Chapitre 25

Write by sokil

Jamal ! Je rêve ! J’ai vite fait de regretter pourquoi j’ai posé la question à haute voix alors que le judas, cette petite ouverture placée dans ma porte m’aurait tout simplement permis de le voir sans être vue, ni même être entendue.

- Quelle conne je suis des fois !

Je me rapproche plus près de la porte et je le vois, Jamal ; il a l’air si désespéré, il a les yeux rivés vers le sol et secoue la tête en permanence en guise de négation. Je finis par coller mon oreille tout près de la porte et je lui demande, d’un air très audacieux.

- Que viens-tu faire ici ? Et qui a osé te donner mon adresse ? Tu n’étais pas censé savoir où j’habite !

- J’connais bien l’coin …Ça n’a pas été difficile…Stp ouvre moi, nous devons parler !

- NOUS ? Tu bien NOUS ? Eh bien… NOUS n’avons plus rien à NOUS dire !

- Voilà pourquoi ça n’a jamais marché entre nous chérie ! Ta têtutesse légendaire…Ouvre moi !

- Va te faire foutre Jamal ! Et laisse-moi en paix !

- Ouvre moi je te dis… Tu n’as pas le droit de me parler sur ce ton ! N’oublies pas que je suis un homme !

- Et toi ? Tu viens d’oublier que je suis une femme de couleur ?

- Femme de couleur ? Mais tu déformes complètement mes mots ! Je n’ai jamais dit ça !

- Jamal ! Tu ferais mieux de t’en aller… Je ne t’ouvrirai pas !

- Tu ne peux pas me traiter comme ça ! Ouvre-moi !!! Tu entends ??? Ouvre – moi cette porte !!!

- Jamal ! Je ne traite plus avec toi… Vas et continues de toutes les entretenir ces autres femmes, ces filles avec qui tu te pavanes sans cesse !

- J’suis un homme ! J’ai des principes !

- Et moi, je suis une femme, une femme de couleur !

- Klariza tu es folle à lier ! Je venais te parler sans rancune !

- Eh bien ! J’ai pas besoin de ça, de t’entendre te parler… je n’ai plus besoin de ça ! Va-t’en !

- Tu vas me regretter un jour… Et tu sais de quoi je parle !

- C’est toi qui deviens fou ! J’ai besoin de tranquillité ! Si ce n’est que ça, je n’en mourrai pas !

- Dans ce cas, au revoir !

- Au revoir Jamal, et …Bon vent !

Jamal ne venait là que pour me narguer ; la preuve, en tant que finissant, il vient d’obtenir une très belle offre, dans une grande société de production. C’est ça qui a été à la une à l’école pendant plusieurs jours. Avec lui, c’est allé de mal en pis, au point de friser le harcèlement. Presque tous les soirs en rentrant, Jamal m’attends soit à la sortie des cours, soit à l’entrée de mon immeuble. Je commence à prendre la mesure de la chose.

- Jamal ! Pour l’amour du ciel, laisse-moi tranquille ! Nous n’avons plus rien à faire ensemble !

- Si… Nous pouvons faire des choses ensemble toi et moi ! J’ai enfin un travail, j’veux que tu sois mienne tu entends ?

- Désolée, ça ne rentre plus dans mes principes !

- Tu en as maintenant ! Des principes ! Pour une fois !

- Faut bien que je tourne la page !

- Écoutes maintenant que j’ai un travail, j’tenais à ce que tu le sache afin que nous puissions nous organiser par rapport à ça !

- Mais qu’est ce tu racontes ?

- Tu ne comprends pas c’que j’suis entrain de te dire ? J’parle en français pourtant !

- Je ne comprends rien ! Je te souhaite beaucoup de bonheur et de réussite, mais ça s’arrête là !

- Je n’ai pas envie de dire une connerie fâcheuse, mais j’te trouve très ingrate, tu le sais ça ?

