Chapitre 23 : Vous m'emmerdez

Write by Mayei

Chapitre 23 : Vous m’emmerdez

 

…Mawa…

 

J’ai repris le boulot aujourd'hui après une semaine d'absence. J’avais besoin de tout ce temps pour me remettre sur pieds et affronter cet individu qu'on appelle Richard. J’ai été très patiente et pas une seule fois je ne lui ai écrit pour demander quoi que ce soit. En lâche qu'il était, lui non plus n'a pas essayé de me joindre afin de donner les minables raisons pour lesquelles il a tout simplement disparu après m'avoir prise dans tous les sens possible la veille de mes supposées fiançailles. Je n'arrive pas à croire que j'ai été victime, moi, Mawa, de ce fameux "mougou pan" dont on parle dans la rue. Moi ! c'est moi qui d'habitude tourne les gars dans tous les sens. C’est moi habituellement qui dirige et donne les couleurs de la relation mais voilà que Richard avait osé me mettre à mal.

 

Les talons frappant très fort le sol de l’allée qui menait à mon bureau, je marchais avec toute l'assurance du monde. Je n'étais pas du tout pressée. À la pause j'allais très bien m'occuper du cas de richard. S’il pense que je vais laisser tomber, il se fourre le pied entier dans l'œil. Je posais mon sac sur ma table de travail et la porte s'ouvrit pour laisser passer monsieur Mahi, mon patron.

 

Mr Mahi : oh Mawa, tu es de retour ? tu te portes mieux ?

 

Moi : oui monsieur et merci de demander. Vous allez bien ce matin ?

 

Mr Mahi : on fait aller. Il y a beaucoup de dossiers qui se sont accumulés dû à ton absence donc j'espère de toi un travail rapide pour la mise à jour

 

Je savais que ce côté gentil du patron qui s'inquiétait trop pour son employée était trop beau pour être vrai. Il fallait automatiquement qu'il me bombarde de dossiers à traiter. En même temps qu'espérais-je ? monsieur Mahi n'était pas du genre à prendre une remplaçante même pour mon mois de congés à plus forte raison pour une semaine d'absence.

 

Moi : je vous dépose mon justificatif pour mon absence et je m'y mets automatiquement.

 

Mr Mahi : ce n'est pas la peine de me laisser la justification. Je sais que vous aviez vraiment besoin de repos. Bon je suis dans mon bureau.

 

Je ne sus pourquoi, mais le ton de sa voix me semblait un brin moqueur. C’était assez étrange mais je n'y accordais pas plus d'importance. Une fois bien installée, l'ordinateur démarré, et tout autour de moi prêt, j’allais prendre tous ces dossiers dont il parlait. Je travaillais dessus jusqu'à ce que la pause arrive et que mon patron s’en aille. Pour plus de sécurité, j'attendais environ dix minutes avant de quitter mon poste et me diriger chez Richard. Je le trouvais, le fauteuil retourné vers sa fenêtre en train de parler de façon très concentrée à je ne sais qui.

 

Richard : je serai avec toi ma chérie.

...

 

Richard : je sais ! je sais ! mais tu es une grande fille et tu sauras comment t'arranger.

...

 

Richard : t'inquiète tout se passera tranquillement ma chérie...tu ne sais pas combien j'ai hâte d'être avec toi. Les photos que tu as envoyées m'ont juste rendu dingue.

 

Au fur et à mesure que la discussion continuait je devinais aisément de quoi il était question. Un porc ne changera jamais. Il restera un porc toute sa vie. Je me raclais la gorge bruyamment pour signaler ma présence. Il se retourna et me vit. Je suis sûre que s’il était blanc, il aurait viré au rouge. Il serait rouge de colère car là maintenant je pourrais voir la vapeur sortir de ses larges narines qui, si nous étions coincés dans un ascenseur, prendrait tout le peu d’air dont nous disposions.

 

Richard : je te rappelle ma chérie. J’ai un petit souci à régler au boulot...oui je te ferais le transfert de sous dans pas longtemps

 

Il raccrocha et se leva de son siège.

 

Richard : QUE FAIS-TU DANS MON BUREAU ?

 

Moi (applaudissant) : bravo, bravo richard. Tu as droit à des ovations monsieur le meilleur acteur de l'année. C’est parce que tu as eu une nouvelle proie que tu t'es désisté ?

