chapitre 8: réparer les dégats

Write by leilaji

Chapitre 8 (merci de kiffer, commenter et partager)

 

****Raphael****

 

Ma sœur est une héroïne. Elle est comme Sakura du manga Naruto.  Ses coups de poings font mal et elle n’a peur de personne. Bon, elle n’a frappé personne mais c’est tout comme, c’est une vraie teigne quand elle est fâchée.

Je ne sais pas pourquoi quand je suis triste, mes idées s’emmêlent et j’ai tendance à redevenir un gamin. J’ai bien conscience d’en être un même si je parais plus grand. Je n’ai qu’onze ans bientôt douze, techniquement je sors à peine de l’enfance.  Je n’aime pas lui causer du souci. C’est pour cela que je fais tout pour ne pas faire de vague et que je me dépêche de grandir. Papa est fatigué, maman en a assez fait. Alors je veux devenir l’homme de la maison pour qu’enfin Lola soit heureuse à son tour. Elle gère déjà tellement de problèmes.

Je me rappelle encore d’un jour où j’étais malade, mais vraiment malade avec des vomissements et une fièvre de cheval. La petite serviette mouillée séchait à l’instant même où on la posait sur ma tête. Même si j’étais malade et qu’elle supposait que je ne la regardais pas, je l’ai bien vu composer le numéro d’un homme et lui donner rendez-vous. En l’entendant parler, j’ai tout de suite su qu’il s’agissait d’Arnaud, un mec fou amoureux d’elle qui était prêt à faire n’importe quoi pour elle mais qu’elle ne supportait pas. Elle est revenue deux heures après son rendez-vous avec assez d’argent pour m’emmener à l’hôpital et payer mon ordonnance. Plus tard quand je lui ai posé des questions, elle n’a jamais voulu me dire ce qu’elle avait dû faire pour obtenir cet argent. Elle a juste précisé qu’elle avait juste profité de sa faiblesse pour elle.

 

Lola gère les soucis de maman, les problèmes de papa.

Mais qui l’aide elle ?

 

Elle a géré le mien avec sa fougue habituelle. Lola agit d’abord et elle réfléchit ensuite, malheureusement.

D’abord, elle a débarqué comme un flic dans une série policière, toute sirène hurlante ! On l’entendait à des kilomètres à la ronde. Je ne sais pas à quel moment Mathieu a pris mon téléphone pour l’appeler. Surement quand je me suis cogné à la barre de fer du pont. Les gens du quartier étaient regroupés autour de nous quand elle est arrivée avec une des petites sœurs de Mathieu. Je me rappelle encore de ses yeux qui lançaient des flammes.

Quand ils l’ont vu arriver, ils en n’ont pas cru leur yeux tellement elle était … super sexy. Ils ont dû se dire comment une fille pareille peut avoir un frère aussi mou que moi.

 

—Raphael ! Lève-toi.

 

Comme elle était en colère, elle a oublié de signer mais j’ai lu sur ses lèvres. Tel un ressort, je me suis levé aux aguets. Les gens nous regardaient, se demandaient ce qui se passait et moi j’avais juste envie de disparaitre dans un trou. Quoi qu’elle fasse, Lola attire toujours toute l’attention. Elle s’est approchée de moi et a commencé à me dépoussiérer comme une mère nettoie son enfant qui s’est un peu trop amusé dans la poussière. C’était humiliant et elle ne s’en rendait même pas compte.

 

—Qui t’a fait ça ?

—…

—Qui t’as fait ça ? signe-t-elle.

 

Je n’avais pas envie de lui répondre devant tout le monde. Me mettre à signer devant ces inconnus. Dévoiler ainsi que je suis sourd ! Je ne le voulais pas. Je souhaitais juste rentrer à la maison. J’évitais de poser mes yeux sur le coupable. Mais elle me connaissait tellement bien qu’elle a tout deviné et  s’est retournée pour gifler à toute volée le garçon en question. Il s’est tenu la joue de longues minutes, complètement immobile, ahuri par son geste. Il ne s’y attendait pas. Personne ne s’y attendait. Elle n’en avait pas encore fini. Elle a pris le bocal et lui a jeté les pièces à la figure. Je regardais les lèvres de Lola bouger.