- Attends une seconde ! Tu parles de quoi là ? Je vais te rafraîchir la mémoire…

- Le seul jour où j’ai demandé à ce que nous ayons une conversation sérieuse, vraiment très sérieuse parce ce que j’en avais marre de cette façon de vivre, d’être tout le temps mise sous les projecteurs parce que tu me critiquais sans cesse, tu me jugeais et tu trouvais lamentable que je fasse certains choix qui selon toi étaient immatures et parfois d’une bêtise… Combien de fois, Ô combien tu m’as traitée de bête, d’écervelée ! Je te passe pleins de détails, mais ce jour-là, je voulais te dire que j’aurai aimé que tu sois un peu plus compréhensif parce que j’en pouvais plus de vivre comme ça ! Et que m’as-tu répondu ?

- Moi ? Mais…

- Arrête… Que m’as-tu répondu Jamal ? Tu m’as même interrompue ce jour - là!

- C’était pour te faire comprendre que tu exagères !

- Non ! Tu m’as dit « Bon vent ! » Et tu t’es levé et tu es sorti ! Tu n’es rentré que le lendemain, tu ne m’as plus adressé la parole ! Tu découchais toutes les nuits, me laissant toute seule ! Tiens, je te passe les détails de la fois où je t’ai annoncé que ma mère serait là avec Rick… Que tu m’as-tu dit par la suite ?

- Tu délires complètement !

- Par la suite j’ai décidé de rentrer chez moi ! Tu n’as pas réagis ! Au contraire, moins d’une semaine plus tard tu as commencé à te pavaner avec des filles comme pour me montrer que tu es vraiment passé à autre chose, puisque les femmes de couleur comme toi tu n’en voulais plus ! Eh bien moi aussi je n’en veux plus !

- Tu tournes et détournes tous mes propos !

- Dans ce cas… Si tel est vraiment le cas, c’est moi qui suis folle !

- Voilà !

- Et comme je suis folle, je te dis merde !

- Tu vas le regretter un jour Klariza…

- Je préfère !

Je lui ai emboité le pas, il m’a suivie, m’a empoigné le bras et m’a collée brutalement contre le mur, tout ça en une fraction de seconde. Le fait de sentir sa respiration si forte contre mon visage, la façon dont il m’a pris la bouche de force, n’ont fait que me rendre plus qu’hystérique. En essayant de me décaler, j’ai voulu crier ; il a refermé tout bonnement sa main sur ma bouche et m’a fait signe de me taire…

- Chuuuut…. Tu te tais ! Tu dois m’obéir d’accord ? Tu me dois obéissance, je suis homme ! Et quand je te parle tu dois m’écouter…

- Lâche-moi ! Tu… tu me fais peur ! Lâche-moi s’il te plait !

- C’est ce que j’voulais t’entendre me dire… « S’il te plait »

Il a relâché son étreinte tout doucement. Pétrifiée et clouée sur place, incapable de faire le moindre mouvement, je me suis mise à trembler de peur et à pleurer… Jamal a continué ainsi à me parler.

- Je ne peux pas te faire du mal chérie ! Mais tu es têtue comme une mule ! Personne, je dis bien personne ne pourra te rendre dingue comme moi je l’ai fait avec toi au pieu ! Tu prenais ton pied avec moi, et tu adorais ça, je l’ai lu à chaque fois dans tes yeux ! J’te raccompagne !

Je me suis laissée faire ; comme téléguidée, je marche comme un robot ; le fait qu’il me tienne par la taille et qu’il me domine complètement me plonge encore plus dans un état d’hébétude au point où, je suis persuadée que le moindre faux pas de ma part sera très mal pris par lui. Je repense soudain à ce que m’a mère a vécu avec cet homme, Antoine ! Je me mets à sangloter discrètement et à prier de toutes mes forces qu’il n’aille pas jusque-là. Mon cœur bat tellement à la chamade que j’ai l’impression qu’il l’entend. Le fait de savoir que je dois coopérer par la force des choses me pousse dès cet instant à imaginer un scénario, comment me sortir de là… Rien, je ne vois pas d’issue ! Il m’a intimé l’ordre de me taire et de ne dire aucun mot déplacé ! Rien que son regard de chat persan m’a donné le tournis et fait comprendre qu’il est loin de rigoler… Je me mets à prier intérieurement… Nous sommes devant ma porte…

- Ok ! Tu rentres, et je veux que tu me fasses des promesses Klariza ! Aller ? dis-moi que tu regrettes tout ce que tu m’as dit ! J’veux te l’entendre le dire…

- Je… Je …

- Parle ! Dis un mot ! Ne me fais pas languir !