 

Richard : sors immédiatement de mon bureau

 

Je ne pris même pas la peine de prendre cette demande en considération.

 

Moi : moi ? vraiment l'homme n'est rien. Toi richard qui suppliait pour mon cul aujourd'hui tu me chasses de ton bureau

 

Richard : oui je te chasse. Je n'ai plus besoin de ton cul. As-tu besoin de remerciement spécial pour services rendus à l'état ?

 

Moi : j'exige une explication immédiatement. Te rends-tu compte de la honte que tu as déversée sur moi ? encore heureuse que mon père dans sa colère ne m'ait pas reniée. Une simple lettre, c'est ce que tu as remis au fils du voisin. Une simple lettre ! pourtant nous nous étions vus quelques heures avant. Tu as préféré me baiser que de régler tes comptes directement.

 

Richard : et ben ton père aurait dû te renier car ce n’est aucunement une fierté d’avoir une fille qui est réputée pour son mensonge. Estime toi heureuse d'avoir reçu qu'une simple lettre. Si j'étais venue de moi-même tu aurais eu encore plus honte. Je n'allais laisser aucun détail crois moi. Tu ne te sens même pas gênée de te présenter à mon bureau et exiger des explications. J’ai été plus que patient avec toi maintenant sors de mon bureau. Et de grâce si tu me vois quelque part, comporte-toi comme si tu ne voyais que le vent.

 

Toutes mes forces venaient de me quitter. J’avais imaginé cet entretien se passer d'une toute autre façon. Je m'étais vue avoir toute l'ascendance du monde sur richard et ce dernier se serait retrouver en train de bégayer, oubliant ses mots devant moi. Mais voilà que ce fut carrément le contraire. Encore une fois je me retrouvais couverte de honte. Ça ne pouvait pas se passer comme ça. Il fallait que je trouve une manière ou une autre de l'atteindre, de lui faire mal afin qu'il ressente cette douleur que je ressentais actuellement.

 

Richard : bon je vois que tu as vraiment envie de rester dans ce bureau. Je prends ma pause. Je te laisse le bureau quand tu en ressentiras le besoin tu pourras t'en aller.

 

Mes yeux ne le quittaient pas tout le temps qu'il prit pour saisir ses clés et ses affaires. Il sifflait un air musical en s'en allant. Mes jambes ne répondaient toujours pas mais mon cerveau, lui, tournait vraiment. Richard n'était ni beau ni séduisant. Tout ce que faisait son charme était sa poche. On dit souvent que l'argent peut rendre l'homme beau et c'était le cas pour richard. Il m'était arrivée de me demander ce que sa femme avait bien pu voir chez lui pour l'aimer autant. Il n'avait pas tout cet argent par le passé. Mes idées s'envolaient donc sur la parfaite façon d'acquérir ma vengeance. Je devais tout faire pour qu'il perde son boulot. Sans ce boulot et l'argent qui allait avec, il ne serait rien. Il n'aurait plus rien qui attirerait les filles comme des mouches. Et une chance pour moi, je bossais directement avec le boss de cette entreprise. Cette idée avait réussi à me remplir de cette force qui me manquait. Je quittais son bureau avec un sourire démoniaque, si je pouvais m'exprimer ainsi.

... ... ...

 

La nuit porte conseil avait-on dit. Cette nuit a été très bénéfique car j'ai pu très bien penser et peaufiner mon plan. Je finissais de me tenir prête pour le boulot et aujourd'hui contrairement à tous les autres jours, je mis une boite de mouchoirs dans mon sac. Cela faisait partie de mon plan. J’admirais ma tenue dans le miroir. Eh oui ! il faut toujours garder la classe même quand on part à la guerre. J’envoyais un bisou en air à mon reflet.

 

Moi : à nous deux, richard. Ce sera ta parole contre la mienne et les femmes sont toujours vulnérables. Nous verrons ça.

 

Richard pense qu'il peut m'avoir comme ça ? rira bien qui rira le dernier. Je me présentais donc à mon poste le visage très triste. Au bonjour de monsieur Mahi, j'avais répondu très timidement, moi qui habituellement suis très vive. Il dut remarquer le changement et marqua un arrêt en s'adressant à moi.

 

Mr Mahi : vous allez bien ?

