
Ressentiments
Write by Opale
***Steeve Gbané***
Elle s'exécute…
Victoire (toute ouïe) :….
Moi(la regardant) : euh…en faite ce que je te disais tout à l'heure dans la voiture était vrai. J'ai eu l'impression que tu ne m'as pas saisis du coup je veux revenir sur le sujet. Je suis le genre de mec à qui tout réussit. À 31 ans, je suis PDG de ma propre banque en France. En plus j'enchainais que des plans culs car les histoires d'amour ne m’ont jamais intéressé. Je voyais cela comme une perte de temps. Et lorsque je t'ai rencontré, très franchement j'ai apprécié ta façon d'être, ton naturel, ce petit côté naïf et insouciant qui te caractérise. Tu as ce petit truc qui vient embellir ta personnalité. De nos jours, il est assez rare de rencontrer des filles aussi stable et qui ont la tête sur les épaules comme toi. Sérieusement, tu as tout pour plaire. Et d'accoutumé, ce sont les filles qui me courent après. C'est pour cette raison que j'ai eu peur que tu t'attaches trop à moi.
Victoire (me regardant) : …
Moi(sur la même lancée) : en faite j'avais pensé que tu avais commencé à éprouver des sentiments c'est pourquoi j'ai préféré m'éloigner pour ne pas te faire mal. Parce que tu es une personne bien. Vu que tu as dis que ce n'était pas le cas. C'est donc temps mieux parce que j'avais peur de te faire du mal. Je tiens à notre amitié et je ne veux pas la perdre. Aussi, je m'excuse pour mon comportement de ces derniers temps. J'ai n'ai pas été présent pour toi mon amie. Pardonnes moi.
Victoire (me regardant) :….
Moi : je suis aussi désolé pour ce qui t'ait arrivé au bureau avec ta collègue. Je suis désolé de t'avoir blessé la dernière fois au téléphone.
Victoire : non, t'inquiète c'est oublié. Maintenant si tu dois me blesser pour m'envoyer dans ce genre d'endroit alors blesses moi tous les jours.
Nous éclatons tous les deux de rire.
Victoire (amusée) : non, juste pour rire !
Moi : wep je sais. Pas besoins de te blesser pour t'envoyer dans ce genre d'endroit tu sais. On revient quand tu veux.
Je lui tends la main qu'elle saisis puis nous rejoignons le petit groupe réunis autour du feu de bois pour le barbecue. L'ambiance est bonne. Elle me parle un peu plus d'elle. De son enfance, son âge, ses aspirations dans la vie. Moi aussi j’en fais de même. On évite bien entendu les sujets douloureux et melancoliques. C'est une personne joviale qui prend la vie du bon côté. Nous dinons sur place au restaurant.
Je commence sérieusement à aimer sa simplicité et sa compagnie. Mes sentiments à son endroit commencent à devenir de plus en plus fort. Et j'ai peur de tomber amoureux.
Après cette soirée, j’avise l'heure et il est 23h. Je m'éloigne un peu pour passer un appel vers le numéro de sa mère pour lui signifier que c'est demain que sa fille rentrera.
Le temps d'embarquer dans le yacht pour atteindre le port, il est 23h45.
Victoire (me regardant) : où m'envoies-tu ?
Moi(la main sur le volant) : à la maison.
Victoire : mais ce n'est pas la route de chez moi !
Moi(concentré sur la route) : j'ai la tête de celui qui a envie de se faire braquer ?
Victoire : non pourquoi ?
Moi (zen) : mais pourquoi veux-tu que je rentre dans ton quartier à cette heure de la nuit ?
Victoire(sarcastique) : ahan ? J'avais même oublié que ma mère et moi étions des dealer de drogues !
Moi : attends Victoire, on dirait que ça te fais plaisir de mal me parler. Je suis quand même ton grand frère hein ! Ne l'oublies pas.
Victoire(ironisant) : hmmm grand frère seulement ? Désolé oh Igweh ! (Roi en langue yoruba)
Nous éclatons de rire tous les deux.
Moi(la main sur le levier) : tu me provoques !
Victoire(le rire dans la voix) : qui aimes bien, titille bien !
C'est ainsi que nous arrivons chez moi à Bietry. Une villa de trois chambre que j'ai acheté par le biais de ma tante. J'y séjourne depuis mon arrivée.
Quand nous entrons dans le séjour pendant qu'elle part prendre place dans le fauteuil moi je monte me changer dans ma chambre.
Moi(m'arrêtant à son niveau) : fais comme chez toi.
Victoire(admirant les lieux) : belle demeure !
Moi(allumant la télé) : merci, je reviens.
