Partie 67 : à ne rien comprendre

Write by labigsaphir

- Amicie, s'il te plait, recule un peu le berceau. Voilà, merci.

- Pour une femme qui va accoucher dans deux semaines, tu as de l'énergie à revendre.

- Je t'assure, fait Odessa non-loin de-là.

- Odessa, s'il te plait, bouge légèrement le tableau au mur.

- Comme cela ? Demande-t-elle en me regardant.

- Oui, c'est parfait, fais-je en lui montrant les deux pouces.

- Tu sais quoi, Jen ?

- Oui, Amicie.

- En tant que future maman, tu es des plus chiantes, je t'assure.

- Ha ha ha ce sont les hormones, mes hormones.

- Aka, tu es le genre de femme enceinte que l'on a envie de gifler à tout bout de champ.

- Yieuuuu c'est une sage-femme qui parle comme ça ?

- Aka que nous ne sommes pas des humains ?

- Eukieee Amicie, je n'aurai pas envie de venir accoucher chez vous, rebondit Odessa.

- Ah ça ! Fais-je en tapant des mains.

- Elle ira accoucher à la Clinique des Emailleurs, n'est-ce pas ?

- Tu as tout compris, répondis-je en secouant la tête.

- Jen, on t'a déjà demandé de ne pas rester debout. C'est même quoi ? Tu veux notre mort sur la conscience ou pas ?

- Amicie, laisse-moi tranquille, dis donc.

- Te laisser tranquille pourquoi ? Intervient Odessa les mains sur les hanches.

- Je te dis, ma chérie. Ses deux mamans et ses deux papas, sans compter ses oncles et tantes et double, nous appellent tout le temps.

- Mais pourquoi ne m'appellent-ils pas directement ? Demandai-je, toujours étonnée par cette façon de faire ?

- Parce que tu leur dis que tu te reposes, alors que tu travailles, pardi !

- Akieuuuu, Amicie, me crus-je obligée de dire, vas-y doucement. Na ya (c'est comment) ? Il ne faut pas effrayer mon bébé.

- Que c'est ton enfant ? Me coupe Odessa en me forçant à m'asseoir sur la chaise à bascule.

- Odessa, je ne suis pas un bébé, tu sais.

- Je m'enfoutasse, Jen. Assieds-toi, dis donc.

- Tu as trop appuyé sur « déranger ». Plus têtue que toi, il n'y a pas.

Le téléphone d'Amicie sonne, elle regarde l'écran puis se tourne vers Odessa, qui affiche un sourire avant de laisser Amicie sortir.

- Que me cachez-vous, toutes les deux ? Suis-je obligée de demander en observant leur manège.

- Rien qui puisse t'intéresser ou te regarder, répond Odessa d'emblée.

- Mais encore ?

- Tu nous emmerdes, ma cocotte.

- Ok, c'est bon. Pas besoin de dire les gros mots. Attends, je pose les mains sur les oreilles de mon bébé.

- Chouagneuuuuuuu, comme quoi la tata est sauvage.

- Tu fréquentes trop les camerounais, Odessa.

- C'est ça même !

- Je ne mens pas, tu sais que c'est vrai.

- Je suis contente que tu ais pu déménager et rentrer dans celui-là ; elle regarde autour d'elle et sourit.

- N'est-ce pas ? La chambre universitaire, c'est terminé.

- Il faut bien avancer dans la vie, ma chérie.

- Je te dis, murmurai-je en repensant à l'autre et ce qui m'est arrivé les semaines précédentes.

- C'est vrai que nous avons failli te perdre, Jen. Nous avons vraiment cru vous perdre, le bébé et toi.

- Je sais, répondis-je le regard embué.

- Pourquoi ne veux-tu toujours pas nous dire ce qui t'était arrivé ?

- A quoi bon ressasser le passé ?

- Est-ce pour cela que tu as les larmes aux yeux en ce moment ?

- ...

- Qui avait déposé la gerbe de fleurs à ton chevet ?

- ...

- Ok, c'est bon. A quoi bon insister ? De toutes les façons, tu ne diras rien.

Amicie revient avec le sourire aux lèvres, fait un léger signe à Odessa qui se met de suite à sourire. C'est un peu comme elles, leur demander ce que tout cela signifie ne sert tout simplement à rien, elles ne répondront pas. Je ferme les yeux et repense au jour où je me suis écroulée et ai été rattrapée de justesse par Allan, alors que je tombais sur mon ventre.

Je me réveillée à l'hôpital, reliée à des appareils avec une ceinture autour de la taille, reliée à un monitoring. Je reconnais avoir eu peur pour mon bébé et éclater en sanglots, mais me suis calmée en écoutant le médecin qui me calmait. Après me revint en mémoire, les messages de Facebook et la fameuse photo, les larmes telles un ruisseau, se mirent à couler sans discontinuité durant quelques minutes. Les médecins et Allan, furent obligés de me morigéner afin de ménager ma tension. Nous pouvons mentir avec la bouche mais le cœur, lui, ne ment jamais. J'ai pleuré en silence toute la nuit car oui, jusqu'ici j'avais espéré qu'il me revienne mais avec cette photo, tout était perdu.