 

Moi (timidement) : oui monsieur.

 

Mr Mahi : vous en êtes sure ?

 

Moi : je vais bien monsieur...je vais bien.

 

Mr Mahi : si vous le dites. Si jamais vous avez besoin de prendre votre journée, faites le moi savoir.

 

Moi : bien monsieur

 

Voilà, la première partie de mon plan était donc lancée. Certaine fois j'attendais que mon patron soit dans les parages pour me moucher le nez donnant l'impression d’avoir longtemps pleuré. Je me forçais même à le faire pour avoir les yeux rouges et la voix quelque peu brisée. À chaque fois qu'il prenait de mes nouvelles, je lui répondais que tout allait pour le mieux et qu'il n'avait pas à s'inquiéter pour moi ce manège avait duré de mardi jusqu'à aujourd'hui vendredi. Je lançais un énième mouchoir dans la corbeille lorsque le téléphone du boulot se mit à sonner.

 

Moi : allo ?

 

Mr Mahi : Mawa, venez s'il vous plait.

 

Moi : tout de suite monsieur.

 

Je le rejoignis dans son bureau et ce dernier me demanda de prendre place. Je m'assis donc en affichant une mine très triste

 

Mr Mahi : vous savez, je peux donner l'air d'un patron qui ne se préoccupe pas mal de ses employées ou encore qui ne se soucie pas de ce qu'ils pensent ou ressentent mais je reste humain. Toute cette semaine vous avez trimbalé cette mine triste et cette nonchalance. Toutes vos taches étaient effectuées de façon machinale sans grand enthousiasme. À chaque fois que j'ai voulu savoir si quelque chose vous tracassais vous m'avez répondu par la négative pourtant cela se voit sur vous que rien de va. Avez-vous besoin de plus de temps pour vous reposer ?

 

Moi : non monsieur

 

Mr Mahi : avez-vous des problèmes familiaux ?

 

Moi : non monsieur

 

Mr Mahi : vous désirez une augmentation de salaire ? je ne serai pas contre car votre travail est plus que satisfaisant.

 

Moi : ce n'est pas cela non plus monsieur

 

Mr Mahi : je ne voulais pas arriver à cette extrême mais étant votre patron j'exige que vous me disiez ce qui ne va pas.

 

Je souriais intérieurement. Telle était la deuxième partie de mon plan. Parler à monsieur Mahi. Je pris donc toute mon inspiration et avec l'air le plus triste du monde je me mis à expliquer mon "problème". Je devais me montrer plus que convaincante.

 

Moi : je ne sais pas si cela est le lieu indiqué pour parler de ce problème aussi personnel et de plus je n'ai pas envie que ce problème affecte votre opinion concernant certains employés ici.

 

Mr Mahi : voyons Mawa ! parlez donc je vous écoute.

 

Moi : à vrai dire j'entretenais une relation avec monsieur Ebrothié

 

Mr Mahi : de la comptabilité ?

 

Moi : oui tout à fait. Au début il ne m'avait pas avertie qu'il vivait avec une femme et des enfants. Le fait qu'il soit constamment disponible, peu importe l'heure, me réconfortais sur le fait qu'il soit libre. De fil en aiguille cette relation a continué jusqu'à ce que je découvre être enceinte de lui. C’est avec toute la joie que je lui annonçais cette bonne nouvelle. Seulement c'est là que débuta mon cauchemar

 

Je marquais un arrêt et fendis en larmes. J’étais moi-même surprise de mon talent d'actrice. Mon patron se dépêcha de me tendre sa boite de mouchoir dans laquelle je me servis pour nettoyer mon visage. Il me demanda de continuer seulement si j'étais prête. Après quelques minutes je me remis à lui conter l'histoire à ma façon.

 

Moi : monsieur Ebrothié est rentré dans une colère noire et a avoué qu'il avait déjà une famille. Dès ce moments tous ses appels n'étaient que des menaces. À chaque fois il insistait sur le fait que je me débarrasse de l'enfant...un avortement. Je ne pouvais pas car cela était contraire à mes convictions religieuses. Il venait jusqu'ici à mon poste me menacer et même avoir des comportements violents envers moi. La semaine passée c'est là que se produisit le drame. Il était venu chez moi très tard, à une heure à laquelle je ne l'attendais pas. Il m'avait prise par surprise et m'avait copieusement frappée. Ses coups étaient emplis d'une grande violence si bien que je finis à l'hôpital, transportée par mes voisines. Il était parvenu à ses fins car j'avais perdu mon enfant et mon corps était couvert d'hématomes. Voilà pourquoi j'ai pris toute la semaine pour récupérer. Je pensais être forte et surmonter cette épreuve mais à chaque fois que je le rencontre ici, sur notre lieu de travail, je me sens déprimer de plus en plus, sa présence me fait peur et m'empêche d'avancer.

