chapitre 9

Write by Meritamon


Qu’est-ce que Zeinab était pour Tahaa?


Une amante dont il se satisfaisait de temps à autre quand elle faisait irruption dans sa chambre à la tombée de la nuit? Une amie d’enfance qui avait eu moins de chance que lui? Un amuse-gueule en attendant qu’il trouve mieux?

Ils se connaissaient depuis leur tendre enfance. Et elle l’avait aimé toute sa vie. N’était-ce pas avec elle, qu’il avait découvert ses premiers émois sexuels?

Leurs destins s’étaient brièvement entrelacés, et s’étaient séparés lorsque Tahaa partit étudier à l’étranger. Elle l’avait alors attendu, patiemment, en entretenant son amour à travers des lettres enflammées. Comme il ne revenait pas, Zeinab fut offerte en mariage, contre son gré, à un homme de sa petite ville. Elle avait donné deux enfants à cet homme cruel, qu’elle avait été obligée de quitter parce qu’il était brutal avec elle. 

Zeinab avait été accueillie sur le domaine des Badr en souvenir de l’amitié que cette famille avait eue pour ses parents. Et lorsqu’elle avait revu Tahaa, son bon vieux cœur, qu’elle avait cru brisé à jamais, s’était à nouveau embrasé pour lui.

Cela ne fut malheureusement pas réciproque pour Tahaa, qui reprenait alors les rênes du domaine de son père.

Les années de séparation avaient tout simplement effacé le souvenir de leurs tendres moments d’adolescents épris l’un de l’autre dans la mémoire de l’homme. Les années avaient aussi fait apparaitre leurs différences sociales, ce dont ils avaient été délicieusement épargnés quand ils étaient enfants.

Tahaa l’avait-il d’ailleurs aimée?

Pour le moment, Zeinab Diallo attendait et espérait que l’homme se décide à voir en elle plus qu’une amante, au-delà de leurs étreintes enflammées, et qu’il fasse d’elle son épouse. Elle avait tellement à lui donner si seulement il s’en rendait compte, au lieu de papillonner avec insouciance de femme en femme, le cœur inaccessible.


      -         Tu devrais récupérer tes enfants, revenir dans ton ménage, faire preuve de résilience. Tous les hommes sont pareils, que veux-tu de plus? Lui suppliait sa mère, morte de honte, à cause des rumeurs.

« Le mariage est un sacrifice, on dit qu’il est fait de miel et de citrons ».


Pour sa part, Zeinab avait assez mordu dans la pelure amère des citrons de son mariage. Son corps et son cœur meurtris, gardaient encore la trace des coups, des privations et des humiliations subies à travers les années. Ses enfants qu’elle n’avait plus le droit de voir lui manquaient toutes les secondes de sa vie.

Et lorsqu’elle vit Serena, petite fille gâtée et insouciante, son cœur s’affola de crainte devant sa beauté insolente, son air supérieur, ses mains lisses qui n’avaient jamais connu le dur labeur et les privations. Son corps ferme, son ventre et ses seins arrogants encore épargnés par la maternité et la concupiscence des hommes.

Une jalousie inexplicable attisée par la probabilité que Tahaa puisse d’une façon ou d’une autre, être attiré par cette fille venue d’ailleurs, s’empara de son cœur. Ce, malgré leur animosité réciproque, le fait que l’homme et l’étrangère ne s’appréciaient pas.

« Ils se ressemblent... Qui se ressemble s’assemble » disait sa petite voix.

Son intuition lui dit qu’il fallait surveiller la nouvelle venue.

 Zeinab rendit visite à Farba, son marabout, celui qui sondait l’avenir dans le sable, qu’elle payait une petite fortune pour lui dire les sacrifices à effectuer afin de s’emparer du cœur de son bien-aimé Tahaa, des huiles et des potions à s’enduire afin de se rendre inoubliable lors des nuits d’amour.

