-y donc.
Je soupire intérieurement d’aise et un sourire béat se dessine sur mes lèvres quand je vois les signes négatifs sur les deux premiers tests et une barre rose sur le dernier. Je reste deux secondes à les contempler lorsque je sens comme une présence. Je me retourne pour tomber sur mamie qui me lance ce regard suspicieux que je lui connais très bien. Telle une automate, je ramène les tests dans mon dos, essayant de paraître naturelle.
Mamie : c’est de qui ?
Moi : quoi ?
Mamie : tu es enceinte de qui je te demande ?
Elle n’attend pas avant de venir me prendre les tests des mains et les fixe un court instant avant de prendre la direction des chambres.
Mamie : je t’attends dans la chambre et tu n’as pas intérêt à traîner les brindilles qui te servent de pieds.
Pourtant je m'y rends en traînant les pas, j’appréhende en fait ce qu’elle va dire. J’ouvre finalement la porte et prends une grande inspiration avant d’entrer. Elle est assise bien droite, le visage neutre. Pas rassurant du tout, mamie qui ne laisse paraître aucune expression. Je ne suis pas sortie de l'auberge du tout.
Moi méfiante : les tests sont négatifs.
Mamie brusque : tu couches avec qui ?
Moi balbutiant : euhh… Je…
Mamie (sur un ton de reproche) : Nahia tu pense avoir encore l’âge de faire des cachotteries ? C’est qui cet imbécile à qui tu ouvres tes jambes sans qu’il n’ait la décence de venir voir tes parents ? Si vous en arrivez à roucouler sans vous protéger, c’est que tu lui fais beaucoup confiance. Sauf qu’apparemment, tu ne lui fais pas assez confiance pour le présenter à tes parents. Jeune fille, je pensais que tu tirais au moins des leçons de tes mésaventures. Je pensais que tu avais pris des résolutions après ta dernière relation ? On dirait que ton cerveau disjoncte lorsque tu te retrouves face à un pénis.
Moi : mamie !!! (souffle) Avant de me condamner, il faut au moins attendre de savoir qui s’est. (enchaînant) En fait…
Elle m’écoute attentivement sans intervenir et se contente de hocher la tête par moment.
Mamie intervenant : en résumé, tu as été rétrogradé tchiza et la tchiza est promue titulaire ?
Je hoche la tête avec un petit sourire. La vieille a trop les sons.
Moi : quelque chose comme ça (concluant) j’ai l’impression que malgré nos efforts à vouloir refaire notre vie chacun de son côté, il y a une force surnaturelle qui nous attire l'un vers l'autre.
Mamie : laisse le surnaturel où il est.
Moi : mais c'est vrai !!
Mamie calmement : à mon avis tu ne l'aimes plus aussi fort qu'avant, c'est juste ta façon à toi de digérer ton chagrin. À cela, s’ajoute le fait que vous êtes tous les deux embrouillés, mais votre histoire de « non voulant, ne voulant pas, voulant », c’est à toi d’y mettre un terme. Parce que toi ma fille, tu es une femme et tu ne peux pas te permettre d’attendre toute ta vie qu’il retrouve ses repères. Tente au moins quelque chose ailleurs si ça ne marche pas moi-même, je me chargerai de cette groupie, tu sais bien que j’en suis capable (je souris.). Ton Manaar là ce n’est pas un mauvais garçon, il se perd simplement dans sa jeunesse. Mais il finira par se retrouver, toutefois ne met pas ta vie en parenthèses pour lui. L’horizon est vaste, très vaste ! Remets-toi sur le marché !!
Je la regarde les yeux et la bouche écarquillés.
Mamie : quoi ?
Moi : rien c’est juste ce n’est pas le scénario que je m’étais imaginée sur cette conversation. Enfin, je n’ai pas eu de remontrances, juste un peu de leçon de morale et tu me trouves même des situations atténuantes. (tâtant son visage) mamie, je dois m’inquiéter ?
Mamie dégageant ma main : bou !! Tu ferais mieux de prendre ta vie en main, le temps ne t’appartient pas.
Moi soupirant : je le sais, j’en suis consciente, mais j’ai bien peur de ne plus pouvoir aimer à nouveau. Déjà, que j’ai du mal à me défaire de l’amour masochiste que je ressens pour Manaar. Je me marierai peut-être pour faire plaisir à mon entourage. Le mariage, l’amour, j’ai fini par ne plus y croire.
