Phillipe Liu

Write by Plénitudes by Zoé

Chapitre 2 : Phillipe Liu


Je suis assise sur mon lit à compter le temps qui passe. Nous n’avons pas de montre mais ça doit faire trente minutes que nous sommes revenus de la pause et donc trente minutes de retard pour Philipe. Ce qui m’horrifie au plus haut point. Il sait qu’on ne me fait pas attendre. Je dois encore attendre un quart d’heure avant que l’une des gardiennes ne vienne me faire sortir de ma cellule pour une visite. Je la suis sans me faire prier et en imaginant déjà comment je vais engueuler cet idiot.


Je serre la mine et m’assois face à un Phillipe pas très sûr de lui et qui fuit mon regard. Je sens que quelque chose ne va pas mais j’attends qu’il parle en premier, cela me permet de garder mon ascendant sur lui, plus il se sent mal à l’aise et moins bien il pourra me mentir.


Phillipe (au bout d’un moment) : Mrs Bright, comment allez-vous ? On vous traite bien au moins ?

Moi (silence) : …

Phillipe (se grattant la tête) : J’ai une mauvaise nouvelle à vous annoncer et je ne sais pas par où commencer.

Moi : …

Phillipe : Les fédéraux ont découvert vos comptes aux îles Caïmans et les ont tous gelés. Je n’ai rien pu faire.

Moi (me penchant vers lui) : Depuis combien de temps travailles-tu pour moi Phillipe ?

Phillipe : Depuis 4 ans Mrs.

Moi (tapant sur la table) : Et tu penses toujours pouvoir me mentir ? 

Phillipe : Non, Mrs. Bright, c’est la vérité je vous assure…

Moi (le saisissant par le col) : Ne me prends pas pour une conne ! Qu’as-tu fait de mon argent ?


Une chose que je n’aurais jamais pu imaginer dans mes rêves les plus fous se produisit alors. Phillipe qui est mon assistant, homme de confiance et bras droit depuis 4 ans se métamorphosa en une personne qui m’était totalement étrangère. Il éclata de rire avant de saisir ma main qu’il tordit violemment pour me faire lâcher prise.


Phillipe : Ce que tu peux être naïve ma pauvre, c’est moi qui t’ai livrée aux flics, tout ce temps où je t’ai vu agir à ta guise, j’attendais le moment parfait pour te faire tomber !

Moi (me tenant la main douloureusement) : Mais pourquoi, je ne comprends pas.

Phillipe : Cela ne m’étonne pas, belle-maman. Eh oui, je suis le fils de Conrad Bright. Je ne suis qu’à moitié asiatique, du côté de ma mère. 

Moi (sous le choc) : Tu veux te venger de la mort de ton père ? Eh bien sache…

Phillipe (éclatant de rire) : Je m’en fiche de ce gros porc qui me servait de père. Je ne suis là que pour récupérer sa fortune qui me revient de droit. En compensation de toutes ces années où il nous a laissés sans le sou ma mère et moi après avoir abusé d’elle.

Moi : …


Trop choquée pour dire quoi que ce soit, je me lève doucement et me dirige vers le couloir et demandais à une gardienne de me ramener en cellule. Au fur et à mesure de mes pas, j’entendais Phillipe qui continuait à rire de son rire gras. Mon argent, le fruit de ces dix années de labeur, tout ce que j’ai traversé pour réunir de quoi couler des jours tranquilles, tout est parti en fumée parce qu’encore une fois j’ai fait confiance à la mauvaise personne. Comment est-ce possible ? Où ai-je merdé ? 


Je me laisse tomber lourdement sur mon lit et me roule en position fœtale. Je ne me suis plus sentie aussi désemparée depuis ce fameux jour à l’aube de mes quinze ans.


*****


C’était une matinée pluvieuse, nous étions en vacances et comme d’habitude j’avais brillé par mes résultats scolaires. J’étais toute fière parce que pour une fois, mes parents m’avaient permis de me lever à l’heure que je voulais pour me récompenser disaient-ils. Je pouvais les rejoindre aux champs quand je le sentirais. C’est donc vers 10h du matin que je me suis mise en route, une bassine sur la tête pour la récolte. Je chantais et avançais en esquissant quelques pas de danse à l’abri des regards, c’est du moins ce que je pensais. J’ai entendu des pleurs d’enfant à mi-chemin et je me suis retournée pour voir si je pouvais voir d’où cela venait mais rien. J’ai donc posé ma bassine au sol et me suis un peu enfoncée dans la forêt en suivant le bruit des pleurs. J’ai fini par tomber sur un petit garçon d’à peine six ans qui se tenait le genou. J’ai voulu me pencher pour voir ce qu’il avait quand j’ai senti qu’on me soulevait du sol.


Deux hommes, jeunes et robustes que j’ai reconnus comme des employés de tonton Somié m’avaient soulevée de sol, et l’un d’eux m’a chargée sur son épaule comme un vulgaire sac de maïs, s’est retourné et m’emmenait je ne sais où. J’ai eu le temps de voir l’autre glisser une pièce au petit. C’était bel et bien un piège. Tout le long du trajet, je me suis débattue, j’ai crié, hurlé, griffé, frappé mais sans aucun résultat. Ils m’ont emmenée dans la maison de tonton Somié, m’ont attachée avec une corde et m’ont jetée sur une natte posée au sol, je me suis écorchée les bras dans le processus. Je suis restée là pendant des heures à pleurer toutes les larmes de mon corps et à prier quiconque m’entendait de me sortir de là.


Dans la soirée, le même homme est revenu me détacher et me tira jusqu’au dehors où mes parents étaient assis ainsi que tout le village et même le chef était là. En voyant mes parents j’ai cru que mes prières avaient été entendues mais plus j’avançais et plus je sentais que quelque chose n’allait pas. Ne devraient-ils pas accourir et me récupérer des bras de cet homme qui me faisait du mal ? Et pourquoi tout le monde était-il là ? Il n’y avait pourtant aucune fête aujourd’hui. Ce que j’ignorais c’est qu’il y avait bien une fête mais que j’étais à l’honneur et que j’étais la seule à ne pas être informée.


Les mamans et femmes mariées du village se sont levées et m’ont entrainée derrière la maison pour me faire me doucher, m’habiller et me coiffer. C’est là que je compris ce qui se passait, c’était arrivé à une camarade de ma grande sœur il y a quelques années et c’était le même pagne qu’on lui avait mis. On me mariait de force. Ce fut la première fois de ma vie que je me sentis trahie et désespérée, mais malheureusement cela ne serait certaniement pas la dernière.

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