Chapitre 21

Write by WumiRa

« Les gens ne voient que ce qu'ils veulent voir »



- Elle t'a menti.


- Rachel ne m'a jamais menti. Ce n'est pas toi qui va m'apprendre à la connaître.


- C'est vrai qu'elle est à féliciter, pour avoir su cacher son jeu.


Excédé, il voulu sortir, quand elle l'arrêta en plaquant ses deux mains sur son torse. 


- Sur ce coup c'est moi qui suis censée me mettre en colère, mais après ce que je viens de découvrir, j'ai pitié d'elles, toutes les deux. L'une qui crie ouvertement à qui veut l'entendre que tu lui appartiens et l'autre qui se déniche un fiancé, rien que pour le fait qu'elle te tourne autour ne se fasse pas voir. 


- Il n'y a que toi pour décider que toutes les femmes de mon entourage sont raides dingues de moi.


- C'est exact. Parce que je suis une femme et que je sais reconnaître quand une autre convoite quelque chose. 


- Tu délires complètement.


- J'aurais dû me douter que Rachel n'était pas qu'une simple amie ou du moins qu'elle ne te voyait pas de manière totalement désintéressée.


Elle retira ses mains.


- Que tu ne me crois pas n'a plus aucune importance, déclara t-elle. Rien de ce qui s'est passé non plus, d'ailleurs. J'ai toujours su que le jour où l'irréparable se produirait, ce serait dans un but précis et là c'était parce que tu m'as cru partie avec un autre et que ton égo en a pris un sacré coup. 


Pour une fois, Malik reconnut qu'elle avait raison. Le simple fait de l'imaginer avec un autre et précisément avec Hamed qui s'était fait une réputation de coureur de jupons, l'avait mis hors de lui. Il n'avait pensé qu'à une chose : le lui faire payer, mais ensuite lorsqu'elle s'était laissée aller dans ses bras, il avait changé d'avis. 


De la manière la plus désinvolte, elle le dépassa et alla jusqu'à la douche. À son tour il retourna dans la chambre, consulta ses mails sur son ordinateur, avant de descendre au salon. Heureusement qu'ils étaient lundi, parce qu'il n'avait aucune envie de passer le reste de la journée en sa compagnie. Il se surprit même à vivement souhaiter qu'elle se fasse embaucher par Lincoln ou n'importe qui d'autre, l'essentiel étant de ne plus l'avoir dans les pattes, le temps de régler un problème qu'il n'aurait pas dû négliger : « Chrystal ». Elle risquait de nuire à ses projets, s'il n'intervenait pas vite. La veille, elle avait désespérément tenté de l'embrasser, alors qu'il lui demandait de quitter la soirée et de retourner à Rabat. Sur le fait qu'elle se soit entichée de lui, Maya avait raison, mais concernant Rachel, c'était absurde. Cette dernière n'avait jamais tenté quoi que ce soit avec lui jusque là, pourquoi serait-ce précisément, maintenant qu'il était "marié" ?


***


- Trouvez-moi un autre fournisseur, mademoiselle Basse. Si vous n'y parvenez pas, inutile de rappeller,  vous prendrez vos vacances plus tôt que prévu.


Debout sur la dernière marche des escaliers, Maya écoutait son mari menacer l'une de ses employés de la renvoyer. Il raccrocha brutalement et se leva.


- Je suis prête, lança t-elle, en quittant les escaliers.


Elle portait l'une des robes qu'elle avait eu l'intelligence de mettre dans ses affaires. Pour paraître plus professionnelle, elle avait enfilé par dessus, une veste Zara que lui avait offert Sonya à son arrivée et des escarpins - l'unique accessoire pour lequel elle était prête à dépenser une fortune.


Malik la jaugea du regard, mais sans le moindre intérêt. Il semblait préoccupé, froid et distant. Un tout autre visage que celui auquel elle avait d'habitude droit ; était-ce parce qu'elle allait malgré tout se rendre à cet entretien d'embauche ? Ce n'était tout de même pas comme s'il avait des droits sur elle, ils avaient couché ensemble et alors ?