Je vais prendre une douche puis je reviens lui tendre deux draps et un pyjama qu'elle prend.
Moi(la regardant) : viens je vais te montrer ta chambre.
Victoire (se levant) : ok.
Elle me suis…
Moi(ouvrant la chambre) : c'est ici ta chambre, la cuisine est en bas à droite, tu as tout le nécessaire dans la salle de bain. Si tu as besoin de quelque chose fais moi signe (baillant) Bonne nuit et à demain. Je tombe de fatigue.
Victoire(entrant dans sa chambre) : merci et à toi pareillement.
C'est sur ces mots que l’on se quitte. Quand je me glisse dans les draps, je ne perds pas de temps avant de m'en dormir. Un sommeil profond. Jusqu’à ce que je sois réveillé à 5h par une forte envie d'uriner. Je me précipite dans la salle de bain pour me vider la vessie.
Mais quelque chose m'intrigue. J'ai l'impression d’entendre des bruits en bas. Au fur et à mesure que je m'avance vers la porte, le bruit se fait plus persistant.
Par mesure de prudence, je me saisis de ma batte derrière la porte pour descendre vérifier. Peut être que c'est un voleur.
À pas feutré, je descends tout doucement pour surprendre la personne qui vient troubler mon sommeil à cette heure de la nuit.
Moi(surpris) : VICTOIRE ! Que fais-tu ?
Victoire (passant le balaie) : tu ne vois pas ? Je passe le balaie !
Moi(ebahi) : à 5h?
Victoire (faisant les gestes) : je voulais me lever plus tôt mais je n'ai pas entendu mon réveil sonné à cause de la fatigue…pardon ! Ne te fâches pas. Je vais faire vite.
Puis elle se remet à balayer…
Moi(interloqué) : sérieux ?
Elle se lève encore une fois pour me regarder.
Victoire (les mains aux hanches) : je t'ai demandé pardon non ! Après le balayage, je vais passer la serpière….
Moi(la coupant) : Victoire es-tu normale ?
Victoire (zen) : oui, je t'ai dis que je ne me suis pas vite réveillée non ! Pardon, stp ne te fâches pas ! Je vais finir tout à l'heure. Le travail même n'est pas assez dans cette maison. Je peux tout faire…
Moi( sur un ton sec) : Montes te coucher et tout de suite.
Sur ce coup, elle ne m'a pas vu venir. Elle est d'abord surprise puis elle pose ensuite le balaie doucement au sol et passe devant moi pour monter dans sa chambre. Moi aussi j'en fais de même.
C'est à 10h30 que je me réveille. Le temps de faire ma toilette et de m'habiller, il est 11h. Quand je sors de la chambre, je ne la retrouve nulle part dans la maison. Je vais frapper à sa porte.
Moi(toquant) : Victoire ? T'es là ?
Victoire(voix ensommeillée) : oui…
Moi(doux) : t'es encore couchée ?
Victoire (depuis la chambre) : je viens à peine de me réveillée.
Moi(la tête contre la porte) : d'accord prends le temps de prendre une douche, je suis en bas.
Victoire : ok.
Je prends la voiture pour aller prendre le pain et quelques viennoiseries à la boulangerie du coin. De retour, je m'attèle à faire le petit déjeuner…enfin le déjeuner…bah j'sais plus trop vu l'heure qu'il fait.
Victoire (derrière moi) : bonjour !
Moi(battant les œufs) : salut ! Ça va ? T'as bien dormi ?
Elle prends place sur un tabouret de la petite table à manger de la cuisine.
Victoire (soupirant) : oui, tu sais cuisiner ?
Moi : tu auras le temps d'apprécier tout à l'heure. Dis moi, tu faisais quoi debout à 5h du matin ?
Victoire (tête baissée) : je voulais juste passer le balaie. Je ne savais pas que tu allais te fâcher.
Moi(la regardant) : lèves la tête et regardes moi.
Ce qu'elle fait…
Moi(la regardant) : ok, je me suis fâché parce que tu étais sensée te reposer à 5h et non venir travailler pour moi. Tu n'es pas ma servante ici mais mon invitée. Pour les travaux ménagers, il y a déjà une femme qui passe deux fois par semaine.
Victoire (petite voix) : je suis désolée alors !
Moi(taquin) : t'inquiète(jouant avec sa pommette) Et puis changes moi cette petite mine là !
Elle éclate de rire…
Victoire (souriante): qu'est-ce qu'on mange ?
Moi (posant la poêle sur le feu) : la spécialité du chef, des œufs brouillés.
Victoire(moqueuse) : juste ça ? Je paris que ça ne sera pas doux !
Moi(versant un peu d'huile dans la poêle) : gouttes d'abord et tu en jugeras ensuite.
