Partie 45 : Maiwenn Banimbeck
Write by labigsaphir
- Dis donc, tu n'as pas traîné, Maiwenn.
- Non, type, toi-même tu sais.
- Tu as déjà un enfant de 23 ans et demi.
- Ah ça ! je vieillis déjà, que veux-tu ?
- Je vais bientôt t'acheter une carabine et un fusil à pompe.
- C'est ce que tu dis doucement, comme ça ? Moi, je vais mettre un écriteau sur la porte, « Ici chien méchant ».
- Et dans 20 ans, « Ici, il y a fille à marier ».
- Ga ga ga ga salopard ! Enfoiré de première.
- Ha ha ha ha laisse-tomber.
- Et toi ?
- Je suis là, type.
- Toujours pas marié ?
- Tu sais que le mariage, c'est la chance. Je n'ai pas encire de tomber sur une panthère une araignée ou une musaraigne.
- Ga ga ga ga vraiment !
- Tu connais nos sœurs-là. Bonjour, 3500 fcfa. Comment vas-tu ? 10 000 fcfa ! Pour Win, si tu ne déposes pas un bâton, oublie seulement.
- Elles sont puissantes, nos sœurs.
- Ne viens même pas mal avec elles.
- On les aime aussi comme ça.
Des pas et Winnie apparaît, ma chère petite femme. Malgré ses formes et son extrême lenteur, j'ai appris à l'aimer et à la supporter.
- Bonsoir la BS, fait Dean tout sourire.
- Dean, mais cela fait longtemps ; elle arrange ses rastas.
- Mais oui, je parcourais le monde.
- En quête de quoi ?
- Moi-même, je ne sais pas.
- Qu'est-ce qui te ramène ici ?
- Le destin, je crois.
- Frère, intervins-je en me tournant vers lui.
- Oui, Maiwenn. C'est même quoi ce prénom de fille ?
- Tchiiip ! Si tu veux prendre pour toi, ici, continue.
- Ha ha ha ha ha tu n'as pas changé hein.
- Non ooooo. Je disais donc que Winnie nous a fait un bongo de serpent.
- Ayiiiiiiii la nourriture des notables.
- C'est ce que tu dis doucement, comme ça ?
- Tu connais les bonnes choses, dis donc. Avec du vin rouge, l'on grimpe directement au paradis.
- Je te dis.
- A ce sujet, veuillez vous donner la peine de me suivre.
Nous prenons nos verres et suivons ma femme. Nous nous installons et dînons en chahutant et nous rappelant le bon vieux temps ; c'est si reposant tout ceci. Trois quarts d'heure plus tard, nous revenons au petit salon pour le digestif. Winnie prend congés de nous et va s'occuper des enfants, ce qui nous laisse la possibilité de discuter entre hommes.
- C'est comment, type ? Lui demandai-je.
- Je suis là, je suis là ; je porte la tasse de thé à mes lèvres et avale le breuvage.
- As-tu des nouvelles de nos anciens camarades ?
- Quelques-uns et très rarement.
- Ah ok. Ici, tous sont soit partis en Europe, soit rentrés dans leur pays respectif.
- Huhum.
- As-tu de ces nouvelles ? Hésitai-je avant de demander, en vérifiant que Winnie n'est pas dans les parages.
- Ses nouvelles ? Mais de qui parles-tu, Maiwenn ?
- Mais tu sais, Dean, rétorque-t-il mal à l'aise.
- Non, je ne sais pas ; j'ai vraiment l'impression qu'il fait semblant de ne pas comprendre.
- Rustine, finis-je par lâcher.
- Celle que tu as lâchée comme une vieille chaussette pour Winnie ?
- ...
- Pourquoi avoir honte d'en parler ? Pourquoi baisses-tu la tête ? De l'eau a pourtant coulé sous le pont.
- Tu sais, il y a des femmes que l'on aime et ne quittent plus jamais nos têtes, quoi que l'on fasse, avouai-je.
- Pardon ?
- Viens, allons à la terrasse, s'il te plait.
Nous nous levons, prenons nos tasses et allons nous asseoir sous la terrasse, à bonne distance de la porte et de manière à avoir une vue de l'intérieur.
- Que disais-tu ? demande-t-il en posant la tasse sur la table et me regardant droit dans les yeux.
- Dean, soupire-t-il, cela fait plus de deux décennies, je devrais déjà avoir oublié mais non.
- Ah bon ? Et pourquoi ?
- Je ne sais pas. Rustine ne m'avait vraiment rien fait, rien. Je ne sais comment, mais du jour au lendemain, je me suis séparé d'elle.
- Surtout qu'une personne s'était chargée de lui envoyer les photos de Winnie et toi.
- C'est vrai, c'est vrai.
- Sais-tu qui est le coupable ?
- C'est Winnie, elle me l'a avoué bien plus tard.
- Elle en a souffert, Maiwenn.
- Je sais, je sais.
- Elle a ramé pour s'en sortir et garder la tête hors de l'eau.
- Je sais.
- Pourquoi ?
- Je ne sais pas, ça arrive tout simplement.