Farba puisait dans le manque de confiance de Zeinab, dans sa vulnérabilité de femme éprise, pour lui dire ce qu’elle voulait entendre.

Il confirma ses doutes. La nouvelle venue serait un obstacle dans ses plans.

      -         Mais elle n’est que de passage! s’écria Zeinab, incrédule.

      -         Le sable me dit que cette fille va rester ici, prends garde à toi. Le sable ne ment jamais.


 

Lorsque Zeinab retrouva son bien-aimé Tahaa, le soir venu dans sa chambre, en nuisette, désirable et parfumée, elle remarqua qu’il dissimulait son ennui.

Elle eut un pincement au cœur. Pourquoi avait-il une ambiguité à son égard? Pourquoi avait-il honte d’être avec elle?

Qu’est-ce qu’ils étaient l’un pour l’autre? Parfois, ils étaient amis, d’autres fois ils étaient plus que des amis et il y avait des fois, où elle devenait juste une étrangère pour lui. Un jour, il lui prêtait tellement d’attention qu’elle croyait être une reine et le jour suivant, l’ignorer. Être avec lui était comme débouler à 300 à l’heure sur des montagnes russes. Sans harnais. Sans protection.

     -          Zeï…

Il était le seul qui l’appelait par son petit nom, Zeï.

     -         J’ai beaucoup de travail demain, nous commençons les labours. Il faut que je dorme.

Zeinab fit une petite moue coquine, posa son index sur les lèvres de l’homme.

    -         Je voudrais seulement être à tes côtés, mon amour, sentir ta chaleur. Je me contenterais de m’allonger contre toi.

     -         Les gens commencent à parler Zeï, de toi et moi. Et tu n’es pas officiellement séparée de ton mari…

La femme s’empara de ses lèvres pour mettre fin à sa résistance. Les gens pouvaient parler! Elle n’en avait cure.

Tahaa se dégagea doucement et la laissa entrer. Il avait l’habitude de ses irruptions et pendant ces nuits, elle s’offrait à lui et devenait son amante. Il connaissait Zeinab depuis l’enfance, elle était la fille de métayers qui avaient été au service de son père. La jeune femme n’avait pas eu la vie facile avec le mariage qui lui fût imposé. Et c’est parce qu’il s’en voulait de ne pas éprouver les mêmes sentiments pour elle, qu’il lui faisait l’amour; un peu pour compenser quelque chose qu’il ne ressentait pas. Il s’en voulait d’être aussi lâche et de ne pas lui dire qu’il ne pouvait pas s’attacher et qu’il préférait sa liberté.

      -         Alors comment trouves-tu ta nouvelle pensionnaire? Demanda malicieusement Zeinab, en lui caressant le torse, après qu’ils firent passionnément l’amour.

       -         Insupportable. Dit-il brièvement, en parlant de Serena Hann.

Zeinab se souleva sur son coude, fixa Tahaa intensément, prête à déchiffrer la moindre expression susceptible de le trahir.

      -         Je veux dire physiquement. Elle est belle, n’est-ce pas? Elle ne passe pas inaperçue.

Tahaa sentant ses allusions, se fit méfiant.

      -          Où veux-tu en venir toi?

     -         Cette fille, Serena, est jeune et fraîche. Tu ne vas pas tarder à l’entraîner comme toutes les autres dans ton lit. Ce n’est qu’une question de temps.

L’homme soupira.

     -         C’est faux. Je ne ferais pas ça. Elle m’a été confiée par son père.

 

    -         Elle s’entend très bien avec ton frère Idy, crut ajouter Zeinab, alors que Tahaa se murait derrière un silence, agacé.

     -         Idy cherche à attirer l’attention, tu le connais. Il est désœuvré. Si seulement mon frère pouvait se remettre au travail au lieu de gratter de la guitare. Monsieur voudrait être artiste! Quelle perte de temps…

Tahaa se leva et remit son pantalon de pyjama.

     -         Zeï ?

     -         Oui, mon amour?