 

Je finis mon monologue en me mouchant le nez. À voir le visage de monsieur Mahi, je savais que mon discours ne l'avait pas laissé de marbre. Il était touché et allait prendre une sanction.

 

Mr Mahi : vous êtes sûre que vous ne faites pas d'erreur ? il s'agit ici de monsieur Ebrothié ?

 

Moi : parfaitement monsieur...je sais que tout ce que j'ai dit parait gros mais c'est bel et bien la vérité monsieur.

 

Mr Mahi : vous savez Mawa, si vous êtes ici depuis tout ce temps, cela est dû à la qualité de votre travail. Je me suis dit que votre vie privée ne me concernait en rien sinon, croyez-moi, il y a quelque temps je vous aurais virée d'ici

 

Moi : pardon ?

 

Mr Mahi : vous m'avez bien compris

 

Moi : je ne vous suis pas !

 

Mr Mahi : d'abord séchez moi ces larmes de crocodile. Vous pensez que je ne vous ai pas entendue dernièrement parler à votre mère du fait que vous ne soyez point enceinte...de comment vous prévoyiez de piéger monsieur Ebrothié ? Figurez-vous que c’est moi qui ai averti ce monsieur de votre sombre dessein.

 

Je me sentais mal tout à coup. J’avais l'impression que mes poumons ne recevaient plus aisément l'air qui leur était indispensable

 

Mr Mahi : oui vous avez raison de faire cette tête car dès aujourd'hui vous venez de perdre votre emploie. Je ne peux pas continuer à confier mes dossiers les plus importants à une personne aussi manipulatrice et vile que vous. Qu’espériez-vous ? que votre tissu de mensonge me mène à virer monsieur Ebrothié ? videz votre table, les agents de sécurité vous assisterons afin de vérifier tout ce que vous prenez

 

En entendant cela, je me jetais carrément à genoux en tenant les chevilles de mon patron. Je lui demandais pardon intensément

 

Moi : patron je vous en prie ne faites pas ça. Excusez-moi c'est une erreur que j'ai commise. C’est le diable sinon je ne sais pas pourquoi j'aurais dit tout ça...

 

Mr Mahi : vous aurez tout le temps une fois chez vous de vous en prendre au diable.

 

Tout se passa tellement vite. Je le voyais prendre le téléphone et faire appel à la sécurité. Comme dans un rêve j'avais ramassé toutes mes affaires pour les mettre dans un carton et tout le long de l'allée je sentais les regards sur moi. D’autres sortaient la tête hors de leur bureau pour m'observer et ça chuchotait à mon passage. Le pire a été de rencontrer Richard sortant de l'ascenseur que je prenais pour quitter définitivement cet endroit. Je venais de perdre mon emploie. J’avais tout perdu à cause de cette maudite relation. Comme quoi, certains sont de passage dans votre vie rien que pour vous créer des problemes.

 

…Salomé…

 

Jamais au paravent je ne m’étais sentie ainsi. J’avais une forte migraine mais surtout la tristesse habitait mon âme.  Je venais de quitter le bureau de Pat ’Jo et franchement ce que je venais d’apprendre me surprenais plus que tout. Je plaçais avec sécurité mon sac à mon épaule et sortis héler un taxi. Il fallait que je rentre chez moi le plus vite possible. Cette heure n’avait rien à avoir avec l’heure à laquelle je rentrais habituellement mais il le fallait. Mon corps réclamait un long moment de repos afin de digérer cette nouvelle.

 

Après m’être assise confortablement sur la banquette arrière de ce taxi, je sortis mon téléphone et composais le numéro de Maxime. Comme ce matin, il ne décrocha pas. Je ne sais pas ce qui lui arrive mais il se fait de plus en plus rare et à ma connaissance nous ne nous sommes pas embrouillés dernièrement. Je tentais une nouvelle fois mais le résultat restait le même, pas de réponse. Tristement je remis mon téléphone au fond de mon sac et concentrais mon regard sur la route.

