L'épouser à tout prix
Ecrit par Nadia.K
Paul AKA était malin et savait saisir les opportunités et
pour sûr Bénédicte en était une. Il l’avait fait tombée amoureuse sciemment,
l’avait ignoré ensuite en toute connaissance de cause, conscient que cette
fille pourrie gâtée ne supporterait pas d’être ignorée et maintenant il allait
profiter de la puissance et de la richesse de sa famille.
Il ne s’agissait plus d’un vulgaire défi pris sous
l’euphorie de l’alcool et relevé par orgueil. Il s’agissait désormais de son
avenir et il ne comptait pas laisser passer sa chance.
Pour cela il a vécu avec Bénédicte, une idylle cachée
pendant 8 mois. A 25 ans, il recevait cette année son diplôme d’ingénieur des
mines et s’attelait à être parfait pour sa petite amie, à la rendre dépendante
de lui. Il s’efforçait d’être toujours plus brillant : elle aimait
l’intelligence, romantique: elle avait bercé son adolescence des histoires à l’eau
de rose. Il n’avait d’yeux que pour elle et avait mis fin à ses nombreuses aventures.
Bien sûr, tout n’était pas parfait et ils se disputaient souvent. Toutefois, il
avait toujours le dessus et arrivait à lui faire porter la culpabilité de tous
leurs problèmes. Chaque fois qu’ils se chamaillaient, elle revenait donc en le
suppliant, persuadée qu’elle avait l’homme parfait mais qu’elle s’arrangeait
quand même pour ne pas être à sa hauteur.
La plupart de leurs disputes portaient sur la présentation à
sa famille qu’elle ne cessait de repousser. A chaque fois, que Adouko père
était sur Paris, elle disparaissait de la circulation. Elle l’évitait alors
comme la peste et ne réapparaissait qu’après le départ de son père. Il lui
rappelait à chaque fois sa promesse et lui reprochait de l’avoir embobiné. Les
éclats de voix allaient crescendo dans ses cas et la dispute se terminait par
Paul menaçant de la quitter et elle lui demandant du temps en promettant que la
prochaine visite de son père sera la bonne.
Las de l’attendre, Paul prit les choses en mains et pendant
2 mois perça à son insu tous les préservatifs qu’il utilisait avec elle.
Le résultat ne se fit pas attendre et elle tomba enceinte.
Amoureuse qu’elle était, il était hors de question d’avorter. Elle se décida
enfin à affronter son père.
Comme on pouvait s’y attendre celui-ci entra dans une colère
noire ! Sa fille, enceinte sans être marié, d’un crevard en plus alors
qu’il préparait des fiançailles avec le fils du président ? Il en était
hors de question.
M. ADOUKO la fit avorter de force, fit tabasser Paul et usa
de ses relations pour lui retirer sa bourse. Il l’obligea alors à rompre avec
sa fille mais celui-ci refusa. Il recevait constamment des menaces et ses
proches restés au pays aussi. Il commençait à avoir peur et à se dire que son
audace se retournait contre lui. Depuis 3 mois maintenant il n’avait plus vu
Bene. Il n’avait plus de bourse et arrondissait ses fins de mois grâce à son
boulot d’étudiant. A ce rythme, il ne pourrait plus rentrer au pays et allait
devoir trouver un plan B après son diplôme.
Contre toute attente, un matin en plein automne on frappa à sa
porte : c’était le père de Bénédicte. Il était terrorisé mais ne laissait
rien transparaitre et l’invita à entrer. « Suivez-moi », lui ordonna
l’homme imposant avant de tourner les talons.
Il le suivit la peur au ventre sans rien dire et monta à sa
suite à l’arrière du véhicule aux vitres teintées. La voiture roula 2
heures ; deux heures pendant lesquelles l’habitacle de la voiture était
aussi silencieux qu’un cimetière en soirée. Il faisait déjà ses dernières
prières intérieurement. Cet homme l’éloignait de la ville parce qu’il comptait
le tuer assurément. Il allait mourir d’avoir trop tenter le diable et son
meurtre serait maquillé en noyade dans la Seine.
Il regrettait amèrement de s’être lancé dans cette aventure
mais il se disait qu’il mourrait au moins en homme s’il se refusait la bassesse
de supplier son bourreau. Il se tût donc tout le long du trajet, attendant dans
un calme extérieur sa dernière heure.
Lorsque la voiture s’immobilisa, M. ADOUKO descendit sans un
mot et il fit pareil en le suivant. Ils étaient devant un centre de santé privé
dont la façade laissait présager le luxe insolent qu’on devait avoir à
l’intérieur.
M. ADOUKO se dirigea droit vers les escaliers et au premier
étage poussa la porte de la chambre 106.
Bénédicte était allongée et dormait. Elle avait des bandages
au poignet et avait l’air malade. Elle était si pâle alors… Son visage avait
maigri et même endormi reflétait une profonde tristesse.
« - Elle a tenté de suicider en s’ouvrant les veines il y a cinq jours, dit-il en rompant le silence.
