UNE LOUVE DANS LA BERGERIE
Write by Puma
C’est ce mercredi matin que l’association des parents d’élèves avait convenu de tenir une rencontre avec l’administration du collège d'enseignement général de Nanguézé. La séance faisait suite au scandale qu’avait produit certains parents il y a quelques semaines. Outrés par le refus d’écoute de leurs plaintes, ce fut au portail de l’établissement qu’ils s’étaient alors réunis pour dénoncer le silence de l’administration face à un mal qui rongeait l’avenir de leurs enfants. En effet, une dizaine d’élèves avaient souhaité se retirer du club féminin de football. Elles avaient confié à leurs parents qu’elles étaient harcelées par une de leur coéquipière. C’est l’association des parents d’élèves qui se fera intermédiaire pour tenter de rétablir le dialogue.
_ nous avons une rencontre tout à l’heure avec le directeur départemental de l’enseignement secondaire donc allons droit au but
Le directeur du collège d'enseignement général venait ainsi de lancer les discussions sur un ton qui déjà ne plaisait pas aux parents plaignants.
_ la sécurité des élèves est plus importante que votre rencontre avec le Directeur départemental, s’écria un parent d’élèves.
_ merci de nous recevoir, Monsieur le Directeur, en dépit de votre emploi du temps chargé. C’est pour le bien de nos enfants.
Le président de l'association des parents d’élèves tenta ainsi de remettre la balle à terre. Mais bien vite d’autres parents s’indignèrent.
_ quel emploi de temps chargé ? N’est-ce pas pour les enfants qu’il est là ?
_ s’il n’a pas le temps pour s’occuper du bon fonctionnement de l’établissement qu’il démissionne.
_ est-ce qu’il est même au courant du sujet de cette assise ?
_ c’est toujours ainsi au service public. Une fois au poste, on croise les mains pour attendre le salaire.
Les parents d'élèves s'y mirent tous à la fois. Perdu dans ce tohu-bohu, le président de l’association des parents d’élèves proposa un report de la séance. Mais très vite, il devint la cible de leurs médisances.
_ en tant que président de l’association des parents d’élèves, vous devriez vous ranger de notre côté.
_ C’est pour défendre la cause des parents que nous sommes que vous avez été élus.
_ nous qui avions confiance en votre sens de la justice.
_ apparemment vous êtes déjà corrompus.
_ cela n’est pas étonnant, ses enfants sont dans les bonnes grâces du directeur.
Cette fois, c’en était assez. Le président de l’association des parents d’élèves se débarrassa de toute retenue pour répondre à leurs accusations. Il ne pouvait accepter de tels propos à son égard, lui qui essayait simplement d’amadouer le directeur pour qu’il ait une oreille attentive à leurs plaintes.
Dans cette ambiance impropre à tout échange, le directeur prit le chemin de la sortie. Accompagné du préfet de discipline, du responsable des activités sportives et du coach du club féminin de football il se vit bloquer l’accès par les parents d’élèves furieux.
_ Vous ne partirez pas sans qu’on ait résolu le problème, pouvait-on entendre
_ Vous ne me retiendrez pas de force, répondait le Directeur du collège d'enseignement général
Résolus à leur idée, les parents plaignants ne purent éviter d’en venir aux mains avec le Directeur et sa délégation. Quand enfin il put trouver répit dans cette bataille imprévue, il décida de taper du poing sur la table. Un tel affront à l’autorité qu’il était, qui plus est devant ses administrés, ne saurait rester impuni.
_ je suspends les activités du club féminin de football . Et nous verrons bien comment vous allez vous en sortir sans l’aide de l’Etat. La plupart d’entre vous ont à peine de quoi payer la scolarité si forfaitaire soit son coût.
