Chapitre 62

Write by WumiRa

Chapitre 62



- Maya ?


L'obscurité totale dans laquelle était plongée la maison fit d'abord croire à Malik qu'elle était sorti, mais lorsqu'il se heurta à la porte de leur chambre verrouillée, il toqua.


- Je suis rentré.


N'obtenant pas de réponse, il sortit un trousseau de clé de sa poche et inséra la bonne clé dans la serrure, avant de constater que c'était fermé depuis l'intérieur. Mais que fabriquait-elle qui nécessite qu'elle doive s'enfermer ?


Encore sous le choc de ce que lui avait dit Henri avant que sa femme ne vienne les interrompre, il sortit malgré lui son téléphone portable pour appeller Maya, quand la porte s'ouvrit enfin.


La première chose que vit Malik fut un visage défait et des yeux enflés. Elle s'écarta pour qu'il entre.


- Hey.


Il tendit la main pour lui toucher le visage, mais elle détourna la tête.


- Qu'est-ce qu'il y a ?


- Bonne arrivée, répondit-elle d'une voix enrouée.


- Merci.


Il referma la porte, s'interrogeant sur ce qui avait pu la mettre dans un tel état ; à la voir, c'était clair qu'elle avait pleuré.


- Que s'est-il passé ?


Elle releva la tête.


- Tu savais toi aussi que j'ai été adoptée ?


Elle ne lui laissa même pas le temps de placer un mot, avant de poursuivre en disant :


- C'est pour cela que tu me disais toujours que je ne devais rien à Henri ?


Comme moi, les ennuis appellent les ennuis, songea Malik.


- Oui, répondit-il.


Elle se détourna de lui, essayant bien que mal de cacher son abattement.


- Je ne pouvais pas m'immiscer dans vos histoires de famille, plaida t-il. Tu ne m'aurais même pas cru.  


- Je ne sais plus quoi penser. Je... j'ai encore dû mal à le croire.


- Je comprends, déclara t-il, en posant les mains sur ses épaules. Et je sais aussi que tu arriveras à le surmonter, tu es plus forte que ça. À mon avis, tu ne devrais même pas accorder de l'importance à ce qu'a pu te dire cette femme, elle ne mérite pas d'avoir une fille comme toi.


Maya se retourna.


- Comment sais-tu... vous vous connaissez ?


Il acquisesça.


- Elle est déjà venu ici.


- Quand comptais-tu me le dire ? 


- Ça m'est complètement sorti de la tête.


- Comment as-tu découvert toute cette histoire alors que moi je n'ai jamais rien su ?


- Maya...


- Je comprends pourquoi Henri ne s'est pas opposé au fait que tu demandes sa fille en échange de ton aide, je ne suis pas de son sang. Il aurait pu me vendre que ça ne lui aurait pas posé de problème.


- Mais qu'est-ce que tu racontes ?


- Qu'est-ce que je raconte ? Je viens d'apprendre que tous les gens que j'aime n'ont fait que me mentir. Même toi...


- Que voulais-tu que je fasse, dis moi ? Tu aurais pensé que c'était pour me venger de ton père.


Elle lui tourna le dos.


- J'ai toujours cherché comment te le dire, mais c'était préférable que ce soit tes parents qui le fassent.


Il lui prit le bras et la fit pivoter sur elle même, pour l'avoir de nouveau face à lui.


- Et même si je n'aime pas particulièrement ton père, à sa place j'aurais fait pareil. Comment veux-tu qu'on dise à un enfant qu'on est pas sa véritable famille ? 


Il la relâcha.


- Pleure autant que tu peux, mais admets qu'ils ne t'ont jamais fait le moindre mal, au contraire ils t'ont donnée la meilleure éducation et sans la réapparition de cette femme, tu ne te serais jamais douté que vous n'avez pas le même sang. Ne sois pas ingrate.


