Chapitre 8

Write by sokil

Chapitre 8 :

 

Placide venait d’embarquer, l’avion décollait dans une trentaine de minutes ; c’était comme un rêve, les choses étaient allées si vite en l’espace de quelques semaines.  C’était fait, il s’en allait ; les dés étaient lancés.  Sur ce coup là, j’avais espoir, je m’étais fait la promesse de ne pas flancher ; de tenir bon et surtout de maintenir le contact permanent avec lui, chose qu’il me scanda sans cesse durant tout le reste de la journée, quelques heures avant son départ.  Je n’avais pas été tranquille pendant tout ce temps. Je percevais en permanence un écho, une petite voix toujours dans mon subconscient qui tentait de me ramener à l’ordre et de me faire comprendre que j’avais peut être fais un mauvais choix comme me répétait sans cesse ma tante.

Je possédais tout ce que nous les femmes nous avons, à savoir l’intuition ; mais je refusais de me fier à ça, jugeant cela bien trop révélateur.  Je balayai toujours d’un revers de la main mon ressenti par rapport à ses sorties et ses attitudes qui pouvaient me sembler assez suspectes.  Placide avait la réponse à tout et les raisons ne manquaient pas, bien qu’elles fussent assez justifiées.  Je le soupçonnais rarement, voire presque jamais.  Mais ce matin là, lorsque Priscilla débarqua chez nous à une heure si matinale, non seulement je fus tirée de mon sommeil, mais je fus tirée d’une sorte de léthargie et sans le vouloir, je lui parlai assez froidement.

-         Félicitation pour ton bébé…  Mais je pense que le moment est très mal choisi pour venir nous l’annoncer à tous les deux maintenant à une heure pareille !

 

-         Oui !!!  Oui !!!  Je sais !  Je venais juste partager ma joie et…

 

-         C’est plutôt avec le père que tu devrais la partager n’est ce pas ? 

 

-         Jaïda a raison !  C’est une bonne nouvelle, mais…  Mais tu ferais mieux de t’en aller « Petite Fleur ».

 

-         Ok !  Je m’excuse de vous importuner à une heure pareille…  Je pensais que la nouvelle vous réjouirait vue la proximité que nous avons toujours eu, vue la façon dont nous partageons les choses…  Je m’en vais !

 

Déçue, elle se leva, remit ses lunettes de soleil et tourna les talons.  Je la stoppai net ; elle avait eu le cran de débarquer chez nous sitôt, alors j’en profitai par la même occasion et avec toute l’audace du monde de lui poser cette question.

-         « Petite Fleur » ?  Une seconde !

Placid, m’intima l’ordre de me taire et de la laisser s’en aller plutôt.

-         Chérie laisse la partir, c’est mieux ! Je pense que…

 

-         Non !  Cette question me turlupine !  Attends une minute Priscilla !

Cette dernière, et avec toutes les manières du monde se retourna, sans omettre d’onduler encore plus son large bassin enrobé sous une robe ultra moulante, ce style qui la définissait si bien.

-         Que veux-tu savoir ?

 

-         Je suis curieuse de savoir qui est le père du bébé ?  Tu es bien venue chez nous sitôt pour nous annoncer que tu attends un heureux événement, mais tu as omis de nous dire qui est le géniteur !  Je pense que nous trois réunis ici et vue la « proximité » comme toi-même tu viens de nous le dire on ne devrait rien se cacher…

Elle sourit du bout des lèvres, se rapprocha, enleva ses lunettes et me répondit sans me regarder.

-         Le père…  Eh bien !  Nous le connaissons tous !  Il fait partie…  De notre entourage !  Ce qui me chagrine le plus c’est qu’il n’a pas été foutu de venir m’assister lorsque j’étais aux urgences !  J’ai fais un malaise et je suis restée près de trois jours à l’hôpital ; il m’a tout simplement abandonnée, ignorée !

 

-         Mais tu ne réponds pas à ma question…  Il fait partie de notre entourage ?  Qui est ce ?

 

-         Vous le saurez bientôt, très bientôt !

 

Elle se retourna et prit la direction de la sortie sans demander son reste.

Sa réponse nous laissa sans voix, mais son attitude m’alerta plus ; encore plus lorsque son regard se posa directement sur Placide lorsqu’elle me répondit.  Ce dernier parut si troublé qu’il vint au rebond à la dernière minute.

-         « Petite Fleur » !  Un instant, reviens !

Elle se retourna encore, irritée.

-         Quoi encore ?

 

-         Tu sais que je n’aime pas les défis !  Pourquoi viens-tu nous narguer ma femme et moi ?  Alors tu vas nous dire…  Qui est le père ?  Parle !  Tu as commencé à jouer à un jeu, alors nous allons le terminer !

 

-         Tu penses ?