_ vous n’avez pas le droit de faire cela
_ eh bien c’est ce qu’on va voir
_ nous nous plaindrons au directeur du sport scolaire
_ je suis le représentant du ministre de l’éducation dans cet établissement
_ c’est le ministère du sport qui finance les activités sportives
_ c’est moi qui décide ici. Les études d’abord, le sport est facultatif
_ c’est avec ce genre de raisonnement que le pays peine à se développer
***
Depuis quelques mois, Vivi se plaignait de Bayi auprès de Sèna. C’était leur capitaine et elle avait toujours fait preuve d’impartialité dans le règlement des conflits au sein du club. Pourtant, Vivi sentait bien que lorsqu’il s’agissait de Bayi , Sèna avait du mal à garder la tête sur les épaules. Plusieurs fois, elle s’était plainte de son amie pour diverses raisons : sa façon de siffler les filles à l’image des mecs machos, son habitude démesurée de taper les fesses des autres, et surtout cette sale manière de vous garder la main et de la caresser quand on la salue. Tellement Vivi s'était plainte auprès d'elle, que la dernière fois qu’elles s'étaient parlées, elles en étaient venues aux mains. En effet, Vivi accusait Bayi de chantage sexuel. Sèna connaissait son amie. Même si ses nouvelles allures de garçon manqué lui donnaient fausse réputation, elle savait que Bayi ne ferait jamais de mal à une mouche. Face à la légèreté avec laquelle Sèna prenait sa plainte, Vivi en vint à accuser sa camarade d’être également partisane de ces abus. Ne supportant pas cette n-ième calomnie, Sèna ne put se retenir de lui claquer la main au visage. La réponse ne tarda pas à lui être donnée, Vivi lui rendit la pareille.
Lorsque Sèna décida de mener ses enquêtes, Vivi était la plus à même de lui fournir des informations puisque désormais tout semblait accuser son amie. Même si elle savait qu'elle n’accepterait pas de lui parler aussi facilement, elle était déterminée à tout mettre en œuvre pour qu'elle se confie. Il lui fallut alors trouver une astuce pour se retrouver seule avec elle. C’était le seul moyen pour elle de l’amener à mener une conversation. Et pour cela, elle avait besoin d’un allié pour y arriver. Ce ne pouvait être que Bona la meilleure amie de Vivi. Il ne restait plus qu’à la convaincre du bien-fondé de sa démarche sans toutefois évoquer son enquête à propos des rumeurs. Cela ne ferait que les alimenter davantage. Rien de plus aisé comme prétexte que l’enterrement de la hache de guerre. Et quelle belle preuve d'amitié cela ferait pour elle que de réconcilier deux anciennes amies !
Midi. La sirène retentit et sonna la fin des cours de la matinée. Sèna s’empressa de rejoindre la classe terminale de Vivi. Bona de son côté avait trainé à se mettre en route pour rentrer. Vivi avec qui elle devait cheminer l’attendait. Bientôt la salle de classe se vida les laissant seules. C’est alors qu’apparut Sèna.
_je dois te parler Vivi
_je n’ai rien à te dire
Vivi se dirigea vers la porte toute furieuse. Elle prit soin de lancer un regard plein de dédain à l’endroit de Bona. Elle venait de comprendre qu’elle avait participé à ce piège. Sèna s’efforça de bloquer l’entrée. Mais face aux quatre-vingt kilos de Vivi, elle dut céder pour s’élancer après elle.
_ excuse-moi si je ne t’avais pas cru
_ c’est ton problème, pas le mien
_ oui, je sais, j’ai été aveugle
_ je voulais juste que tu lui parles pour qu’elle arrête
_ Bayi et moi sommes des amies d’enfance. C’est une fille gentille. Je ne pouvais pas croire ce que tu me disais. Mais après ce que j’ai vu...
Vivi coupa court à sa course.
_ qu’as-tu vu ? interrogea-t-elle
_je l’ai surprise avec Téna en train de s’amouracher, parvint-elle à lui faire entendre au bout de mille et un soupirs
Sèna était épuisée par cette course poursuite.
_ tiens, asseyons-nous là, fit-elle en indexant un bloc de pierres au pied d’un manguier.
Vivi comprit qu'elle était enfin disposée à l'écouter.