 

Tout s’embrouillait dans mon esprit, tout était confus. Je sentais les larmes se pointer mais les retins en me composant une mine plus que sereine. À destination, je tendis au chauffeur la somme qui couvrait cette course et pris les escaliers qui menaient à mon nouvel appartement. Il n’y avait personne. J’étais toute seule. Normal, il n’est que treize heures. Georges et Amandine sont à l’école et cette heure coïncide surement avec leur pause.

 

Je me servis un verre d’eau pour palier a cette soif qui s’accentuait de plus en plus. Alors que je me dirigeais vers ma chambre un bruit venant de la porte principale me figea sur place. Je pris peur et aussitôt me mis à imaginer le pire. J’avais ordonné à mon corps de disparaitre de la mais non, aucun effet. Je restais donc à regarder ce portail s’ouvrir pour laisser passer Amandine, habillée dans une toute autre tenue que son uniforme scolaire. J’étais tellement dépassée de la voir, en ce jeudi, habillée dans une robe lui couvrant à peine les jambes, maquillée comme jamais et trainant avec elle des sacs de courses. Ne m’ayant pas vue dès le départ, elle faillit tomber à la renverse en me croisant là dans le couloir.

 

Amandine : Sa…Salomé ? que fais-tu là ?

 

Moi : ça ne va pas chez toi ? c’est ta maison et tu me poses cette question ? la bonne question à poser ici c’est d’où tu sors alors que tu es sensée être en cours ?

 

Amandine : c’est que…en fait…

 

Moi : en fait quoi Amandine ? ce sont les problèmes que tu veux me créer dans cette maison. Tu veux que ta mère aille trainer mon nom partout dans les rues de Daloa en disant que je n’ai pas surveillé sa fille ?

 

Amandine (boudant) : je suis grande Salomé…

 

J’ai dû me faire violence pour ne pas la gifler lorsqu’elle me sortit cette phrase. Quand c’est pour les bêtises elle sait qu’elle est grande n’est-ce pas ?

 

Moi : c’est quoi tous ces paquets que tu tiens ? où as-tu pris l’argent pour ça ?

 

Amandine (effrontément) : je t’ai déjà dit que je suis une grande fille, je sais comment me procurer mes effets

 

Dans un excès de colère, je lui arrachais les paquets des bras et malgré son cri désapprobateur, je renversais tout à même le sol. En voyant toutes ces affaires, j’ouvris grandement la bouche. La qualité des affaires qui étaient versées au sol là me dépassait. Pour qu’amadine puisse se procurer tout ceci, il fallait qu’elle ait un compte assez garni et jusqu’à preuve du contraire c’est moi qui lui remets son argent de poche.

 

Moi (soulevant son sac Gucci) : Amandine c’est avec quel argent que tu t’es payé ça ?

 

Amandine : … …

 

Moi (criant) : Amandine je suis en train de te parler.

 

Amandine : Salomé je ne cherche pas les problèmes, laisses moi simplement passer avec mes affaires. Où je les prends ne te regarde pas du tout.

 

Moi : Amandine ! c’est dans ma maison que tu veux me monter sur la tête ?

 

Amandine : tu ne fais que dire ça “ma maison” “ma maison” elle est où la maison ? (Regardant un peu partout) le trois chambre-salon que tue loues dans l’immeuble là ? les autres ont de vraies maisons, des maisons basses, des duplexes ou des triplex. Ils ne paient pas le loyer chaque mois comme tu le fais parce qu’ils ont construit d’eux-mêmes. Ce sont ces personnes-là qui peut se taper la poitrine et dire “ma maison”. Tu n’as que l’appartement loué et juste pour ça on ne peut plus respirer.

 

Je regardais Amandine comme si je la voyais pour la première fois.  Elle parlait avec tellement d’assurance que je me retrouvais à être toute petite devant elle. Des questions fusèrent un peu partout. Qu’est ce qui pouvait bien se passer dans sa tête pour qu’elle puisse me faire un tel affront ?

 

Moi : c’est l’appartement mais c’est grâce à moi que tu es ici

 

Amandine : dans ce cas dis-moi en même temps de m’en aller car j’ai l’impression que cela te brule les lèvres.

