Chapitre 12

Write by sokil

Chapitre 12 :

Tout ce que je veux c’est dormir, et même ne plus jamais me réveiller ! je suis sous la couette, encore tremblante, cette fois ci la fièvre est revenue de plus belle, je profère encore des paroles sordides ; les enfants sont assis près de moi, ils me regardent et ne comprennent pas ; Enzo se met à pleurer parce qu’il me voit dans cet état ; maman les amène hors de la chambre, elle leur demande d’aller jouer avec grand père ; elle revient, et fait tout son possible pour me calmer, tente de me donner encore des remèdes que je rejette de toutes mes forces. Elle essaie de m’apaiser, elle n’y parvient pas, mais elle n’abandonne pas ; elle était avec moi, elle a tout entendu.

On nous a dit que Martin a posé sa démission il y a six mois, du jour au lendemain, on lui a même proposé d’autres avantages, un salaire plus consistant, mais il n’en a pas voulu ; on nous a dit qu’il a toujours été un très grand bosseur, on ne s’est jamais plaint lui, et qu’ils n’ont jamais compris pourquoi il a décidé de partir comme ça subitement. Il leur a juste dit qu’il fallait qu’il parte, qu’il a des problèmes de famille et qu’il est en plein divorce. En plein divorce !!!! Il y a six mois on avait certes des petits problèmes mais nous étions un couple tout à fait normal ! Et c’est même à cette période là qu’on parlait de se marier à l’Eglise ! On n’avait jamais parlé de divorce !!!!

-          Ma mère : Mama !! fais un effort ! bois les remèdes, ce n’est pas la fin du monde, je comprends que c’est dur pour toi ! mais donnes toi juste le temps de récupérer ! Tu dis que tu veux mourir que ça sert à quoi ? Martin n’en vaut pas la peine ! pense à aller de l’avant c’est tout ce qui compte !!!! Et je t’ai dit, il n y a que la prière ! Laisse tomber ; un jour, tu finiras pas avoir le cœur net ! mais pour l’instant, ce qui compte c’est que tu t’en sortes !

Les semaines qui ont suivies n’ont pas été paisibles pour moi, ni même pour ma famille ; j’ai fait une dépression nerveuse, on m’a conduite à l’hôpital ; j’ai mis près d’un mois à tenter de m’en remettre. Juste après, j’ai beaucoup maigri, fané, je me suis laissée aller, je n’ai plus eu goût à rien. La rumeur a commencé à circuler un peu partout dans la famille, comme quoi Martin m’a délaissée pour une autre, que Martin a voyagé pour une destination inconnue dans les bras d’une autre, qu’il s’est remarié, qu’il a fondé une nouvelle famille. Ca n’a fait que me tuer à petit feu ! Les gens viennent me rendre visite, je n’ai pas la force de leur expliquer quoi que ce soit, je laisse la latitude à mes parents de le faire, parfois je ne veux voir personne, je m’enferme dans la chambre pendant des heures, je n’en sors pas ! Je tente tant bien que mal de lire la bible, je me fais suivre spirituellement par un prêtre chez qui j’ai passé près d’une dizaine de jours, dans une espèce de foyer, dans le calme et la piété. Ca m’aide à me calmer un tout petit peu ; mais ce jour, c’est la date de notre dixième anniversaire de mariage, et c’est ce jour qu’on devait s’unir devant DIEU ; quel échec pensai-je !!! Je fais un effort pour ne pas flancher, et sur les conseils du prêtre je tente de prendre la vie du bon côté et ne je ne cesse de me répéter intérieurement «  Tout ce que DIEU fait est bon » ; ce n’est pas pour rien que tout ça arrive, alors je me dois d’avancer malgré les difficultés.

Après plus de quatre mois, Martin n’a toujours pas refait surface, il est introuvable ; on est passé à l’étape suivante ; Etienne m’a finalement contactée, il a fait un tour ici en ville et on s’est vus ; il a confirmé la disparition de Martin, mais il ne sait pas non plus où il est allé, il sait juste que son frère n’est pas mort, il en a la certitude; on a appris aussi que leur famille s’est divisée en deux blocs, il y en a qui savent où il se trouve et ne parleront pas et d’autres qui n’en savent rien du tout , comme Etienne. Après notre causerie avec lui, j’ai décidé de faire un constat d’abandon du foyer conjugal par un huissier, on a lancé un communiqué radio, il est question qu’on lance aussi un avis de recherche, mais ça demande trop d’argent, je n’ai presque plus d’économies, et en même temps je dois vivre. La maison est restée inhabitée, j’ai fait changer toutes les serrures ; personne, ni même la famille de Martin y vit ; un avocat nous a conseillé qu’il fallait d’abord qu’on ait la preuve que Martin soit vivant ou mort avant de se décider ; J’ai porté aussi plainte pour occupation abusive contre la famille de Martin dans notre maison, car j’ai reçu des menaces de la part de Guy, il avait l’intention, lui certains de ses frères, d’occuper les lieux ; ils faisaient constamment des tours là bas ; c’est donc  en stand by, la maison est fermée. Pour les effets, les meubles et tout je n’ai pas la preuve si c’est Martin ou sa famille qui les ont emportés.