Le lendemain alors que je me reposais, essayant en vain de m'endormir, je vis entrer Louhann comme dans un mauvais rêve dans ma chambre. Elle tenait une gerbe de fleurs et un panier de fruits. Je ne me souviens plus de son charabia mais je me mis à convulser, perdant ainsi connaissance. Au réveil, je m'entretins avec mon médecin qui m'annonça que je pourrais perdre le bébé en faisant de la pré-éclampsie et qu'il fallait à tout prix me calmer. Je me mis à prier et décidai de ne plus verser une larme pour Elric. Je risquai de perdre mon bébé à cause de Loutruc et son acolyte, non, non et non. C'est ainsi que je remontai rapidement la pente, me promettant de ne plus jamais flancher, plus jamais.

TROIS JOURS PLUS TARD...

Depuis mon réveil, j'ai l'impression que mon corps va trop vite et des migraines à répétition. J'ai tout d'abord essayé de le cacher à mes « infirmières », mais pas longtemps. Une tête passe à travers l'entrebâillement de la porte, je fais mine de m'intéresser à la personne.

- Ça va, là-bas ?

- Oui, mama, répondis-je en reconnaissant la voix de Carla.

- En es-tu certaine ? Insiste-t-elle en rentrant dans la chambre.

- Non, avouai-je en essayant de bouger.

- Que se passe-t-il ? Demande Rustine, étant au salon.

- Jen, Jen, que se passe-t-il ? Fait Carla en accourant et posant la main sur mon front.

- Qu'a-t-elle ? S'enquiert à son tour, Rustine.

- Elle est très chaude, très chaude, répond-elle en se tournant vers elle.

- De l'eau, de l'eau, j'en ai besoin, réussis-je à dire.

- De l'eau, de l'eau, je vais en chercher, réagit Rustine.

Elle revient quelques secondes plus tard, elles m'aident à me redresser et me font boire l'eau comme du petit lait. Rustine insiste pour que nous nous rendions de suite à l'hôpital Carla finit par accepter et appelle les pompiers. Arrivées à l'hôpital, les médecins diagnostiquent une éclampsie et m'annonce qu'ils vont provoquer l'accouchement. Le mécanisme est mis en place, je demande à ce qu'Amicie et Odessa soient prévenues. Elles arrivent une heure plus tard, affolées et restent à mon chevet.

PENDANT CE TEMPS...

[ LOUHANN ]

Cela fait deux semaines que plus rien ne va entre Elric et moi, j'ai vraiment du mal à le comprendre. Après son retour de voyage, nous avons passé une bonne semaine et après, cela a été la descente aux enfers. Je ne sais pas si c'est parce que j'ai demandé à Elric de me faire cadeau d'une maison comme cadeau de mariage. Quoi ? Pourquoi ouvrez-vous grand les yeux ? Certains hommes offrent une voiture de luxe à la leur future femme et moi, je veux juste une villa. L'immobilier paie toujours, vous le savez parfaitement. Je pourrais mettre mon enfant et moi, à l'abri du besoin.

Je me lève, vérifie qu'Alden va bien et rentre m'asseoir en cogitant. Où est-ce qu'il pourrait bien être en ce moment ? Serait-il rentré entre les jambes de cette idiote de Jen ? Si tel était le cas, une amie habitant près du domicile de cette gourde, me l'aurait dit. Il n'a d'ailleurs jamais mis les pieds chez elle.

Je prends mon portable et compose le numéro d'Elric, il décroche à la première sonnerie.

- Comment va mon fils ?

- Bonjour. On dit, bonjour, Elric.

- Comment va mon fils ?

- Bien, merci et toi ?

- Que veux-tu, Louhann ?

- Comment peux-tu autant changer en si peu de temps ?

- Pourquoi m'appelles-tu si tout va bien avec le petit ?

- Elric, je te rappelle que nous sommes fiancés.

- Tu peux oublier les fiançailles, je n'ai plus la tête à cela.

- Pardon ?

- Louhann, tu as vraiment cru que je suis assez fou pour passer ma vie aux cotés d'une dérangée comme toi ?

- Mais la bague ?

- La bague n'est qu'une bague et rien d'autre. N'oublie pas que c'est nous qui donnons la valeur aux objets.

- Elric que t'ai-je fait ?

DRIIIIIIIIING...DRIIIIIIIIIIIING...DRIIIIIIIIIING...DRIIIIIIIIIIIING...

- Ne quitte pas, je reviens.

- J'ai mieux à faire que d'écouter tes fadaises.