 

-         Qui est ce ?

 

-         Arrête…ça !  Ne me fais pas dire quelque chose que …

 

-         Je me fou de ce qui va arriver !  Qui est-il ?

 

-         C’est quelqu’un qui n’a pas été foutu de venir me tenir la main alors que j’étais très mal !

 

-         Figure-toi qu’il s’est senti piégé !

 

-         Piégé ?  Ne me fais pas rire !  Il a un devoir et ce devoir je…

 

-         Il ne le fera pas compris ?  Tu t’es servie de lui ! 

 

-         Je ne lui ai pas demandé de me courir après ! 

 

-         Tu savais ce que tu faisais !

 

-         Eh bien, le géniteur de cet enfant, j’aimerai qu’il me porte un peu d’attention !

 

-         Dans ce cas tu n’as rien à faire en Angleterre, c’est la seule chose qu’il te reproche !

 

-         On verra …

 

-         Maintenant tu peux t’en aller, va t’en !!!

 

J’avoue qu’au départ je n’avais rien compris à ce petit théâtre.  Ma colère était telle que je ne pus plus me contenir lorsque Priscilla finit par s’en aller. A peine avait elle prit la porte que j’explosai et je criai sur Placide au point de faire sortir tous mes boyaux.

-         A quoi vous jouez tous les deux ?  C’est quoi cette histoire ?

 

-         Calme-toi !

   

-         Me…  Me calmer ?  Je vais te dire Placide, j’en ai par-dessus tout, j’en ai marre d’elle !!!  Je …  Je commence à douter de …

 

-         Douter ?  Mais elle est folle chérie !  C’est ma sœur je t’assure mais elle commence déjà à me gonfler crois moi !

J’avais les nerfs à vif, et j’éclatai subitement en sanglots.

-         Je crois que j’ai été bête…  Très bête !  Non seulement elle s’en va avec toi pour l’Angleterre mais j’ai été…

 

-         Chérie !  Ecoute…  Ecoute…  Elle ne s’en va nulle part !  Elle n’ira nulle part, elle va reste ici !

 

-         Qu’est ce que…

 

-         « Petite Fleur » elle a eu une petite aventure avec un ami à moi, il s’appelle Eric !  C’est moi qui les ai présentés. 

 

-         Mais pourquoi ne va-t-elle pas jubiler avec lui !  Elle vient ici nous provoquer, moi en l’occurrence !

 

-         Tout simplement parce que je suis l’ami d’Eric, tout simplement parce qu’Eric en a marre, tout simplement parce qu’en venant me l’annoncer, elle espère que je plaide sa cause auprès de lui, elle l’aime et ça je le sais !  Elle vient me faire comprendre à demi mot que cette grossesse pourrait encore sauver leur couple ; il a apprit pour son voyage en Angleterre, et moi je lui ai fais comprendre toujours à demi mot qu’elle devrait donc essayer de recoller les morceaux !  A un moment donné, lui-même nous a soupçonnés elle et moi de sortir ensemble, bien que je lui ai prouvé le contraire ; nous sommes frères…  Mon mariage avec toi a vite fait de le calmer.

 

-         Mais alors son voyage ?  Elle doit partir demain !

 

-         Elle va annuler…  C’est une femme restée longtemps célibataire, alors par amour elle serait prête à tout !  Eric m’a fait comprendre que si elle reste ici, il pourrait lui donner une chance…  C’est une espèce de gigolo, il aime le fric !

 

-         Elle est plus vieille que lui ?

 

-         « Petite Fleur », elle est seulement bien entretenue !

 

-         Quoi ?

 

-         Elle est notre aînée !  Alors quand elle rencontre l’amour…

Elle était notre aînée, notre grande sœur, comme il avait expliqué et mon cœur s’apaisa une fois de plus.  Mon regard envers elle changea, la considérant beaucoup plus comme une victime.  Elle ne connaissait pas l’amour ou alors les choix qu’elle avait dû faire plus tôt ne lui permirent pas de rencontrer l’âme sœur.  En journée, elle m’envoya un message à travers lequel elle se confondit en excuses : « Je te prie de m’excuser mon intrusion et mon indiscrétion ce matin, je suis persuadée que toi au moins tu me pardonneras… ».  Trop préoccupée par le départ de Placide, je lus le message à la volée et je n’y prêtais plus attention.

La nouvelle se son voyage avait été répandue comme un traînée de poussière ; je me rendis compte que rien ne se cachait dans cette famille ; les gens avaient du mal à tenir leur langue et l’une des choses que je craignais était le secret de ma grossesse ; la mère de Placide savait et par ricochet les sœurs de ce dernier furent elles aussi mises au courant.  Elles jurèrent et promirent qu’elles ne diraient rien.  Il avait été prévu qu’on fasse un détour chez sa mère ; celle – ci tenait à faire partie de la délégation de ceux qui l’accompagnait.  Grande fut notre surprise de constater qu’il y avait plutôt grand monde et c’est chacun qui revendiquait sa place dans le véhicule.  Une vive discussion s’ensuivit et c’est Placide qui calma les hostilités.