_tout le monde se plaint d’elle en coulisse. Personne n’ose le dire de peur de se faire exclure du club. Tu sais que son père est le directeur du sport scolaire. De plus, elle est dans les bonnes grâces de la capitaine que tu es.
_ c’est donc vrai qu’elle harcèle les filles ?
_Bayi est devenue très amère depuis que Kodjo l’a quittée. Elle s’est mise à détester les garçons et ne voulait plus rien savoir d’eux. Je compatissais à sa douleur car j’avais connu pareille déception il n’y avait pas longtemps. Je faisais de mon mieux pour la soutenir. Peu à peu, on s’est rapproché. On est devenues très amies.
_ oui, je m’en rappelle. C’était un peu avant les congés de fin d'année
_ oui, on se voyait fréquemment. Elle venait souvent à la maison.
_ j’en étais venue à être jalouse de votre amitié. C’était une période où elle n’avait même plus le temps pour nos loisirs communs. Je n’avais pas beaucoup d’amis. Je t’en voulais de me l’avoir arraché. J’aurais aimé qu’on se rapproche toutes les trois mais je sentais bien qu’elle te préférait à moi.
_ à un moment donné, il y a eu comme des sentiments entre nous. Je ne sais pas comment l’expliquer mais on était bien ensemble. J’aimais être à ses côtés. Elle me manquait quand on ne se voyait pas. Je sentais que c’était réciproque. Il arriva un moment où je pensais que j’étais amoureuse d’elle.
_ce n’était pas le cas ?
_ non. Un jour elle a voulu m’embrasser et j’ai refusé. J’aimais bien être avec elle mais pas comme ça. Mais elle m’a avoué ses sentiments. Elle était si sincère. Je ne voulais pas lui faire de la peine. Avec la curiosité de découvrir l’effet d’un baiser de fille, je finis par la laisser aller au bout de son désir.
_pourquoi te plaignais-tu autant d’elle alors qu’entre vous c’était si bien ?
_ laisse-moi finir Sèna . Les jours qui ont suivi, je me sentais vraiment mal. Bien vrai c’était palpitant comme expérience mais ce n’était pas ce que je voulais. Moi j’aime les garçons. Je veux vivre une belle histoire d’amour avec un homme comme mes parents et porter nos enfants.
_ tu le lui as dit ?
_ oui. Je m’étais mise à l’éviter mais un jour elle est venue chez moi. Elle me répondit que j’avais tout le temps pour cela et que cela n’empêchait pas de jouir de la vie. Mais je savais que ces genres de relation n’étaient pas que physiques. Elles engagent tout notre être. Ce sont des choses qui une fois faites ne se défont plus. Je pensais à mes parents et à toute la peine que je leur ferais, aux morales et vertus auxquelles mon éducation me conviait.
_c'est là qu’elle s’est mise à te harceler ?
_ non. Elle me répondit qu’elle n’avait plus ressenti cela depuis sa relation avec Kodjo. Elle était vraiment amoureuse de moi. Je me sentais tellement mal pour elle. Elle pleurait et je sentais qu’elle était sincère. Dans l’émotion je l’ai prise dans les bras. Elle ne voulût plus me lâcher. J’avais du mal à la repousser. Elle se mit à m’embrasser dans le cou. Je n’arrivais plus à lui résister. On s’est laissé emporter et voilà.
Sèna n'en croyait pas ses oreilles. Vivi avait toujours été une fille sage et raisonnable. Elle avait reçu une éducation enracinée dans une religion qui condamne ce genre de relation. Fervente pratiquante, comment a-t-elle pu faillir à tant d’années de croyance ? Sèna savait qu'elle devait regretter amèrement son acte car elle était véritablement convaincue de ses principes religieux.
-vous êtes allés loin ? finit par demander Sèna pour rompre le silence qu’observait Vivi
- oui, acquiesça-t-elle d’une petite voix. Très loin. Ce n’est qu’après avoir repris mes esprits que j’ai compris ce qui s’était passé. Je m’en voulais déjà la minute d’après. Je lui ai demandé qu’on oublie et qu’on le garde secret. Elle s’est sentie à nouveau rejetée. Elle a promis devenir une briseuse de cœur pour ne plus souffrir en amour. C’est ainsi qu’elle a changé de look pour devenir prédatrice.