Paul le regardait alors choqué puis porta son regard à nouveau sur elle, il n’osait pas l’approcher.
-
Elle a dit qu’elle préférait mourir plutôt que
de vivre sans toi jeune homme. Je ne l’avais pas prise au sérieux. Je l’ai
retrouvée dans sa baignoire inerte : elle avait perdu beaucoup de sang. On
a pu la sauver de justesse mais elle refuse de s’alimenter.
-
…
-
Je ne vais vous poser cette question qu’une
seule fois. Il n’est pas dans mes habitudes d’accepter l’affront, ajouta-t-il
durement. Ce que vous avez fait avec ma fille est clairement un affront. Dans
d’autres conditions, vous ne seriez même plus là à respirer le même air que
moi, alors je vous répète une seconde fois : je ne poserais qu’une fois la
question qui va suivre. Que voulez-vous réellement dans la vie de ma
fille ?
-
L’épouser, dit Paul du tic au tac.
Devant le visage déformé par la colère qui a accueilli sa
réponse il se sentit obligé d’argumenter :
-
J’aime votre fille. Je sais que j’ai mal agi en la
fréquentant derrière votre dos mais je l’aime plus que tout. Je veux la rendre
heureuse quoi qu’il en coute. Je veux être un homme digne pour elle, être à la
hauteur de ce qu’elle mérite. Jamais je ne m’amuserais à jouer avec elle. Je
m’excuse de l’avoir fréquentée derrière votre dos et je sais que vous avez le
pouvoir de m’ôter la vie à titre de punition. Aussi vrai, que je suis sans
défense vis-à-vis de vous, aussi vrai que je ne pourrais me résoudre à la
quitter peu importe ce que vous déciderez. Je ne pourrais juste pas le faire
alors je ne peux que vous demandez humblement de me tester : laisser moi
m’occuper d’elle et en faire mon épouse, la rendre heureuse. Et si jamais, je
failli à cette mission, vous pourrez laisser libre court à votre courroux
contre moi.
Le cœur battant je venais de jouer mon va-tout.
Il me répondit juste : « une chance, une
seule : il n’y en aura pas deux » et s’en alla me laissant avec sa
fille.
Je n’arrivais pas à croire à tout ce qui venait de se
passer. Je ne pensais pas avoir autant de pouvoir sur cette fille. J’ai bien
fait d’être persévérant et de jouer le rôle jusqu’au bout. Bien vrai que je
n’en suis pas fou amoureux, sa présence est plaisante et va me propulser au
sommet je le sais. Je saurais en faire la femme docile que je souhaite avoir,
j’aurais alors tout gagner.
L’histoire entre Paul et Bénédicte repris alors
officiellement. Il eut son diplôme et trouva, grâce au père de Bene, un boulot
à Total. Si sa fille devait être avec lui, il fallait qu’il devienne lui aussi
quelqu’un. Il ne pouvait pas associer son nom à n’importe qui. Son beau-père
pour sûr ne l’aimait pas et le poussait constamment dans ses retranchements,
voulant le voir craquer. Mais il ne cédait pas, au contraire il faisait tout
pour gagner le respect du vieil homme. Il savait qu’il n’avait cédé qu’au vu de
l’état de santé de sa fille unique. C’est la raison pour laquelle il ne lui a
pas demandé de l’épouser immédiatement pour « laver l’honneur » de
son enfant. Il était sur la sellette et il se tenait à carreau.
Au bout d’un an, il se décida à affronter le père de
Bénédicte pour la demander en mariage. Celui-ci accepta de mauvaise grâce.
Le mariage fut célébré en grandes pompes un an plus tard. Bénédicte
avait alors terminé sa licence et ils rentrèrent au pays. Son mari, fut
« placé » au ministère des ressources halieutiques. Brillant, il se
fit vite remarquer et gravit les échelons. Quant à elle, elle vivait un
rêve : elle était mariée à l’homme parfait et priait chaque jour que leur
grande maison s’emplisse du rire des enfants qui seront le fruit de leur amour.
En réalité, Bénédicte se sentait privilégiée car elle était
totalement sous l’emprise de Paul. Il savait la charmer et l’amour l’aveuglait.
Il avait repris ses coucheries très discrètement, la volait allégrement et sans
remords. Lorsqu’elle osait se plaindre, il la faisait culpabiliser : il
était souvent absent parce qu’il travaillait pour la rendre heureuse et la
mériter ou encore la maison était si vide d’enfant que le silence qui y régnait
lui était insupportable. Elle accusait le coup, puis en bon pervers narcissique
il revenait la calmer et lui donner une nouvelle dose d’amour.
5 ans plus tard, Paul était désormais reconnu et proche de
personnes importantes. Il avait plus de pouvoir et beaucoup plus d’argent
acquis suite à 2 ou 3 affaires louches. Il avait désormais le respect de son
beau-père qui voyait en lui un jeune homme plein de talents : il était
aujourd’hui le fils qu’il n’a jamais eu.
La vie du pauvret qui ne savait s’il aurait au moins un
repas en se réveillant chaque matin avait drastiquement changé.