- Je regrette…Je regrette …

- C’est bien ! Passe une bonne nuit ! J’passe te prendre demain après les cours …Nous … Nous avons le droit d’avoir des projets ensemble ! Ce n’est pas parce que nous nous sommes brouillés la dernière fois que tu vas en faire une affaire du siècle ! J’suis un homme, et il peut arriver que j’ fasse des rencontres, mais sans grand intérêt… Tu es à moi ! J’te ferai découvrir un autre univers, tu vas devoir changer pour moi, devenir une autre personne, pour moi ! J’ vais t’enseigner des valeurs, une autre éthique morale… Tu ne mangeras plus la viande de porc par exemple, j’ai horreur de ça !

Il a parlé ainsi pendant plusieurs minutes avant de me laisser rentrer. Une fois à l’intérieur, j’ai fermé la porte à double tour…
J’en ai profité pour lui lancer des mots, à travers la porte.

- Tu… tu ne m’auras pas tu entends ? Tu … tu ne m’auras pas ! C’est de a folie ! Tu es malade dans ta tête…Je vais appeler la police !!! Je vais appeler la police !!!

J’ai porté plainte quelques jours après pour harcèlement, je suis restée cloîtrée chez moi pendant plusieurs jours. Mortes d’inquiétude, mes copines ont fini par rappliquer chez moi un soir après les cours.

- Tu as porté plainte ? C’est du harcèlement ! Me dit Coralie !

- J’ai porté plainte ! Ils m’ont posé deux ou trois questions sans trop me croire ! Ils sont convaincus que j’ai juste eu une prise de bec avec Jamal c’est tout ! Et… le pire c’est que ce Jamal, m’a menti sur toute la ligne ! J’apprends que son père est toujours en service au consulat de Bordeaux et vous savez quoi ? Ils bénéficient tous de l’immunité diplomatique ! Il en faut plus pour que Jamal soit accusé, il est presque intouchable ! Voilà pourquoi je ne sors presque pas !

- Mais c’est d’la folie ! Jamal c’est un malade ! Il faut avertir tes parents, ça vaudrait mieux ! Me suggère Jasmine.

- Mes parents ? Ils sont au pays ! Que peuvent-ils bien y faire ? Ils ne savent même pas que j’ai eu une relation avec lui, le fils de l’ami de mon père !

Je n’ai pas voulu mêler mes parents à ça, à en croire que toutes mes relations ont- elles toujours une fin psycho dramatique, ce qui les accablerait encore plus, ce qui désolerait ma mère, et même ma tante Claude, paix à son âme ! Je me retrouve toute seule, entrain de monologuer.

- Oh Tata ! Que dois-je faire ? Me revoila, encore face à mes vieux démons ! Jamal ne me laisse pas en paix ! Ça va de mal en pis, mon téléphone abonde de ses messages de menaces et certains soirs il vient frapper à ma porte et me lance des paroles méchantes, même les voisins alertés n’ont pu rien faire ! …Ok !ok ! Je sais ce qu’il me reste à faire… Je vais pas baisser les bras et pleurnicher comme une madeleine, je vais aller au bout de mes actions, et surtout ne pas lui montrer qu’il me fait peur, c’est une erreur ! J’ai compris !

Jamal a fini par se faire un peu rare ; j’ai pu sortir à nouveau et aller en cours par la suite, mais toujours dans la crainte de le croiser en chemin. Mais non ! Jamal a fini par disparaitre comme par enchantement. Il s’est tout simplement avéré que son père, étant mis au courant de ces agissements, aurait demandé à ce qu’on le mute dans une autre ville. Jamal aurait ainsi reçu pour instructions ferme de ne plus jamais m’approcher, du moins, de se trouver dans le même périmètre que moi. Je n’ai jamais su exactement ce qui s’est réellement passé afin que tout puisse jouer en ma faveur, si c’est la plainte que j’ai eu à déposer contre lui ou encore le fait que le père de Jamal ait été mis au courant. A ma connaissance je savais que mes parents n’ont pas été mis au courant de cette fâcheuse histoire, jusqu’au jour où Richard lui-même en personne, lors de son passage ici me surprenne…

- Eh bien ! Sur le plan scolaire, ma petite tu as toujours été si brave… Ce qui nous satisfait pleinement !