_ oui, j’ai également constaté sa métamorphose. Je l’attribuais à sa séparation d’avec Kodjo. C'est plutôt sa déception avec toi qui l'a déçu au point de vouloir se transformer en garçon pour avoir plus de chance avec les filles. Mais jusque-là je ne vois pas d’harcèlement
- tu sais que le directeur du sport scolaire est son père . Elle miroite aux filles de les aider à trouver des bourses dans des centres de formation à l'étranger. Téna m'a confirmé que c'est la raison pour laquelle elle est avec Bayi. Mais Bayi continuait de courtiser les filles. Celles qui n'en pouvaient plus se sont retirées du club. Les parents d'élèves sont venus alerter l'administration.
Vivi fondit en larmes. C’était la première fois qu’elle se confiait à ce propos. Même ses parents n'en avaient pas eu le privilège. Une fois les rumeurs parvenues à leurs oreilles, ils l’avaient condamnée. Tant leur déception était grande qu’ils ne l’avaient pas laissée raconter comment cela avait pu se produire. Elle s'était retrouvée avec cette étiquette d'identité sexuelle dans laquelle elle-même ne se retrouvait pas...
***
Voilà Avril. Bientôt deux mois que le club féminin de football avait arrêté toute activité au collège d'enseignement général de Nanguézé. Plus aucune séance d'entraînement, surtout plus aucun paiement de bourses. Il n’y avait plus moyen de résoudre le problème au seul sein de l’établissement. Face aux difficultés pour subvenir aux besoins de leurs enfants, c’est au ministère des sports que les parents d’élèves ont décidé d’aller se plaindre. Cette suspension était abusive à leur entendement. C’était en comptant sur cette subvention de l’Etat qu’ils avaient fait leurs prévisions financières pour l’année scolaire. Ils jugeaient le directeur du collège d'enseignement général peu sérieux dans sa gestion. Sa démission faisait même partie de leurs revendications.
Ce fut au directeur du sport scolaire que fut confié le devoir de dénouer la crise. Le rendez-vous était convenu pour huit heures trente minutes dans le bureau du directeur de l'établissement. Le directeur du sport scolaire tenait à éviter que l’altercation de la précédente rencontre ne se répète. Participeraient alors aux discussions le président de l’association des parents d’élèves, un parent d’élève en plus des deux autorités. Monsieur Glagla, le père de Vivi avait été désigné par les autres parents d’élèves comme représentant. Ce qui n'empêcha pas les autres parents d'élèves de suivre les échanges depuis les couloirs.
Ce fut à dix heures que débuta enfin la séance.
_ bonjour à tous. Alors... le ministre m’a chargé de trouver solution à la crise actuelle au sein du club féminin de football dans votre collège. Etant donné qu’il y a déjà eu une tentative de résolution qui malheureusement a envenimé la situation, je propose de laisser les plaignants s’exprimer, si vous êtes d’accord Monsieur le Directeur
_ oui, oui, bien sûr, Monsieur le directeur du sport scolaire . Qu’ils se plaignent, qu'ils se plaignent…
_ Monsieur le président de l'association des parents d’élèves, dites-nous alors, de quoi s’agit-il ?
_ merci Monsieur le directeur du sport scolaire.
Le bureau de l’Association des parents d’élèves que je dirige a reçu il y a trois mois des parents d’élèves par rapport à une rumeur d’harcèlement sexuel au sein du club féminin de football.
_ harcèlement sexuel ? Où est l'entraîneur ? comment ose-t-il ?
_ non, Monsieur le directeur du sport scolaire . Le coach n'en est pour rien. A ce qu’il paraît c’est juste entre les filles.
_ comment cela se peut-il ?
_ voilà... Je vais laisser la parole à M. Glagla, il saura mieux vous expliquer.