Victoire(amusée) : j'attends alors.
***Diane Aka***
Maman(me secouant) : lèves toi, tu vas venir m'aider au lieu de te jouer les paresseuses. Deux semaines que tu es enfermée dans la maison, tu n'es pas fatiguée ? Pendant que tes camarades partent chercher les bons gars riches, toi tu es dans ma maison à ne rien faire. Ce n'est pas parce que dernièrement tu as eu des gars moyens qui ont envoyé quelques cinq sacs de riz de 50kg et des cartons de spaghetti en plus du fait que tu as payé les arriérés de la maison en avançant le loyer de trois mois que tu vas trop penser que tu as réussi. Les filles de ton âge construisent des châteaux pour leurs mères comme dans les films.
Moi(la regardant) :….
Maman(continuant) : alors que tu n'es même pas fichu de me faire sortir de ce taudis…eeeeh ! J'ai accouché cadeau ! J'ai eu mal au ventre cadeau ! Bonne à rien(sortant de la chambre) tu es une bonne à rien….
Elle sort encore d'autres paroles blessantes mais je ne réponds rien. Toujours en train de me rabaisser et à me comparer aux autres. Qu’elle fasse donc ce qu'elle veut. Je n'ai plus d'énergie à gaspiller sur elle. Ni la force de me battre contre elle.
Depuis mon enfance, ce sont les mêmes mots ainsi que les mêmes refrains que j'entends. Que suis une bonne à rien. Au final, j'ai fini par m'y faire. Tout compte fait, elle a raison.
Je suis là à gâcher toutes les petites opportunités que la vie m'amène. Quelque part, je pense que je deviens pire qu'elle. À trop vouloir tirer mon épingle du jeux, j'ai fini par devenir une personne que je ne suis pas réellement.
La misère et la précarité dans lesquelles j'ai grandi m'ont rendu amère. La frustration de ne pas avoir certaines choses basiques. Le sentiment d'être toujours limité face aux situations. C'est difficile et compliqué. Faut vivre pour comprendre.
S'était supportable quand papa était encore en vie. Mais lui aussi m'a trahi lorsqu'il s'en est allé. Il m'a laissé avec maman qui ne fait que me rabaisser et me mettre en compétition avec les autres.
C'est un peu tard de le dire mais maman a toujours voulu vivre ses rêves de jeune fille à travers moi. Quand je l'ai compris, j'avais déjà pris goût à cette vie. Celle de convoité, de jalouser et d'être aigrie. Car elle m’a toujours dit que ce que les autres possédaient était pour moi aussi. J'y aie pris goût.
Je ne cherche pas à me dédouaner de mes erreurs ou à fuir mes responsabilités, bien au contraire j'en ai honte. Moi-même je sais que je suis une mauvaise personne car ma conscience me le rappelle incessamment.
Petit à petit, je suis devenue un monstre. Toujours prête à rabaisser et à s’accaparer du bien d'autrui de gré ou de force. Car c'est bien ce que j'ai appris durant toutes ces années. Quand tu veux quelque chose, faut tout mettre en œuvre pour l'avoir. Que ce soit par la bonne ou la pire des manières. Le but c'est de l'avoir.
Depuis la scène au bureau, j'ai ce sentiment désagréable vis-à-vis de ma personne. Je me dégoute. J'ai poussé le bouchon un peu trop loin. Personne ne m'a demandé d'aller jusque là…non personne. C'est cette fille détestable et remplit d'orgueil qui l'a fait, oui c'est moi seul qui l'aie fait.
Et je l'ai fait de mon propre chef. Je sais que je suis impardonnable et que je suis une bonne à rien. Bref, d'autres sont fait pour briller sur l'esplanade et les gens comme moi sont fait pour foutre la merde dans le monde.
Tout compte fait personne ne viendra à mon secours car personne ne m'aime. Personne ne me comprendra car tous ont vu la méchante personne que je suis.
Jusqu'ici, ils ne m'ont pas appelé pour me dire que j'étais renvoyé mais je sais que c'est le cas. Et ils ont amplement raison. De toute façons qui voudra d'une mégère comme moi dans son entreprise.
Maman( su le pas de la porte) : bonne à rien, tu es encore couchée ? Je ne t'ai pas demandé de venir m'aider ?
Moi(agacée) : ah maman ! Tu me fatigue.
Maman : Ah…Ah…Ah ! Tu cris sur moi ? C'est sur moi que tu cris maintenant ? (S'asseyant à même le sol) venez oh ! Venez ! Il y a Diane qui veut me frapper maintenant ooooohhhh !!