-         On se calme voyons !  Je tiens à ce que vous sachiez que je suis et je reste votre fils, frère, cousin et tout le reste…  Je vous remercie d’être venus, mais nous allons devoir nous séparer ici, personne ne se rendra à l’aéroport à part ma mère, ma femme et deux ou trois personnes.  Le reste je vous dis au revoir…  Je ne manquerai pas de penser à tout le monde et chacun aura droit à un appel de ma part une fois sur place!

A peine avait il parlé que tout le monde se calma, laissant place à une ambiance assez conviviale.  Nous étions en début d’après midi et chacun essayait tant bien que mal de se bourrer la panse ; un petit buffet avait été préparé pour l’occasion.  J’étais bien présente mais pas très à l’aise.  Je voyais bien certains visages devenus si familiers, qui me souriaient et s’autres parfois, surtout les femmes dont le regard se posait discrètement sur mon ventre.  J’entamais à peine le troisième mois et je savais que rien n’étais encore visible.  Mon cœur se noua, et je compris que la nouvelle faisait déjà tache d’encre.  J’en voulu à Placide qui avait vite trop parlé à sa mère et surtout à ses sœurs.

Sophie et Nathalie, les deux sœurs cadettes de Placide faisaient partie de ceux avec qui le courant passait bien ; on s’entendaient à merveille ; elles me considéraient comme leur grande sœur et ne manquaient jamais une occasion de me tenir compagnie chez nous lorsque j’en avais besoin.  Sophie la plus âgée, 23 ans à peine étudiante, excellait dans cet art là, celui de savoir rapporter tel ou tel divers sur n’importe qui.  Ce jour là n’y tenant plus, je l’appelai discrètement dans la cuisine et lui fit part de mon mécontentement.

-         Sophie, je ne suis pas contente ; j’ai l’impression que tout le monde sait !

 

-         Quoi ?  De quoi veux-tu parler ?

 

-         De ma grossesse…  Il était question que…

 

-         Noooo !  Ce n’est pas moi n’est ce pas c’est elle ?

 

-         Qui ça ?

 

-         Aka !  Laisse tomber…  Depuis un certain temps elle chante qu’elle croit qu’elle est enceinte, elle fait du tapage à qui veut l’entendre !  Et elle se moque tout le temps de toi !

 

-         Qui ? « Petite Fleur » ?  Mais où est le rapport avec moi !

 

-         Non laisse tomber…

 

-         Si !  J’insiste dis-moi !

 

-         Elle dit que…  Tsuiiippp !  Laisse, ça ne sert à rien !  C’est tata Blanche qui lui a fermé la bouche l’autre jour avec ça !  Tu sais qu’elle et Petite Fleur se détestent ; alors tata Blanche lui a dit un truc comme quoi Placide ne peut pas partir sans avoir fécondé sa terre…  Un truc comme ça !

 

-         Elle a dit ça ?

 

-         Oui !  Depuis là, les gens de la famille se demandent si c’est vrai ! 

 

-         Quoi ?  Mais c’est quoi cette histoire ?

 

-         Pardon reste calme fais comme si je ne t’ai rien dit parrrrdon !  Si Placide apprends ça il va mal le prendre et il va s’en prendre à tata Blanche !  Tu sais que tata Blanche t’apprécie beaucoup et…

 

-         Je suis complètement dépassée !  Tu dis que « Petite Fleur »…

 

-         Je te le dis à toi, mais « Petite Fleur » ne…

Nous fûmes interrompues par la voix de Placide, il me cherchait peu partout.  Lorsque nous l’entendîmes m’appeler depuis le salon, Sophie s’interrompit, tourna les talons et sorti en trombe.  Il vint me trouver et je pus lire dans son regard une certaine tension.

-         Je te cherche partout !  On doit partir ; je dois être à l’aéroport dans deux heures !

 

-         Allons-y !

 

-         Que se passe-t-il ?  C’est Sophie ? Je l’ai vue sortir de la cuisine en courant !

 

-         Oh !  On parlait juste des choses de filles…

 

-         Ok ! Allons-y !