Mamie : tomber amoureuse ou pas ce n’est pas à toi d’en décider. Tout, comme tu n’as pas décidé pour tes ex. Un x peut sortir de nulle part et viendra bousculer ton cœur, peut-être même que tu l’aimeras comme jamais tu n’as aimé auparavant.
Moi (sur le ton de la plaisanterie) : façon, je le botterai celui-là de m’avoir fait perdre mon temps dans des futilités.
Elle éclate de rire.
Mamie : tu n’étais pas prête, et même là tu n’es pas prête pour l’attirer vers toi. Fais le ménage dans ta vie et tu verras ! N’oublie pas que tu attires ce que tu penses.
Moi le ton rieur : la fameuse loi de l’attraction lol. (sérieuse) Merci mamie, je songerai à tous ça plus tard.
Je veux l’étreindre, mais elle se défile.
Mamie : enlève les mains que tu prends pour tripoter ton ex là sur moi tsuiiipp !!
Moi faisant la moue : rhooo mamie. (du coq à l'âne) Tu ne repars plus à Louvain hein ?
Mamie : et pourquoi donc je ne vais pas partir ? Mes autres enfants et petits enfants ont également besoin de moi. Je reste encore quelques mois, le temps que ta sœur entame son second trimestre.
Moi : je m’en doutais !! Des cachottières ta belle fille et toi, vous me triez maintenant quoi.
Mamie : tu te tries toi-même. Tu as ta chambre ici je ne vois pas pourquoi faire du gaspillage en louant un appartement trop grand pour toi seul.
Moi : j'ai besoin d'intimité, ici j'étouffais à la limite.
Mamie : intimité pour avoir la liberté avec ton ex, n'est-ce pas ?
Moi : orrhhh mamie laisse tomber cette histoire. (la petite voix) Au fait merci de garder ça pour toi, ça ne doit surtout pas tomber dans les oreilles de ta belle fille. (mains jointes en l'air) I beg !
Elle me toise et je ris franchement. Quatre heures plus tard, je décide de rentrer chez moi, mais je fais d’abord un détour chez miss Tina. Je lui ai envoyé un message pour lui dire que les tests sont négatifs, elle m’a simplement répondu « tant mieux ». Là je sais que la copina est fâchée et pas qu’un peu. Sa réaction est tout à fait opportune, je n’en disconviens pas, mais entre nous est-ce que c’est une chose dont on est fière d’exposer sur tous les toits ?
J’arrive chez elle après une demie heure de conduite et la retrouve au salon, Bradley est sorti et les enfants sont chez leur grand-parent maternel. Je m’assois bien en face d'elle, mais elle m’ignore et feint d’être concentrée sur le journal télévisé. Lol depuis quand même elle suit le journal ?
Moi : mme Elli tu boudes toujours ?
Tina froidement : il y a de quoi nan ?
Moi : rooooo Tina, ce n’est pas quelque chose dont je suis moi-même fière. Rassure toi ce n'est pas dans l'intention de me retourner avec lui, encore qu'il est toujours avec Clarisse. J'avoue que je ne sais plus du tout comment m'en sortir.
Tina : tu n’aurais simplement pas dû t’y mettre, vu que tu perds toute rationalité quand il s'agit de lui. Là, tu passes pour quoi ? Nahia si tu ne connais pas ta valeur au moins fais-toi respecter ! (pause) De toute façon, c’est ta vie, tu la gères comme tu l’entends.
Moi soupirant : Tina ?
Tina : c’est vraiment ce que je pense, tu fais ce que tu veux de ta vie. Ne reviens juste pas pleurnicher dans mes jupons. Toutefois, je tiens à te dire que je suis déçue de toi, non pour ta bêtise, mais le fait de me l’avoir caché. Je ne suis pas seulement ton amie Nahia, toi et moi avons passé le cap de l’amitié. Sache qu'il m'est impossible de mettre fin à cette amitié comme ça du jour au lendemain parce que tu aurais commis une erreur, des erreurs nous en commettons tous. Ce n’est pas pour autant que je cesserai d’être ton amie ou que mon amour pour toi diminuera. Je ne suis pas là pour te juger, à la rigueur on se prend la tête deux minutes. Mais au delà de tout je suis ton amie, l'épaule sur laquelle tu peux toujours compter.
Awwwww !!!
Moi émue : je le sais babe.
Tina : on ne dirait pas pourtant ! Bref, tu viens au Chilling demain soir.
Moi lui jetant un coup d’œil : je suppose que je n’ai pas le droit de refuser.
Tina : ce n'était pas une demande.