Moi(m'asseyant sur le lit) : arrêtes ça, tu exagères maman ! Et tu es ridicule.
Maman(me regardant) : ah bon j'exagère ? Tu trouves que ta mère que je suis exagère ? Quand ton idiot de père est parti et qu'il vous a laissé entre mes mains, c'est bien moi qui me suis occupé de vous pendant tout ce temps. N'est-ce pas moi qui t'es nourri et blanchi ? Espèce de sale ingrate.
J'en avais marre qu'elle parle ainsi de mon père. Qu'elle me rabaisse oui mais pas mon défunt père. En plus c'est une menteuse.
Moi(furieuse) : où est-ce que tu m'as blanchi ? Où est-ce que tu m'as blanchi maman ? Dis plutôt que tu m'as appris à être manipulatrice et à m'accaparer des bien des autres. Tu m’as blanchi et puis j'ai été obligée de coucher les hommes à mes 14 ans pour me nourrir dans cette maison ? Tu m'as blanchi et puis je me suis fait renvoyé de l'école à maintes reprises par faute de fourniture impayé ? Tu m'as blanchi et puis il a fallu que je couche plusieurs hommes à la fois pour espérer avoir un niveau d'étude ? Tu peux me parler de tout sauf de ma propre histoire. Et puis, respectes la mémoire de mon père car même mort il vaut mieux que toi.
Maman(se levant brusquement) : ai-je mal fait Diane ? Dis moi si j’ai mal fait de te montrer 2 ou 3 codes pour t'en sortir dans la vie ? Ai-je mal fait de t'avoir aider à briller un peu comme les filles de ta génération ? Remercie moi plutôt car toutes les mères ne sont pas comme moi. Je suis un cerveau et je crée des stratégies pour que tu puisses t'en sortir un peu car la vie te cogne dure. Et ça se voit sur toi, crois moi, ça se voit comme le nez au milieu du visage.
Moi(sarcastique) : cerveau hein ? La NASA a même perdu un élément très pimpant de son équipe !
Maman (me regardant) : oui, oui je suis un cerveau (se pointant elle-même du doigt) qui t'a envoyé chez baba Ognangan et après ça, que s'est-il passé ? N'est-ce pas après cela que les hommes avec beaucoup d'argent et avec des grosses voitures ont commencé à te courir après ? Des hommes friqués, je ne parle pas de ton Fulbert avec sa grosse culotte de cacao hein.
Moi(avec véhémence) : maman tu m'exaspère…
Maman (me coupant) : Ekeeeuuuh ! C'est avec moi que tu parles le gros français ? Pardon, ce n'est pas moi qui aie fait qu'il t'ont attraper la main dans le sac. Moi je te donne juste les codes et à toi savoir les développer !
Moi(sortant brusquement du lit) : mieux je pars pour ne pas te manquer de respect plus que ça !
Maman(derrière moi) : c'est mieux ainsi car c'est encore moi la propriétaire de cette maison, sale idiote et ingrate…
Je sors complètement de la cours pour aller m'aérer l'esprit dehors. Je trouve un groupe d'enfant jouant et riant gaiement. Leurs joie de vivre et leurs innocence m'apaise. Adolescente, je voulais être institutrice. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle j'ai refusé d'avorter de ma grossesse quand maman me l'a proposé.
Car j'aime bien voir les enfants s'épanouir. Si je le pouvais, je redeviendrai un enfant afin d'oublier ma dure et triste réalité qui me frappe.
Marie(accourant vers moi) : maman…maman…tu es sortie ? Tu n'es plus malade ?
Moi(la réceptionnant dans mes bras) : non princesse, maman t'a vu et elle va mieux. C'est à qui le jouet que tu tiens dans les mains ?
Marie(petite voix) : j'ai…
En un rien de temps, je suis entouré par une ribambelle d'enfants.
La petite fille(me regardant) : tantie…tantie, Marie a pris mon jouet.
Marie : non, c'est à moi !
Moi(la regardant) : je ne me rappelle pas t'avoir acheté ce jouet ma chérie. Je t'ai toujours dit de ne pas arracher le jouet de tes amies. Tu demandes juste et s'ils ne veulent pas tu laisses. Aller rends lui son jouet !
Elle le lui remet timidement.
Marie : merci tantie (regardant Marie) viens jouer avec nous Marie !
Moi(la faisant descendre) : vas jouer avec tes petites camarades !
Elles courent toutes en me laissant toutes seule comme si de rien était. La vie est si simple avec les tout petits.
Vraiment, je ne veux pas que mon enfant soit comme je suis. Je veux la meilleure éducation possible pour elle pour elle. Il n'y a qu'elle que j'ai de plus beau dans ma vie.