- Merci papa…Je fais de mon mieux, je me bats, même si ça a été très difficile pour moi, c’était très dur !

- Qu’est ce qui n’a pas été facile ? Les études ?

- Non ! Pas les études en tant que telles, mais les aléas de la vie, quelque chose comme ça ! Tata Claude qui est partie…

- Le décès de tante c’est autre chose ! Est – ce que la vie que tu mènes ici t’es inconfortable ?

- Non ! Ce n’est pas ça ! J’ai presque tout ce qu’il me faut ici !

- Alors sois plus claire ! Qu’est ce qui a été si difficile pour toi ?

- Euh… Mon fils me manque…

- Tu vois ton fils presque tous les six mois environ ; et tu sais qu’il est entre de bonnes mains et qu’il ne manque de rien ! Je ne comprends toujours pas pourquoi tu dis que ça n’a pas été facile ! Qu’est ce qui n’a pas été facile pour toi ?

- Ma vie… ma vie de jeune fille !

- Pourquoi ne nous as – tu rien dit ? Moi je peux comprendre que tu ne me dises rien, mais ta mère …

- Parfois je trouve que je n’ai pas besoin de vous mettre au courant de certaines choses que je pense que je peux gérer toute seule !

- Oui, mais … Alpha Moussa est mon ami… Le père de ton ex copain ! Il s’est confondu en excuses auprès de nous de ce que son fils a fait. Je l’aimais bien lui et je l’appréciais beaucoup jusqu’ à ce que nous apprenions par la bouche de son père que tu étais sa copine ! C’est ce que moi je te reproche !!! Ces petites cachoteries, ton espièglerie, je déteste ça ! Jamal a dit à son père que vous viviez sous le même toit comme un couple ? Mais qu’est-ce que…

- C’est une erreur… Je regrette ! J’ai fait une erreur !

- Je ne suis pas content de toi Klariza ! Sur ce point-là je suis très déçu, ta mère encore plus !

- Je demande pardon, j’ai fait une grosse bêtise !

- Tu as beaucoup de chance… Je ne prendrai pas de décisions radicales envers toi ! Moi, ce que j’aime c’est le dialogue, je prône cela depuis très longtemps ! Tiens, Sébastien, aux dernières nouvelles, est en prison ! Tu… tu te rends compte ? Il est père d'une fille et il est tellement irresponsable! Il va falloir que j’aille batailler pour lui ; sa mère n’y peut rien ! Je me demande si ça ne vaudrait pas la peine qu’il y reste pour un bon bout et qu’il purge sa peine. Mais moi je compte beaucoup sur toi, et j’espère que tu ne nous décevras pas davantage ! Il y a un temps pour tout ! Tu trouveras la bonne personne le moment venu ! Fais l’essentiel, concentre-toi sur l’essentiel !

- Merci, pour tes conseils, j’ai bien compris, c’est juste que…C’est gênant de parler de ce sujet avec toi !

- Alors, ta mère est là pour ça ! Je savais bien qu’il y avait un truc pas très net entre toi et ce Jamal ! Je vous l’avais bien dit ce jour-là, de faire gaffe !

- Je ferai désormais gaffe papa, je te le promets !

Deux bonnes années plus tard…

- Attention Klariza ! Fais gaffe ! Ne renverse pas toute la crème sur ta jolie robe !

- Ce n’est qu’un gâteau après tout ! Voilà, je le pose, ça y est, c’est bon !

Entre rire et éclats de voix, tout le monde s’emballe, tout le monde chante et crie à tue – tête, c’est mon anniversaire, je viens de souffler sur mes bougies, on applaudit.

- Un discours ! Un discours ! Aller !!! Tu ne nous a pas tout dit ! Tu nous dois bien ça !

- Vous êtes chiants à la fin !

Après avoir insisté, j’ai fini par craquer.