Je voulais en savoir plus sur cette histoire avec « Petite Fleur », sur ce qu’elle racontait un peu partout à mon sujet ; anxieuse et sur le qui vive, je me ravisai, préférant ne rien dire à Placide de peur que Sophie ne se taise à jamais.  Cette petite voix constante et permanente dans mon esprit n’arrêtait pas de me marteler ce que je ne voulais pas entendre ni comprendre.  J’étais comme possédée par une force invisible qui m’empêchait d’avoir l’esprit plus clairvoyant ; je la sentis cette forte impression, cette intuition mais je refusais de voir ni même de comprendre, continuant à croire et à espérer que tout irait mieux.  Placide était mon mari et je savais qu’il avait cette poigne là, celle de se battre et de tenir sa parole ; je savais qu’il viendrait me chercher vite fait.  A un moment donné dans la voiture, lorsqu’il me prit la main, je la serrai si fort et je touchai mon ventre discrètement de l’autre main.

Il venait d’embarquer, l’avion décollait dans une quinzaine de minutes ; on s’était tout dit, tout, du moins l’essentiel ; nous pûmes nous étreindre à plusieurs reprises, nous pûmes nous dires des mots tendres surtout venant de sa part ; ce qui me rassura encore plus et me fit oublier provisoirement les dires de Sophie.  J’avais remis ça à plus tard ; j’avais l’intention d’y revenir là-dessus et pas plus tard que le lendemain.  Placide me fit encore part de son souhait de d’aller habiter chez sa mère, le temps qu’il revienne me chercher le plus tôt possible.

-         J’ai compris, je le ferai, je demanderai à tes sœurs de m’aider à ranger les choses !

 

-         Ok !  Prends soin de toi ma chérie…  Je reviens très bientôt, pas d’inquiétude la dessus !

 

-         Toi aussi, tu fais attention à toi et surtout avec cette Pri…

 

-         Priscilla ne viendra pas !  C’est décidé !  Elle a décidé de rester, le temps de profiter de sa grossesse, et de son gars !

 

-         C’est tant mieux !

 

-         Je t’aime !

 

-         Je t’aime !

 

Je pleurai tout le long du retour ; nous n’eûmes pas le courage d’attendre que cet avion décolle ; mais j’eus comme l’impression qu’il était déjà parti, pour toujours !  Je réfutai cette idée, tout en essayant d’être positive et de garder espoir.  Ca martelait en permanence dans mon esprit ; je n’étais pas tranquille et cette voix qui n’arrêtait pas, mon subconscient qui me m’envoyait ces éternels signaux.  Dans la voiture la mère de Placide remarqua mon attitude ; assise à côté de moi, elle me dit.

-         Ce n’est pas la fin du monde et sache que ça fait partie des difficultés du mariage ! Prie seulement pour qu’il revienne, il y a beaucoup de tentations !

 

-         Je prierai pour cela !

 

-         Il m’a dit que Sophie a dû te raconter des choses, il ne faut pas l’écouter celle là !  C’est une vraie commère !

 

-         Sophie ne m’a rien dit !

 

-         Sophie, tout le monde la connait…  Elle ment beaucoup !

 

Une fois seule dans l’appartement, tout s’embrouilla dans mon esprit ; je comptais avoir une discussion avec Sophie, mais en même temps je ne sus pas si elle m’avait raconté des salades dans le but de se couvrir, ou alors la mère de Placide voulait tout simplement étouffer l’affaire d’après les dires de son fils.  Je me recroquevillai en boule, et je voulu appeler ma mère, chose que je fis, je voulais me lâcher et me confier à quelqu’un de sûr, la seule personne en qui je pouvais avoir confiance, ma mère.

-         Allo ? Maman ?

 

-         Oui ?  C’est comment ?  Ta voix est bizarre…

 

-         Ca va un peu !  Placide vient de partir !

 

-         Finalement ! 

-         Il m’a demandé d’aller habiter là bas avec sa mère !

 

-         Non !  Ce n’est pas une bonne idée ; je comptais t’appeler avant mais comme tu l’as fait avant c’est mieux !  J’arrive demain et on va bien causer !

 

-         Ok je t’attends, à demain !

 

Mon cœur n’étant toujours pas tranquille, je décidai de composer le numéro de Sophie, dans l’espoir de tirer quelque chose, qu’elle soit vraie ou fausse.

-         Allo ?  Sophie ?  Tu dors ?

 

-         Non  pas encore !

 

-         On n’a pas terminé notre conversation de toute à l’heure…

 

-         Jaïda, je t’aime vraiment comme une sœur je te jure !  Mais je n’aimerai pas avoir les problèmes ici !

 

-         Merci ça me fait chaud au cœur ! Fais-moi confiance, je ne dirai rien !

 

-         Tu es sûre ?  Tu risques ne pas…

 

-         Sophie !  Sophie !  Je ne suis pas un enfant dis moi et je saurai gérer !  Qu’est ce que « Petite Fleure » raconte ?

 

Sache seulement que…  « Petite Fleur », elle n’est pas notre cousine, nous n’avons aucun lien de parenté !

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