- As-tu encore des sentiments pour elle ?
- ...
- Maiwenn, as-tu encore des sentiments pour elle ?
- ...
- Maiwenn,
- J'ai un infini respect pour Rustine, Dean. J'ai aimé la façon dont elle s'est relevée, sans porter atteinte à sa dignité.
- Tu sais que tes excuses sont bidons.
- C'est vrai. C'est quand même risible pour une personne qui en a profité, ne pus-je m'empêcher de dire.
- Je ne comprends pas.
- J'ai eu des échos selon lesquels, tu t'étais mis en couple avec elle.
- ...
- Dean,
- C'est vrai, reconnait-il en se pinçant les lèvres.
- Tu lorgnais donc sur elle, alors qu'elle était avec moi.
- Même pas.
- Tu avais quand même des sentiments pour elle.
- A quoi rime tout ceci ? Tu es en couple et heureux avec Winnie, à ce que je sache.
- Oui, mais le code, tu ne l'as pas respecté.
- S'il te plait, Maiwenn, à d'autres !
- Que devient-elle ?
- Elle vit au Cameroun, est mariée à un camerounais.
- Oulaaaaaaaaaaaa encore un camerounais ? Pourquoi pas toi ?
- J'ai merdé et quand j'ai voulu réparer ma bêtise, il était trop tard.
- Tu as encore des sentiments pour elle, Dean. Il faut passer à autre chose, sinon tu ne te marieras jamais.
- Si tu le dis.
- Au fait,
- Oui,
- J'avais aperçu sa copine de l'époque.
- Huhum.
- Comment s'appelait-elle, déjà ?
- Heidi, je crois. Et ?
- Nous avions échangé et il semblait que ça n'allait plus entre elles.
- Huhumm.
- Sais-tu pourquoi ?
- Non.
- J'avais eu vent des rumeurs selon lesquelles, Rustine avait été enceinte.
- Ah bon ? Fait-il en arquant un cil.
- Oui. Tu étais son meilleur ami, à l'époque.
- Je n'ai eu vent de rien.
- Ok.
- Si elle avait été enceinte, elle aurait presque le même âge que ton aînée.
- C'est vrai.
PENDANT CE TEMPS...
[ JENEYA ]
- Que comptes-tu faire ? Demande-t-elle en prenant place près de moi.
- Je n'en sais rien, maman.
- Courage ; elle me caresse la main.
- Je ne sais pas par où commencer, je t'assure.
- Je te comprends.
- Je sais qu'elle m'avait appelé Laya, à ma naissance. Elle a laissé une chaîne en or blanc avec un médaillon sur lequel sont gravés, Laya et des initiales R.M. Maman, que peut-on faire avec tout ceci ? Toute la layette est estampillée, Laya. Je ne peux même pas essayer de remonter jusqu'au magasin.
- Il est fermé depuis une dizaine d'années, déjà.
- Je sais qu'elle devait faire partie de la classe bourgeoise car la layette en elle-même, n'était pas donnée.
- C'est clair.
- Si elle était de la haute, pourquoi m'a-t-elle abandonnée ?
- ...
- Elle aurait pu me laisser à mes grands-parents au lieu de me laisser cette dame.
- C'est vrai mais c'est aussi grâce à elle, que nos routes ont pu se croiser.
- C'est vrai.
- Maman, depuis que je sais avoir été abandonnée, je me suis posée moult questions. Avait-elle honte de moi ? Que me reprochait-elle ?
- Jen, Jen, ne te mets pas martel en tête. La vie est tellement compliquée, elle avait surement ses raisons.
- Je ne vois aucune raison pouvant me pousser abandonner la chair de ma chair.
- Jen, je comprends ton ressenti mais une fois de plus, crois-moi, la vie est compliquée.
Je vais m'asseoir à la table et regarde au loin, elle me rejoint quelques minutes plus tard.
- Maman,
- Oui, Jen.
- J'ai besoin de prendre du recul, besoin de voir clair dans tout cela.
- Huhumm, je comprends.
- Les partiels terminés, j'irais passer un peu de temps en Afrique du Sud. Rustine,
- Oui, Rustine.
- Elle a dit avoir une famille là-bas, et se dit prête à me recommander. Je vais faire d'une pierre deux coups : prospecter pour le compte de l'empire Stern et réfléchir à tout ce qui se passe dans ma vie.
- Ok.
- Je ne veux en aucun cas vous faire du mal, mais j'en ai besoin.
- Ok, je comprends. Et Elric ?
- Je le lui dirai, tout à l'heure.
- Ok.
Elle sort de de la pièce, je serre son journal tout contre moi, puis m'assieds et me mets à le feuilleter.
...CARLA...
Je m'adosse à la porte et ferme les yeux, impuissante face à la détresse de ma fille. Les parents comprendront facilement ce que je vis en ce moment. Jeneya est là, sans vraiment être là. Elle essaie de paraître détachée mais ses yeux, fenêtre de son âme, ne mentent pas.
Je me rappelle encore du jour où elle est entrée dans ma vie, comme si c'était hier.
****FLASH-BACK DE 23 ANS***