Il sortit quelque chose de sa poche, une cravate - la même qu'il avait enlevée devant elle, dans son bureau, il y a quelques jours- et l'attacha soigneusement. Ensuite, il prit des clés sur la table et dit :


- Allons y.


Comme un automate, Maya le suivit jusqu'à sa voiture, réfléchissant à tout ce qu'elle allait pouvoir faire de sa journée, une fois l'entretien terminé. Son plan d'évasion était toujours d'actualité, mais après y avoir longuement pensé, il aurait été stupide de s'en aller, alors que d'un simple claquement de doigt, Malik pouvait changer leur situation financière, plus précisément celle de ses parents. Le mieux était d'attendre que ceux ci aient de quoi racheter les parts de Sylla, ensuite...


- Où est-ce que je te dépose ? 


Elle sursauta.


 - Lincoln-Prod, merci. 


Il mit le contact juste au moment où leur gardien ouvrait le portail, leur cédant le passage. 




Beaucoup plus tard, lorsqu'il la déposa devant son futur nouveau travail, Maya s'attendit à ce qu'il parte immédiatement, mais à son grand étonnement, il sortit de la voiture et la suivit à l'intérieur. Dans l'ascenseur, elle se tourna vers lui :


- Je n'ai pas l'intention de minimiser tes chances de te faire embaucher dans ce poulailler, la devança t-il.


- Dans ce cas, que vas-tu faire ? Tu ne me crois toujours pas quand je te dis que je n'ai pas reparlé à ce type ?


- Mais si. Raison de plus pour m'assurer que ce soit toujours le cas. Je n'aime pas les malentendus.


- Tu n'es pas jaloux, mais alors qu'est-ce qui te prend ? Si c'est pour te venger à propos de ce que j'ai dit concernant Rachel, je suis désolée, mais toi même tu as dit qu'il est le fils de mon futur patron et...


L'ascenseur s'ouvrit sur un couloir vide.


- Je serai forcément appelée à le revoir, murmura t-elle, en sortant la première.


- À moins que Lincoln ne décide subitement que tu n'es pas apte à travailler dans sa compagnie ?


Elle se retourna vivement.


- Ok, j'ai pigé, je ne m'immiscerai plus dans tes affaires, mais sérieusement tu n'avais pas besoin d'en arriver là. Maintenant, va-t-en. 


- Tu as honte de moi ? 


Elle s'approcha de lui et le poussa jusque dans l'ascenseur.


- Vu comment tu te comportes, oui, tu me fais honte. Au revoir, ciao ! 


Une fois que l'ascenseur se fût refermé, elle respira un grand coup, ajusta sa robe et avança d'un pas décidé vers le but de sa venue.



***


- Bonjour monsieur Sylla.


Malik répondit à la salutation de sa nouvelle secrétaire, d'un bref signe de tête, en se dirigea vers son bureau.


- Monsieur Fall vous attend depuis plus d'une heure, lança t-elle, en le suivant.


- Très bien.


- La réunion avec...


Il se retourna.


- Vous allez me poursuivre en récitant tout ce qu'il y'a sur ce papier ? demanda t-il.


Intimidée par la dureté de son ton, elle se confondit en excuses.


- Faites une liste des réunions auxquelles je dois assister et déposez-la sur mon bureau, ordonna t-il. Je ne vous paie pas pour vous apprendre votre travail.


- Oui, monsieur Sylla. Désolée.


Il continua jusqu'à son bureau et effectivement, Henri l'y attendait, patiemment. 


- Désolé d'avoir mis du temps, s'excusa t-il, de la manière la plus hypocrite. Je devais emmener Maya à ce qui sera probablement son nouveau lieu de travail, si tout se passe bien. 


Henri approuva d'un signe de tête.


- J'ai cru comprendre qu'elle tenait à travailler avec les Lincoln. Mais peut-être que vous auriez pu la convaincre de travailler pour vous ?


Malik s'assit et dessera sa cravate. 


- Elle a décidé que non, parce que ce serait du favoritisme. En tout cas, je respecte sa décision, du moment où elle en est satisfaite.