J’essaie de me remettre tout doucement, ce n’est pas facile, je n’y parviens pas vraiment, je survie, chaque jour qui passe est comme un chemin de croix pour moi ; j’ai remarqué que lorsque je ne prie pas, surtout le soir, je suis persécutée, je fais des rêves bizarres, voire des cauchemars ; j’en ai parlé au prêtre, qui m’a dit que ça ne présage rien de bon, que je suis attaquée ou envoutée, il faut que je me libère de ça, et que l’image de Martin dans mes rêves dans cet état là veut sûrement indiquer quelque chose ; il m’a recommandé chez un prêtre exorciste, mais celui-ci ne réside pas à Yaoundé ; je dois m’y rendre coûte que coûte, car je n’en peux plus, même mon corps en subit les conséquences ; j’ai remarqué que des tâches sombres apparaissent sur tout mon corps, et elles ont commencé à me démanger, surtout lorsque je prie, tout mon corps se met à me gratter, je ressens comme des picotements. Je vis presque un enfer sur terre. Je ne sors presque pas de la maison, j’en ai tellement honte ! Je suis devenue l’ombre de moi-même, je veux tenter quelque chose, tenter de me relever je n’y arrive pas, je sens comme un poids sur mon dos, je peine à réfléchir, mon cerveau est tout le temps lourd, j’ai constamment la migraine.

Je suis si faible, je passe mes journées dans la chambre, heureusement que les enfants vont à l’école en journée, leurs scolarité avait été payée entièrement depuis le début de l’année ; ça me rassure, et d’ici là, j’espère pouvoir m’en sortir pour l’année prochaine ; mais je ne sais pas comment, je me sens tellement assaillie, je sens une force malsaine qui m’empêche de m’en remettre. Les séances de prières que nous faisons à la maison chaque soir m’apaisent un peu, mais ce n’est pas suffisant, je commence à douter.

-          Ma mère : Faut jamais parler comme ça ! Tu crois que si tu ne priais pas là on saurait comment que tu es touchée ? Le Seigneur nous guide et nous monte quel chemin prendre

Nous sommes sorties à cinq du matin, je suis avec ma mère, mes sœurs et une tante, la sœur à ma mère ; on a loué un taxi pour aller dans ce village où réside ce prêtre exorciste ; hier dimanche, j’ai fait une crise ; nous étions à la messe ; non seulement je fus prise de violentes démangeaisons, mais tout mon corps s’est mis à chauffer, et je suis tombée, j’ai perdu connaissance ; le reste aucun souvenirs, je ne reprends mes esprits que très tard dans la soirée, tout le monde est aux abois, tout le monde panique ; on me raconte ce qui s’est passé, je suis sidérée et je me mets à pleurer, je sais que je vais mourir, Martin est entrain de me finir tout doucement, il est parti, mais je ne sais pas ce qu’il m’a fait avant de s’en aller. Le père Cyprien, très réputé dans la zone pour ses séances de délivrance de toute nature nous attendait déjà ; en dehors de la chapelle, il y habite tout juste à côté et a même aménagé des petites chambres pour les patients, dont les cas nécessitent un long suivi. Tout le monde l’appelle « Padre », c’est son sobriquet ici, monsieur l’Abbé et tout ça là c’est trop long et trop conventionnel, avons nous finis par apprendre. On m’installe dans une chambre, elle est toute simple, avec un lit et juste une table, il y a un chapelet et une bible et quelques bougies, je comprends que il n y a pas d’électricité ; j’ai le cœur noué, je pense aux miens, j’ai peur, je ne veux pas qu’on me laisse ici, mais il le faut, ma mère et les autres restent avec moi pendant encore un long moment avant de s’en aller, j’aurai aimé qu’elles restent, je suis si triste, je pleure je serre la main de ma mère si fort, je ne veux pas la lâcher, je n’ai pas l’habitude, je ne sais pas m’en sortir seule, j’ai besoin d’elle.

-          Ma mère : On va rester avec toi toute cette journée, mais on va devoir partir, tu vas rester ici pendant tout ton traitement, comme a dit le « Padre » ; il le faut c’est important, aie confiance en DIEU mama !!! ça va aller ! sois forte aussi !

-          Moi : Mais… Comment ? J’ai trop peur ! Je ne peux pas dormir ici seule, il vaudrait mieux que je rentre et qu’on revienne juste pour me soigner… je ne…

-          Ma mère : On ne peut pas, car on ne sait pas combien de temps ça prendra, et on ne peut pas faire des allers-retours constamment, ça prends beaucoup d’argent. Supportes, nous allons revenir le week-end prochain !