- Bon eh bien ! Merci chers tous d’être venus si nombreux à ma fête d’anniversaire et aussi comme vous pouvez le constater, je viens de terminer mes études, j’ai enfin obtenu mon diplôme, et je suis très ravie de célébrer ça avec vous (…) Pour le moment je vais commencer un stage, toujours à Toulouse, ma ville de prédilection, c’est là-bas que j’ai été retenue, on verra bien ce que va donner…

Tout comme le reste de ma promotion, chemin faisant, c’est chacun qui a pu trouver sa voie, son petit bonheur. Successivement, j’ai assisté au mariage de Jasmine et à la naissance de la fille de Coralie, cette dernière s’étant mariée un an plus tôt. Je n’ai fais que ça d’ailleurs, accompagner tous mes amis et connaissances vers une sorte de construction, voire d’agrandissement familial. Je ne peux pas dire que je me suis mise à envier tout ce monde, mais quelque part un sentiment immense de profonde solitude m’a très souvent envahie; j’ai pensé à mon fils, dont le père inconnu n’a jamais refait surface ; j’ai pensé à moi – même dont la vie sentimentale est devenue tellement complexe.

Avec la crainte de décevoir mes parents, je me suis donné pour objectif de ne plus me laisser aller dans ce sens au point où je n’ai fait que rejeter les avances de tous ces mâles, qui selon moi, n’ont l’audace de ne m’approcher que pour en tirer ne serait – ce qu’un certain profit. Il m’est arrivé d’avoir des petits coups de foudres par ci par là, de petites envies d’un soir, mais je me suis toujours ravisée à la dernière minute, je ne me suis jamais laissée emporter ; je n’ai plus eu le courage de m’ouvrir à qui que ce soit. Quelques jours avant mon départ pour Toulouse, je suis allée rendre visite à Coralie et son mari ; leur fille grandit bien, elle est si épanouie.

- Elle est très mignonne ta fille ! Avec ses petites fossettes ! Regarde comment elle sourit ! J’ai toujours pensé cela, qu’un enfant doit grandir en présence de ses deux parents ! C’est très important !

- Ouais ! J’suis d’accord avec toi ! Des nouvelles de Rick !

- Oui ! Tous les jours ! C’est déjà un homme… Tu sais ! Avec ce job à Toulouse, il pourra enfin me retrouver, j’ai hâte !

- Ah ça, j’te le souhaite de tout cœur ! Vivement que tu rencontres l’âme sœur !

- Oui … Plus tard !

- Plus tard ? Je ne dis pas que c’est une fin en soit ! Non, c’est pas c’que j’dis mais… mais, je les vois tous ces mecs tourner autour de toi ! Tu risques de passer à côté du bon selon moi !

- Qui ça ? Comment ? Pfff je ne vois personne, je ne veux pas les voir… je n’ai plus le temps pour ça !

- En même temps j’te comprends… C’est pas facile ! Aller ne t’en fais pas, je suis sûre que ta nouvelle vie à Toulouse sera fructueuse, je te souhaite beaucoup de bonheur et surtout que tu rencontres le grand amour !

- Ne me fais pas rire, merci quand même !

Et comme si cela ne suffisait pas, Christelle mon amie du Cameroun avec qui j’ai toujours gardé le contact, vient elle aussi de se marier, à peine enceinte de quelques mois. J’ai été contente pour elle et je lui envoyé ma petite contribution, et nous nous sommes parlées longuement au téléphone.

- Félicitations ma belle ! Un événement et un futur événement ! Je suis très contente pour toi !

- Merci ma chérie ! Tu me manques tellement, on se serait bien amusées ! Tu aurais été ma dame de compagnie !

- Je t’assure, ça me fait un pincement au cœur ! Mais promis, je compte venir là-bas très prochainement !

- Ah ça ! Il le faut ! Tu rates beaucoup de choses ici ! Hein ? Madame la mbenguiste !

- Laisse-moi seulement ! Je serai là ! On va bien rigoler !

- Je ne te dis pas alors ! Les amis de mon gars, de gros célibataires ! Mais il y a un là, je ne sais pas, j’ai envie de lui parler de toi ! Il est bien !

- Ohhh mama ! Laisse d’abord ! On verra ça après !