Non, du moment où il pouvait travailler en toute tranquillité, sans avoir à penser à son joli derrière, rectifia t-il mentalement. Des images de la nuit dernière défilèrent devant ses yeux et il dût faire appel à toute sa volonté, pour se concentrer sur Henri. Il se redressa sur son siège. Il avait l'habitude des femmes, ce n'était pas le fait d'avoir mis une de plus dans son lit qui allait lui faire perdre la tête ; sa trop longue période d'abstinence par contre, en était pour quelque chose.


- J'ai apporté le reste des documents, comme vous me l'aviez demandé, fit son interlocuteur.


- C'est parfait. Mais avant que je n'appose ma signature finale, je veux que vous sachez qu'elle est au courant que vous avez trompée votre femme.


- De quelle manière ?


- Elle m'a entendu vous parler au téléphone et pour que vous n'ayez pas de mauvaises surprises, je préfère vous prévenir qu'elle était très en colère et qu'à un moment, elle était d'accord pour que je me retire de l'HFL.


Henri blêmit.


- Peut-être qu'il est temps que vous leur disiez la vérité à toutes les deux ? 


- Ma femme ne me le pardonnera jamais, opposa t-il. Elle a des soucis de santé, je n'aimerais pas... Bref, je verrai quoi dire à Maya, mais il ne faut absolument pas qu'elle aille raconter ce qu'elle vous a entendu dire à sa mère. 


Son ton accusateur n'échappa pas à Malik, qui à chaque minute qui passait, se retenait de ne pas l'empoigner par le col de sa chemise, pour lui demander ce qui l'avait poussé à trahir la confiance de son père.


- Elle ne le fera pas, elle est très intelligente, dit-il. Vous avez beaucoup de chance d'avoir une fille comme elle.


Henri ne le contredit pas. 


- Elle est très différente des filles de son âge, mais si vous avez décidé de l'épouser aussi vite c'est sûrement parce que vous n'y voyez aucun problème.


- Je passe ma vie à résoudre des problèmes et Maya n'en ai pas un. La différence avec les autres, c'est qu'elle sait ce qu'elle veut. 


Surpris par ses propres paroles, il se ressaisit. 


Décidément, il ne tournait pas rond. « Qu'est-ce qui te prend, Mal ? » se demanda t-il. À quelle partie du plan était-il mentionné qu'il devait parler avec Henri Fall des "nombreuses" qualités de sa fille ? Il se souvint qu'en quittant la maison, plus tôt, il avait décidé de se concentrer sur ce qui lui tenait le plus à cœur, mais alors, pourquoi ses pensées revenaient-elles toujours à la même personne ? 


Il prit un stylo bille sur la table et ouvrit la chemise dossier qu'Henri lui remit en main propre.


- Tout est là ? 


- Vérifiez.


- Je vous fais confiance.


Comme son père avant lui.


Sans prendre la peine de lire, il signa à plusieurs reprises, puis dès qu'il eût terminé, il retourna les papiers à Henri qui signa à son tour. 


- Normalement, nos avocats auraient dû être présents, mais vu comment les choses ont été précipitées.


Malik le regarda plus attentivement. Il semblait soudainement plus vivant et moins soucieux qu'à son arrivée, nul doute qu'il était loin d'imaginer que c'était son arrêt de mort qui venait d'être signé.


- L'essentiel c'est que nous soyons parvenus à un commun accord, monsieur Fall. Dorénavant vous pouvez considérer que votre entreprise n'a jamais eu le moindre problème, toutes vos dettes ont également été payées.


- Je ne saurai jamais comment vous remercier. Vous n'avez pas fait que sauver ma situation, vous m'avez épargné la prison.


« Malheureusement tout le monde n'a pas cette chance » pensa Malik. La preuve, personne n'avait voulu croire son père, quand ce dernier avait été si injustement accusé de détournement de fonds du gouvernement et de trafic de drogue. Mais quoi qu'il arrive, justice serait faite, maintenant que tous les pions étaient en place. Chacun des torts causés aux Sylla allait être réparé, même s'il fallait que mort d'homme d'en suive.


- Ne me remerciez pas encore. Dormez et profitez de la vie.






L'histoire que vous lisez

Statistiques du chapitre

Ces histoires vous intéresseront

Sensuelle Ennemie