 

—Touche encore à mon frère et je vais faire débarquer tout Kinguélé (quartier chaud de Libreville) pour te régler ton compte sale petit connard de trou de cul de merde! Le pont t’appartient ? C’est ton grand-père qui l’a construit ? Tu crois que tu es digne de toucher Raphael ? Non mais je rêve là !!!

 

Son ton devait être aussi mordant qu’il en avait l’air. Tout le monde la fixait avec crainte. Puis une personne a dû crier quelque chose dans la foule. Le mec a fini par s’énerver et s’avancer vers Lola mais ses potes l’ont retenu, conscients que la situation pouvait dégénérer à tout moment avec cette foule qui commençait à leur être hostile.

 

—Mtchrrrr, tu as bien fait ma fille ! lance une autre en face de moi.

 

Apparemment d’autres personnes se rebellaient aussi. Mais je ne pouvais lire sur toutes les lèvres en même temps alors j’ai tourné de nouveau mon regard vers Lola. Je voulais qu’on s’en aille.

 

—Arrêtez votre comédie ! Il s’est fait agresser devant vous non ! Personne ne lui est venu en aide et maintenant que je suis là vous osez me dire que j’ai bien fait. Vous auriez pu bien faire à ma place. Et toi Mathieu ! Tu crois que c’est normal de demander à un gamin de onze ans de te ramener ton devoir dans ton quartier pourri parce que t’es trop BETE pour le faire toi-même? Il a onze ans, onze ans !

 

« Lola allons-nous en, pensais-je très fort ».

Il y avait des moments où j’avais envie d’avoir la capacité de crier. Hurler !

Mais elle ne me regardait pas. Elle était trop en colère contre la foule. Elle était trop occupée à se battre pour moi.

 

Et si elle ne me regarde pas, elle ne m’entend pas.

 

Quand on a enfin pu partir de plein ciel, pendant tout le trajet en taxi,  je me suis muré dans un silence qui lui a fait du mal. Elle ne comprenait pas. Elle avait beau me poser des questions, je détournais la tête pour couper toute communication entre nous.

 

Lola a besoin d’avoir tous les yeux braqués sur elle. Et moi, j’ai juste besoin d’être invisible.

 

Une fois arrivés à la maison, elle n’en pouvait plus et m’a forcé à me tourner vers elle.

 

En Lsf

 

—Mais pourquoi tu me boudes ?

—…

—Raphael ?

—…

—Mais arrête ! Quoi ? Tu voulais que je les laisse s’en tirer à bon compte alors qu’ils t’ont brutalisé ?

—Il ne t’est pas venu à l’esprit que je ne voulais pas être l’objet de ton cinéma habituel ! je lui demande avec colère essayant tant bien que mal de ne pas signer trop rapidement afin qu’elle puisse comprendre chaque geste.

—Mais de quoi tu parles ?

—Je voulais juste récupérer mon argent et m’en aller. Maintenant grâce à toi, tout le monde là-bas sait quel faiblard je suis. Ça te plait hein, d’être celle qui vient toujours sauver le petit sourd !

—Tu ne sais pas ce que tu dis.

—Va-t’en tu m’étouffes !

—Tu n’as que onze ans ! Et même si tu crois m’être supérieur parce que t’es plus intelligent que moi, détrompe-toi. Je reste ta grande sœur. Et c’est mon rôle de veiller sur toi quand papa et maman ne le peuvent pas. Alors tu me fermes ta gueule et tu vas dans ta chambre.

—Tu n’es pas ma mère !

—Encore heureux !

 

On s’est séparé là. En colère l’un contre l’autre.

 

***Le lendemain soir***

 

Lola pleure dans sa chambre. Je lui ai fait de la peine hier. Je m’arrête devant la porte de sa chambre, lève la main pour cogner puis finalement m’éloigne.

 

***Un autre jour après***

 

Je sens qu’on m’embrasse la joue. J’ouvre mes yeux. C’est ma sœur encore un peu ensommeillée. Son regard me demande pardon. J’avais hâte qu’elle vienne me voir.

 

En lsf

 

—Excuse-moi.

—C’est moi qui suis désolé d’avoir été méchant avec toi.

—T’inquiète tu restes mon petit frère préféré.