Après cela, il quitta la chambre, la laissant seule. Après ce qu'on venait de lui apprendre, il savait qu'il ne serait pas en mesure de trouver les bons mots pour la consoler, alors mieux valait ne pas demeurer dans les parages. Cette fois, la première depuis que tout avait commencé, il en avait marre. À croire qu'ils n'avaient pas droit au véritable bonheur et que les problèmes n'allaient jamais finir. Comment son père pouvait-il être toujours en vie, alors que tout le monde était au courant de sa mort en prison ? Henri aurait-il pu mentir ? Mais dans quel intérêt ? Il n'avait pas pu lui demander quoique ce soit, parce sa femme était rentré et il s'était senti obligé de partir, même si la conversation demeurait inachevée.


Secouée, il tourna en rond au salon pendant une dizaine de minutes, ne sachant que faire exactement, puis ensuite il décida de regagner la chambre à coucher. 


Assise au bord du lit, Maya tenait dans sa main plusieurs feuilles qu'elle regardait pensivement. Dès qu'il s'approcha, Malik s'aperçu qu'il s'agissait d'un acte de naissance et d'autres papiers qui la reliaient sans doute aux Fall. Il s'agenouilla devant elle et les lui prit des mains, avant qu'ils ne finissent tous noyés par les flots de larmes qui coulaient de ses yeux.


- Je suis désolé pour ma réaction de tout à l'heure, dit-il. Je n'aime pas te voir comme ça.


Elle ferma les yeux, sans que les larmes ne tarissent pour autant.


- Mais plus tu y penseras, plus tu auras mal.


- Pourquoi moi ? demanda t-elle.


- Ce n'est pas facile mais tu dois te résigner. Dis toi qu'il existe des milliers de familles comme ça.


Il lui prit les mains.


- Entre nous, t'es-tu déjà posée la question de savoir s'ils étaient tes parents ou pas ? 


Elle secoua la tête.


- Comment aurais-je pu ?


- Parce qu'ils ne te l'ont jamais fait sentir. Ils t'aiment comme si tu étais de leur sang et c'est le plus important. Je ne sais pas pourquoi ils ont gardé le silence jusqu'à maintenant mais j'imagine que ce n'était pas facile. À leur place, je ne voudrais pas faire de la peine à mon enfant.


- Je sais...


- Alors réfléchis bien à la décision que tu vas prendre. 


Il se redressa et s'assit à côté d'elle.


- Fais ce qu'il y a de bien pour toi, mais s'il y a une chose que tu dois garder en tête c'est que celle qui dit être ta génitrice n'a pas jugé bien de te garder à ta naissance, alors elle ne mérite rien venant de toi.


- Ils sont tous coupables.


- Je ne crois pas. Imagines que les Fall ne t'aient pas recueillie et qu'elle se soit débarrassé de toi ou qu'elle t'ait donnée à de mauvaises personnes ? Pense à l'enfance heureuse que tu as eu, à l'amour que t'ont donné tes parents adoptifs, à moi.


Il lui essuya les yeux.


- Si elle t'avait placée ailleurs, Dieu sait ce qui se serait passé alors je t'en prie... Sois juste reconnaissante.


- Qu'est-ce qui va se passer maintenant ? Comment vais-je pouvoir me comporter vis-à-vis d'eux ?


- Tu n'as pas à te tracasser pour quoi que ce soit, Maya tu sais qui est ta vraie famille. Les liens du sang ne sont pas toujours les plus forts. Oublie cette Awa et va voir tes parents quand ça ira mieux. D'accord ?


Elle ne répondit pas dans l'immédiat.


- Je comprendrai si tu me dis que tu as peur.


Elle acquisesça.


- En gros, ils ne me doivent rien, fit-elle. S'ils décidaient de me déshériter... Ce serait compréhensible.


- Ça n'arrivera pas.


- Non Malik, ils n'ont aucune obligation.


- C'est ce qui te fait peur ? 


- Pas ce que je pourrais gagner, j'ai peur que leurs réactions changent maintenant que je suis au courant.


Il lui enserra les épaules de son bras. 


-  N'y pense plus pour l'instant. Il se pourrait que demain tu voies les choses autrement, alors maintenant il faut que tu dormes.


Il se leva et entreprit de rabattre la couverture du lit.


- La nuit porte conseil.


- Comment ça s'est passé de ton côté ? 


- Uhm ?