Moi regard implorant : Tina ?
Tina (faisant la grimace) : tu veux te faire pardonner ou non ?
Je soupire.
Tina : et je tiens déjà à te prévenir que Bilal et sa femme seront là.
Moi arquant le sourcil : genre, c’est ma punition quoi ?
Tina haussant l’épaule : mouais, tu tolères Manaar n’est-ce pas ? Tu vas le tolérer lui aussi.
Moi : pfff !! De toute façon lui, je le gère. Bon j’ai quand même le droit de venir avec qui je veux ?
Tina ton ferme : je ne veux pas voir les pieds de Manaar sur mon paillasson.
Moi : qui te parle d’un homme ? (grimace de défi) Je vais former mon clan de célibataires aussi.
Tina riant : Zaïdia et Murielle ? (oui de la tête) lol le redoutable trio !
Moi (l’accompagnant dans son rire) : je vais renverser ton game là !
Tina : lol !
Khalil…
Je suis assis sur ma chaise au bureau, les mains croisées derrière la nuque en espérant un déclic pour commencer mon déménagement. J’ai décidé de lâcher prise et je dois dire que ce n’est pas de gaieté de cœur, mais il en va de mes responsabilités en tant qu'aîné. J’abdique afin d’augmenter les chances de Yumna à reprendre ses études. Je ne suis pas trop prêt à parier sur les résultats de ma démarche, mais si je veux éviter des conflits inutiles qui peuvent amener le vieux à prendre une décision radicale qui jouera en sa défaveur je n'ai d'autre choix que de me plier à sa volonté.
Cette agence, c’est ma plus grande réalisation, c’est la seule chose que j’ai faite dans ma vie qui en vaille vraiment la peine. Quand je pense à tout ce par quoi, je suis passé pour en arriver là, je n’ai pas du tout envie de cesser mes activités. Surtout que c’est pour passer d'employeur à employé pffff !!! Je ne me vois pas du tout être subordonné à quelqu'un bien qu'il s'agisse du père de mon meilleur pote qui est également comme un père pour moi. Je n’ose pas imaginer comment seront nos rapports employeur/employé parce que tonton Sharif, c’est le sosie du Cheikh et vous savez tous ici que ça finira en pétard tôt ou tard. Je n’ai jamais été porté sur la subordination, j’aime trop ma liberté. Mais bon je ne perd rien à essayer.
Je finis par rouler la chaise vers la bibliothèque et m’apprête à me lever pour commencer le travail lorsque la porte s’ouvre sur mes frères. Sitôt je me rassois et prends une mine qui se veut sévère avant de leur donner le dos, c’est Yumna qui prend la parole en premier.
Yumna : s’lut bigii ! Tu as le temps pour discuter ?
Moi (me tournant à demi) : nan, comme vous pouvez le constater.
Ussama : Khalil s’il te plaît.
Moi : ok mais soyez bref, j’ai d’autres chats à fouetter.
Yumna la petite voix : tu as une idée de quoi je veux parler mais le plus urgent c'est d'évincer Walter. Tu as toujours eu de superbes idées.
Moi : ah ça vous intéresse maintenant l’opinion du renégat ?
Ussama : rooooh Khalil ne soit pas si rancunier, on avait nos raisons.
Je tourne ma chaise et leur fais face avant de parler.
Moi posément : quelle bonne raison avez-vous à garder un secret aussi poignant ? (fixant Yumna) Quelle bonne raison peut justifier le fait que tu acceptes de mettre ta vie en péril ?
Yumna balbutiant : je… J’avais peur.
Moi : peur de quoi ou de qui ? Entre ta famille et ce détraqué qui devrait te susciter de l’effroi ?
Yumna la tête baissée :…
Moi retournant ma chaise : c’est bien ce que je me disais aussi.
Yumna : je suis désolée, je n’avais pas fait exprès de te pestiférer. C’est… C’est que…
Moi me retournant brusquement : c’est que quoi ?
Elle sursaute et baisse la tête, je soupire.
Moi calmement : ça m’a vraiment blessé que vous mes frères me faites un coup pareil dans le dos, je pensais qu’on devrait tout partager parce que selon moi en plus du lien de sang nous étions les meilleurs potes du monde ? Je croyais vraiment qu’on formait un bloc contre le monde entier dans le dur.
Ussama me coupant la parole : c’est toujours le cas bro.
Moi : ce n’est pas l’impression que vous m’avez donné.