     -         J’ai croisé ton mari à la coopérative. Vous êtes encore mariés tous les deux. Il veut que tu reviennes chez toi. Je ne pourrais plus continuer à avoir des relations avec toi.

Zeinab le toisa, furieuse.

     -         Pourtant ça te plaisait au début. Ça te plait encore de me baiser. Qu’est-ce qui te prend tout d’un coup?

     -         Ce n’est pas évident… ça finira par aller aux oreilles de ta belle-famille, ça pourrait te nuire.

     -         Dans ce cas, tu sais ce que tu as à faire Tahaa! Il suffit que tu demandes ma main, que tu m’épouses.

     -         Il n’y a rien à espérer de moi Zeï, je ne t’ai jamais fait croire que nous nous marierons ensemble…

Je suis un salaud! Pensa avec remords Tahaa alors que des larmes d’incompréhension coulaient sur les joues de Zeinab.

     -         Tu es mon amie Zeinab.

     -         Parce que tu couches souvent avec tes amies? Est-ce que tu m’aimes? Lui demanda-t-elle.

« Je te supplies de me répondre Tahaa! M’as-tu jamais aimée? ».

Tahaa fut incapable de répondre à cette question. Il ne voulait pas la blesser ni lui mentir en lui disant le contraire. Il se maudit intérieurement de n’avoir pas de cœur. Zeinab se retourna de l’autre côté du lit, le cœur en miettes.

C’est à ce moment que des coups à la porte ébranlèrent le silence.

Tahaa se leva, ouvrit la porte et se retrouva nez à nez avec le joli minois de la demoiselle Hann. Il soupira, exaspéré. Il ne manquait plus qu’elle dans le décor.

     -         Que me voulez-vous? Il est tard.

Serena dissimula son trouble devant le torse nu et musclé de l’homme. Pouvait-il enfiler une chemise? Elle fit l’effort de le regarder dans les yeux. Mais là encore, son regard à lui la brûlait.

     -         Je sais. Est-ce qu’il y a un moyen que je me connecte à l’internet? Je dois vérifier mes mails.

     -         C’est que le moment est très mal choisi, répondit-il froidement. Je suis occupé.

Par-dessus son épaule, Serena remarqua dans la pénombre de la chambre une forme féminine allongée dans son lit. Serena ne sut pourquoi elle sentit une éraflure sur son cœur. Légère mais présente. Elle dissimula son embarras et dit fermement.

     -         Dans ce cas, je pourrai me rendre à la ville voisine. Idy m’a dit qu’il y a un café-internet où je pourrais me connecter. Votre frère propose de m’y accompagner.

Tahaa sentit une colère le gagner. Encore Idy qui mettait dans la tête de cette fille qu’elle pouvait obtenir des faveurs. De quoi se mêlait son frère?

       -         Je ne vous donne pas cette autorisation.

       -         Vous ne pouvez pas m’empêcher d’entrer en contact avec mes proches!

      -         Votre père vous téléphonera comme d’habitude. Je vous conseille d’aller vous remettre au lit tout de suite parce que vous vous lèverez encore de bonne heure demain.

      -         Vous êtes injuste!

Il soupira, fortement agacé comme elle protestait.

      -         Écoutez, j’en ai assez. Qu’est-ce que vous n’avez pas compris quand je vous disais, ma maison, mes règles?

      -         Vous êtes tellement rigide!

Tahaa avait haussé les épaules, indifférent et lui avait fermé la porte au nez.

« Je vous déteste Tahaa Badr » fulmina-t-elle en se retrouvant dehors, près des bâtiments des ouvriers d’où lui parvenaient les bruits d’une petite fête. Serena ne tarda pas à retrouver Idy et ses amis, entrain de jouer de la guitare. Le jeune homme lui adressa un grand sourire quand il la vit et lui dédia une chanson.


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Coucou! j'espère que ça va chez vous? Je vous souhaite la santé.

Merci de me suivre et de liker ! à très vite. Meritamon.


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