CHAPITRE IX : KARL LEKE
Write by Marc Aurèle
CHAPITRE IX : KARL LEKE
KARL LEKE
Je suis assis derrière mon vaste bureau style victorien, héritage de mon séjour en tant que jeune étudiant dans la capitale anglaise. Mes doigts passent et repassent dans ma barbe grisonnante, signe que je suis préoccupé. J’ajouterai même très préoccupé car l’allure que prend la relation de sissi avec les ADJI, risque de mettre en mal ma tranquillité. Je suis Karl LEKE, Docteur en aéronautique, spécialiste de la fusion nucléaire, membre de la grande société des spécialistes de l’aéronautique du monde. Premier succès scientifique africain de mon domaine, il faut dire que je suis très sollicité depuis mon plus jeune âge. J’ai fini par atterrir au Bénin mon pays, juste par envie de renouer avec ma famille, mais surtout pour rétablir une vérité qui me pèse dessus depuis plus d’un demi-siècle. Je regarde mon épouse, qui est assise en face de moi, mais je n’entends en réalité aucune des phrases qu’elle prononce. Je suis ailleurs dans ma tête.
Je suis à mille lieux de ce vaste bureau, qui à été le seul à voir mes larmes et même si actuellement j’ai envie d’en couler, je dois maintenir ma stature. Je ne dois pas laisser transparaître ma peine, car cela n’arrangerait en rien la situation désastreuse dans laquelle mes folies de scientifiques avaient plongé mon couple il y a près de trente ans déjà. Je me revois dans le labo assis par terre, tenant dans mes bras cette belle assistante, folle amoureuse du mentor que je suis et qui venait de m’annoncer la plus belle des nouvelles de toute ma vie. Judith avait toujours été là pour moi depuis mes premières années de doctorat et qu’elle m’apprenne qu’elle portait en elle le fruit de notre amour, n’était que joies. Malheureusement, nous en avions oublié dans notre euphorie que nous étions en plein test et ce qui s’en suivi fut juste catastrophique. Si je me retrouve dans un néant sans nom, malgré les apparences de l’homme heureux que je donne, c’est bien dû à une maladresse que je ne saurai jamais expliquer. Le sas d’isolation des produits chimiques s’était ouvert contre toute attente. J’ai juste vu une nuée brune s’étaler dans le labo et de mon corps, je protégeai habilement celle qui devint mon épouse pour le meilleur, vu que ce que nous avions vécu ce fameux soir là était déjà le pire de notre vie.
Aujourd’hui je suis ce que les journaleux appellent un modèle de réussite et même si mes images font la une de toutes les revues africaines de sciences, rien de cette notoriété ne me ramène ni ma dignité, ni ma fertilité ou encore moins mon enfant. Oui mon enfant, car en ayant exposé la grossesse de mon épouse à ce gaz toxique, il y a trente ans, j’exposais aussi ma fille qui malheureusement ne survécu point à la naissance.
- Tu ne dis rien karl ! cria judith en tapant du point sur la table. Elle me sortie de mes pensées.
- …. Je venais de réaliser que je l’avais laissé parler toute seule.
- Attends ! tu ne m’écoutais donc pas ?
- Je m’excuse, tu sais combien je m’en veux et que chaque fois que nous abordons le sujet je suis évasif et que j’en oubliais d’être là. Je n’ai qu’une seule envie disparaître de la face de la terre. Répondis-je
- Je vois que tu ne peux rien pour moi. Mais sache que c’est préférable que nous la laissions proche de ses frères en attendant de lui faire découvrir la vérité.
- Il est évident que cela me poussera à ma tombe tu sais ? je ne me sens pas en mesure de dire à ma fille que je l’ai échangé à sa naissance. Je ne peux pas lui dire qu’elle est la fille d’une mère qui à souffert sa perte jusqu’à en mourir. Je ne suis pas en mesure de le faire.
- On va cesser d’en parler. Au moins son père est au courant. Fit-elle me fixant de ses yeux dont le charme n’avait point terni.
- Comment ?
Je me levai de mon siège et regardai en direction de la porte.
- Tu n’as même pas pris la peine de fermer derrière toi criai-je à l’attention de mon interlocuteur qui me suivait du regard. Je remarquai une silhouette dans le couloir, mais trop juste pour être sur de moi.
- Désolé, mais j’étais trop troubler en entrant ici mon chéri. Répondis mon épouse. Le poids de l’âge et du secret commence par ruiner ses épaules.
Elle si belle et forte, devenait chaque jour un peu plus l’ombre d’elle-même. Je m’approchai d’elle et pris son visage entre mes deux mains. Mes lèvres se rapprochèrent des siennes et je les pris dans ma bouche une à une. Je ne voulais pas d’un simple baiser, je voulais retrouver la sensation de nos baisers d’antan. Elle se laissa faire, entrouvrit sa bouche pour laisser passer ma langue. Etre vieux ne veux pas dire, ne plus pouvoir embrasser. Mon épouse se blotti dans mes bras et nous restâmes là profitant des secondes tout en nous dessinant des cœurs sur le corps. Ce qui nous lie est plus fort que la mort, plus fort que la radiation, plus fort que le temps, plus fort que la vague qui arrive et même si elle m’effraie je sais qu’elle ne nous emportera pas.