CHAPITRE 12 : La mise en œuvre

Write by delali


Trois jours passent sans qu’Assita, la mère de Kady, ne lui adresse la parole. Assita est une femme « traditionnelle », très peu instruite mais qui est dotée d’une grande intelligence. Âgée de 35 ans, elle est issue d’une famille très conservatrice également. Elle ne sait d’où donner de la tête ni quoi penser par rapport à ce qui se passe avec sa fille. Elle s’en veut elle-même, elle s’en veut de ne pas avoir assez surveillé sa fille. D’ailleurs c’est ce que son époux dira quand il apprendra ce qui est arrivé. Il faut donc qu’elle trouve une solution, parce que cette situation c’est le déshonneur pour la famille. Et surtout le malheur pour elle dont la fille aînée est tombée enceinte avant le mariage religieux. Elle risque même d’être répudiée par son époux et cela au grand plaisir de ses coépouses. Qu’est-ce qu’il faut donc faire ? La seule solution qui lui vient en tête, c’est de la faire avorter. Mais, elle en a peur, vu qu’elle a elle-même perdu une cousine par la faute de l’avortement. Alors elle craint pour la vie de sa fille. Elle est prête à tout pour éviter le déshonneur, mais surtout pas à aller risquer la vie de sa fille. Pendant ces trois derniers jours, elle n’a fait que réfléchir, et pense avoir trouvé une échappatoire. Très tôt le matin du quatrième jour, avant même le premier chant du coq, elle réveille sa fille :
- Kady, tu sais, si je le pouvais, moi-même je t’ouvrirais le ventre et te retirerez ce bâtard que tu as dedans….
Kady est frappée d’une grande frayeur, elle n’a jamais vu sa mère dans un état pareil. Sa mère continue :
- Je vais te poser des questions et tu vas me dire la vérité.
- Ok, maman.
- Depuis combien de temps tu n’as plus tes règles ?
- Deux mois.
- Qui est ce qui t’a engrossée ?
- Il … il s’appelle Christopher… Christopher SANDOL-ROY.
- SAN quoi ? Il est de la même tradition que nous ?
- Non…
Assista se tient la tête, et constate qu’elle n’est pas encore au bout de ses peines :
- C’est un élève comme toi ?
- Oui… non ! Lui, il est étudiant et a presque finit, il va bientôt s’installer…
- Bientôt ?! Bientôt ?! Tu crois que ta grossesse va durer une éternité ?!
- Il m’a dit de ne pas m’inquiété maman.
- Ah oui ? il est prêt à t’épouser ?
- Je… je ne sais pas.
- Idiote !!! A te faire engrosser par le premier venu ! J’espère que tu sais ce qui t’attend ! Ton père risque de nous mettre dehors toutes les deux. Laisse-moi te dire que ça ne va pas arriver, alors tu vas faire ce que je te dis.
- D’accord maman.
- Je vais dire à ton père d’accélérer ton mariage, comme ça, personne ne saura que tu es enceinte. Et tu feras passer cet enfant pour celui de ton mari.
- Quoi ? Mais je ne peux pas ! Répond-t-elle horrifiée.
- Et pourquoi ?
- C’est l’enfant de Chris !
- Et ce Chris machin chose, il va t’épouser ? Même s’il le veut, il ne peut pas, parce qu’il est étudiant, et il ne pratique pas la même religion que nous, alors ton père ne voudra jamais.
- C’est … c’est … ça va se savoir maman.
- Si tu évites d’ouvrir ta grande bouche comme tu le fais actuellement, personne ne le saura.
- Maman !!! ...Chris…est... il est métis, son père est blanc.
La mère est bouche bée, et croit que tout espoir est perdu. Elle manque même de s’écrouler suite à un vertige :
- Mais maman, il a dit de ne pas m’inquiéter, qu’il allait trouver une solution.
- …Je veux rencontrer ce jeune homme, et parler aussi à ses parents. Personne dans la famille ici ne doit être au courant ! Tu m’entends ???
- Oui maman.
Plus tard dans la matinée, Kady organise la rencontre. Elle se rend chez Christopher avec sa mère. Celui-ci les accueille chaleureusement avec l’aide de maman Claudine. Il fait tout pour témoigner sa bonne foi à la mère de Kady. Mais celle-ci n’est toujours pas apaisée vu qu’elle ne trouve pas encore de solution apparente à son problème, celui de faire faire les choses comme il le faut à sa fille :
- Donc c’est toi qui a engrossé ma fille ?
- Oui. Répond-t-il un peu intimidé
- On ne t’a pas appris les bonnes manières ? On ne t’a pas appris qu’une femme ça se respect et qu’il ne faut pas la déshonorer surtout à l’insu de ses parents ?
Christopher ne trouve rien à dire, il baisse la tête, puis elle continue :
- Mais après tout, ce n’est pas de ta faute, c’est cette idiote (en donnant une tape à Kady au niveau de la tête) qui s’est offerte bêtement comme si elle n’avait pas d’honneur !!
Christopher voyant sa petite chérie maltraitée, vient automatiquement à son secours :
- S’il vous plait maman, ne la frappez pas. Tout est de ma faute, je ne … croyez-moi, je veux faire les choses comme il faut maintenant.