 

Je restais debout, les mains sur les hanches à regarder Amandine ramasser ses affaires et se diriger vers sa chambre en se dandinant. Je la regardais jusqu’à ce qu’elle disparaisse. Moi qui pensais que cette journée était merdique et ben elle est bien pire. Je voyais déjà l’affaire se dessiner sous mes yeux. Je savais qu’un homme se cachait derrière tout ça. Je ne vois pas une amie lui offrir tout ça par simple amitié. Je vois déjà comment on va raconter que Salomé a pris la fille de Agnès et au lieu de l’envoyer à l’école comme convenu, c’est dans les bras d’un homme qu’elle l’a conduite jusqu’à la grossesse est apparue.

 

Je suis finalement sortie de ma torpeur. Je n’avais qu’une seule idée en tête. Je pris mon téléphone et composais le numéro de Agnès.

 

Agnès : Allo ?

 

Moi : Agnès c’est Salomé…

 

Agnès : oh Salomé comment vas-tu ?

 

Moi : je vais bien merci. J’appelle pour te dire de monter dans le premier car de demain pour Abidjan. Je te prendrais à la gare.

 

Agnès : il y a un problème ?

 

Moi : il faut venir chercher ta fille, elle et moi ne pouvons plus habiter sous le même toit.

 

Agnès : mais…

 

Moi : à demain.

 

Clic

 

...Linda...

 

Nancy : crois-moi ça marchera

 

Violette : vous êtes complètement folles.

 

Violette était pliée de rire après ce plan rocambolesque que Nancy venait d’élaborer. Mais bon je ne me perdais rien à essayer. Elle était tellement sure d’elle que j’espérais au fond de moi que ça marche vraiment. Nancy se leva et j’en fis de même. Elle dans sa voiture et moi dans la mienne. Nous avions d’abord conduit jusqu’à chez moi afin d’y laisser ma voiture et faire tout le reste du trajet avec elle. J’espérais vraiment que là où nous allions la personne que nous désirions voir était présente. Nancy conduisait toujours en me donnant les topos sur comment réagir, mais surtout comment simuler. Elle est trop drôle cette fille. Je me demande où elle tire toute cette imagination.

 

Moi : c’est la...je pense que tu peux garer juste là. Il y a d’autres voitures qui ont fait pareil.

 

Nancy ; ok pas de soucis

 

Nous quittions la voiture, nous présentant devant la porte. Cette fois il fallait se présenter au gardien, et indiquer la personne que nous étions venue voir.

 

Moi : dites-lui que c’est Linda s’il vous plaît.

 

A son retour, je poussais un souffle de soulagement en entendant qu’elle était présente. Nous avions été installées au salon. Nancy regardait un peu partout, faisant des commentaires drôles.

 

Nancy : attends ce ne sont pas les petites maisons hein

 

Moi : tu vas me tuer Nancy

 

Nancy : non toi-même regarde le sol ! Je me vois clairement même. Imagine un profond sommeil sur le sol là, c’est mieux que le lit.

 

Moi : ce sont les courbatures qui t’attendront

 

Nancy : laisses ça ! Des carreaux comme ça ne peuvent pas donner des courbatures.

 

Je souris à sa remarque puis nous entendions des pas dans les escaliers. Comme si nous pensions à la même chose, nous prîmes une posture plutôt sérieuse différente de celle qu’on avait un peu plus tôt. Les pas se firent encore plus prononcés et au bas de l’escalier nous vîmes madame Kalou avancer dans son boubou haut de gamme. Elle était fraîche comme on le dit. Elle s’approcha avec le sourire et nous nous levions pour la saluer.

 

Madame Kalou : oh Linda ça fait plaisir de te revoir

 

Moi : c’est réciproque ! je passais dans le quartier avec mon amie et je me suis dit pourquoi ne pas m’arrêter et faire un coucou.

 

Madame Kalou : ah c’est vraiment gentil. Tu me sauves de la solitude d’aujourd’hui.

 

Moi : je vous présente mon amie Nancy

 

Madame Kalou : enchantée Nancy

 

Nancy : enchantée madame.

 

Madame Kalou : vous aussi ! On ne va pas se lancer dans « les Madame ». Appelez-moi simplement Blanche ou maman si vous le voulez mais pas de madame.