Elle se leva à son tour.


- Comment mon père a t-il réagit quand tu lui as révélé ton identité ?


- Il était déjà au courant.


- Comment ça ?


Il lui fit signe de prendre place dans le lit.


- Je te promets d'en reparler demain, pour l'instant il faut qu'on dorme. 


- Comme tu veux.


Elle se coucha et le regarda se déshabiller avant qu'il ne la rejoigne.


- Je suis maintenant disposée à partir avec toi, fit Maya au bout d'un moment.


- Pourquoi maintenant ? s'enquit Malik.


Il se mit sur le côté.


- C'était ton idée.


- Bien sûr.


- Tu as changé d'avis ?


- Non mais tu l'as toi-même dit, ce serait comme fuir nos problèmes au lieu de les affronter.


Maya ne dit rien de plus, alors il tendit la main pour éteindre la lumière, puis il lui souhaita bonne nuit.


***


La nuit ne sembla pas avoir porté conseil à aucun des deux puisque le lendemain l'atmosphère froide de la veille n'avait pas disparu. Malik se leva en premier, puis s'assurant que sa femme dormait toujours, il s'habilla pour aller courir comme chaque matin. Sauf que cette fois n'avait rien à voir avec la routine, il avait besoin de réfléchir. Durant toute la nuit, il n'avait pu fermer l'oeil que lorsque la fatigue avait finit par avoir raison de lui ; ce que lui avait dit Henri continuait à le tracasser. Puis il y avait cette voix en son intérieur qui lui murmurait qu'il avait commis une erreur, que tout, depuis le début n'était qu'un vulgaire malentendu.


Pour échapper à ses propres pensées, Malik accéléra en vitesse, avant de se rendre compte que quelqu'un l'appellait par derrière. Il s'arrêta et se retourna pour voir arriver jusqu'à lui une jeune femme qu'il ne reconnut pas tout de suite.


- Oulala ! fit-elle en lui tendant la main. Bonjour.


Il lui tendit la sienne, perplexe, ne se souvenant pas l'avoir déjà vue quelque part.


- Bonjour.


- Ça fait un moment que j'essaie de te rattraper mais on dirait que tu as mangé du lion. 


Elle éclata de rire et il demanda :


- Nous nous connaissons ?


- Oui, on s'est croisé au mariage de Sonya. Avec ta femme tu te souviens ?


Il haussa les sourcils.


- Oumou ?


- Exactement. 


Il la regarda plus attentivement. La femme qu'il avait en face de lui n'avait pourtant rien à voir avec celle dont il avait fait la connaissance malgré lui, des jours plus tôt. Si alors il lui avait trouvé des airs de campagnarde, présentement il devait s'avouer que c'était en réalité une vraie bombe. Ou était-ce dû à sa tenue ? Elle portait un petit débardeur qui laissait son ventre très plat à la vue de tous, sur un legging qui lui allait à la perfection.


- J'ai l'air plus jeune n'est-ce pas ? demanda t-elle, sans se départir de son sourire.


- On peut dire ça.


- Disons qu'à mon arrivée j'étais dans une période de deuil, du coup je n'avais pas du tout la tête à autre chose. Encore moins à faire du shopping.


- Je vois. Mes condoléances pour la mort de cette personne.


Ils se mirent à marcher côte à côte.


- C'était ma mère. Mais bon je ne vais pas t'accabler par mes histoires, tu es du quartier ?


- Oui. Et toi ?


- Un peu plus loin. J'espère que ta femme va bien.


Malik haussa les épaules.


- Très bien, Dieu merci.


Il se tourna vers elle.


- Je vais devoir te fausser compagnie, mais je suis ravi de t'avoir revue.


- Le plaisir est partagé et j'espère que ce n'est pas la dernière fois. 


- Dakar est assez vaste.


- C'est clair, mais mon intuition me dit je te reverrai avant de retourner à Bruxelles et en toute sincérité, je ne suis pas contre.


Ils s'arrêtèrent un moment, Oumou se pencha vers lui et lui fit la bise.


- Passe le salam à ta femme de ma part.


Peu après, Malik reprit sa course à pieds.


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