_ merci Monsieur le président de l'association des parents d’élèves. Je tiens à souligner au premier abord Monsieur le Directeur du Sport Scolaire que nous avons déjà voulu une première discussion avec le Directeur du collège d'enseignement général sans succès. Ce qui nous a conduit à manifester devant l’établissement. C’est ainsi qu’on a pu obtenir avec l’appui de l’association des parents d’élèves une séance d'échange. Malheureusement face à sa mauvaise foi…
_Monsieur Glagla, expliquez-nous ce qui se passe entre les filles ?
_ oui j’y arrive Monsieur le directeur du sport scolaire. Mais avant, il faut l’affecter de ce poste, il ne fait rien pour mériter son salaire. Voilà... Maintenant... J’ai été informé par un autre parent d’élève, qui venait de retirer sa fille du club, qu’elle serait harcelée par une certaine Bayi
_ Bayi, ma fille ? ou il y en a plusieurs dans le club ?
_ ah ! je ne savais pas que votre fille était également inscrite au club, Monsieur le directeur du sport scolaire. Je ne sais pas s’il s’agit d’elle
_ Monsieur le Directeur, pourquoi le coach n’est pas ici ?
_ Comme vous n’avez pas demandé à ce qu’il soit présent à la séance Monsieur le directeur du sport scolaire, il s'en est abstenu
_ Mais vous aviez connaissance du problème, non ? Vous devriez donc savoir que sa présence est nécessaire
_ c’est ce que je vous disais Monsieur le directeur du sport scolaire, il ne fait pas son travail
_ contentez-vous de dire ce que vous savez Monsieur Glagla....
_ en tout cas... Je disais donc qu’il m’informait de ce pourquoi il retirait sa fille du club. En bon parent, je me suis rapproché de ma fille également inscrite au club pour savoir ce qu’il en était. Mais elle ne voulut pas en parler. Cela m’intrigua. J’ai alors cherché à me renseigner auprès des autres filles du club. J’apprends ainsi que la Bayi en question avait déjà fait des victimes dont ma fille
_ votre fille victime, soyez plus explicite je vous prie
_ oui Monsieur le directeur du sport scolaire, à force d'être harcelée, elle a fini par se donner
_ voudriez-vous dire qu'elle a eu des relations sexuelles avec Bayi ?
_ oui Monsieur le directeur du sport scolaire . Vivi me l’a confirmé au bout de rudes menaces
_ c’est quoi toutes ces saletés ? Et ce coach Monsieur le Directeur, il vient ?
_ le voilà, le voilà…
L'entraîneur du club féminin de football fit son entrée dans la pièce.
_ bonjour Monsieur le directeur du sport scolaire
_ oui, coach. Et il paraît que les filles se harcèlent entre elles ?
_ les victimes n’ont rien voulu me dire. Elles avaient peur.
_ et pourquoi ?
_ parce que c’était votre fille, Monsieur le directeur du sport scolaire. Certaines ont préféré se retirer du club.
_ c'est donc bien ma Bayi qu’elles accusent. Avez-vous au moins entendu sa version des faits?
_ pas encore Monsieur le directeur du sport scolaire
_ donc vous la condamnez d’office. Si on devait juger les gens sur ce qu’on raconte sur eux…
Monsieur Glagla convaincu de la culpabilité de Bayi ne put s'empêcher de répondre.
_ j’ai la preuve moi, Monsieur le directeur du sport scolaire. Elle a couché avec ma fille
_ peut-être Monsieur Glagla. Mais rien ne prouve qu’elle fut harcelée. Vous l'avez dit, elle s'est donnée
_ c'est par peur qu'elle l'a fait. Elle tenait à rester au club. Ma fille n’a jamais été intéressée par ce genre de relation. Elle est bien éduquée. De plus, elle a eu un copain
_ cela ne veut rien dire. D’ailleurs la mienne aussi
_ mais ce n’est pas de Vivi que les autres filles se plaignent, c’est de Bayi. C’est elle qui les courtise et leur miroite des bourses en votre nom.