- Après comment ? Ce n’est pas le genre à vouloir s’amuser ! Il a un bon boulot, tout ! Il lui manque seulement une compagne… Tu ferais bien l’affaire ! En plus il voyage tout le temps !

- D’accord, mais je te préviens, ce genre de chose ne me préoccupe plus !

- Klariza, tu te bloques, je sens ça ! Je comprends que tu as peur, peur de revivre les mêmes traumatismes… Steve, ensuite Jamal…

- Steve j’en ai été presque traumatisée, même si je m’en suis sortie ! Jamal me harcelait tous les jours, il pouvait me faire du mal !

- Assia ma chérie ! Ca va aller ! Concentre-toi sur l’essentiel, le reste viendra !

- Merci ! Je vous souhaite beaucoup de bonheur et de réussite dans votre couple…Je descends au Cameroun dès que possible !

- Okay !!!

Mon stage se passe très bien, étant familière à la ville et surtout au milieu professionnel, je me suis très vite adaptée. La seule chose qui me hante dorénavant l’esprit, est celle de retourner au Cameroun et récupérer mon fils. J’y pense de plus en plus, j’en parle avec les miens presque tous les soirs.

- Écoute ! Tu viens quand tu veux, du moment que tu travailles déjà ! Organises toi ! Ton père est d’accord !

- Oui maman ! Je pense avoir atteint une partie de mes objectifs !

- Oui… Je suis très contente, nous le sommes tous ! Tu as su relever la pente ! Tu es très brave et nous sommes tous très fiers de toi !

- Merci !

- Je voulais aussi te dire que…Je ne t’en voudrais pas pour le reste !

- Je ne comprends pas !

- Je sais que tu es une femme et tu as des envies ! Je m’en suis voulu encore une fois d’avoir été un peu trop carrée sur les bords !

- Je ne te suis pas très bien maman ! De quoi parles-tu ?

- Personne n’est parfaite ! C’est normal que tu fasses des rencontres… Cette rencontre avec le fils de l’ambassadeur, Jamal, je t’en ai voulu après ! Je n’aurais pas dû ! J’aurais dû chercher à te comprendre ! Ça fait partie de ta vie aussi, de tes expériences ! Un échec sentimental ne veut pas dire qu’on n’est la personne la plus minable de toute la terre ! Il faut qu’on se parle, qu’on se fasse des confidences ! Je veux être comme ta chère tante Claude, t’écouter, te conseiller, te tirer les oreilles et après te les masser à l’immédiat ! J’aimerai que tu t’appuies une fois de plus sur mes épaules comme tu le faisais avec Claude ! Je pense qu’elle aurait aimé que tu le fasses maintenant qu’elle n’est plus là ! Je crois que ce Jamal, j’aurai dû rappliquer et lui donner non pas un, mais deux bons coups de pieds dans le derrière ! M’en fiche qu’il soit le fils d’un diplomate ou le fils de l’ami de ton père ! L’immunité diplomatique ! Mon œil !

- Maman… Tu vas me faire pleurer …Et rire en même temps ! J’ai besoin de toi, de Rick ! De cette chaleur ! Ça me manque des fois !

- Viens quand tu peux ma chérie… Mais…et ton travail ?

- Mon stage, je ne pense pas qu’il sera renouvelé ! J’ai postulé ailleurs ! Si c’est confirmé, je m’en irai sans réfléchir.

- Et c’est pour où ?

- Je préfère garder le suspense ! On attend !

Mon stage n’a malheureusement pas été renouvelé, je n’ai toujours pas obtenu de réponse de là où j’ai appliqué. J’ai envoyé mon dossier un peu partout, j’ai dû me déplacer à plusieurs reprises pour passer des entretiens, sans succès. Je suis remontée à Paris, dans l’espoir que là-bas je pourrai avoir plus de chances ! Richard m’a demandé de séjourner au château pour quelques jours avant de redescendre sur Toulouse. J’ai reconnu tout le monde, ou alors presque tout le monde m’a bien reconnue ! Martin l’éternel majordome et ses phrases toutes plaquées sur mesure ne m’ont plus impressionnée comme au départ.

- Bienvenue au Château de Chartes ….

J’ai dû l’interrompre.