—C’est normal vu que je suis le seul que t’as !

 

Elle est entrée dans le lit et a rabattu les draps sur nous. Lola a peut-être tous les défauts du monde mais elle n’est jamais définitive avec moi. Elle finit toujours par me pardonner, quoi que je fasse et c’est peut-être pour cela que c’est la meilleure des grandes sœurs malgré ses maladresses.

Je lui demande pourquoi elle était aussi triste la veille et elle n’a pas voulu me répondre. Je lui fais remarquer qu’il ne devrait pas y avoir de secret entre nous, qu’on devrait toujours se soutenir l’un l’autre.

Et elle m’a expliqué. A contre cœur.

Alors qu’elle avait Gabriel Valentine en face d’elle et qu’elle pouvait enfin lui parler, il a fallu qu’elle vienne me rejoindre à cause des garçons qui m’avaient brutalisé. Après m’avoir ramené, elle a essayé de le rappeler. Il a décroché pour lui répondre qu’il n’avait pas de temps à perdre avec les gamines qui ne savaient pas prendre leur chance au sérieux. 

 

En lsf

 

—Mais pourquoi t’as fait ça ! Je suis un grand garçon maintenant je peux me débrouiller tout seul. T’étais pas obligé de venir m’aider, fallait aller voir ton monsieur Valentine.

—Premièrement ce n’est pas mon monsieur Valentine et deuxièmement Raphael ! Tu as onze ans. Tu n’es qu’un enfant. Brillant certes, mais enfant tout de même. Et je dois te protéger.

—Tu ne pourras pas me protéger toute ta vie. Il faudra bien que j’apprenne à me débrouiller tout seul.

—Crois-moi Raphael, aucun enfant d’onze ans ne se débrouille tout seul.

 

Puis elle s’arrête de parler et regarde ailleurs. Mais j’ai eu le temps de remarquer la larme qui a coulé sur sa joue quand elle a détourné son visage de moi.

Elle a raté sa chance.

A cause de moi.

Ce n’est pas juste.

 

****Gabriel****

 

Je suis saoulé par le projet que je suis en train de mettre en place. J’ai l’impression qu’il est de trop grande envergure et qu’il n’est pas fait pour le Gabon.  Je perds mon temps !

Pourtant je ne peux pas abandonner comme ça. Pas sans avoir au moins essayé ! Ce n’est pas dans mes habitudes d’abandonner sans me battre. Même si je suis tout le temps en costume, que je cultive délicieusement ce petit air ultra chic qui électrise les femmes, je suis à moi tout seul toute une armée. J’aime livrer bataille que ce soit pour un concert exceptionnel ou une fête grandiose. Mais cette fois je veux être l’auteur d’une chose de plus pérenne qu’une fête.  Je referme le dossier que je dois présenter à la banque dans trois mois. Il est temps que je rentre chez moi.

En fermant mon bureau, je tombe sur ma sœur qui ferme aussi le sien. Comme à son habitude, elle est d’un chic sans borne. Elle porte avec élégance, une robe asymétrique gris clair et son visage est tellement parfait qu’on dirait une poupée barbie vivante.

 

—Je ne savais pas que tu étais encore là, petit frère.

—Et toi que fais-tu là ?

—Je bouclais de petites choses. Il faut bien que je te justifie mon salaire n’est-ce pas ?

 

Son téléphone sonne et elle décroche avec un sourire. Après une brève conversation, elle raccroche et fouille son sac à main à la recherche des clefs de sa voiture.

 

—Tu fais quoi ce soir ?

—Rien, je rentre me coucher. La journée a été longue, dis-je d’une voix fatiguée.

—Si tu veux … tu peux venir avec nous… Denis m’invite manger.

 

Elle évite mon regard en parlant de lui.

 

—Quoi t’as pas rompu avec lui ? Tu disais que tu avais l’impression de perdre ton temps avec lui !

—Je sais, je sais. Mais je l’ai revu et bang j’ai compris que c’était l’homme de ma vie. Je veux me marier avec lui.