Ma mère a aussi mal pour moi, je le lis dans son regard, mais elle sait être forte, elle ne flanche presque pas ; mes sœurs quant à elles sont tout juste calmes, elles tentent aussi de me réconforter comme elles peuvent. Avant que les miens ne s’en aillent, Padre m’a consultée, on lui a briefé un peu mon histoire et tout ce qui s’en est suivi par la suite ; juste à côté des chambres, il a aménagé une petite pièce, son laboratoire comme il aime bien l’appeler ; avec des chaises et une table, même décor, il y a une bible posée sur la table; il me demande de m’allonger sur la table et de poser ma tête sur la bible. Tout mon corps est parsemé de sel et d’huile bénis ; Je ressens les mêmes sensations de brûlure et de chaleur, mon corps est prit de spasmes pendant un bon moment, j’entends tout le monde s’activer dans les prières et les chants, il a posé une grosse croix sur mon front ; je suis toujours consciente, il m’interroge, me parle me demande qui je suis, aucune réponse, le rituel dure pendant près de vingt minutes, aucun résultat ; il ne semble pas paniqué. Je me relève.

-          Padre : Elle est bien envoûtée, elle n’est pas possédée, mais ce n’est pas si grave !

-          Ma mère : Comment ça ? Qui en est l’auteur ? Son mari ?

-          Padre : Je ne peux pas me prononcer pour le moment, mais c’est lié à son mari, lui-même n’est pas épargné, mais il est invisible…

-          Ma mère : C'est-à-dire ?

-          Padre : On à du mal à le cerner, comme vous m’avez expliqué qu’il a disparu depuis un bon bout, même ici aussi, il n’est pas visible, ce n’est peut être pas lui l’auteur,  il a sûrement voulu servir de « pont » avant de disparaître, mais je ne peux le confirmer, on va voir d’ici là comment les choses évoluent.

Je suis complètement dans les vap’s, j’ai envie de dormir, on me ramène dans la chambre et je m’endors ; à mon réveil, elles ne sont plus là, ma mère et les autres, elles sont parties ! Je me sens mal et je repense à la conversation avec Padre. Martin est lié a tout ça pensai je, mais on ne sait pas si c’est lui l’auteur de mon envoûtement, Qui est ce alors ? Je pense directement à ses gens, rien à faire ils sont passés par lui pour m’atteindre, ils m’en veulent à mort, je pense directement à Magguy, à son séjour chez nous la dernière fois, je suis persuadée que c’est elle ; et Martin s’est laissé faire, il n’a pas pu les empêcher ; ils en ont après moi, ils veulent tout simplement me finir. La nuit avant de m’endormir, Padre m’impose les mains, et je me couche. Le lendemain, on me réveille, il y a messe à 6h ! Plus tard en journée, mes parents me passent un coup de fil, ils prennent de mes nouvelles et m’encouragent.

Ca fait une semaine que je suis ici, je m’accommode petit à petit, au début c’était très difficile, j’avais peur, surtout la nuit,  il n y a pas d’électricité, heureusement qu’il y a d’autres patients juste à côté de ma chambre, je ne me sens plus trop seule, on se côtoie et on partage nos histoires, ça m’encourage à aller de l’avant. Une nuit, Padre a oublié de m’imposer les mains avant de m’endormir, j’ai fait un rêve où j’ai vu Martin, il était comme emprisonné, pris au piège de je ne sais quoi, il avait toujours le même visage décomposé, cette fois ci, une partie de son corps était en décomposition, il portait une chemise blanche et un pantalon de la même couleur, mais déchirés et en partie brûlés par les flammes qui se consumaient autour de lui, il était pieds nus, et il ne tenait pas sur place car sur le sol il y avait des braises, ça le brûlait et il gesticulait en sautillant, ses mains avaient été attachées mais les chaines ont été rompues …. Je me suis réveillée en sursaut, il était près de quatre heures du matin. J’en ai fait part à Padre le matin. Il est resté silencieux, il m’a juste dit  que c’est bon à savoir et que c’est sûrement les effets de mon traitement ; on a continué nos séances, beaucoup plus les séances de purification, car il fallait expulser les ondes maléfiques qui me perturbaient.

Je recouvre progressivement des forces, je me sens plus légère ; je viens de passer dix jours là chez Padre, je me sens en forme, tout ce que je ressentais les douleurs, les démangeaisons, les sensations de brûlure et surtout ce poids lourd qui m’empêchait de réfléchir, tout a disparu ; je recommence à garder espoir. Je suis rentrée à la maison, j’ai beaucoup appris de mon séjour là bas ; j’ai fini par découvrir que Martin non seulement est parti, mais il est pris au piège, dans un gouffre lui aussi, il a du faire ou toucher  à quelque chose de pas saint, et se sentant en danger, il fallait qu’il disparaisse, au point de tout laisser derrière lui, femme et enfants. Ayant avec lui des alliés, peut être sa famille, lui aussi doit être en danger de mort.

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