Chapitre 44

Write by Auby88

Aurore AMOUSSOU


Flashback


(...) Mon téléphone sonne à nouveau. Je n'y fais plus attention. Ce doit toujours être Femi.

Un quart d'heure plus tard, je reçois un message. Ce doit encore être Femi. Je suis bien curieuse de savoir ce qu'il m'a écrit.

C'est bizarre. Le message provient d'un numéro que je ne connais pas.


" Bonsoir Aurore. J'ai urgemment besoin de te parler. Où peut-on se voir ? Signé Paula KOUTON."


Quelle surprise ! Elle ? Qu'est-ce-que cela signifie ? Que peut-elle bien me vouloir ? Perplexe, je demeure.


Je suis tellement en colère que je décide de lui écrire : "Va au diable !" mais j'abandonne l'idée. En fait, cette Paula ne m'a rien fait. Ce n'est pas sa faute si Femi la préfère à moi.

Je relis encore son message, en me posant des tas de questions, puis je le supprime.


Le lendemain.

Tandis que je m'affaire à l'atelier, je reçois une visite surprise. Celle de ... Paula.

- Bonjour Aurore, fait-t-elle en déposant son sac à main sur ma table.

- Bonjour, réponds-je à voix basse en m'efforçant d'être la plus courtoise possible. Qu'est-ce que je peux pour toi ? Tu veux passer une commande ?

- Non, reprend-t-elle en me fixant.

J'évite son regard.

- Tu n'as pas répondu au message que je t'ai envoyé hier, alors j'ai décidé de venir ici pour qu'on discute.

- Comme tu peux le voir, je suis occupée.

Ses yeux parcourent la salle.

- Je sais que tu prépares un défilé, mais ce que j'ai à te dire est très important. Et cela ne te prendra que quelques minutes.

- Je n'aime pas … m'arrêter en plein travail ! réplique-je en continuant la découpe dans le bazin.

- Crois-moi, ce que je vais te dire conduira à un grand changement dans ta vie.

- Un changement, tu dis ! ricane-je. Mais ma vie n'est faite que de changements !

- Je …

- Ecoute, Paula, je vais être franche avec toi. Aujourd'hui, je ne suis pas d'humeur à discuter, encore moins avec toi. Alors va-t'en !

Elle me regarde sans dire mot. Des têtes se tournent vers nous. Je me rends compte que je viens de hausser le ton. Je parle moins fort.

- Paula, s'il te plaît, laisse-moi tranquille !

- C'est bon. Je m'en vais. Mais sache que je ne suis pas ton ennemie.


Je ne veux pas l'écouter. Je m'efforce de poursuivre mon travail. Elle prend son sac et lâche d'un trait :

- Et puis, je ne suis pas la petite amie de Femi !

 Je l'ai bien entendue. Je lève immédiatement les yeux vers elle.

- Qu'est-ce que tu viens de dire ?

Je remarque un sourire ironique aux coins de ses lèvres.

- Ah maintenant, tu es intéressée ?

Toute honteuse, je me mords la lèvre inférieure avant de répondre.

- Eh bien …

- Est-ce que tu es enfin prête à m'écouter ?

- Oui, dis-je timidement. Nous serons​ mieux dans mon bureau.


* *

 *

Une fois à part.

- Alors, vous n'êtes pas ensemble ?

- Il n'y a que de l'amitié entre lui et moi.

Je m'efforce de ne pas laisser paraître ma joie.

- J'ai toujours du mal à y croire !

Elle inspire profondément et se cambre mieux dans le petit canapé.

- Je te le repète pour la troisième fois, je crois,  nous ne sommes pas ensemble.

- Mais la dernière fois chez lui, vous…

- Bon sang ! Mais t'es dure à convaincre toi ! Exactement comme Femi !


Je n'aime pas le ton sur lequel elle vient de me parler. Cependant, je ne riposte pas ! Je renfrogne juste la mine et fixe, sans intérêt bien sûr, la pile de catalogues de mode posés sur le guéridon.

Sans trop faire attention à moi, elle se penche en bas pour ôter ses talons.

- Enfin, mes pieds respirent !