_ ça suffit. J’en ai assez entendu. Je connais ma fille, elle n’harcèlerait personne. Ce sont des inventions d’adolescents. Dès demain les activités reprennent au club et les bourses reversées.
Le Directeur du collège d'enseignement général Nanguézé n'avait pas prévu une si rapide résolution de la situation. Il avait des pris des libertés dans la gestion des allocations financières mensuelles reçues de l'Etat. Il tenta alors d'en détourner l'attention du directeur du sport scolaire.
_ le ministère ne nous a pas encore viré les bourses de ce mois, Monsieur le directeur du sport scolaire
_ il s’agit des bourses des deux derniers mois retenus au niveau de l'établissement, Monsieur le directeur. Celles qui n’ont pas été perçues. J'espère qu'elles sont toujours disponibles
_ ah, ces bourses là... Oui, oui, bien sûr Monsieur le directeur du sport scolaire
Le Directeur du sport scolaire avait compris sa manigance. Et pour l'engager en présence des parents d’élèves, il insista.
_ vous pouvez rassurer les parents d’élèves que la situation est sous contrôle. Les activités reprennent. Les bourses seront versées. Celles qui ont démissionné peuvent réintégrer le club.
C'était sans compter la rage toujours furieuse de Monsieur Glagla.
_ et ma fille dans tout ça ? Qui est responsable de ce qu’elle a subi ? Il y a bien un responsable. Ma fille est très respectueuse de nos principes moraux et religieux. Elle a été pervertie par votre fille et on doit faire comme si tout était normal ?
_ votre fille n’est pas une sainte alors arrêtez d’insulter la mienne, Monsieur Glagla. Si les autres ont su refuser les avances de Bayi votre fille aurait pu aussi. Elle n’a qu’à s’en prendre à elle-même et se tenir éloignée de la mienne.
_ comment peut-elle s'éloigner de votre fille alors qu’elles jouent dans le même club ? Ce n'était pas des avances, mais bien du harcèlement
_ dans ce cas qu’elle se retire.
_ et comment je pourrai assurer sa scolarité sans bourse ? Votre fille détruit la vie de la mienne et c’est cette dernière qui est punie ?
_ma fille n’a détruit la vie de personne. Et c’est la vôtre qui a publié cette rumeur d’harcèlement qui n’en est pas. Pour cela elle est suspendue du club pour le reste de l’année scolaire.
_cela ne se passera pas ainsi. J’irai me plaindre au ministère. Ce n’est pas parce que c’est votre fille qu’elle a le droit de faire ce qu’elle veut. Depuis quand une fille peut en courtiser d'autres dans ce pays ? C’est du harcèlement, de l’incitation à la débauche. Ma fille n’a fait que dire la vérité.
_allez vous plaindre à qui vous voulez. Pour le moment c’est moi qui décide.
_elle est belle la République. Pas un cadre pour en rattraper un autre. Tous pareils. Brimant le peuple qu’il a supplié de le laisser le servir.
_surveillez vos propos Monsieur Glagla
_ sinon quoi ? Qu'ai-je encore à perdre ?
Suivant le directeur du sport scolaire qui s'était levé, Monsieur Glagla prit également la sortie. Il se dirigea vers ses pairs qui le rejoignaient.
_ et vous, vous ne dites plus rien étant donné que vos enfants pourront réintégrer le club.
_ne parlez pas en ces termes Monsieur Glagla , il s'agit de la fille du directeur du sport scolaire
_et alors ? c'est de la mauvaise éducation, il n'a qu'à s'en prendre à lui-même. Comment une fille qui grandit sans mère peut avoir une bonne éducation ?
_vous devriez questionner votre fille sur ce qui s'est vraiment passé. Elle ne vous a pas dit qu'elle a été harcelée jusqu'à preuve du contraire
_ses camarades l'ont été, alors ... Ne me dites quand même pas qu'elle a changé d'orientation sexuelle ?
_on ne finit pas de connaître ses enfants. Tout ce qu'on dit est qu'il faut en discuter avec elle.
***