 

La dernière fois qu’elle est sortie avec cet homme, il lui a brisé le cœur. Je n’ai rencontré Denis Onbinda que de très rare fois et ça n’a pas du tout collé entre nous. Je l’ai trouvé arrogant et très cynique. Etant moi-même assez hautain parfois, j’ai dû reconnaitre que lui était vraiment un cran au-dessus de moi. Et contre toute attente c’était justement ce trait de sa personnalité qui plaisait à Eloïse. Ce trait de personnalité et aussi le fait qu’il soit fils et frère de président. Ah les femmes !

 

—C’est un Onbinda. Il est tout ce qu’on n’est pas : frimeur et voyant… On entend parler que de lui dans tout Libreville… des filles avec lesquelles il couche…

—Arrête !

—Je ne veux pas de cette vie pour toi Eloïse. Que tu sois celle qui garde la maison pendant qu’il va tirer des coups ailleurs.

—Ecoute Gabie. J’ai 32 ans et de la fortune. Lui au moins ce n’est pas mon argent qui l’intéresse. C’est un Onbinda, il a de l’argent à ne pas savoir quoi en faire. On forme une bonne équipe tous les deux. Et puis, je veux des enfants… Je ne serai pas une vieille fille célibataire…

 

Je me tais un moment. Eloïse est … obstinée. Quand elle s’est mis une idée en tête, il est très difficile de lui faire changer d’avis.

 

—Tu ne t’es même pas posé la question essentielle.

—Laquelle ?

—Est-ce qu’il t’aime ?

 

Elle se fige et me regarde comme si tout d’un coup j’avais perdu la raison.

 

—Gabriel dans quel monde vis-tu mon chéri ? Les contes de fée c’est pour les petites filles niaises. Et tu sais que je suis loin d’en être une.

 

Et elle s’en va sans plus rien ajouter.

Eloïse. Une si belle femme, malheureuse en amour depuis qu’elle a connu les hommes. Sa seule vraie relation, celle qui a duré plus de six mois c’était avec ce salop de Justin Biyogue. Un enfoiré de première. A l’époque, mon père a quasiment pris tout le mariage en charge. Il n’a pas eu à débourser le moindre centime. Et le jour j, juste quelques minutes avant l’arrivée du maire, une jeune femme s’est présentée avec un bébé dans les bras et quelques membres de sa famille. Une jeune femme apparemment démunie et un bébé qui était son portrait craché. Un bébé qu’il a tenté de nier pour pouvoir épouser une fille Valentine et ainsi s’assurer une vie de pacha. Eloïse en a eu le cœur brisé. L’humiliation a été cuisante pour toute la famille. Depuis lors, elle s’est tellement endurcie que parfois je ne reconnais plus la grande sœur aimante qu’elle a été autrefois.

Et franchement ce Denis Onbinda ne me dit rien qui vaille.

 

Lorsque je sors des studios, Tyson est toujours là occupé à chasser un adolescent qui s’était adossé à ma voiture.

 

—Tyson ?!

—Oui monsieur, répond-il en poussant avec un peu plus de force le gamin qui se remet automatiquement à la même place.

 

Putain c’est qui ce petit con ? Il va me rayer la carrosserie ! Je marche un peu plus rapidement et les rejoins. Dès que je les retrouve, le gamin se tourne vers moi, ignorant ainsi Tyson qui fulmine derrière lui. Il me tend un mot. Je ne suis pas du tout rassuré. Aujourd’hui, on ne sait plus qui est qui.  Même l’enfant le plus innocent est capable du pire.

 

« Je suis le petit-frère de Lola. S’il vous plait reprenez-la. Ce n’est pas de sa faute si elle n’a pas pu être là»

 

Je ne comprends pas pourquoi il me  tend un mot. Je le regarde avec insistance. Est-il fou ? Non il m’a l’air tout à fait normal. Propre et poli. Par ailleurs, il ressemble un peu à Lola alors je suppose qu’il ne me ment pas. Malgré tout, ce n’est qu’un gamin. Je ne comprends pas ce qu’il fait ici à cette heure. Il est tard et il ne devrait pas trainer ainsi dans les rues de Libreville.

 

—Où est ta sœur ?

 

Il sort un petit carnet de sa poche et y note un mot qu’il me tend.

 

« Elle révise ses cours chez une amie ».