- Humm ! Vous croyez que c’est de l’amusement. Où sont tes parents ? Dis-leur que je veux les voire.
Pendant que Christopher essaye de faire venir ses parents pour qu’elle puisse parler avec eux, Assita retourne à ses pensées. Vue le genre de famille à laquelle appartient ce jeune Christopher, c’est sûr qu’ils refuseront que leur fils se convertisse à sa religion à elle.
Christopher fait tout pour joindre son père, mais ce dernier lui apprend qu’il est très pris par son travail, et que dans ce cas, sa mère viendra pour s’entretenir avec Assita la mère de Kady. Celle-ci arrive et Christopher s’empresse de faire les présentations :
- Ravie de faire votre connaissance madame Assita.
- Moi aussi. Répond la mère de Kady d’une langue mal assurée.
- S’il vous plait les jeunes, laissez-nous seules, on va parler entre grandes personnes. Mais toi Chris, tu m’attends dans ta chambre, TOUT SEUL ! Claudine ?
- Oui Madame !
- Veilles-y s’il te plait.
- Ok, Madame.
Une fois hors du salon, et que les portes ont été fermées, maman Claudine sait qu’elle ne peut rien faire pour empêcher les amoureux d’être ensemble :
- Viens dans mes bras ma puce. Dit Christopher à Kady.
Il l’enlace et l’embrasse :
- Pitié les enfants, ne vous faîtes pas prendre sinon j’aurais des problèmes moi ! lance-t-elle avant de disparaître dans la cuisine.
- T’en fais pas d’accord, avec mon père on va trouver une solution.
- Ta mère ne m’aime pas on dirait, t’as vu comme elle me regardait ?
- Mais non, c’est parce qu’elle ne te connait pas encore. Laisse-lui du temps, ok ?
- Ok… suis tellement contente d’être dans tes bras…
- Humm….
***
Le soir même de ce jour, tard dans la soirée, Gabriel SANDOL-ROY, a fini par rentrer à la maison. Il fait venir son fils Christopher dans son bureau pour lui annoncer une nouvelle qu’il a tant attendu. Le seul souci est que la nouvelle ne lui fait pas l’effet qu’il a espéré. Christopher a comme un boulet dans la gorge qui l’empêche de jubiler. Il se sent comme un lion en cage, à qui on ne laisse pas beaucoup de choix :
- C’est la chance de ta vie Chris. Accepte cette proposition et pars lancer ta carrière, celle dont tu as toujours rêvé…
- Je le veux bien papa, je le veux…
- Tout est déjà prêt là-bas, le matériel, le personnel, et tout ce qu’il faut autour pour lancer en ton propre nom. Il te suffit juste de signer le contrat.
- C’est oui papa, je suis d’accord. Quelles sont les dispositions à prendre pour signer le contrat ?
- Tu dois regagner la Suisse demain au plus tard, c’est là-bas que tu signeras le contrat.
- Quoi ?! Demain ? je ne peux pas le signer ici ?
- C’est là-bas que tout se trouve mon garçon, ton nouveau poste, ta nouvelle vie. Bien sûr j’ai reçu une copie du contrat, mais l’original est avec tes partenaires, et il faut qu’on y aille.
- On ?
- Je viens avec toi. Moi non plus je ne m’y attendais pas, la nouvelle m’est parvenue tout à l’heure au bureau, juste avant mon départ pour la maison.
- …Mais papa, …et Kady dans tout ça ? Elle est enceinte de moi. Dit-il tout doucement.
- Si tu ne pars pas, tu rateras la chance de ta vie, et ne compte pas sur moi si tu t’obstines.
Christopher tourne sur lui-même, est ce qu’il a le choix ? Il est obligé d’abandonner Kady. Elle ne lui pardonnera pas cela, parce qu’il lui a promis le contraire. Qu’est-ce qu’il doit faire ?
- La route est longue Chris, je préfère qu’on rejoigne Abidjan par la route avant d’embarquer pour notre vol.
- Je peux lui dire au revoir au moins avant de partir ?
- On n’a plus de temps pour ça Chris ! Je dis au chauffeur d’apprêter le véhicule. Il est déjà très tard et on part dès l’aube.
- Mais papa, je peux pas partir comme ça ! Comme un lâche ! Comme si elle n’était pas enceinte de moi ! Tu ne m’as pas donné une pareille éducation. Non papa, je refuse de faire ça !!!
Son père reste silencieux et l’observe pendant quelques secondes, puis s’avance vers lui et le prend par l’épaule :
- Je devrais me mettre en colère contre toi pour ce refus, mais chose curieuse, ça me rend fier de toi. Non seulement cela prouve que tu aimes cette fille, mais surtout que tu es devenu un homme responsable. Je suis fier de toi mon fils. Mais pour l’instant, tu ne peux rien. Le mieux que tu puisses faire, c’est de saisir cette opportunité, de travailler dur et de revenir la chercher si tant est que tu tiens toujours à elle… pour cette grossesse, je t’avais dit qu’il fallait l’interrompre, vous avez tout le temps devant vous…
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