- Ne quitte pas s'il te plait.

CLIC...Il raccroche, je vais le rappeler de toutes les façons.

- J'arrive ! Dis-je en me dirigeant vers la porte.

Je hâte le pas et vais ouvrir la porte, le facteur et un de ces appareils sur lequel, l'on est obligé de signer m'est tendu.

- Bonjour monsieur.

- Bonjour Mademoiselle. Vous êtes bien Mademoiselle ******* Louhann ?

- C'est bien moi.

- Signez ici, je vous prie.

- Ok, dis-je en m'exécutant.

Je signe et récupère l'enveloppe, regarde le nom et adresse de l'expéditeur. Je suis étonnée par le fait que cela vienne du JAFF, car entre Elric et moi, tout avait pourtant été clair. Après qu'il soit revenu de lui-même, nous avons décidé de faire l'impasse sur le passé afin de reconstruire l'avenir.

Je reconnais lui avoir fait du chantage mais tout le monde peut comprendre que j'étais désespérée. Ça a été le grand amour avec Elric et puis, la rupture si brutale. Et là, c'est une convocation pour une audience d'urgence, dans deux jours. Mais pourquoi ? Qu' a-t-il de si urgent ?

[ JENEYA ]

BIP..BIP...BIP...BIP...BIP...BIP...BIP...

- Docteur, que se passe-t-il ? Demande Carla en se tournant vers le médecin.

- Je crois qu'il est temps de l'emmener en salle d'opération.

- Pouvons-nous assister à l'opération ? Intervient Rustine.

- Non, ce n'est vraiment pas possible.

- Mais pourquoi ? Insiste Rustine.

- C'est ainsi, madame, désolée.

En quelques minutes, la salle de remplie d'infirmières, docteurs et anesthésistes. J'essaie de ne pas paniquer, ne pas montrer mes émotions mais n'en mène pas large. Alors que je suis dans la salle, prête à passer entre les mains de l'équipe, j'entends du brouhaha au dehors. Je me redresse un tout petit peu et regarde vers la porte.

- Non, vous ne pouvez pas entrer.

- C'est moi, le père de l'enfant. Bon sang !

- Et même, vous ne pouvez assister à l'opération.

- J'ai tout de même le droit de lui parler, réplique l'homme que je soupçonne être Elric.

- Docteur, laisses-le passer, je vous prie, dis-je sous une impulsion soudaine.

- Mademoiselle, c'est une opération, un acte chirurgical.

- Juste pour cinq minutes, suppliai-je.

- Ok, juste cinq minutes, vous avez dit.

- Merci, fais-je reconnaissante.

Une infirmière va ouvrir la porte, puis Elric rentre telle une furie dans la pièce, bousculant une à deux personnes. Je ne sais pas s'il y a plus sauvages que les Bulu...Ah oui, les Bassa...krkrkr...pardon, ne me tuez pas, les Bassa...N'oubliez pas que mon père est Banimbeck et les Banimbeck sont des bassa, personnes réputées comme se promenant avec des factures et machettes.

- Que fais-tu, ici ? Demandai-je de but en blanc.

- Il faut que je te parle, Jen, il faut que je te parle.

- Qu'as-tu à me dire ?

- Euh...Pas devant tout ce monde, fait-il en balayant la salle du regard.

- Ah bon ? Aurais-tu oublié les mots durs dans un supermarché devant tous et les multiples humiliations ?

- Non, j'en suis navré, Jen. Je sais avoir eu le comportement d'un gougeât, mais j'avais une raison de le faire.

- Ah bon ? Fais-je hilare.

- Oui, j'avais une raison de la faire. Il fallait à tout prix que je fasse croire à tout le monde que je te déteste. Jen, il fallait que je vous protège, notre enfant et toi.

- N'importe quoi ! Elric, je ne tiens pas à entendre tes mensonges.

- Jen, le fait de t'avoir vue au supermarché avec Allan, m'a juste fait accélérer les étapes de mon plan.

- Elric, tu sais quoi ? Je n'ai rien à foutre de tes conneries !

- Non, Jen, écoute-moi, je t'en supplie.

- Non, mon enfant naîtra dans de bonnes conditions et ne manquera jamais d'amour.

- Jen, je suis revenu pour de bon. Je suis maintenant libre, je t'assure, libre.

- Alléluia, il est revenu, le papa perdu, la brebis égaré

CLAP...CLAP...CLAP...CLAP...

- Il est temps, annonce le médecin.

- Je veux voir ma fille naître.

- Non, tu n'as pas de fille, ici.

- Jen, s'il te plait, s'il te plait.

- Sors de cette salle ! Sors d'ici !

- Jen, je t'aime et t'ai toujours aimée.

- Foutez-le à la porte !

- Docteur, intervient une des infirmières, l'enfant est en souffrance fœtale.

- Jeune homme, veuillez sortir, je vous prie. 

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