 

Est-il muet ? Je fais signe à Tyson de nous laisser car le petit semble mal à l’aise en sa présence. Je n’arrive pas à croire qu’elle m’ait envoyé un gamin pour plaider sa cause. C’est tellement irresponsable et immature.

 

—C’est ta sœur qui t’envoie?

 

Un nouveau mot écrit rapidement.

 

« Non, elle me tuerait si elle savait que je suis sorti en cachette. Il est tard.»

 

Je lis le mot. Je regarde les trois petites feuilles que je tiens dans ma main. C’est la première fois de ma vie que je parle à une personne muette. Ca me bouscule un peu parce que ce n’est qu’un gamin aux yeux pétillant d’intelligence. Des feuilles. Ça doit être contraignant de ne pas pouvoir s’exprimer comme les autres.

 

—Ecoute, ma décision est prise et je vais garder celle qui chante déjà pour moi. Ta sœur m’a l’air assez difficile à gérer et je n’ai pas le temps pour ça.

 

Difficile à gérer c’est un doux euphémisme mais bon.  Je ne vais pas me mettre à expliquer à un gamin que j’ai envie de b… , que je désire sa sœur et que ça me perturbe parce que je suis déjà avec quelqu’un à qui je tiens énormément. Il me tend une autre feuille et sors de sa poche plein de billets froissés qu’il m’enfonce dans les mains pour libérer les siennes et ainsi pouvoir écrire un nouveau mot.

 

—Qu’est-ce que c’est ?

 

Nouveau mot.

 

« C’est tout ce que j’ai. Ça ira ?»

 

Je compte les billets : quatre de dix mille, sept de cinq mille, trois de deux mille et dix de cinq cents. Est-ce qu’il essaie de me donner un pot de vin pour que je prenne sa sœur dans mon écurie ? Je le regarde pensant lire de la gêne dans ses yeux mais il est absolument confiant. J’ai envie de rire mais je me retiens. Ca le vexera peut-être. Il a l’air très sérieux. Cette somme ridicule ne pourrait même pas acheter mes chaussettes !

 

Mais je trouve le geste très courageux de sa part.

 

—Est-ce que ça ira ? Je crois que c’est même trop me donner, dis-je d’un ton ironique.

 

Il fait une drôle de tête et ajoute un dernier billet de mille francs. Puis il m’écrit un nouveau mot.

 

« L’ironie ne passe pas toujours bien quand on parle à un sourd. Je ne saisis pas les nuances de la voix. Là c’est vraiment tout ce que je peux donner. Ça ira ? Pour la prendre avec vous ? ».

 

Ça doit être toutes ses économies.

J’ai le cœur qui se sert et je ne sais même pas pourquoi. Je crois que je suis ému. Quel âge a-t-il douze, treize ans. Et il défend déjà sa sœur ainsi !

 

—Comment tu t’appelles ?

 

« Raphael. Je vais bientôt être à court de papier sur mon bloc note. Alors c’est oui ou non ? »

 

Il négocie bien le petit, il ne perd jamais le nord et va droit au but. Je prends un billet de cinq mille et lui rends le reste. Je ne veux pas qu’il pense que j’ai accepté parce que je l’ai pris en pitié même si je dois avouer que je ne peux occulter ce sentiment de mon cœur en le voyant.

 

—Cinq mille c’est largement suffisant pour un début, après tout je n’ai encore jamais produit personne, dis-je en lui tendant la main pour signer notre contrat.

 

Il me sourit et prend ma main.

Comme il se fait tard, je lui demande de monter pour que je le dépose chez lui. Peut-être que j’espère aussi au passage voir sa sœur mais c’est surtout pour le remercier du courage dont il a fait preuve.

 

****Raphael****

 

J’espère que Dieu me pardonnera d’avoir utilisé mon handicap pour lui inspirer l’envie de reprendre Lola. Je sais bien que la somme que je lui ai donnée était dérisoire. Je ne suis pas assez naïf pour croire que je peux payer un tel homme. Je suis sûr que rien que le prix de sa voiture pourrait acheter quatre fois notre maison.

 

Oui, j’ai joué sur la corde sensible en lui dévoilant mon handicap sans fioritures.

Mais je suis content de moi, et je n’ai pas honte.

J’ai été un homme aujourd’hui.

J’ai arrangé les dégâts que j’ai causés.

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