- Oui ! Oui Je sais… Le petit déjeuner, le dîner et le souper sont servis tous les jours, à des heures régulières …

- Bien mad’moiselle !

- Et ma dame de compagnie n’est autre que …

- Céline !

- Céline ? Et Arlette ?

- Arlette ? Il y a fort longtemps qu’elle est partie ! Son Excellence n’admet pas les femmes en gestation…

- Je vois !

J’ai tout simplement acquiescé de la tête sans plus poser de questions, je connais bien toute l’histoire avec Arlette. A part ça, j’ai l’impression de tourner en rond et que rien ne mord. Je n’ai presque plus assez d’économies et le fait de vivre au château me permet de tenir. Pas question que je demande quoi que ce soit à mes parents, avec tout ce qu’ils ont toujours fait pour moi jusqu’ici, je pense que ce serait trop leur demander. Je pense sérieusement à trouver un job, n’importe lequel, pour pouvoir tenir.

Je passe un entretien le lendemain, et cette fois ci c’est le dernier me dis-je ! Après ça, j’ai bien l’intention de passer à autre chose… Il ne manquait plus que ça, que je le croise lui, et pire, que ce soit lui qui me reçoive et me fasse passer l’entretien. J’ai cru au rêver au départ, lui également… Jamal ! Il y a longtemps qu’on a levé l’interdiction pour lui de m’approcher… Assise en face de lui, il m’a à peine saluée et n’a fait que me parler avec beaucoup d’arrogance et de froideur, sans omettre de me « vouvoyer ». J’ai eu le temps de jeter un coup d’œil rapide sur sa table de bureau ; une photo de famille encadrée, le montrant lui et une femme, portant un bébé. J’ai observé son doigt et j’ai vu qu’elle brille son alliance. J’ai détourné rapidement mon regard…

- Bien ! Euh … Mad’moiselle… Nous vous contacterons ! J’ne vous promets rien !

- Merci !

Je me suis levée sans demander mon reste. En tournant le dos, il me rappelle, par mon prénom.

- Klariza ? Écoute… Viens, approche !

- Pardon ?

- J’suis vraiment désolé, mais nous ne pouvons pas te prendre, sincèrement !

- C’est pas grave !

- Ne m’en veut pas s’il te plait ! Ecoute ! J’ne suis plus le même, j’ai beaucoup changé ! J’ten ai voulu à mort ! Mais … tout ça c’est du passé ! J’suis devenu quelqu’un d’autre !

- C’est passé ! Moi je suis passée à autre chose ! La preuve, ils ont levé la sanction contre toi !

- C’est une très bonne chose… Est-ce que tu peux me pardonner ? J’suis sincère ! Pardonne-moi s’il te plait ! J’ai été bien con !

- Quoi ? Tu peux répéter ?

- Pour tout ce que j’ai fait, tout c’que j’tai fait subir ! J’avais l’esprit bourré ! j’ne me rendais même pas compte que tu avais juste besoin d’être aimée et appréciée à ta juste valeur !

- Jamal… Je suis une femme de couleur ! Et les femmes de couleur ça…

- Je sais ! C’est idiot, j’avais dit ça dans le feu de l’action, de manière spontanée, j’avais pris la grosse tête ! J’ai une vie de famille à présent, mon épouse est une femme… de couleur… Et j’ai beaucoup appris ! Comment va ton fils ? Rick ?

- Il… il va bien !

- Je suis content ! Tiens, si tu veux je peux te filer une ou deux adresses, l’une d’elles se trouve aux Etats – Unis, tu peux toujours essayer…

- D’accord ! Merci j’essayerai !

- Essaie, je suis sûr que ça va marcher … J’ai confiance !

Six mois plus tard, j’ai fini par m’installer aux Etats – Unis, mon fils est avec moi … Et par un bel après – midi, je le promène au parc, il tient un ballon ; subitement il l’aperçoit en premier et court vers lui. Assise sur un banc, je le vois venir, un large sourire au visage, il tient une énorme gerbe de fleurs en main…Rick s’écrie à tue-tête…

- Jamal !!! Tonton Jamal !!!

Je me lève tout en lui rendant le même sourire…

- Bonjour toi ! Me dit il.

- Bonjour toi ! Je lui ai répondu!

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