Yumna : si c’est le cas, sauf que parfois, tu te montres trop dur envers nous du coup, nous avons dû former une imbrication de ce bloc.
Je me passe la main dans les cheveux avant de soupirer profondément.
Moi : loin de moi l’idée de vous offusquer. Comprenez juste que je joue mon rôle de grand frère. Parce que logiquement, après papa, c’est moi qui dois me charger de vous ramener sur le droit chemin, tout comme je vous soutiens et vous encourage à poursuivre vos rêves.
Elle vient se jeter dans mes bras suivis de prêt d’Ussama.
Yumna : je te présente mes excuses, je promets de ne plus le répéter.
Moi : c’est bon, j’ai compris ! (ils m’étreignent encore plus.) Lol ne m’étouffez pas ! Ussama ta barbe !!
Ils se décollent et nous partons dans un fou rire.
Moi (quand le calme revient) : maintenant dites-moi en quoi puis-je vous être utile ?
Yumna : on veut, enfin je veux que tu me sauve la mise auprès de papa.
Moi me levant : je m’en doutais bien ! (sourire espiègle) Alors mettez-vous au travail.
Ils froncent la mine.
Moi : vous rangez tous dans (désignant les cartons contre le mur) ces cartons et vous les convoyez ensuite dans mon archive à la maison. Vous vous chargez vous-même du transport. Mon assistante vous apportera un coup de main. Et je lui demanderai de veiller au grain à ce que le travail soit fait par vous même.
Ussama : tu es sérieux là ?
Yumna écarquillant les yeux : tout ça ? On ne finira jamais !
Moi me dirigeant vers la porte : tu veux finir tes études ou pas ?
Ussama : et moi ? Je n’ai rien fait moi !
Moi rictus moqueur : j’ai cru comprendre que c’était ton associée !
Ussama : rhoo le grand ça, c’est de l’abus d’autorité.
Moi plaçant mes lunettes sur mes yeux : Tu connais même les termes juridiques hein ?? Vous avez jusqu’à 17 h pour m’envoyer le trousseau de clés au restaurant Singh.
Eux : hein !? Dans deux heures ?
Moi (fixant ma montre) : non dans exactement une heure cinquante-huit minutes. (revenant sur mes pas) Il y a les autres bureaux aussi.
Je referme la porte sans me soucier de leurs bouilles amarrées et vais rejoindre mes acolytes. On passe une bonne soirée comme d’habitude, ils me charrient un peu sur mon rapatriement. Les petits se sont débrouillés pour m’envoyer les clés, mais à dix-neuf heures. L’essentiel était que je n’avais pas eu à me taper ce boulot, c’est parfois bon d’être le grand frère hein lol. Les deux jours qui suivent se passent dans une humeur câline et gaie entre ma famille et mes amis, enfin sauf papa qui est resté inaccessible depuis sa confrontation avec Yumna. C’est tardivement le soir à la veille de mon départ que je vais le retrouver dans son bureau pour essayer de résoudre le cas de Yumna. L’accueil fut plutôt chaleureux et nous avons même eu à discuter brièvement de mon voyage.
Moi abordant le sujet : papa euhh maintenant que tout est réglé pour mon voyage, je voudrais que tu te penches à nouveau sur le cas de Yumna s’il te plaît. Elle n’a jamais été en mauvaise posture en dehors de cette histoire donc je pense qu’elle mérite une seconde chance. Je suis sûr qu’elle a compris la leçon, je…
Papa m’interrompant : je n’ai jamais eu l’intention de la retenir ici, ce serait du gaspillage avec tout ce que j'ai eu à investir dans ses cours. Il a juste fallu que je l'éloigne un tant soit peu pour pouvoir m'occuper entièrement de cet imbécile d'Américain. Je pense qu'il en a eu pour son compte.
J’ouvre la bouche et le regarde complètement sonné, weh mon père et ses méthodes !!
Moi simplement : ah ok.
Je sors les clés de ses appartements qui me servaient de bureaux.
Moi tendant ma main vers lui : voici les clés de tes appartements.
Papa : garde les, tu en auras peut-être besoin dans le futur.
Je rêve ou quelqu’un a pris possession du corps de mon père ce soir ? Bof autant partir dans cette atmosphère.
Je joins l’acte à ma pensée et me dirige vers la porte lorsqu’il m’appelle à nouveau.
Papa : fiston ! (je réponds.) Je veux que tu saches que tout ce que j’entreprends, toutes les décisions que je prends, c’est pour votre bien.
Je hoche lentement la tête et lui fait un petit sourire.