Je la toise. Heureusement, elle ne me voit pas. Je l'avoue, je n'aime pas trop ses manières.

- Ecoute Aurore, reprend-t-elle en me regardant, c'était de la pure comédie. Une histoire qu'il a inventée pour te faire mal et te tenir loin de lui. Il m'a prise au dépourvu et j'ai joué le jeu pour ne pas le décevoir, c'est tout.


Plutôt que de me réjouir, cette vérité m'attriste.

- A présent, tu me crois ?

Je hoche faiblement la tête. Elle remarque ma triste mine.

- Je pensais que la nouvelle te rendrait heureuse, mais à te regarder on dirait le contraire.

- Il a sciemment monté un stratagème pour m'éloigner de lui. Comment puis-je m'en réjouir ? C'est sûr, il ne m'aime plus.

Elle porte son verre de jus d'ananas à la bouche, en boit une gorgée.

- Tu te trompes, je te l'assure. Femi t'aime toujours et souhaite être avec toi, même s'il ne l'avoue pas. Ces temps-ci au bureau, il est triste et distrait parce que tu es distante avec lui.

- Je voudrais te croire, mais je n'y arrive pas.

- Je te dis pourtant la vérité, Aurore. Il t'aime ! Dis-moi, tu n'as rien remarqué de différent chez lui ? N'est-il pas plus attentionné envers toi ?

Elle parle avec assurance. Dans ma tête, je passe en revue tous les moments que j'ai récemment passés avec lui. Je me rappelle ses bisous tendres sur la joue, sa gentillesse débordante avec moi, ses appels fréquents parfois juste pour me saluer…

C'est donc possible qu'il m'aime encore. Cependant, le doute demeure en moi.

- C'est vrai qu'il a changé d'attitude envers moi, mais …

- Il n'a aimé, il n'aime et n'aimera que toi, Aurore ! me réaffirme Paula.

- Alors pourquoi met-il autant de te temps à me le dire et à m'offrir une seconde chance ?

- Sans doute parce qu'il a peur !

En parlant, elle plisse ses lèvres.

- Peur ! m'étonne-je.

- C'est ce que je pense. Il doit avoir peur de souffrir à nouveau, peur que tu le blesses encore. Votre rupture et ton départ l'ont beaucoup affligé, tu n'imagines pas à quel point. T'a-t-il dit qu'il était à l'aéroport le jour de ton départ pour tenter de t'empêcher de partir ?

Je secoue la tête.

- T'a-t-il dit qu'il s'était mis à boire les jours suivants ?

Je secoue la tête. Apprendre ces vérités m'attristent davantage.

- Nous étions chez moi quand j'ai rompu avec lui. Il s'en est allé fâché contre moi. Je ne pensais pas qu'il viendrait encore me chercher à l'aéroport.

- Il l'a fait, mais ton vol était déjà parti. Si je fais référence à ces évènements passés, ce n'est pas pour te juger, t'accuser ou te causer du chagrin, mais plutôt pour que tu réalises ce par quoi il est passé et que tu comprennes son attitude actuelle.

- Au final, je ne le mérite pas. Je ne lui ai causé que du chagrin. Hors l'amour ne devrait pas faire mal. C'est même mieux que les choses soient ainsi entre nous.

- Ne dis pas cela, Aurore.

Sur ma main, elle pose la sienne.

- Tu le rends aussi heureux, c'est certain. Son monde est incomplet sans toi.

Je soupire profondément.

- Tu n'as vraiment plus envie que vous vous remettiez ensemble ?

- Je ne sais plus, Paula.

J'hésite à dire le fond de mes pensées à cette inconnue.

- Parle-moi franchement.

Ses yeux semblent sincères. Du moins, c'est ce que je ressens. Et puis si elle a préféré venir me voir plutôt que de profiter de sa pause, c'est qu'elle est une bonne personne.

- Oui, Paula. Je l'avoue. Rien ne me ferait plus plaisir que de me remettre avec lui. Mais je ne peux l'y contraindre s'il ne me fait plus confiance, s'il ne se sent pas prêt.

- Mais tu peux lui forcer la main !

- Non, je ne veux pas. Je préfère qu'il se décide lui-même.

Elle secoue la tête et sourit.