 

Nous : d’accord maman

 

Elle prit place auprès de nous et somma la fille de ménage de nous envoyer des apéritifs.

 

Madame Kalou : vraiment qui s’assemblent de ressemblent hein. Vous êtes toutes les deux très belles. Comme Linda est déjà avec ce faux type de Nathanaël, si tu n’étais mariée Nancy, j’allais directement te donner à un de mes neveux.

 

Nancy (posant son verre) : oh comment savez-vous que je suis mariée ?

 

Madame Kalou (clin d’œil) : la bague ne passa pas inaperçue

 

Nancy : oh je vois, mai...

 

La sonnerie de son téléphone mis un terme à ce qu’elle voulait dire

 

Nancy : quand on parle du loup...c’est mon mari qui appelle. Je vais m’écarter un peu si ça ne vous dérange pas.

 

Madame Kalou : oh fais comme chez toi

 

Pour toute vérité, il n’y avait pas d’appel d’un quelconque mari. Tout cela faisait partie du plan. Après quelques minutes Nancy revint vers nous et annonça avec un air désolé qu’elle devait rentrer. L’histoire était que son mari venait de la joindre pour lui signifier que sa mère était présente à la maison. C’est là que tout se jouait. Tout allait maintenant dépendre de la réaction de madame Kalou.

 

Moi : je vais devoir m’en aller moi aussi. J’aurais voulu passer assez de temps avec vous mais je ne suis pas véhiculé et c’est Nancy qui me servait de chauffeur lol

 

Madame Kalou : ça peut encore s’arranger. Tu sais quoi ? Tu restes, on peut même passer toute la journée ensemble et j’appellerai Nath afin qu’il te dépose. Qu’est-ce que t’en penses ?

 

Moi : je ne sais pas trop, surtout par rapport à son emploi du temps

 

Madame Kalou : ne t’inquiète même pas un peu

 

Moi : dans ce cas ok

 

Nancy qui était dans le dos de madame Kalou s’était mise à me faire des grimaces pour savourer le bon déroulement de notre plan. Je dus faire un effort surhumain pour ne pas éclater de rire. Puis elle s’en alla me laissant la toute seule. Madame Kalou savait faire dans la conversation. Elle me raconta toutes les péripéties de Nathanaël lorsqu’il était petit et surtout comment il était attaché à sa maman Linda. Elle fit une blague là-dessus en disant que finalement c’est une Linda qui avait réussi à le calmer. Pourtant je savais très bien que c’était très plat entre lui et moi. Elle me posa des questions sur ma famille puis ce fut le moment de passer à ma troisième et dernière partie du plan.

 

Moi : pourrais-je utiliser les toilettes s’il vous plaît ?

 

Madame Kalou : oui bien sûr ! Laisse-moi t’accompagner.

 

En me levant je prétextais être soudainement prise d’un grand vertige. Je me rassis automatiquement en posant la maison sur mon front, les yeux fermés. Madame Kalou s’approcha de moi, alarmée.

 

Madame Kalou : tout va bien Linda ?

 

Moi : je...j’ai le vertige hummm

 

Madame Kalou : oh allonge toi un peu. Couche toi dans le fauteuil. Est-ce que tu as mangé depuis ce matin ?

 

Moi (me couchant) : pas vraiment. J’ai juste grignoté quelque chose.

 

Madame Kalou : il faut bien t’alimenter c’est très important pour la...

 

Elle ne termina pas sa phrase et changea de sujet en appelant la fille de ménage. Elle me demanda avec toute la douceur d’une mère ce que je voulais manger. Je n’avais pas envie de déranger la pauvre fille pour ce cinéma que j’étais en train de faire là. Alors je sortis de ma bouche le fait de vouloir des croissants. De toutes les manières j’en raffolais.