- Alors, tu risques d'attendre encore longtemps !

Elle a peut-être raison.

- Qu'est-ce que tu me proposes, Paula ?

Plutôt que de me répondre, elle s'empare à nouveau de son verre qu'elle vide d'un trait. Intérieurement, je soupire.

- Délicieux, ce jus ! Je pourrai en avoir un autre ?

- Oui.

Je roule mon fauteuil jusqu'au réfrigérateur, l'ouvre et en sors une autre bouteille. Je reviens vers elle et la décapsule.

- Merci Aurore. Laisse, je vais me servir moi-même. C'est fou comme parler peut donner soif !

Je souris. Moi je ne suis pas trop à mon aise avec elle, tandis qu'elle est très dégourdie.

- Je suggère que nous jouions à son jeu, quitte à le laisser se faire prendre. Je m'implique plus en tant que sa petite amie et …

- moi je continue à faire l'ignorante, c'est ça ?

- C'est exact.

- Ton plan est risqué, Paula. Il risque de mal le prendre lorsqu'il découvrira la vérité.

- Peut-être. Mais comme le dit l'adage : "Qui ne risque rien n'a rien". Alors es-tu partante ?

Je réfléchis quelques secondes pour finalement répondre :

- Oui, je le suis.

- Maintenant, il faut qu'on réfléchisse à un bon stratagème, une occasion parfaite pour le pousser à bout, le faire réagir malgré lui.

Elle vide son verre, rote aisément avant de poursuivre :

- Exquis, ce jus ! Je pourrais en finir une dizaine sans m'en lasser.

Intérieurement, je ris. Je la trouve amusante au final. Je la laisse parler.

- Pour le moment, je n'ai pas d'idée. Et toi ?

- Eh bien ... laisse-moi y réfléchir.

Je cogite quelques secondes​. A l'esprit, me revient l'invitation de Femi.

- Il m'a invitée à une soirée karaoké pour ce samedi mais…

Je n'ai pas le temps de finir ma phrase.

- Ne cherche plus. C'est exactement ce qu'il nous faut ! s'exclame-t-elle.

- En fait, j'ai décliné son invitation.

- Pas grave. Tu le rappelleras et tu lui diras que tu as changé d'avis. Cette soirée est l'occasion parfaite pour mettre notre plan à exécution. Et si rien ne s'y passe, on continuera encore et encore.

J'hésite un petit peu.

- Paula ! On devrait le laisser tranquille ! Peut-être qu'il compte tout m'avouer ce samedi !

- Qui ? Le Femi que je connais là ? J'en doute. Même s'il est décidé, il trouvera un prétexte pour se défiler. Il vaut mieux qu'on agisse.

- Bah, si tu le dis !

Une petite angoisse demeure en moi, tandis qu'elle semble si sûre d'elle. Je dois reconnaître qu'actuellement c'est elle qui côtoie le plus le "nouveau​" Femi. C'est elle qui le connait le mieux.

- Tu es toujours partante ?

- Oui, dis-je faiblement.

- Aurore !

- Oui, je suis partante !

- Je comprends que tu doutes encore. Mais crois-moi, tu ne le regretteras pas.

Elle se lève du canapé, s'étire longuement puis prend son sac à main. Elle doit bien être fatiguée ! (Sourire)

- A présent, je dois te laisser. On se rappelle plus tard.

- Merci Paula, achève-je tandis que nous nous dirigeons vers la porte.

- Je t'en prie. Ah au fait, si tu tiens vraiment à me remercier, pense à moi pour ton défilé. J'ai toujours adoré faire du mannequinat.

Je lève un sourcil.

 - Malheureusement, comme tu peux le constater, je n'ai pas une taille fine.

- Ne t'inquiète pas, Paula. Pour moi, ce détail n'a pas d'importance.

- Fantastique ! Tu me diras plus tard ce que je dois faire. Pour l'heure, je me dois de filer au bureau. Il est presque 15 heures.

- Allez, vas-y. Encore merci.

Elle me sourit. Je la raccompagne jusqu'à l'entrée de l'atelier puis reviens à mon poste de travail, avec le sourire aux lèvres.



SECONDE CHANCE