 

Madame Kalou : rose il faut monter dans la chambre prendre mon téléphone

 

Rose : bien

 

Une fois le téléphone apporté, je devinais aisément que c’était avec Nathanaël qu’elle parlait. Elle lui indiqua de rappliquer ici avec des croissants et des jus de fruits. Elle n’avait cependant pas une seule fois mentionné le fait que je sois là et je lui en fus reconnaissante. Telle que je connaissais Nath, s’il avait su que j’étais ici il aurait sûrement refusé de se présenter dans cette maison. Une heure s’écoula. Une heure durant laquelle madame Kalou me cajola au point que j’en ressentis une certaine culpabilité. La femme s’inquiétait vraiment pour moi. Elle me faisait penser à ma mère qui était en voyage. Je sais qu’à son retour mes oreilles vont chauffer lorsqu’elle saura tout ce qui s’est passé dans son dos. Tout à coup Nath apparut et marqua un arrêt en me voyant. Il me regarda intensément avec un brin de colère. Sur le coup j’eus envie de disparaître mais je n’étais pas magicienne.

 

Madame Kalou : donne-lui les croissants elle ne se sent pas bien là.

 

Il posa le tout devant moi

 

Nath : bon je vais y aller

 

Madame Kalou : y aller où ? Tu comptes la laisser toute seule dans cet état ?

 

Vraiment demandez-lui. C’est lui qui m’a mise enceinte non. Quand on est fâché on ne s’occupe pas ?

 

Nath : maman je suis un peu pressé, j’ai un ami dans la voiture que je dois déposer.

 

Madame Kalou : bon Linda part avec lui en même temps, tu mangeras les croissants dans la voiture

 

Moi (comme une petite fille) : d’accord...ça va un peu mieux même. Le vertige a disparu

 

Nath me regardait et je faisais celle qui ne voyait pas. Nous fîmes nos au revoir à sa mère et monsieur se mit à marcher devant me laissant très loin derrière. De toutes les façons on fera le trajet ensemble. En arrivant à sa voiture, qu’elle ne fut la surprise de constater que l’ami en question qu’il devait déposer était une femme assise à l’avant de la voiture. La colère qui m’habitait ces temps-ci réapparut très vite.

 

Moi : Nath c’est qui cette fille ?

 

Nath : monte et je te dépose chez toi

 

Moi : je t’ai posé une question

 

Nath : à laquelle je ne suis pas obligé de répondre

 

La fille : chéri qu’est-ce ce qui se passe ?

 

Oh là je n’ai pas pu supporter. Mon sang n’a fait qu’un seul tour. Je me suis précipité vers l’avant de la voiture en ouvrant la portière.

 

Moi : je ne sais pas qui vous êtes mais descendez immédiatement de la voiture de mon mari

 

La fille : pardon ?

 

Moi : vous êtes sourde ? Descendez de la voiture de mon mari et je ne compte pas me répéter une troisième fois.

 

La fille (regardant Nath) : qu’est-ce que c’est que tout ça ? Tu es marié ?

 

Moi : oui il est marié ma chérie et je commence à perdre patience. Descendez immédiatement.

 

Nath : Linda monte tranquillement que je te dépose.

 

Moi : jamais !

 

Il paraissait de plus en plus embêté. Il prit son portefeuille et en sortit des billets qu’il remit à la jeune fille.

 

Elle : c’est pour quoi ça ?

 

Nath : prends un taxi s’il te plaît

 

Elle : mais...

 

Nath : VOUS M’EMMERDER À LA FIN. PRENDS UN TAXI ET RENTRE CHEZ TOI. TOI LINDA MONTE DANS CETTE PUTAIN DE VOITURE IMMÉDIATEMENT.

 

Il n’avait pas eu à me le demander plus de deux fois. Je me retrouvais dans la voiture, la ceinture déjà mise sans savoir comment. Sa mâchoire était serrée et ses mains maintenant fortement le volant de sa voiture. Il démarra laissant la fille qui criait je ne savais quoi. Il était vraiment en colère et j’avais décidé de ne pas en rajouter une couche. Pendant ce cours moment j’ai cru comprendre ce que la femme de Dharan aurait pu ressentir en imaginant son mari avec moi. J’ai automatiquement compris sa gifle. Cette jalousie qui m’avait habitée en voyant cette fille, jamais je n’avais ressenti cette sensation. Je crois que lorsqu’on tient vraiment à la personne qu’on aime, nous n’avons aucunement envie de la partager avec qui que ce soit. Et c’était mon cas avec Nath. Je ne souhaitais point le partager et je m’en voudrais vraiment si nous n’arrivions pas à tout mettre à plat et essayer de repartir sur de nouvelles bases. Le chemin qu’il prenait était celui qui menait à sa maison et non la mienne.


 
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